Article initialement publié par nos amis de L’Action Française.
« Ces institutions « meurtrières », comme les a précisément nommées M. Paul Bourget, travaillent depuis cent ans à affaiblir, faute de pouvoir les détruire complètement, la famille, l’association, la commune, la province et, en bref, tout ce qui seconde et fortifie l’individu, tout ce qui n’enferme pas le citoyen dans son maigre statut personnel. Chacune des faiblesses de la France moderne coule de ces institutions comme de sa source première. De là vient l’importance de l’Etat juif au milieu de nous »
Charles Maurras.
Nous assistons actuellement dans la mouvance patriotique à un phénomène qui n’est pas nouveau, loin de là, mais qui connaît une certaine recrudescence ces dernières années. La chose n’est pas inédite puisque l’on sait que des disciples de Maurras et non des moindres se sont échinés à tamiser la pensée de Maurras afin d’en extraire les grains antisémites quelques temps après la fin de la Seconde guerre mondiale. Grains que le Système ne saurait tolérer, comme nous le savons. Pierre Boutang, le philosophe illisible de L’Ontologie du Secret, thèse savante que seul l’illustre linguiste hébreux Georges Steiner aurait compris (c’est dire l’intelligence du bonhomme), était aussi l’auteur d’un pavé soporifique consacré à Charles Maurras et à son œuvre, Maurras, la destinée et l’œuvre. Il s’agit d’un ouvrage qu’il est impossible de résumer. Trop épais, trop personnel, trop digressif. Boutang ne nie pas l’antisémitisme de Maurras, mais il le relativise. D’abord via son exégèse para-maurrassiste où il ne s’éternise jamais sur le « sujet des sujets » préférant trop souvent s’attarder sur le côté « poète » du Martégal dont tout le monde se contrefiche et sur certaines considérations philosophiques qui n’intéressaient pas forcément le théoricien nationaliste. Ensuite, par sa conduite, sa posture, celle d’héritier idéologique qui aurait disposé de toute la légitimité pour exercer un droit d’inventaire sur le nationalisme intégral.
La trahison de Boutang
Le grand intellectuel, le grand philosophe chanté par Steiner, a créé son journal, La Nation française, enseigne à la Sorbonne, passe chez Bernard Pivot dans l’émission littéraire Apostrophe. Il parle de Maurras, il parle de la France, mais il est philosémite, complètement philosémite et complètement sioniste. La communauté, du moins sa frange érudite, l’apprécie grandement, non pour ses qualités intellectuelles mais pour sa défense acharnée d’Israël. Matzneff, qui fut tout proche de Boutang (il l’était déjà tout jeune lycéen) relate dans l’un de ses papiers (Le Point dans l’année 2014) une aventure avec le Normalien, plus précisément une colère de ce dernier. Alors encore jeune (et certainement moins pressé par la dictature de la pensée), Matzneff dut subir la rage de son dady philosophe après qu’il ait naïvement fait part de ses sympathies pro palestiniennes. « La seconde colère de Boutang, ce sont mes prises de positions pro-palestiniennes qui me la valurent. Cela se passait à une époque très ancienne, quand le Fatah de Yasser Arafat se battait pour une Terre sainte laïque où les juifs, les chrétiens, les musulmans, les agnostiques seraient des citoyens égaux en devoirs et en droit. Cela n’avait rien à voir avec la Palestine islamiste, sectaire, que prônent aujourd’hui les dirigeants du Hamas. » Dans son livre, La Guerre de Six Jours, il écrira que « comme à l’origine, Israël est signe de contradictions, pierre de touche pour les nations et les empires dont il fait apparaître les contradictions, lui-même restant, d’une manière inconnue, le lieu toujours privilégié de la contradiction utile, entre l’homme et son Dieu ». Il voudra démontrer « Pourquoi Israël est-il l’Europe ? », La lâcheté des « Grandes Puissances », qu’Israël est « La Nation exemplaire », et que « Jérusalem pour des raisons bibliques, mais aussi de très concrètes, ne peut qu’être confiée à la garde de l’État et du soldat juifs. La décadence et les crimes de notre Europe, anciennement chrétienne, ont conduit à ce châtiment mystérieux, ce signe de contradiction ineffable comme tout ce qui tient à Israël. » On se demandera si ces acrobaties politiques et religieuses sont les conséquences de la Seconde guerre mondiale (qui l’auront diablement ébouriffé) ou les expressions de sa volonté de plaire aux puissants de l’ombre pour retrouver sa Sorbonne et les jolis mots de certains critiques littéraires. Mais quand on observe le parcours de son fils feu Pierre-André qui fut patron d’Arte (une gageure), on croit davantage à la seconde hypothèse.
