Le 17 avril au tribunal de grande instance de Paris, j’ai comparu devant un juge d’application des peines (JAP). Pourquoi m’avait-il convoqué ? Parce que la France a entrepris à mon encontre une « extension de remise ». Comprenez : après avoir obtenu de l’Écosse mon extradition, elle va demander aux autorités écossaises leur consentement pour que deux jugements et un arrêt prononcés en France à mon encontre entre 2017 et 2021, alors que j’étais en Angleterre, puissent être exécutoires.
Une volonté de me faire taire au plus vite
Des attentes douchées
En effet, l’article 695-18 du Code de procédure pénale est clair :
Lorsque le ministère public qui a émis le mandat d’arrêt européen a obtenu la remise de la personne recherchée, celle-ci ne peut être poursuivie, condamnée ou détenue en vue de l’exécution d’une peine privative de liberté pour un fait quelconque antérieur à la remise et autre que celui qui a motivé cette mesure1.
Or, les autorités françaises ont obtenu mon extradition pour sept vidéos que j’ai publiées sur internet entre septembre 2019 et avril 2020. Elle n’ont pas invoqué les deux jugements et l’arrêt, car si, pris ensemble, ils m’infligent quinze mois d’incarcération, pris séparément, chacun me condamne à moins d’un an de prison, ce qui rend impossible une demande d’extradition.
Par conséquent, lorsque, le 2 février 2024, je fus livré, menotté, aux autorités françaises, un juge d’instruction me mit en examen et me plaça sous contrôle judiciaire pour les sept vidéos mentionnées dans le mandat d’arrêt.
Je suis accusé de « négation, minoration ou banalisation publique d’une crime de guerre », de « contestation publique de l’existence d’un crime contre l’humanité commis durant la seconde guerre mondiale » et de « provocation publique à la haine ou à la violence en raison de l’origine… ». La détention préventive n’existant pas — ou pas encore — pour ces délits dits « de presse », le soir même, je suis ressorti libre du tribunal.
Je ne me tais toujours pas
Pour mes adversaires, la déconvenue fut grande, car certains me voyaient déjà incarcéré. Lorsque, le 12 octobre 2023, la justice écossaise autorisa mon extradition, le président de l’Association nationale des familles des martyrs d’Oradour-sur-Glane, Benoît Sadry, lança2 : « On peut se féliciter qu’il vienne en prison chez nous ! »
D’autres pensaient sans doute qu’après quinze mois de prison en Écosse, une extradition et une mise en examen immédiate avec placement sous contrôle judiciaire, je me tairais désormais, dans l’espoir de ne pas aggraver mon cas.
Ils se trompaient. Le soir même de mon arrivée en France, j’accordais un entretien vidéo à Jérôme Bourbon et Florian Rouanet3. Puis vinrent ceux réalisés par Égalité & Réconciliation4 et Nérée Osa5. L’apothéose fut ma participation à l’émission Géopolitique profonde, présentée par Mike Borowski, en compagnie d’Alain Soral et d’Alexandre Juving-Brunet6.
S’y ajoutent des conférences hebdomadaires, organisées un peu partout en France. Je me suis déjà déplacé à Nantes, Chartres, Quimper, Rouen, Montauban, Perpignan, Le-Puy-en-Velay et Lyon. D’autres réunions sont prévues, de Vannes à Strasbourg et de Dunkerque à la Savoie.
Enfin, j’écris des articles publiés dans les colonnes de Rivarol, sur mon blogue avec son Infolettre7 ainsi que sur ma page GAB8.
Utiliser les rouages les plus extraordinaires du Code pénal
En juin 2023, le directeur de l’Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean Jaurès, Jean-Yves Camus, déclara9 : « face à un doctrinaire comme Reynouard, malheureusement, seule la prison permet de faire taire sa propagande. » Depuis le 2 février 2024, mes adversaires s’en sont aperçus.
D’où cette démarche d’ « extension de remise » initiée à mon encontre. Elle se fonde sur l’article 695-18 du Code de procédure pénale. Nous l’avons vu, celui-ci empêche la France de me jeter en prison en vertu des deux jugement et de l’arrêt rendus à mon encontre alors que j’étais exilé en Grande-Bretagne.
Mais il prévoit également des exceptions. Les autorités françaises ne peuvent pas exécuter ces décisions de justice, sauf « lorsque l’autorité judiciaire de l’État membre d’exécution, qui a remis la personne, y consent expressément »10. Paris va donc demander à Édimbourg son consentement.
