DITES TRENTE-TROIS. Oui, comme chez le médecin, il faut savoir prononcer ce chiffre pour nommer toutes les listes qui solliciteront nos suffrages aux élections européennes du 26 mai. Trente-trois listes et deux mille six cent sept candidats pour siéger au Parlement européen ! Alors que ce scrutin ne sert à rien, qu’il ne modifiera en rien les politiques qui sont menées tant en France qu’à l’échelle du Vieux Continent, les candidats sont plus nombreux que jamais. Il faut dire que la soupe est bonne : la rémunération mensuelle des députés, prévue par le statut unique, s’élève à 8 757,70 euros avant impôts. De plus, chaque député dispose de 24 943 euros mensuels pour bénéficier d’assistants parlementaires. Les frais de voyage sont également intégralement remboursés par le Parlement européen, c’est-à-dire en réalité par les contribuables : c’est le cas des prix des billets d’avion en classe affaires (la plus onéreuse !), du billet chemin de fer en première classe et l’eurodéputé bénéficie d’un forfait de 0,53 euro au kilomètre pour les trajets en voiture (à concurrence de 1 000 km), en sus des indemnités forfaitaires calculées en fonction de la distance et de la durée et destinées à couvrir les autres frais liés au voyage (péages autoroutiers, excédents de bagages ou frais de réservation). Pour voyager à l’extérieur de son pays, les eurodéputés bénéficient du remboursement intégral des frais, de leur hébergement et des dépenses connexes jusqu’à un montant maximal annuel de 4454 euros.
Mais cela ne suffit pas. A tous ces avantages et privilèges s’ajoute une indemnité journalière, appelée également indemnité de séjour, lors des sessions à Strasbourg et à Bruxelles. Le Parlement verse une indemnité forfaitaire journalière de 320 euros pour couvrir les frais de logement et les frais afférents pour chaque jour de présence des députés à Bruxelles ou à Strasbourg. Cette indemnité couvre les frais d’hôtel, les repas ainsi que tous les autres frais connexes. En ce qui concerne les réunions en dehors de l’Union, l’indemnité s’élève à 160 euros et les frais de logement sont remboursés séparément, mais ils le sont !
EST-CE FINI ? Que nenni ! Existe également l’indemnité de frais généraux destinée à couvrir les coûts résultant des activités parlementaires des eurodéputés, comme les frais de location de bureaux et les frais de gestion, les abonnements téléphoniques, les activités de représentation, l’achat d’ordinateurs et d’appareils téléphoniques, ainsi que l’organisation de conférences et d’expositions. Cette indemnité s’élève à 4513 euros par mois et par député.
Vous en voulez encore ? Pas de souci. Il n’y qu’à se baisser pour ramasser. Les députés ont droit au remboursement de deux tiers de leurs frais médicaux, quel que soit leur montant. Par ailleurs, à la fin de leur mandat, si les pauvres députés ne sont pas réélus, qu’à cela ne tienne, ils ont droit au versement d’une indemnité transitoire, d’un montant égal à leur salaire, pendant un mois par année de mandat, et pouvant aller jusqu’à deux ans. Or, que je sache, être député n’est pas un métier. Pourquoi les payer pour être au chômage ?
Dans sa grande bonté, le Parlement met à la disposition des députés des bureaux équipés à Bruxelles et à Strasbourg avec des ordinateurs dernier cri et toute la technologie et le confort modernes. Dans ces deux villes, les députés peuvent utiliser gratuitement les véhicules officiels du Parlement qui disposent du plus grand confort et de tout le luxe imaginable.