Pour autant, Boutang n’était plus d’Action française, et la grosse biographie sur Maurras qu’il a commise en 1984 ressemble plus à une performance d’universitaire exhibitionniste qu’à un vigoureux essai politique. Bref, ce mondain s’est-il d’abord servi de Maurras comme d’un marchepied.
D’autres individus, souvent de petits professeurs espérant connaître quelque renommée en occupant une position dans l’organigramme d’une Action française qui partait à la dérive et que nous refaisons, restaurons intellectuellement aujourd’hui, essayèrent d’accroître leur visibilité en comptant sur les bons points que leur décernaient les politologues israélites et les media de même essence grâce à la diffusion d’un discours certifié conforme par leurs juges. S’ils ne se réclamaient pas de l’Action française historique et de la pensée du « premier » des Français, ils pourraient avoir le droit politique et intellectuel de dire tout et n’importe quoi sur les Etats confédérés et sur la question qui n’existe pas. Mais quand on se veut héritier des Camelots, de Marius Plateau, des Real del Sarte, de Vaugeois, de Maurice Pujo et, en premier lieu, du grand Charles, on n’a pas le droit de dire que le cheval blanc d’Henri IV était noir. C’est une insulte faite à l’intelligence, une malhonnêteté intellectuelle, un grave mensonge.
Peut-être que les juifs trouvent l’antisémitisme pas très gentil à leur égard, peut-être « qu’il ne faut pas être antisémite ». La question n’est pas là !
Antisémite, qu’on le veuille ou non.
Charles Maurras était antisémite. Il était même terriblement antisémite. Pas à moitié, pas sur les bords, pas dans des accès de colère noire, non, profondément, théoriquement, scandaleusement, à l’instar d’un Drumont, d’un Marquis de Morès, d’un Jules Guérin. Maurras était antisémite, même en dormant. L’antisémitisme alimentait tout son être, nourrissait son cerveau et irrigue toute sa pensée. Voilà un fait objectif. Maurras est antisémite. L’UEJF, Jean-Yves Camus, Marek Halter, Enrico Macias, Marine Le Pen peuvent bien le détester, cela ne change rien à la vérité. Marion Maréchal Auque peut bien dénigrer l’essence de la pensée maurrassienne, Maurras reste Maurras. Le faux nez Éric Zemmour peut bien jouer au fier à bras, il ne peut décidément pas inventer un Maurras qui n’existe pas en lui inventant des disciples qui n’existent pas. Zemmour n’est pas plus nationaliste en effet que Charles De Gaulle était maurrassien comme il le soutient hystériquement devant la petite-fille Le Pen dans sa prétendue école néo-con’. De Gaulle lisait le journal L’Action française quand il était tout jeune… Tel est l’argument irréfragable lancé par le lutin trompeur pour donner du crédit à cette fable de crétins d’un De Gaulle maurrassien. De Gaulle lisait Maurras à 16 ans, donc il était maurrassien à 70 ans… C’est puissant, n’est-ce pas ? Ce n’est pas tout, bien sûr. La Cinquième république serait purement monarchique dans son fonctionnement et blabla… Des billevesées pour nous endormir que cela ! Car les propos de Zemmour ne font partie que d’une grosse et grossière entreprise de récupération politique en faveur du sionisme international. De Gaulle n’était pas antisémite. Il ne l’était pas, car il n’était pas nationaliste ; loin de là : au lieu de neutraliser les ennemis de l’intérieur (selon le programme strictement nationaliste), il les fit proliférer par le communisme et le monde de la culture notamment (pour parler des éléments les plus visibles de la subversion antinationale). A quoi cela sert-il de vouloir confondre Maurras et De Gaulle sinon pour castrer le premier, et ses partisans, surtout, par la même occasion. Ecoutez bien les cadres parasites, ils ont raison, entend-on murmurer Zemmour : Nul besoin d’être antisémite pour être maurrassien ; vous pouvez être certifié conforme et être maurrassien, elle est pas belle la vie ?