En ma présence et devant mon avocat, le juge d’application des peines admit qu’il s’agissait d’une démarche assez peu courante, et qu’avec la Grande-Bretagne, c’était une première pour des délits de presse.
Il a en outre souligné que les faits condamnés dans les deux jugements et dans l’arrêt étaient « anciens » : il s’agit de trois publications (deux vidéos et un livre je crois) datant de 2014, 2017 et 2019, soit des faits remontant à cinq, sept et dix ans.
Pressons, pressons !
Mais qu’importe : mes adversaires veulent absolument me bâillonner ; après avoir remué ciel et terre pour obtenir mon extradition, ils feront tout pour obtenir au plus vite mon embastillement.
L’extension de remise prévoit la tenue d’une audience en Édimbourg. Au terme des débats, les magistrats écossais diront si, oui ou non, ils autorisent la France à rendre exécutoires les trois décisions de justice prises à mon encontre.
Mon avocat supposait que, compte tenu de la lenteur administrative, l’affaire ne serait pas jugée avant un an. Mais le juge a déclaré que la France espérait une fixation d’audience avant une semaine et une audience à Edimbourg avant l’été. Oui, vraiment, on souhaite m’incarcérer au plus vite…
À la recherche d’un avocat écossais courageux
Déjà, nous préparons l’audience en Écosse. Un avocat écossais sera contacté.
Un avocat éreinté par le combat révisionniste
J’écarterai celui qui m’a défendu lorsque j’étais emprisonné à Édimbourg, car j’ai la nette impression qu’au fil des mois, il a pris peur.
En novembre 2022, il était enthousiaste à l’idée de me défendre. Avec chaleur, il me disait : « Si l’on condamne le révisionnisme et que l’on jette des gens en prison pour cette raison, alors on peut aussi rétablir l’esclavage. Les droits de l’homme sont indivisibles ».
Mais plus tard, il me confia : « J’ai reçu des appel de nombreux journaux, y compris israéliens. Je vous défends sur la base du Droit ; je refuse être votre porte-parole. Je veux mourir tranquille, dans mon lit. »
Les semaines passant, j’ai constaté qu’avec son collaborateur, il adoptait une défense a minima. En particulier, il ne souhaitait pas que je m’exprime devant les juges. Lors des audiences, j’étais là, assis comme une potiche. Mon destin se jouait, mais les juges m’ignoraient et mon avocat s’abstenait de me donner la parole.
J’entends encore le procureur prétendre que mes vidéos véhiculaient un « antisémitisme effrayant ». Pourtant, mon collaborateur avait transmis à la Défense un dossier qui reprenait tout ce que j’avais dit sur le problème juif depuis 2018. Il démontrait sans contestation possible que j’étais « judéo-indifférent », non pas par stratégie mais par conviction.
C’était le moment, pour mon avocat, de le produire. Il n’en fit rien, se bornant à répondre que mes vidéos devaient être jugées dans leur intégralité, pas sur quelques extraits présentés hors-contexte. Il avait raison.
Toutefois, au lieu de les analyser et d’en citer des passages pour souligner qu’elles développaient des arguments rationnels, sans aucune « haine », il préféra s’engager dans la discussion sur le caractère « offensant » ou « grossièrement offensant » de mes propos. Sans surprise, le procureur les qualifia de « grossièrement offensants ».
Défendre la liberté d’expression pleine et entière
Pour donner à mon avocat la possibilité de répondre, je lui avait transmis l’arrêt Handyside c. Royaume-Uni du 7 décembre 1976. La Cour européenne des droits de l’homme avait déclaré11 :
La liberté d’expression […] vaut non seulement pour les « informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population. Ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’est pas de « société démocratique ».
J’avais également porté à la connaissance de mon avocat la préface du Mémoire en Défense de Robert Faurisson. Rédigée par Noam Chomsky, cet auteur juif soulignait :
même si Faurisson se trouvait être un antisémite acharné ou un pronazi fanatique […] cela n’aurait rigoureusement aucune conséquence sur la légitimité de la défense de ses droits civils. Au contraire, cela rendrait leur défense d’autant plus impérative puisque, encore une fois, et c’est l’évidence depuis des années, depuis des siècles même, c’est précisément le droit d’exprimer librement les idées les plus effroyables qui doit être le plus vigoureusement défendu ; il est trop facile de défendre la liberté d’expression de ceux qui n’ont pas besoin d’être défendus12.
