L’ANNÉE 2024 s’achève dans quelques jours et à l’heure où nous bouclons ce numéro (plus tôt que d’habitude car Noël tombe cette fois-ci un mercredi, ce qui nous oblige à en anticiper l’impression, la distribution et la parution), la France n’a toujours pas de gouvernement, même si elle dispose depuis la sainte Lucie d’un nouveau Premier ministre en la personne de François Bayrou. Comme nous avons déjà eu l’occasion de l’écrire, que notre pays n’ait pas une équipe ministérielle au grand complet et qu’il soit dirigé par un Exécutif faible et instable est, dans une certaine mesure, un moindre mal. Il est souhaitable en effet de disposer d’un pouvoir fort lorsqu’il va dans le bon sens et défend le bien commun. Il est en revanche préférable d’avoir un pouvoir faible lorsqu’il est nuisible, sa nocivité étant ainsi quelque peu diminuée ou freinée. La Quatrième République, si décriée, a finalement été moins nocive que la Ve du fait de la relative impuissance et de la réelle faiblesse de ses gouvernements et présidents successifs. Elle n’a pas réussi à saborder complètement notre empire colonial, elle n’a pas révolutionné le droit de la famille ni organisé la submersion migratoire de notre pays, comme l’a fait la Ve gaullienne que l’on porte tant aux nues. En effet, contrairement à ce que l’on croit souvent, un pays peut davantage souffrir voire mourir de réformes, si elles sont mauvaises, que de l’absence de réformes.
Depuis un demi-siècle au moins, la France va à vau-l’eau à cause de réformes successives, plus détestables les unes que les autres, qui ont détruit ou bouleversé la nation, la famille, l’armée, l’école, la morale, les corps intermédiaires, la vie. C’est pourquoi, s’il pouvait y avoir, ne serait-ce qu’une pause, dans cette révolution arc-en-ciel et cosmopolite qui nous asservit, nous détruit et nous avilit, ce serait finalement plutôt une bonne chose. Même si cela bien sûr ne résout rien sur le fond et n’est nullement un gage de salut sur le long terme. Mais peut-on croire actuellement à une trêve, fût-elle de courte durée, quand le Premier ministre, nouvellement nommé par le chef de l’Etat, s’apprête, semble-t-il, à reprendre pour l’essentiel les mêmes ministres que ceux des précédents gouvernements macronistes et que tout laisse à penser qu’il conduira sur tous les sujets une politique semblable ou comparable ?
AU RESTE, Bayrou, qui soutient sans discontinuité Macron depuis son ralliement en février 2017, et qui a toujours été un chaud partisan d’un gouvernement unissant le centre droit et le centre gauche, avant même que Macron mette en pratique lui-même cette idée, ne peut que poursuivre cette politique européiste, mondialiste, cosmopolite qui conduit notre peuple à la ruine et notre pays au tombeau. Avoir nommé le Béarnais à Matignon, alors qu’il incarne depuis bientôt huit ans la Macronie dont il est l’un des principaux piliers, un constant soutien et un fidèle allié, est une façon pour le président de la République de mépriser le résultat des élections législatives qu’il avait pourtant lui-même convoquées de manière anticipée en juin dernier. Alors même que son camp est revenu à l’Assemblée nationale avec une centaine de députés en moins et qu’il est donc minoritaire, tant en voix qu’en nombre de parlementaires, il reste au cœur et au sommet de la vie politique et dirige toujours l’Exécutif : l’Elysée, Matignon et même l’hôtel de Lassay, puisque la présidente du Palais-Bourbon, la communautaire Yaël Braun-Pivet, est également macroniste depuis la création d’En marche en 2016 et qu’elle a été réélue à ce poste prestigieux en juillet dernier, du fait de la collusion entre les Républicains et l’ex-majorité présidentielle.