L’antisémitisme n’est cependant pas un sentiment, une opinion vestimentaire, un accessoire. Il est, qu’on le veuille ou non, qu’on déteste cette pensée ou qu’on l’apprécie, essentiel au nationalisme ; il participe de sa vitalité. Cette caractéristique rend d’ailleurs le nationalisme incompatible avec la république qui mène une lutte à mort contre elle, ni plus ni moins. Nous posons ici rapidement un constat objectif de la réalité macropolitique. Nous n’instillons aucun jugement de valeur dans nos propos. L’histoire du nationalisme les corrobore.
La naissance d’un antisémite
Charles Maurras forge sa doctrine antisémite en s’inspirant notamment des écrits de l’un de ses maîtres à penser, René de La Tour du Pin. Dans son programme social de 1889 (centenaire de la Révolution), La Tour du Pin envisage de « dénationaliser » les juifs français. Il écrit à la même époque : « Les juifs seront mis sur le « même pied que les indigènes de nos colonies » ; leur nouveau statut de « sujets français », inférieur à celui des citoyens de « souche française », leur garantirait la protection des autorités tout en leur interdisant l’accès aux fonctions publiques ». Maurras reprendra cette idée entre 1904 et 1906, à l’époque où il élabore sa théorie des quatre Etats confédérés. Mais avant de formuler cet antisémitisme, avant de le théoriser, avant de lui offrir l’un de ses « théorèmes », Maurras était naturellement antisémite. L’antisémitisme a toujours été pour lui une évidence. Il faut savoir que Maurras a rencontré dans ses lectures La Tour du Pin avant Edouard Drumont qui n’était pas un théoricien politique à la différence du premier. Maurras s’est en effet intéressé à l’antisémitisme comme l’élément d’un tout, d’un système politique. Les historiens et autres généalogistes des idées négligent trop une période de la vie de Maurras. Ses tout débuts dans le journalisme. Bien avant son voyage à Athènes pour La Gazette de France, avant son Enquête sur la monarchie pour Le Figaro, avant de découvrir Mistral dans le texte et de devenir un critique passionné des Félibres, il écrivait dans des petits journaux et revues spécialisées qui lui permettront d’emmagasiner une riche culture dans les matières des sciences humaines. Il a commencé très jeune à rédiger des recensions d’ouvrages pour le fameux Polybiblion, une revue bibliographique. Là il était chargé de résumer d’une manière extrêmement concise les ouvrages sociologiques nouvellement publiés ou réédités. Par le biais de ce travail, il se familiarise avec les grands courants de la sociologie naissante, et surtout avec les fondamentaux du positivisme et les textes principaux de son fondateur, Auguste Comte. Comte écrit en 1842 un texte fondateur dans ses Cours de philosophie positive, fondateur et décisif dans la formation de la doctrine maurrassienne (que le Martégal lira 50 ans après sa première publication) : « Notre mal le plus grand consiste en effet, dans cette profonde divergence qui existe maintenant entre tous les esprits relativement à tous les maximes fondamentales dont la fixité est la première condition d’un véritable ordre social. Tant que les intelligences individuelles n’auront pas adhéré par un assentiment unanime à un certain nombre d’idées générales capables de former une doctrine sociale commune, on ne peut se dissimuler que l’état des nations restera, de toute nécessité, essentiellement révolutionnaire, malgré tous les palliatifs politiques qui pourront être adoptés, et ne comportera réellement que des institutions provisoires. Il est également certain que si cette réunion des esprits dans une même communion de principes peut une fois être obtenue, les institutions convenables en découleront nécessairement, sans donner lieu à aucune secousse grave, le plus grand désordre étant déjà dissiper par ce seul fait. » Ces quelques lignes résument l’antilibéralisme fondamental d’Auguste Comte qui ne peut concevoir une société vivante remplie de religions et d’idéologies qui s’entrechoquent. Une fois la condition vitale de l’ordre sociale posée, il fallait comprendre pourquoi il était si difficile de réunir, rassembler, moralement, religieusement, la société. Maurras s’intéressa à cette question.