Les arguments sur la forme ne servent à rien lors d’un procès pour révisionnisme
J’espérais que mon avocat produirait ce matériel pour affirmer mon droit d’exposer calmement mes thèses historiques et politiques, au-delà de leur caractère « offensant » ou « grossièrement offensant », mais s’il affirma que l’utilisation de la loi sanctionnant les propos « grossièrement offensants » était abusive dans le cas présent, il omit de le justifier en citant l’arrêt Handyside et la préface de Noam Chomsky.
Face aux allégations du procureur, il répondit avec timidité : « J’estime que les propos de mon clients sont offensants sans l’être grossièrement ».
À ce moment, j’ai su que la partie était perdue, parce qu’au lieu de combattre sur le terrain de la raison et en invoquant les opinions très claires manifestées par des gens au-dessus de tout soupçon, la Défense s’était laissée conduire sur celui de l’arbitraire : « offensant » ou « grossièrement offensant » ? C’était parler du sexe des anges… Les juges peu courageux allaient tout naturellement alléguer qu’ils étaient « grossièrement offensants ».
Les conséquences d’un combat sans concession pour la vérité
Aujourd’hui, je suis convaincu que mon avocat a reçu des appels et des messages qui, à tort ou à raison, l’ont intimidé. Je ne le lui en veux pas, car en me revendiquant du national-socialisme, j’en suis une grande partie responsable. Certes, j’explique que le national-socialisme n’est pas l’hitlérisme : l’hitlérisme en est une manifestation à une époque donnée, dans un pays donné, pour résoudre des problèmes donnés. Il comporte de nombreuses contingences, telles que l’euthanasie des malades mentaux, les expériences sur des cobayes humains, l’antijudaïsme radical ou l’ouverture des camps de concentration.
On peut être national-socialiste sans pour autant vouloir imiter tout ce qui s’est fait sous le IIIe Reich. Mais très peu de gens écoutent mes explications. Pour l’immense majorité, un « nazi » est un fou furieux qui veut massacrer les Juifs, les « sous-races » et les handicapés mentaux, pendant qu’il enferme les opposants dans des camps de concentration, qu’il fanatise la jeunesse, détruit la culture et ravale les femmes au rang de génitrices. Dès lors, le seul fait de dire à un avocat : « Vous défendez un nazi ? » suffit bien souvent à l’intimider.
Mettre la justice écossaise face à ses responsabilités
J’espère donc trouver un défenseur écossais qui manifestera plus de courage. Nous l’informerons de la répression hystérique qui sévit en France.
Notre objectif est qu’il mette la justice de son pays face ses responsabilités en disant : «Violant la tradition britannique qui commande d’offrir le droit d’asile aux persécutés politiques, vous avez livré un citoyen français dont le seul « crime » est d’exprimer des opinions historiques et politiques qui déplaisent aux puissants. Allez vous commettre une autre ignominie en autorisant la France à l’incarcérer suite à des décisions de justice rendues au nom d’une loi liberticide qui n’existe pas ici ? »
Trouverons-nous un avocat assez courageux pour adopter cette stratégie? Et si oui, les juges reculeront-ils au moment de commettre une nouvelle ignominie? Les espoirs sont minces, voire illusoires. Mais qu’importe: même sans espoir de victoire, il faut combattre et dénoncer le scandale.
Face à l’importance de l’enjeu, je ne me tairai pas
Faut-il en déduire qu’avant l’été ou à la rentrée, je retournerai en prison ? Non, car si l’Écosse accède au désir des autorités françaises, alors je ferai opposition aux deux jugements et formerai un pourvoi en cassation contre l’arrêt. Les deux premières affaires reprendront à zéro et la troisième sera examinée après plusieurs mois.
Pendant ces plusieurs mois, je compte bien donner le plus possible de conférences et écrire un maximum d’articles. J’ai dédié ma vie au révisionnisme: les coups et les menaces ne me feront ni me taire, ni reculer.
Certains blâmeront mon jusqu’au-boutisme. « Vous avez déjà sacrifié votre famille dans un combat qui n’intéresse pas les Français. Les gens s’inquiètent de l’avenir qui se joue au présent, pas du passé ». Il est vrai que d’après une étude, les Français se préoccupent avant tout de la délinquance, du pouvoir d’achat, de l’environnement, des inégalités sociales et de la situation économique du pays13.
Mais si, vraiment, le passé ne jouait aucun rôle, alors les autorités me laisseraient tranquille. Or, nous l’avons vu, elle se démènent pour me faire taire au plus vite.
