Invoquant l’affaire Navalny, l’Union Européenne fait planer la menace de nouvelles sanctions contre Moscou.
A la fin du mois d’août, Alexeï Navalny avait été transféré dans le coma en Allemagne, après avoir été victime d’un malaise. Il accuse le pouvoir russe d’avoir tenté de l’empoisonner (une version également défendue par plusieurs gouvernements, dont ceux de la France, des Etats-Unis, et de l’Allemagne), ce que réfute Moscou.
L’opposant russe a été incarcéré pour non-respect des conditions d’une peine de prison avec sursis, à son retour en Russie le 17 janvier. Selon les services pénitentiaires russes, Alexeï Navalny ne s’est pas présenté à l’enregistrement auprès de l’inspection à au moins six reprises au cours de l’année 2020, entre janvier et mi-août. Cette peine de prison avec sursis, prononcée en 2014, a été transformée en peine de prison ferme le 2 février 2021.
Les autorités russes ont dénoncé de leur côté à plusieurs reprises l’ingérence de pays occidentaux dans les affaires russes, pointant du doigt la présence de diplomates étrangers à l’audience d’Alexeï Navalny, les appels de gouvernements occidentaux à la libération de l’opposant russe ou encore l’indication, sur le site de l’ambassade américaine à Moscou, des heures et lieux de mobilisations non-autorisées pro-Navalny en Russie.
Ne voulant pas être en reste, le Parlement européen a débattu le 9 février à Bruxelles du fait que le représentant des affaires étrangères de l’UE, Josep Borrell, de retour de Moscou, appelle à des sanctions contre la Russie dans un contexte de tensions autour de l’affaire Navalny. À cette occasion, une eurodéputée irlandaise a fermement exprimé son rejet de la position européenne sur cette question, et a comparé le traitement de l’opposant russe avec d’autres affaires ignorées par l’Union européenne, comme l’affaire de Julian Assange, y voyant un « deux poids, deux mesures ».
Lors de ce débat, l’eurodéputée irlandaise Clare Daly a attaqué le double standard du Parlement européen en matière de droits de l’Homme et a accusé ses collègues d’hostilité répétée envers la Russie :
« En écoutant la russophobie incessante qui s’exprime ici, comment trouver surprenant que le gouvernement russe ne voie pas d’intérêt à dialoguer avec l’UE ? »
a questionné Clare Daly à la tribune – dans un contexte où la Russie se dit désormais être prête à un refroidissement des relations UE-Moscou.
Après avoir vertement critiqué les positions politiques de l’opposant russe, Clare Daly a affirmé que s’il avait été arrêté dans un autre pays que la Russie, on ne parlerait pas du tout d’Alexeï Navalny dans l’UE.
La parlementaire a ensuite énuméré une série de comparaisons entre le traitement de l’affaire Navalny et d’autres, délaissées par l’UE :
« Pendant ce temps-là, Julian Assange est incarcéré depuis presque dix ans pour avoir exposé des crimes de guerre américains et on ne peut même pas le mentionner »,
s’est indignée Clare Daly qui, le 25 novembre 2020, dénonçait le fait que l’écrasante majorité des députés européens ait en effet rejeté un amendement faisant référence à l’affaire Assange, dans un rapport dédié à la situation des droits fondamentaux au sein de l’UE sur la période 2018-2019.
Après avoir cité différents cas présumés de violation des droits de l’homme en Europe et aux Etats-Unis, l’eurodéputée a clos son discours du 9 février en demandant :
« Où sont les appels à rompre les liens avec les Etats-Unis ? […] Nulle part ! Parce qu’il ne s’agit de pas de droits de l’homme. Cela [l’affaire Navalny] correspond à un agenda géopolitique antirusse, alimenté par un complexe militaro-industriel qui a besoin d’un ennemi pour justifier ses millions.»
A l’adresse de Josep Borrel, Clare Daly a conclu :
« Bien sûr que vous avez raison d’aller en Russie où nous devrions miser sur le dialogue et pas sur la guerre. »