Maurras sociologue
Le désordre, la dissociété ne sont pas des choses naturelles. Le désordre ne se développe pas spontanément, et dans une situation de paix civile, il devrait donc être possible de restaurer l’ordre social. Mais non seulement l’Etat est parasité par les ennemis de la France mais la société elle-même est gangrenée par l’esprit du libre-examen et de l’individualisme né du protestantisme moderne. Maurras a compris qu’il était impossible de se libérer de ces fléaux en ne travaillant que métapolitiquement. C’est cet infatigable écrivain, journaliste rigoureux, vigoureux, didactique, qui comprit le mieux les limites de la subversion proprement idéologique. Pour changer les choses politiquement, il fallait s’emparer tout simplement du pouvoir politique. Evidemment, il n’existe qu’une méthode pour s’en emparer : Le coup de force. Pour Maurras, les ennemis de la France, les suppôts républicains ne laisseront jamais la moindre ouverture aux nationalistes dans leur conquête du pouvoir. Les élections sont un piège permanent. Et les principes républicains des poisons qui contaminent les électeurs jusqu’aux patriotes qui se réclament de la République. L’antisémitisme de Maurras n’est pas une mode, une culture, une opinion. Il fait partie de la statique sociologique selon lui. Et cette statique sociologique est corrélée à la sociologie juive. Sous le régime républicain et individualiste, là où les membres de la communauté sont dans tous les rouages de la société, apparemment dispersés, apparemment atomisés, apparemment « individualisés », l’antisémitisme se fait virulent comme une fièvre. Dans une France monarchiste où les communautés sont prises en considération pour ce qu’elles sont, les juifs sont marginalisés et se ghettoïsent selon Maurras. La conspiration républicaine perd alors ses plus résolus activistes. Car la République, ses principes, sont l’écologie du juif selon Charles Maurras. Maurras qui écrivit dans un éclair en 1908, 10 ans après la création de l’Action française : « La pendaison de Marianne devant la Bourse du travail est l’acte le plus significatif de notre histoire depuis le 14 juillet 1789. Bourgeois conservateurs, le comprendrez-vous ? » Rien, rien ne peut être entrepris sous un régime républicain qui laisse les requins entrer dans le port ! Maurras ne l’a pas découvert ex nihilo. Edouard Drumont avait, avant lui, dégagé les conditions d’une renaissance sans comprendre les impératifs politiques l’autorisant. En 1889 Drumont adjurait les bons Français de faire plus que remplacer simplement « le juif borgne de l’opportunisme par le juif bossu du boulangisme ». Maurras, lui aussi, avait tiré une grande leçon de l’expérience boulangiste.
République, règne de l’Etranger
Et la même année, 1889, Drumont avait cette intuition : « Le centenaire de 89, c’est le centenaire du juif ». C’est parce que la République est en premier lieu le règne de l’étranger, c’est parce que la république offre la nation aux plus parasitaires, sans protection, c’est d’abord pour cette raison que Maurras est anti-démocrate, antirépublicain. Parce qu’il est patriote, il est nationaliste. Parce qu’il est nationaliste, il est antisémite. Parce qu’il est antisémite, il est monarchiste. Aussi, suivant Maurras, la solution antisémite, donc nationaliste, donc patriote, est monarchiste. D’où son fameux « Politique d’abord ». Les questions sociologiques seront résolues ou canalisées par la politique.