C’est d’autant plus révélateur que je ne dispose d’aucun relais dans les grands médias, d’aucune complicité dans le monde universitaire ni d’aucune aide financière appréciable : depuis trente ans, j’édite moi-même mes œuvres et je vis de cours particuliers. La répression qui me frappe en tant que révisionniste de la seconde guerre mondiale démontre que cette période pèse sur le présent, donc sur l’avenir.
À ceux qui en douteront, je rappellerai qu’une brochure publiée par l’Éducation nationale prévient:
la Shoah n’appartient pas au passé. À partir de 1945, le sursaut des nations après l’entreprise de déshumanisation la plus absolue que le monde ait eu à subir a suscité des institutions nouvelles14.
Parmi ces institutions figurent les Nations Unies. Le 26 septembre 2018, leur Secrétaire général, Antonio Guterres, lança : « Les origines des Nations Unies elles-mêmes s’enracinent dans la nécessité de tirer les leçons de l’Holocauste15. »
La jeunesse, première cible des gardiens de la Mémoire
Graver la Shoah dans l’âme de l’humanité
D’où la propagande organisée auprès de la jeunesse. A l’heure où les derniers déportés disparaissent, certains passent la Mémoire aux jeunes afin qu’il l’intègrent et la transmettent à leur tour. S’adressant à des jeunes Belges en partance pour Auschwitz, le directeur du War Heritage Museum, Michel Jaupart, a déclaré16 :
Aujourd’hui, vous allez rencontrer l’histoire, devenir des passeurs de mémoire […] Vous pourrez raconter ce voyage à vos parents, à vos amis, et plus tard à vos enfants.
Ailleurs, un jeune Français devenu passeur de mémoire confirme qu’il a compris sa mission17 :
Parler de la Shoah, en cours et en dehors, ça nous sensibilise. Personne ne reste indifférent quand je raconte ce que j’apprends, et je compte bien continuer à témoigner, pour que plus tard mes futurs enfants deviennent à leur tour des ambassadeurs de cette mémoire.
Le journaliste qui rapporte ces propos conclut : « Que les survivants de l’Holocauste ne s’inquiètent pas : les jeunes prennent le relais. » Tel est l’objectif des autorités : perpétuer la mémoire de génération en génération.
En 2006, commémorant l’anniversaire de la libération d’Auschwitz, le président israélien Moshe Katsav lança18 :
Maintenant que la trace de l’Holocauste est gravée à jamais dans l’âme de l’humanité, Yad Vashem est le gardien fidèle du chemin de la mémoire pour le peuple juif et l’humanité tout entière, pour toujours.
La technologie pour éterniser la mémoire
Afin d’atteindre cet objectif, la Mémoire est diffusée partout, y compris grâce aux nouvelles technologies. Dans l’Eure, un professeur d’Histoire annonce19 :
Nous avons la volonté qu’une plaque pour les déportés juifs de l’Eure soit apposée en 2025 à Évreux. L’an prochain, nous aimerions faire des podcasts, et nous avons l’idée de créer un parcours dans la ville à l’aide de QR codes.
Le recours aux nouvelles technologies permettra de créer une « mémoire 2.0 ». Le Mémorial de la Shoah la présente ainsi20 :
Le Mémorial de la Shoah, acteur dans le domaine de l’éducation, souhaite initier un débat sur les enjeux de la transmission 2.0.
Écrivains, comédiens, influenceurs, historiens, youtubeurs, ont aujourd’hui un rôle primordial à jouer de passeur de mémoire et de porte-voix […]
En mobilisant des influenceurs ambassadeurs de la jeune génération, au travers d’un format « d’infotainment » 100 % digital inédit, le Mémorial de la Shoah confirme son ambition de faire bouger les lignes avec dynamisme pour mieux sensibiliser les publics jeunes et adolescents.
Déjà, des survivants ont été filmés et reproduits sous forme d’hologrammes: non seulement ils peuvent répéter leur témoignage à l’infini, mais l’intelligence artificielle couplée à des logiciels de reconnaissance vocale permet aux gens de poser des questions auxquelles ces personnes virtuelles répondent21. D’anciens déportés morts depuis des lustres pourront donc continuer à transmettre la Mémoire22.