Le Béarnais se présente comme un partisan de la rigueur, du sérieux, de l’équilibre des comptes publics. Mais la vérité, c’est qu’il hérite d’un pays en faillite — François Fillon, alors Premier ministre de Nicolas Sarkozy, le disait déjà il y a près de vingt ans : « Je suis le chef du gouvernement d’un pays en faillite », et les choses se sont encore largement aggravées depuis lors — et on voit mal comment il pourra redresser la situation, si peu que ce soit. Au deuxième trimestre 2024 (dernier chiffre connu), la dette publique de la France s’élevait à 3 228 milliards d’euros, soit 112 % du Produit intérieur brut. Le déficit public en 2024 est de 180 milliards d’euros, ce qui représente 6,1 % du PIB. En 2022, il n’était “que” de 4,7 %. Le dérapage est considérable. La balance commerciale, longtemps excédentaire, est désormais fortement déficitaire, et ce depuis déjà de longues années. La France a ainsi enregistré un déficit commercial de 7 666 millions d’euros en octobre 2024. Par ailleurs, quelques heures seulement après la nomination du nouveau Premier ministre, l’agence de notation américaine Moody’s abaissait la note de la France, qui est passée à Aa3 au lieu de Aa2. Rappelons que les agence de notation mesurent le risque de non-remboursement des dettes par les différents pays. D’autant qu’il n’y a pas que la dette proprement dite, mais il faut prendre également en compte les intérêts de la dette qui sont eux aussi faramineux. Selon un rapport sénatorial de 2024, le remboursement des seuls intérêts de la dette française représente actuellement un peu plus de 46 milliards d’euros par an, soit 3,4 % des dépenses publiques annuelles, contre 1,5 % seulement pour l’Allemagne.
OR cette dette et ces déficits risquent de se creuser encore, malgré les promesses de nos gouvernants successifs, avec le chantier de reconstruction de Mayotte, cet archipel français de l’Océan indien ayant été complètement dévasté par le cyclone Chido le 14 décembre. Le jeudi 19 décembre, lors de la visite de ce territoire qui est officiellement depuis 2011 le 101e département français — on a refait avec Mayotte l’erreur qui avait été commise par la IIIème République qui avait départementalisé l’Algérie, alors qu’elle aurait mérité un statut juridique spécifique —, le chef de l’Etat n’a pas été avare en promesses, annonçant la mise en place d’un fonds d’indemnisation pour les non-assurés — qui sont ultra-majoritaires, puisque beaucoup d’habitants de l’archipel, essentiellement des Comoriens, sont en situation irrégulière, Mayotte subissant une submersion migratoire continue favorisée par le stupide droit du sol et la générosité des aides sociales et familiales versées par la France —, le vote d’« une loi spéciale » pour reconstruire, rebâtir complètement l’archipel, à l’instar, a-t-il promis, de ce qui a été fait pour Notre-Dame de Paris et pour les Jeux olympiques. Macron a également dit qu’il voulait « mettre fin aux bidonvilles » et « supprimer les habitats qui sont à la fois indignes et dangereux ». Un programme ambitieux et munificent mais dont il n’a pas chiffré le coût qui risque d’être gigantesque. Le défunt gouvernement Barnier avait déjà acté des hausses d’impôt avant même cette catastrophe naturelle.
Gageons que ce cyclone dévastateur va être l’occasion, ou le prétexte, d’une nouvelle et forte augmentation de la fiscalité, tant sur les particuliers que sur les entreprises, dans un pays qui détient pourtant déjà le record au monde des prélèvements obligatoires. Alors même qu’on annonce des dizaines de milliers de faillites d’entreprises industrielles dans les mois qui viennent — 300 000 emplois sont actuellement menacés —, que le chômage repart à la hausse, que la croissance est en berne, cette nouvelle cure d’austérité risque d’aggraver encore une situation déjà très dégradée. Et si encore, en reconstruisant Mayotte, on prenait à bras le corps la question de l’immigration clandestine, qui est là-bas un véritable tsunami, on ferait œuvre utile. Mais il est hélas à craindre, compte tenu des politiques dites anti-discriminatoires des gouvernements successifs, que rien de concret et d’efficace ne sera fait pour résoudre ce problème vital. François Bayrou a promis de ne rien négliger, de ne rien laisser de côté, de traiter toutes les difficultés. On peut néanmoins penser qu’il n’en résoudra ni n’en résorbera aucune, car, dans le cadre politique, intellectuel, moral et spirituel de ce régime de mort, rien de bien ni de sain n’est possible.
CAR ce Système montre chaque jour davantage son immoralité et sa malfaisance. L’ancien président de la République, l’ultra-sioniste Nicolas Sarkozy, a vu son pourvoi rejeté par la cour de cassation le 18 décembre dans l’affaire dite des écoutes où il avait été condamné pour corruption et trafic d’influence à trois ans de prison, dont un ferme sous bracelet électronique. Jamais jusque-là un ancien chef de l’Etat français n’avait été condamné définitivement à de la prison ferme pour corruption. Cela en dit long sur le délitement du régime et l’effondrement de la morale publique. C’est d’autant plus choquant quand il s’agit de l’ancien premier magistrat de France, du chef des armées et de l’Etat. Sarkozy n’en a d’ailleurs pas fini avec Thémis puisqu’il doit comparaître, à partir du 6 janvier, et pour quatre mois, dans l’affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007. Et dans les mois qui viennent la Cour de cassation devra trancher sur le pourvoi de l’ex-maire de Neuilly contre sa condamnation à un an de prison, dont six mois ferme, dans l’affaire Bygmalion, concernant les dépenses excessives de sa campagne présidentielle de 2012.