Antisémite et populiste ?
« Tout paraît impossible, ou affreusement difficile, sans cette providence de l’antisémitisme. Par elle tout s’arrange, s’aplanit et se simplifie » (L’Action française, 28 mars 1911). Cette citation bien connu des professeurs d’histoire, n’est pas la preuve d’un cynisme maurrassien mais celle de son antisémitisme décomplexé. Maurras ne disait pas par là qu’il fallait absolument utiliser l’antisémitisme uniquement parce qu’il était populaire. Il disait simplement que sa popularité était une sorte de divine surprise tant la propagande républicaine a calibré les cerveaux. « Contre l’hérédité de sang juif, il faut l’hérédité de naissance française, et ramassée, concentrée, signifiée dans une race, la plus vieille, la plus glorieuse et la plus active possible. […] Décentralisée contre le métèque, antiparlementaire contre le maçon, traditionnelle contre les influences protestantes, héréditaire enfin contre la race juive, la monarchie se définit, on le voit bien, par les besoins du pays. Nous nous sommes formés en carré parce qu’on attaquait la patrie de quatre côtés. » Un roi ne saurait être juif. Même l’évidence est antisémite. Maurras écrivait encore en 1905 : « Seule, la Monarchie assure le salut public et, répondant de l’ordre, prévient les maux publics que l’antisémitisme et le nationalisme dénoncent. » S’il est vrai que l’antisémitisme de Maurras est politique (antisémitisme d’Etat) parce que sociologique, il faut ajouter que Maurras peut être très cruel, très méchant, terrible envers les juifs. Nous pourrions dire d’une manière triviale que l’antisémitisme de Maurras est intégral et radical. Il peut se fâcher, s’enflammer, user de mille épithètes contre les juifs et même se dire raciste envers eux comme il le fit dans La Gazette de France en 1895. Bien plus tard, il fera part de son éternelle méfiance vis à vis de cette communauté décidément, pense-t-il, indissoluble : « J‘ai vu ce que devient un milieu juif, d’abord patriote et même nationaliste, quand la passion de ses intérêts proprement juifs y jaillit tout à coup : alors, à coup presque sûr, tout change, tout se transforme, et les habitudes de cœur et d’esprit acquises en une ou deux générations se trouvent bousculées par le réveil des facteurs naturels beaucoup plus profonds, ceux qui viennent de l’être juif »
Les années 1911, 1912, 1913
En 1911, Maurras qualifie Drumont de « maître génial » et de « grand Français » qui a posé « la difficile question » de « l’antisémitisme d’État. » Maurras ajoute : « Le Juif d’Algérie, le Juif d’Alsace, le Juif de Roumanie sont des microbes sociaux. Le Juif de France est microbe d’État : ce n’est pas le crasseux individu à houppelande prêtant à la petite semaine, portant ses exactions sur les pauvres gens du village ; le Juif d’ici opère en grand et en secret. » Un résumé du spectacle antisémite que présenta Maurras en cette année… Le 23 février 1911, irrité par le scribouillard Bernstein, auteur de pièces de théâtre antimilitaristes, Maurras se lâche. Sa colère est effrayante : « Les juifs de France n’ont vraiment pas de quoi faire les fiers, ni les malins. Leurs fautes personnelles et leurs crimes mêmes restent sans proportion avec les immenses désordres qu’ils ont causés et dont le mouvement antisémitique témoigne. Il est bon que la force juive ait conduit à faire du théâtre juif un théâtre d’Etat. On n’en verra que mieux combien l’antisémitisme est affaire d’Etat. La réorganisation de l’Etat français peut seule régler cette haute et difficile question. »
Le 16 janvier, répondant au juge Worms : « Je suis Français, vous êtes de nationalité juive. Il m’est impossible de répondre à un juge juif. »