La Mémoire : une arme de propagande au service du mondialisme
Un enseignement qui n’a rien de neutre
Mais l’objectif des autorités dépasse la transmission de la mémoire du passé. Il est aussi — et surtout — politique : les autorités cherchent tout d’abord à combattre l’antijudaïsme. L’auteur d’un article intitulé « Enseigner la Shoah dans une démarche d’éducation civique » conclut23 :
Cet enseignement, même très partiel, de la Shoah dans le cadre du cours d’éducation civique […] dépasse les enjeux mémoriels, la responsabilisation des générations à venir face à tout nouvel avatar de l’antisémitisme en étant l’objectif principal.
C’est si manifeste que les jeunes embrigadés en ont conscience. Après avoir entendu le témoignage de Ginette Kolinka et visité Auschwitz, un élève du lycée de Saint-Avold, Lother, déclare24 :
Elle incite toujours les élèves à être les gardiens de cette mémoire qui ne doit jamais disparaître. C’est en ceci que nous nous sommes engagés dans ce projet pour que cette mémoire ne disparaisse jamais et que le négationnisme et l’antisémitisme ne prennent jamais le dessus.
L’antijudaïsme n’est toutefois pas la seule cible. La brochure Mémoire et histoire de la Shoah à l’école explique25 :
la vigilance contre les retours possibles de la barbarie ne saurait se réduire à cette seule somme de connaissances et de conscience critique patiemment édifiée, que l’on nomme culture ; il faut de surcroît penser autrement l’autre et l’ailleurs, et appréhender la diversité culturelle comme l’essence même de l’humanité. Une éducation ouverte sur le monde, sur l’autre et l’ailleurs est un des meilleurs remparts contre les préjugés et le racisme.
Embrigader les jeunes sous la bannière de l’antiracisme
L’objectif final est donc d’utiliser la Mémoire pour susciter l’antiracisme. Les preuves abondent.
Pour les années 2023-2026, le « Plan national de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine » établi par la DILCRAH prévoit quinze « mesures phares ». La première est la suivante26 :
Organiser une visite historique ou mémorielle liée au racisme, l’antisémitisme ou l’antitsiganisme pour chaque élève durant sa scolarité.
Au-delà, donc, de la lutte contre l’antijudaïsme, la Mémoire sert à embrigader les jeunes sous la bannière de l’antiracisme.
Dans ce contexte, Auschwitz et Oradour revêtent la même importance. Fin août 2020, après qu’une inscription révisionniste ait été peinte sur le Centre de la Mémoire d’Oradour, le patron du CRIF, Francis Kalifat, réagit en lançant27 :
Il n’y a pas de différence entre un négationniste de la Shoah et un négationniste d’Oradour-sur-Glane ou d’un autre génocide. Ce sont les mêmes, qui alimentent le négationnisme de la Shoah et qui viennent aujourd’hui sur ce terrain, ce qui est un fait nouveau […] Ces mêmes négationnistes s’attaquent désormais à la mémoire de ce qu’est la France.
Former de bons démocrates antifascistes
Six ans plus tôt, participant aux commémorations du soixante-dixième anniversaire de la tragédie d’Oradour-sur-Glane, Manuel Valls avait déclaré28 :
Oradour, c’est l’Europe que l’on veut finir de détruire, c’est l’humanité que l’on veut finir d’assassiner. Et dans ce tombeau de ruines que nous venons de parcourir, dans ce silence, les murs ne parlent pas. Ils crient ! […] Et derrière ces cris, ceux des six cent quarante-deux victimes, montent d’autres cris, ceux des millions de morts des camps.
Et d’ajouter :
Oradour, c’est aussi une mise en garde pour combattre et ne jamais laisser prospérer les idéologies de mort. Nous le savons bien, […] elles n’ont pas disparu […] Les fanatismes, les radicalismes ont toujours leurs chefs, leurs doctrines qui appellent à semer la terreur, à n’avoir aucune considération pour la vie humaine ou les populations civiles et c’est à nous, démocratie, c’est à la France de ne rien céder, de ne laisser aucune brèche et d’agir avec la plus grande détermination. Ici et partout en Europe, dans le monde.
C’est clair : d’Oradour à Auschwitz, les mémoires fusionnent pour susciter l’antifascisme et, au-delà, l’antiracisme. Tout cela au nom de la démocratie. Les autorités ne s’en cachent pas. Le Bulletin officiel de l’Éducation nationale explique29 :
Inscrit dans sa dimension historique, l’enseignement de la Shoah a une finalité civique et répond à une obligation morale. Il ne s’agit pas seulement de transmettre une mémoire et des connaissances : il faut donner à tous les élèves les éléments de culture et de réflexion leur permettant de refuser toutes les formes de racisme et de discrimination et de comprendre que, contraires à la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, elles rendent impossible la démocratie.
