Les jours que traverse le Liban ressemblent curieusement à celles qu’il a connus lors de l’assassinat de l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri.
Depuis la double explosion destructrice qui a eu lieu le 4 août dernier, dans le port de Beyrouth, il est le théâtre de tentatives sournoises de la part de certains acteurs libanais qui exploitent cette tragédie en vue d’internationaliser la crise au Liban. Ces tentatives proviennent de deux piliers du camp de 14 mars: le parti socialiste progressiste (PSP) du leader druze Walid Joumblatt et le parti des Forces libanaises de leader maronite Samir Geagea.
Depuis ce désastre qui a coûté la vie à 137 personnes et blessé plus de 5.000 civils libanais, ils mènent de concert avec leur clique et leurs médias une campagne infeste, destinée à renverser le président de la république Michel Aoun et le gouvernement actuel présidé par Hassane Diab.
Lors d’une conférence de presse, M. Joumblatt a réclamé une commission internationale pour révéler la vérité sur l’explosion du port au motif qu’il n’a pas confiance en les capacités du gouvernement libanais à dévoiler la vérité : « Le gouvernement actuel est un ennemi et il faut à tout prix un gouvernement impartial qui puisse sortir le Liban des axes et contrôler les passages frontaliers et les ports », a-t-il déclaré, indiquant « qu’il n’a nullement confiance dans cette bande gouvernante ». Et d’ajouter en criant au complot : « Est-ce une simple coïncidence ou un complot ?… les investigations le dévoileront. Sur le peu d’informations que je détiens, cette quantité énorme d’ammonium qui se trouve depuis 6 ans dans le port de Beyrouth n’est toxique ni explosive toute seule. Elle a besoin d’un déclencheur ». Remerciant la visite de M. Macron, le chef du PSP a conclu par une note tragique : « Le Liban est blessé, occupé, isolé et sous contrôle ».
Même son de cloche de la part du chef des FL : appel pour une commission internationale le plus vite possible, et pour une réunion extraordinaire et urgente pour interroger le gouvernement sur l’explosion.
Mais la vérité a été dite crûment par le principal animateur politique de leur télévision MTV, Marcel Ghanem, qui est entièrement sorti de ses gonds lors de son programme, depuis quelques jours, s’emportant contre le Premier ministre, lui imputant la responsabilité de l’incident et le sommant avec insolence à présenter sa démission. Sans aucun égard pour les règles journalistiques.
Ces deux partis, avec celui du Futur, sont sortis du gouvernement d’alliance nationale de leur plein gré, lors de l’éclatement du mouvement de protestation en octobre 2019, contre la détérioration de la situation économique au Liban. Une crise pourtant provoquée par les politiques menées par les gouvernements dans lesquels ils étaient les piliers.
De part et d’autre, ces tentatives semblent aussi vouloir faire passer, d’une manière sous-entendue, que le Hezbollah assume la responsabilité de l’explosion, en lien avec son armement. Certains de leurs médias répandaient qu’il détient des armes dans ce port, quoique personne ne les a pris au sérieux. D’aucun ont même propagé que des éléments du Hezbollah déguisés en agents de la santé se sont infiltrés dans le port, après sa destruction. Ce qui a été aussi démenti par la direction de l’armée libanaise.
Cette rhétorique accusatrice arbitraire n’est pas sans rappeler les allégations de l’ambassadeur d’Israël au Conseil de sécurité. En juillet 2019, Dany Danon avait affirmé que le port de Beyrouth est devenu le port du Hezbollah par lequel l’Iran lui fournit des armes. Allégations auxquelles le secrétaire général du Hezbollah avait alors répondu en personne, les niant en bloc et assurant qu’elles sont « le prélude pour imposer une nouvelle tutelle sur le port et les frontières libanaises ».
De nombreux observateurs s’accordent à penser que le contrôle de ces frontières, des ports libanais et de l’aéroport constituent les objectifs à réaliser des américains et leurs alliés. D’autant que par la la voie de leurs diplomates et délégués, ils ne cessent de le réclamer frénétiquement lors de leurs rencontres avec les responsables libanais. « Certains voudraient que le Liban y parvienne par lui-même », au contrôle de ces frontières, avait alors affirmé Sayed Hassan Nasrallah, mettant en garde « contre ceux qui ont un problème avec le Hezbollah de vouloir mettre le port en danger ».
Compte tenu de ces objectifs américains, et de la mise en garde du numéro un du Hezbollah, l’hypothèse selon laquelle l’incident du port n’a rien d’un incident fortuit est renforcée. Il en serait de même pour toutes les circonstances qui l’entourent depuis que la cargaison du nitrate d’ammonium s’est bloquée au Liban en 2014, en passant par la négligence des responsables concernés qui l’ont laissée entassée, sans précautions.
En 2004, l’assassinat du martyr Rafic Hariri avait été utilisé pour réaliser trois objectifs :
- le premier étant de faire sortir les Syriens du Liban, ils ont été les premiers accusés, avant d’être innocentés après leur retrait,
- le second consistait à déchoir de leur poste les plus hauts officiers des forces de sécurité libanaises – qui ont aussi été accusés puis disculpés,
- et le troisième visait à affaiblir le Hezbollah et le désarmer.
Il est depuis dans le collimateur. La mission de mener à bien cette mission était confiée au verdict final du Tribunal spécial pour le Liban, qui devait être annoncé le vendredi 7 août et a été reporté depuis.
Ce verdict étant certainement insuffisant pour la réaliser, peut-être avait il besoin de sang… De beaucoup de sang.
Source : Al-Manar