Le 28 février : « Notre loi ment. Il présente le juif comme Français mais il n’est pas Français. »
Le 23 mars : « Ce sont des gens qui ne sont pas Français puisqu’ils sont juifs. »
Le 28 mars : « Tout de même, ce sera un beau branle-bas quand tous les juifs d’administration civile ou militaire devront, en recouvrant leur nationalité, dire adieu à la nôtre et quitter le poste public qu’ils occupaient dans notre Etat. »
Le 24 août 1912 : « Nous n’hésitons pas à faire la guerre à la race juive et à la grouillerie métèque mais c’est là l’étranger de l’intérieur. »
Le 15 février 1913 : « Le peuple juif est juxtaposé au peuple français. Il n’est pas fusible avec celui-ci. » (…) Chacun sent comme un mal physique l’insolence du Juif. Bientôt, la loi signifiera aux juifs qu’ils ne sont pas Français. »
Le cas Léon Blum
Dans les années trente, Blum est la cible de plusieurs articles de Maurras : « Ce Juif allemand naturalisé, ou fils de naturalisé, qui disait aux Français, en pleine Chambre, qu’il les haïssait, n’est pas à traiter comme une personne naturelle. C’est un monstre de la République démocratique. Et c’est un hircocerf de la dialectique heimatlos. Détritus humain à traiter comme tel. (…) L’heure est assez tragique pour comporter la réunion d’une cour martiale qui ne saurait fléchir. Reibel demande la peine de mort contre les espions. Est-elle imméritée des traîtres ? Vous me direz qu’un traître doit être de notre pays : M. Blum en est-il ?
Il suffit qu’il ait usurpé notre nationalité pour la décomposer et la démembrer. Cet acte de volonté, pire qu’un acte de naissance, aggrave son cas.
C’est un homme à fusiller, mais dans le dos ».
Et le 15 mai 1936 : « C’est en tant que Juif qu’il faut voir, concevoir, entendre, combattre et abattre le Blum. Ce dernier verbe paraîtra un peu fort de café : je me hâte d’ajouter qu’il ne faudra abattre physiquement Blum que le jour où sa politique nous aura amené la guerre impie qu’il rêve contre nos compagnons d’armes italiens. Ce jour-là, il est vrai, il ne faudra pas le manquer. (…) Si, par chance, un État régulier a pu être substitué au démocratique Couteau de cuisine, il conviendra que M. Blum soit guillotiné dans le rite des parricides : un voile noir tendu sur ses traits de chameau ».
En 1938, l’antisémitisme de Maurras franchit un palier, dans une veine très célinienne, lorsqu’il écrit : « Le Juif veut votre peau. Vous ne la lui donnerez pas ! Mais nous l’engageons à prendre garde à la sienne, s’il lui arrive de nous faire accéder au massacre universel. »
Nous le voyons, encore et encore. L’antisémitisme de Maurras est fondamental, violent et régulier. Les seules fois où le maître de l’Action française écrit calmement sur le sujet, c’est lorsqu’il évoque les lois antijuives que la monarchie mettra selon lui immanquablement en place. Assurément et implacablement. Quand il pense « être devant l’action » des juifs, notamment lors de la Seconde Guerre Mondiale et malgré Vichy, il se déchaîne.
« Les juifs nous ont tant roulés que nous n’osons pas imaginer le rouleau inverse ! Cependant, à leur ruse, on peut riposter par la force. » (19 octobre 1940). Et Maurras de ne pas hésiter à s’en prendre aux plus puissants des puissants, les Rothschild en demandant à Vichy de prendre l’or et l’argent là où ils se trouvent !
Voilà Maurras ! Il est comme ça Maurras ! Un homme antisémite, terriblement antisémite, fondamentalement antisémite. Convoquer Maurras sans convoquer son antisémitisme est chose impossible. C’est une farce qui ne trompe personne. Personne. Ni les nationalistes, ni les juifs d’aujourd’hui.
Jean Charleux
Source : L’Action Française.
Commentaires 1