La Mémoire est donc être un outil destiné à formater les jeunes afin de les transformer en bons démocrates.
Bâtir une morale de non-discrimination
Dès lors, on ne sera pas surpris d’entendre Amel, 16 ans, jeune passeur de mémoire, déclarer à son retour d’Auschwitz30 :
Ça m’a enrichi au niveau de la culture générale, et humainement aussi, parce que ça nous fait comprendre le présent ; c’est pareil que toutes les autres formes de racisme, comme l’homophobie.
De son côté, le réseau Canopé propose aux enseignants un matériel pédagogique pour entretenir la Mémoire afin de lutter contre les discriminations. Il le présente ainsi31 :
Mettre en œuvre un projet mémoriel au sein de votre classe ou de votre établissement scolaire, construire une mémoire collective, ouvrir le dialogue et amener les élèves à réfléchir sur les valeurs républicaines participent à la prévention et à la lutte contre les discriminations.
Parmi les documents proposés figure un ouvrage intitulé : Leçons de la Shoah. Son auteur, Gérard Rabinovitch, écrit32 :
Le parti pris de cet ouvrage est de tenter d’ébaucher — appuyé des faits exhumés, explorés, consignés — ce que la Shoah, dans son effectivité ineffaçable, appelle de remises en perspective cognitives, de synthèses alertées, d’avertissements éthiques. Il ne s’agit pas que de « devoir de mémoire », il s’agit de prendre la mesure de ce que « le nazisme a constitué pour l’Occident une échéance historique et un épisode de destructuration dont les sociétés contemporaines demeurent tributaires », tel que le souligne le juriste et psychanalyste Pierre Legendre.
Les épouvantes du XXe siècle, cette « machine à liquider permanente » comme le nomme l’écrivain Imre Kertész, mobilisent les historiens en vigiles des faits ; convoquent la philosophie politique à remettre à plat ses questions fondatrices : qu’est-ce qu’une vie bonne ? Qu’est-ce qu’une bonne société ? Qu’est-ce qu’un bon agir en commun ? Elles appellent une anthropologie non lénifiante, désenchantée par évidence, et lucide par nécessité.
On le voit, la Mémoire de la Shoah sert à bâtir une morale, celle de la non-discrimination.
D’où la « chambre à gaz » placée au centre de l’Histoire. Dans un ouvrage destiné à combattre Marine Le Pen, on lit33 :
en tant qu’elles marquent de façon indélébile la mémoire et la conscience de l’humanité tout entière […] les chambres à gaz sont au centre de l’Histoire de la Seconde Guerre mondiale et au centre de l’Histoire.
Autrement dit : la« chambre à gaz » est un héritage que l’humanité tout entière doit prendre au présent, car elle contribue à forger les consciences.
Une répression qui nécessite, en face, une entraide
Dans un tel contexte, les révisionnistes sont tout naturellement rangés parmi les principaux ennemis à combattre. Gérard Rabinovitch écrit34 :
Enseigner l’histoire de la Shoah, restituer l’intégralité de ses faits, contre les falsificateurs, les négationnistes ou les jactances rhétoriciennes, c’est faire œuvre éducative autant que civique.
Mais contre le révisionnisme, l’enseignement reste insuffisant ; la répression judiciaire doit le compléter. Sous le titre « Nier l’Holocauste est un crime raciste », le vice-président du Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA), Richard Marceau, et sa collaboratrice Emmanuelle Amar lancent35 :
nier la Shoah est un indicateur, oui, de la haine du Juif. Mais c’est aussi un troublant marqueur de radicalisation, dont la société dans son ensemble fera un jour immanquablement les frais. Ce qui commence par les Juifs ne finit jamais avec les Juifs.
D’où la nécessité, concluent-ils, de criminaliser le révisionnisme afin de protéger toute la société.
En Europe, cette criminalisation est bien avancée : de nombreux pays se sont dotés de lois dites antirévisionnistes. La Grande-Bretagne figure parmi les exceptions. Mais en acceptant mon extradition, elle a lancé un message clair : l’île ne deviendra pas le refuge des révisionnistes pourchassés. L’acharnement subi par les libres chercheurs démontre l’importance capitale du passé.
J’en suis une preuve vivante : comparé aux moyens dont disposent les gardiens de la Mémoire, je suis un indigent. Face à leurs vociférations, je ne puis que chuchoter. Mais ce chuchotement est encore trop. Mes adversaires veulent me faire taire au plus vite. Si, vraiment, le passé n’avait aucune importance et si le récit officiel offrait toutes les garanties de solidité, alors un tel acharnement n’existerait pas.
