Salim.B, photographe de mode, accusé de viols : huit plaintes
Brooke entend ainsi exprimer sa colère. Et veut par-là inciter d’autres victimes à sortir de l’ombre.
« Je suis fâchée ! » assène cette jolie brune avec ses mots de français, son regard vert rivé au vôtre. Cette Américaine de 25 ans est parmi les premières à avoir porté plainte pour viol contre le photographe de mode Salim B. C’était en avril 2015. Repartie aux Etats-Unis depuis, elle pensait sa démarche oubliée des autorités. Jusqu’à ce qu’elle apprenne, à l’automne, que son agresseur présumé avait été interpellé et incarcéré.
Depuis octobre 2016, Salim B., Marocain de 32 ans, mis en examen pour quatre des huit plaintes qui le visent, dort en prison.
Brooke a donc découvert qu’elle n’était pas la seule à accuser cet homme. Mais son histoire est singulière. Elle n’avait pas sollicité Salim B. pour une séance photo. Alors qu’elle était étudiante en management, cette passionnée d’art et de photographie voulait le rencontrer pour « discuter technique ».
« Je lui ai écrit, car je trouvais son travail magnifique. Je voulais apprendre de lui. » Après des échanges sur un site, Salim B. lui propose un rendez-vous. Un jour de janvier 2015, Brooke se retrouve chez lui, à Paris. « Il m’a offert un verre de vin, raconte-t-elle. J’ai dit oui. J’ai regardé s’il mettait quelque chose dedans parce que je me méfie, mais je n’ai rien vu. Alors, j’ai pensé que c’était OK. Mais après, tout est devenu flou. J’ai pensé : C’est bizarre, pourtant je tiens l’alcool, et là, je suis bourrée avec un seul verre. Puis j’ai fermé les yeux… »
L’Américaine poursuit : « Quand je me suis réveillée, j’étais complètement nue. Il était nu aussi. C’était horrible. Il m’a touchée… J’étais paralysée, je ne pouvais pas bouger. C’était comme un rêve… Je ne sais pas comment je suis rentrée chez moi. Quand j’ai émergé, j’ai compris qu’il m’avait touchée et que je n’étais pas d’accord. J’ai réussi à reconstituer ce qui s’est passé. Je sais ce qu’il m’a fait. Il a pensé que j’oublierai. Mais je me souviens. »
Révoltée, la jeune femme décide d’alerter sur la page Facebook du photographe : « N’allez pas chez Salim B. » « Il a réagi en me menaçant. Il m’a dit qu’il avait fait des photos pornos de moi et qu’il allait les diffuser, affirme-t-elle. J’ai eu peur… J’ai supprimé mes messages. » Quelques mois plus tard, Brooke porte plainte. Les policiers l’envoient procéder à une analyse toxicologique, qui décèle des traces de médicaments. « Après ça, je n’ai plus eu de nouvelles. J’ai pensé que mon cas n’importait pas parce que j’étais étrangère. »
En fait, Brooke perd pied. Elle lâche ses études. S’enferme chez elle. Se met à boire… « J’avais peur de sortir. J’étais triste, toujours fâchée, je pleurais tout le temps. » Il y a un an, elle se résout à repartir à New York. Elle y travaille à mi-temps dans un bar et ne va guère mieux. « Cet homme a gâché ma vie. A cause de lui, j’ai quitté la France et ce n’est pas juste. Je veux qu’il reste en prison. Je veux la justice, pour moi et pour les autres. Parce que la vie est dure et que des choses comme ça la font plus dure. » Elle lève le poing : « Je suis prête à lui être confrontée. »