Le lendemain, le 19 décembre, la cour criminelle du Vaucluse rendait son verdict dans la sordide et terrifiante affaire des viols de Mazan. Dominique Pelicot, 72 ans, qui a fait subir pendant dix ans des viols collectifs et répétés à son épouse qu’il droguait préalablement à son insu, a été condamné à une peine de 20 ans de prison ferme, accompagnée d’une période de sûreté des deux tiers. Les autres accusés (ils étaient 51 hommes en tout) ont écopé de peines allant de 3 ans de prison, dont 2 avec sursis, à 15 ans d’emprisonnement. 45 accusés sur 51 sont allés derrière les barreaux dès l’énoncé du verdict ou y demeurent quand ils y étaient déjà. Dans cette affaire hors normes, qui prouve là aussi l’impressionnant recul de la morale, de la dignité, et même de la simple humanité, on a tu le rôle pourtant moteur et dévastateur de la pornographie qui était consommée à haute dose par tous les accusés de cette sinistre affaire. En revanche, les grand media en ont profité pour mettre en accusation à longueur de journées l’homme en général, tous les hommes, et particulièrement les mâles blancs hétérosexuels coupables par essence de tous les maux. On mesure à quel point ce régime arc-en-ciel promeut la défiance et la guerre entre les sexes, les générations, les classes, les races, qu’il n’est là que pour détruire et non pour construire, pour conduire à toutes formes d’affrontements et de guerre civile, même au sein de la famille, afin d’installer le chaos et l’anarchie.
OUI, l’actualité est particulièrement triste voire déprimante en cette fin d’année. Tout semble aller de mal en pis. Et la répression ne faiblit pas. Le courageux et prolifique révisionniste allemand, Germar Rudolf, 60 ans, a été arrêté par le FBI le 9 décembre aux Etats-Unis où il vivait et il pourrait à tout moment être extradé en Allemagne où, du fait de ses nombreux travaux et écrits non conformistes, il pourrait purger à nouveau de très longues années de prison. C’est dire que la situation n’est vraiment pas confortable pour les vrais dissidents aujourd’hui. Mais face à ces épreuves, cruelles assurément, il ne faut pas désespérer ni perdre courage. Et quoi de mieux pour résister à ce mystère d’iniquité que de méditer, de contempler ces jours-ci le mystère de Noël qui est en tous points l’inverse du monde actuel dont Satan est le prince ?
Alors que nous n’avons que des gouvernements instables et fugaces, que tout aujourd’hui est changeant, contingent et transitoire, que nous vivons dans la société de l’évanescence, de la fugacité, du mouchoir jetable, dans le monde de l’immédiateté, de l’individualisme, du subjectivisme, de l’égocentrisme et du narcissisme, le monde où l’on peut changer, du jour au lendemain, sans aucune difficulté, de sexe, de partenaire, de conviction, de religion, d’organisation, de “genre”, d’« orientation sexuelle », où l’on peut procéder à des “transitions”, où l’on peut sans cesse se réinventer, se transformer, se grimer, refaire sa vie, comme si l’on avait plusieurs vies, ainsi que c’est le cas dans les jeux vidéo, il est bon de méditer sur la permanence dans l’être et dans la grâce, sur l’Eternel qui se fait chair par amour pour les hommes et dont le message de charité, d’humilité et de paix, lui, ne connaît ni de commencement ni de fin.
Alors que la société actuelle repose sur la mort et sur le crime de masse — 2024 restera la triste année où a été gravé dans le marbre constitutionnel le génocide des enfants à naître, le 4 mars dernier, et dans quelques semaines, le 17 janvier 2025, ce sera la commémoration des cinquante ans de la criminelle loi Veil, tandis que l’an qui s’achève a également été marqué par la poursuite et l’aggravation de l’abominable génocide à Gaza que le monde entier a laissé faire et même souvent nié ou relativisé dans un négationnisme qui, lui, est autorisé et promu. En 2025 pourrait être votée la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté débouchant sur le meurtre de masse des anciens et de tous ceux jugés inutiles ou encombrants —, comment, face à cette culture de mort, ne pas méditer sur l’Auteur de la Vie qui donne sa vie pour nous sauver, nous racheter, nous changer, nous ouvrir le Ciel qui était fermé, et qui nous donne même par l’Eucharistie l’Auteur de la grâce ?