Nos adversaires craignent le révisionnisme, car il met en danger leurs armes de propagande politique. En dédiant ma vie au combat révisionniste, j’ai certes sacrifié beaucoup, dont ma famille, mais je lutte pour tous les enfants de France et d’Europe, afin qu’on cesse de leur inculquer une fausse mémoire dont découle une morale favorisant le mondialisme mortifère. Merci à celles et à ceux qui m’épaulent dans cette mission.
Vincent Reynouard
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Notes :
1 https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006071154/LEGISCTA000006151924/
2 https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/haute-vienne/on-peut-se-feliciter-qu-il-vienne-en-prison-chez-nous-vincent-reynouard-qui-remettait-en-cause-le-massacre-d-oradour-sur-glane-bientot-extrade-d-ecosse-2855906.html.
3 Encore disponible sur Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=6qeGEpe4yhg.
4 Disponible sur Youtube : https://youtu.be/kQNtHR6I4es?si=Iyj9KDvCLuM0cyfL.
5 Disponibles sur Youtube : https://youtu.be/0NNtEiicoZw?si=eextYLyI1T9l3A4Z et https://youtu.be/BosGJk2xqJY?si=5hsQHf6Kt_yGpqr_.
6 Disponible sur Youtube : https://www.youtube.com/live/kViDa6UOzB0?si=B2hjeAA7Sx_Q0ArJ.
7 Adresse de mon blogue : https://blogue.sansconcession.net. Bloqué sur ordre des autorités françaises, un VPN est nécessaire pour y accéder.
8 https://gab.com/Reynouard.
9 Cité par Xavier Truti dans « Vincent Reynouard, autopsie d’un négationniste », paru dans l’organe de la LICRA Le Droit de Vivre (consultable à l’adresse suivante : https://www.leddv.fr/actualite/vincent-reynouard-autopsie-dun-negationniste-20230610).
10 https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006071154/LEGISCTA000006151924/
11 Le texte complet de l’arrêt est consultable à l’adresse suivante : https://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-62057.
12 Noam Chomsky, préface de Robert Faurisson, Mémoire en Défense (Paris : La Vieille Taupe, 1980).
13 Enquête « Etat de la France », première édition (Ipsos, septembre 2023), p. 7 (consultable à l’adresse suivante : https://www.ipsos.com/sites/default/files/ct/news/documents/2023-10/Ipsos-Cese-Etat-de-la-France-septembre-2023%201.pdf).
14 Mémoire et histoire de la Shoah à l’école (Ministère de l’Education nationale, s.d.), Introduction, p. 5.
15 « Secretary-General’s remarks to High-Level Event on the Power of Education for Countering Racism and Discrimination: The Case of anti-Semitism [as delivered] » (https://www.un.org/sg/en/content/sg/statement/2018-09-26/secretary-generals-remarks-high-level-event-the-power-of-education-for-countering-racism-and-discrimination-the-case-of-anti-semitism-delivered#:~:text=The%20origins%20of%20the%20United,all%20our%20energy%20and%20will.)
16 « « Vous allez devenir aujourd’hui des passeurs de mémoire” : des élèves bruxellois visitent le camp d’Auschwitz » (https://bx1.be/categories/news/vous-allez-devenir-aujourdhui-des-passeurs-de-memoire-des-eleves-bruxellois-visitent-le-camp-dauschwitz/).
17 Aude Bariéty, « Éva, Kevin, Ilham et Raphaël, passeurs de mémoire de la Shoah », publié le 26 janvier 2017 (https://etudiant.lefigaro.fr/article/eva-kevin-ilham-et-raphael-passeurs-de-memoire-de-la-shoah_579af322-e3db-11e6-89bc-1146aeb0c0af/).
18 https://www.yadvashem.org/remembrance/archive/address-by-president/2006.html
19 Florent Lemaire, « Évreux. Les passeurs de mémoire du lycée Senghor sur les traces des familles juives déportées », publié le 8 mars 2024 (https://actu.fr/normandie/evreux_27229/evreux-les-passeurs-de-memoire-du-lycee-senghor-sur-les-traces-des-familles-juives-deportees_60791522.html).
20 Mémorial de la Shoah, Vers une mémoire 2.0 (2022), p. 1 (https://www.memorialdelashoah.org/wp-content/uploads/2022/08/cp-memoire-2-0-aout-22.pdf).
