Une fois n’est pas coutume, un général français, fût-il à la retraite, le général Christian Piquemal, ancien commandant de la Légion étrangère, a fait preuve d’une certaine audace en participant à Calais, le 6 février (tout un symbole !), à une manifestation interdite du mouvement anti-immigration Pegida (acronyme allemand d’Européens patriotes contre l’Islamisation de l’Occident). Comme c’était prévisible, après avoir pris la parole lors de cette manifestation, l’officier a été interpellé par les forces de l’ordre, placé en garde à vue pendant 48 heures (pour seulement trois heures d’interrogatoire) puis hospitalisé à la suite d’un malaise. Il devait être jugé en comparution immédiate dès le 8 février mais son audience a été repoussée au 12 mai en raison de ce problème de santé. Le même jour, la Fédération des sociétés d’anciens de la Légion étrangère, que Christian Piquemal a commandé pendant cinq ans, a publié un communiqué pour se désolidariser du général, et manifester son respect des pouvoirs publics (quel courage !), tandis que le général Bruno Dary, ancien commandant de la Légion étrangère, lui a exprimé publiquement son soutien, par solidarité de corps, tout en précisant prudemment (on n’est jamais trop prudent, même à la retraite !) qu’il n’aurait pas agi comme lui. Le général Didier Tauzin, lui aussi retraité, l’a publiquement félicité, tout en prenant soin de préciser que Piquemal « ne peut en aucun cas être considéré comme un raciste » (sous-entendu à la différence de Pegida… qui lui-même fait très attention à n’avoir aucun lieu avec le NPD jugé affreusement néo-nazi, décidément on n’en sort pas !). Et Tauzin d’ajouter héroïquement : « J’appelle au calme. […] Ne nous laissons pas entraîner là où ils veulent nous conduire : l’action violente » Mais le propre d’un militaire, quand le pays s’enfonce dans le chaos et l’anarchie, n’est-il pas de prendre ses responsabilités ? Ce n’est certes pas avec ce strict légalisme, qui n’est que le prétexte à l’inaction et à la lâcheté, que l’on pourra inverser le cours des événements. La bravoure du général Piquemal n’aura, elle, duré que quarante-huit heures. Le 8 février au soir, il accorde en effet une interview à RTL dans laquelle il indique “regretter” de s’être rendu à la manifestation et affirme qu’il « ne partage aucun lien » avec Pegida. « Personnellement, je n’aurais pas voulu les voir sur place. Ils ont une connotation extrêmement négative » assuret-il courageusement. Président d’un « cercle de citoyens patriotes », le général Piquemal affirme qu’il s’est rendu à cette manifestation « reconnaître les lieux et voir s’il n’y avait pas des solutions pérennes à mettre en place » pour les “migrants” à Calais. « J’aurais préféré qu’on soit seuls car ça ne se serait pas passé comme ça. On n’est pas racistes, islamophobes ou xénophobes. J’ai commandé la Légion étrangère pendant 5 ans, il y a 140 nationalités dedans. Donc s’il y a bien quelqu’un à qui on ne peut pas reprocher d’être raciste, c’est bien moi. Ce qui a été dit sur mon compte ne correspond pas à la réalité. » Et pour être sûr qu’on l’ait bien compris, le général, sans doute encore abasourdi par son audace d’un moment, ajoute : « On a été au même endroit que Pegida, mais c’est une rencontre qui est fortuite et ne correspond pas à l’intention que nous avions. » Fermez le ban !
Ceux qui espéraient qu’on pourrait compter sur l’armée française, ou au moins sur une partie d’entre elle, pour faire un putsch en seront pour leurs frais.
Pendant que Pegida maintenait à Calais la manifestation interdite par les pouvoirs publics et que le général Piquemal était arrêté, que faisait donc le Front national ? Eh bien, il s’adonnait aux joies de l’introspection dans le cadre feutré et luxueux du country club d’Etiolles (Essonne) s’interrogeant dans le cadre d’un séminaire (imagine-t-on Philippot et ses gitons en séminaristes ?) sur la nécessité d’infléchir son discours et ses thématiques pour enfin percer le fameux plafond de verre des 50 % qui résiste obstinément à la stratégie dite de dédiabolisation mise en oeuvre par la présidente du FN et sa garde rapprochée. A l’issue de cette réunion à huis clos où avaient été invitées des personnalités extérieures au FN comme Gilbert Collard et Robert Ménard mais pour laquelle le fondateur du mouvement n’avait pas reçu de carton d’invitation, Marine Le Pen est venue le 8 février au 20 heures de TF1 pour livrer les résultats de ses intenses cogitations. Or, manifestement la montagne a accouché d’une souris.
Même si l’on a vite compris que la normalisation allait s’accélérer. Pendant son interview d’une dizaine de minutes, la présidente du FN n’a pas une seule fois prononcé le mot immigration ni à aucun moment évoqué la situation à Calais, et notamment les incidents du 6 février. Pas un mot pour dénoncer l’interdiction de la manifestation de Pegida, pas un mot sur le traitement infligé au général Piquemal. Marine Le Pen, au sourire artificiel, a en revanche évoqué les nouvelles thématiques du FN : « l’industrie du futur, l’écologie, le patriotisme économique, l’innovation ». Autant de sujets relativement subalternes par rapport à l’invasion de notre pays et à la situation insupportable à Calais.
Suite de l’éditorial de Jérôme Bourbon dans le Rivarol n° 3222 du 11 février 2016.
Chaque place vendue dans les Centres Dramatiques Nationaux est subventionnée à hauteur de 70 euros.
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