Les dépenses des 751 parlementaires européens représentent chaque année la modique somme de 429 millions d’euros. Et il ne faut pas croire qu’en échange de ces salaires et avantages mirobolants l’eurodéputé soit assommé de travail. Le calendrier du Parlement prévoit quatre jours de sessions plénières par mois, lors desquelles les parlementaires débattent officiellement des textes et votent leur adoption ou non. De sorte qu’en général les eurodéputés ne viennent à Bruxelles ou à Strasbourg qu’une petite semaine par mois (quand encore ils y viennent !), tous les frais leur étant payés. Et ils passent souvent plus de temps aux restaurants, à la cantine ou à la buvette du Parlement que dans l’hémicycle ! Plusieurs députés européens nous ont confié honnêtement qu’ils ne servaient à rien, que c’était une sinécure, toutes les décisions étant prises soit par la Commission de Bruxelles, soit par les chefs d’Etat et de gouvernement des pays de l’Union. Mais ils sont payés pour dire que ce Parlement est formidable, que l’Europe est fantastique, alors qu’il s’agit d’une vaste supercherie. Ce Parlement européen, véritable Babylone moderne, est donc une escroquerie totale. Croire qu’il peut sortir quelque chose de bon de tout cela est une parfaite illusion. Ce devrait être un devoir civique de ne pas participer à cette farce, à cette mascarade. Les sondages prédisent 60 % d’abstention. Si les Français avaient conscience de la réalité de ce Système, ils seraient plus de 90 % à bouder l’isoloir.
LES MEDIA depuis des semaines nous surjouent un duel artificiel entre la République en marche et le Rassemblement national, entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, entre le chef de l’Etat et la chef des dégâts. Le 9 mai on nous disait que le RN venait de doubler la liste macronienne car le premier serait à 22 % et le second à 21,5 %. Comme si l’on pouvait mesurer sérieusement un résultat à 0,5 % d’écart alors même qu’on nous dit en même temps que la marge d’erreur est au moins de 2 à 3 % ! De qui se moque-t-on ? Macron a tout intérêt à ce duel avec Marine Le Pen. Il apparaît ainsi aux yeux des sots comme le seul rempart contre la menace RN. Si sa liste arrive en tête, il pourra claironner qu’il est le seul à pouvoir faire échec au populisme. Et si elle arrive en seconde position, il insistera sur le danger représenté par le RN et sur la nécessité de s’unir autour de sa personne et de son action pour résister à l’extrémisme, ce qui fait sourire quand on connaît le profil des candidats marinistes !
La stratégie de Macron, c’est de se retrouver à nouveau en duel et en débat avec Marine Le Pen à la prochaine présidentielle. Il sait bien que sa seule chance d’être réélu, et plutôt confortablement, est de se retrouver face à la présidente du RN qui ne peut obtenir au second tour plus de 50 % des suffrages exprimés après quarante ans de diabolisation du lepénisme. Et ce d’autant plus qu’il suffit qu’il la pousse sur des terrains techniques (économiques, institutionnels…) pour qu’elle s’effondre littéralement et montre son incompétence abyssale et sa nullité crasse. On l’a vu le 3 mai 2017 !
Ce duel médiatisé entre Macron et le RN est aussi une bonne chose pour Marine Le Pen qui apparaît ainsi, sans se fatiguer, comme l’opposante numéro un à Macron et qui bénéficie d’une confortable rente électorale et de tous les avantages qui lui sont liés. Elle aura aussi réussi à éliminer politiquement son père et Bruno Gollnisch qu’elle n’a pas voulus sur sa liste. Ce que les opposants de Le Pen et de Gollnisch n’avaient pas réussi à faire depuis des décennies, les tuer politiquement et les contraindre à une piteuse retraite, alors que les deux eurodéputés rêvaient de rempiler, Marine Le Pen l’aura réussi ! Et en plus les deux exclus sont masochistes puisqu’ils soutiennent publiquement la liste Bardella, ce qui donne raison à l’adage : oignez vilain, il vous poindra, poignez vilain, il vous oindra !
On le voit, cette situation de blocage, de verrouillage électoral peut durer très longtemps. Les dés sont pipés. Si nous devons mettre quelque part notre espérance, ce n’est certes pas dans la voie électorale. On ne le dira jamais assez, l’électoralisme est la tare et la sauvegarde du régime. Il serait temps de le comprendre et d’en tirer toutes les conséquences pour ne pas être éternellement la proie de marchands d’illusions.
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Jérôme BOURBON.
Editorial du numéro 3376 de RIVAROL daté du 9 mai 2019.