21 Lesley Stahl, « Artificial intelligence is preserving our ability to converse with Holocaust survivors even after they die », publié le 5 avril 2020 (https://www.cbsnews.com/news/holocaust-stories-artificial-intelligence-60-minutes-2020-04-05/).
22 Illinois Holocaust Museum, « Interactive holograms : survivors stories experience » (https://www.ilholocaustmuseum.org/exhibitions/survivor-stories-experience/)
23 Article publié dans la Revue d’Histoire de la Shoah, 2010/2 (n° 193), pages 169 à 172. Disponible à l’adresse suivante : https://www.cairn.info/revue-d-histoire-de-la-shoah-2010-2-page-169.htm.
24 Marine Prodhon, « Auschwitz-Birkenau : 300 lycéens passeurs de mémoire », publié le 16 février 1924 (https://www.lasemaine.fr/auschwitz-birkenau-300-lyceens-passeurs-de-memoire/)
25 Mémoire et histoire de la Shoah à l’école (Ministère de l’Éducation nationale, s.d.), p. 17.
26 https://www.dilcrah.gouv.fr/ressources/plan-national-de-lutte-contre-le-racisme-lantisemitisme-et-les-discriminations-liees-lorigine-2023-2026
27 « Oradour-sur-Glane – Francis Kalifat : « J’attends que ce scandale serve d’électrochoc » », publié le 24 août 2020 (https://www.crif.org/fr/actualites/oradour-sur-glane-francis-kalifat-jattends-que-ce-scandale-serve-delectrochoc)
28 « Déclaration de M. Manuel Valls, Premier ministre, dénonçant les « idéologies de mort » et les « nostalgiques de la Collaboration », à Ouradour-sur-Glane le 10 juin 2014. » (https://www.vie-publique.fr/discours/191469-declaration-de-m-manuel-valls-premier-ministre-denoncant-les-ideolog)
29 Bulletin officiel n° 29, 17 juillet 2008. Consultable à l’adresse suivante : https://www.education.gouv.fr/bo/2008/29/MENE0800541N.htm.
30 « Le Mirail : des lycéens passeurs de mémoire racontent Auschwitz », publié le 18 mai 2016 (https://www.ladepeche.fr/article/2016/05/18/2346340-le-mirail-des-lyceens-passeurs-de-memoire-racontent-auschwitz.html).
31 https://www.reseau-canope.fr/actualites/actualite/la-memoire-et-la-citoyennete-pour-lutter-contre-les-discriminations.html
32 Gérard Rabinovitch, Leçons de la Shoah (s.l. : Canopé, s.d.), p. 8.
33 Laurauce Parisot et Rose Lapresle, Un piège bleu marine (Paris : Calmann-Lévy, 2011), p. 35.
34 Gérard Rabinovitch, Leçons de la Shoah…, p. 115-116.
35 https://www.ledevoir.com/opinion/libre-opinion/710211/libre-opinion-nier-l-holocauste-est-un-crime-raciste
Bravo Vincent. Merci à Jeune Nation pour le relai. Seule la vérité compte.
Ce récit de Vincent Reynouard concernant le révisionnisme est très intéressant, cependant je regrette qu’il reprenne et avalise ce que voudraient faire croire les anti-revisionnistes, à savoir, que combattre le révisionnisme protège du racisme, alors que le racisme anti-musulman n’a jais été aussi florissant et peut s’exprimer en toute liberté et impunité. Il est » Open Bar » sur certaines chaînes de télévision et dans les discours de responsables politiques.
Vincent Reynouard est de toute évidence un homme de grande culture. Toutefois ce qui me dérange dans son discours révisionniste, c’est qu’il soit teinté d’idéologie, par rapport à ses prédécesseurs, qui certes, avaient différentes opinions politiques, mais les laissaient de côté pour ne s’en tenir qu’aux faits et aux éléments, l’histoire devant être neutre, pour être crédible.
J’ai aussi du mal à comprendre, comment Vincent Reynouard, peut-il avaliser le thème de propagande des anti-revisionnistes, selon lequel, combattre le révisionnisme, protégerait la société du racisme. Ah bon ?
« Il [le NS] comporte de nombreuses contingences, telles que l’euthanasie des malades mentaux, les expériences sur des cobayes humains, l’antijudaïsme radical ou l’ouverture des camps de concentration ».
Pratiques – et bien au-delà, la lobotomie médicale par exemple – normales et habituelles avant-guerre en Suède et aux États-Unis……