Alors que la société actuelle promeut toutes les inversions, toutes les déviances, toutes les immoralités, tous les cynismes (ce 30 décembre 2024, cela fera vingt ans qu’a été voté définitivement par un Parlement très majoritairement de “droite” l’ahurissant délit d’homophobie qui interdit toute critique publique de l’homosexualité et également de la transsexualité sous peine d’un an de prison ferme et de 45 000 euros d’amende), comment ne pas contempler l’innocence, la pureté, la vertu, la délicatesse de conscience de la Sainte Famille et de ce Divin Enfant venu panser nos blessures et guérir nos souillures ? Comment ne pas penser à cet esprit d’enfance fait de pureté, de générosité, d’innocence, de franchise, de loyauté mais aussi d’intransigeance sur les principes ?
Alors que la société actuelle est profondément désincarnée, que l’anonymat et la froideur des réseaux sociaux se substituent hélas bien souvent à la chaleur d’un foyer aimant, que le virtuel et le factice l’emportent sur l’authentique, l’amour vrai, les humbles vertus domestiques, le dévouement pour autrui, que le monde présent réalise même une forme de contre-Incarnation diabolique qui promeut le vice, la laideur, le mensonge, l’inversion, qui va jusqu’à chasser la crèche de tous les lieux publics tellement il refuse et rejette la simple vue de cet Enfant, comment ne pas croire de toutes ses forces à la religion du Verbe incarné, du Dieu qui se fait homme, qui a vécu en tout, comme nous, à l’exception du péché, qui est le Chemin, la Vérité et la Vie, qui donne, sacrifie Sa vie sur la Croix et la transmet par Sa grâce, et dont le Cœur brûlant d’amour est un refuge, un repos, un asile, une oasis, la source et le canal de toutes les grâces pour les hommes de bonne volonté ?
Alors que les familles sont de plus en plus éclatées, atomisées, décomposées ou prétendument recomposées, comment ne pas admirer la Sainte Famille, saint Joseph, le grand silencieux berçant et caressant l’Enfant-Dieu, le conduisant en Egypte pour l’arracher déjà à ses persécuteurs, maniant comme humble charpentier la varlope et le rabot, la sainte Vierge méditant tous ses saints mystères dans son cœur et témoignant de tout son amour à cet enfant dont elle est la Mère ? Et parce que ce bébé qui vient de naître à Bethléem, qu’elle va langer et allaiter, et qui vivra jusqu’à ses trente ans dans la plus totale obscurité, dans l’humble chaumière de Nazareth, est une personne divine, ô mystère insondable, elle est aussi Mère de Dieu.
Enfin, alors que le monde actuel est livré à toutes les infatuations de l’orgueil, à l’étalement de tous les vanités, à la boursouflure des ego, un phénomène considérablement aggravé avec l’omniprésence des écrans, des smartphones et des réseaux sociaux, comment ne pas méditer sur l’infiniment grand qui se fait infiniment petit, sur le tout-puissant qui se fait si fragile, sur la merveille du Dieu éternel et immuable par essence commençant d’être ce qu’il n’était pas, la merveille du Dieu demeurant Dieu, sans rien perdre de sa majesté et de sa gloire, quoique se faisant homme et s’en appropriant les faiblesses et les misères, la merveille du culte suprême réservé jusqu’alors à Dieu seul, et rendu maintenant à un Homme-Dieu, non seulement par les hommes, mais par les anges mêmes qui adorent en lui la faiblesse toute-puissante, l’Eternel né dans le temps, l’infini restreint dans un petit espace, l’auteur du monde descendu au rang de ses ouvrages et devenu lui-même une si petite partie du monde ? Comment enfin ne pas contempler le Créateur dans sa créature, le Ciel dans la terre, la gloire souveraine dans l’ignominie, l’infinie richesse dans la pauvreté, l’immortalité dans la mort, et, mieux que tout cela encore, la vie divine dans l’humanité, les perfections du Ciel devenues visibles ici-bas, la plus profonde humilité dans la plus sublime élévation, l’abnégation de soi dans la divinité, le dévouement incomparable dans Celui à qui est dû tout dévouement ? Et comment alors, malgré la noirceur de ces temps mauvais, ne pas faire grandir en soi la joie, non pas celle factice, trompeuse et éphémère du monde, laquelle débouche toujours sur la tristesse, la dissipation et la désillusion, et je ne sais quelle amertume, mais cette joie chrétienne, pleine de confiance et d’abandon, simple et profonde, qui apaise et guérit, comble et irradie, vivifie et fortifie, calme et rassasie, et que rien ni personne ne pourra nous enlever.
Joyeuses et saintes fêtes de Noël à tous ! […]
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Source : Éditorial de Rivarol