Depuis le début du mois – le mouvement a été lancé lors d’une « nuit de la détresse » – et singulièrement depuis la mi-juillet, les éleveurs français ont organisé d’importantes et parfois de violentes manifestations en France. Ils dénoncent les faibles prix auxquels ils vendent les animaux qu’ils élèvent ou les produits comme le lait, critiquant notamment les marges de la grande distribution et des intermédiaires. En position de faiblesse, abandonnés par les pouvoirs publics face à des géants économiques tout puissants, les prix d’achat aux producteurs ont en effet baissé, quand ils ne se sont en effet effondrés, quand les prix de revente ont continué à augmenter pour le consommateur.
Déjà fortement en colère, les paysans ont été excédés par le non-respect d’un accord signé le 17 juin dernier avec les abattoirs, les grossistes et la grande distribution. Il prévoyait l’augmentation des prix d’achat ; déjà insuffisant en lui-même, il n’a pas été suivi d’effet, en tout cas pas comme annoncé. Les éleveurs réclament d’autres mesures, comme la baisse des importations, des aides pour le désendettement – très important – des exploitations, dans le cadre d’une crise mondiale pour les produits laitiers.
La situation est telle que de nombreux élevages, entre 20 000 et 25 000, sont aujourd’hui menacés. Certains éleveurs travaillent à perte et ne sont même plus en mesure de se verser un salaire. Si dans certaines branches de l’agriculture – le maraîchage, la production céréalière – et dans certaines zones la situation des paysans est relativement bonne, elle est particulièrement mauvaise pour plusieurs professions, notamment les producteurs de laits et les éleveurs de porcs et de viande bovine.
Le gouvernement a refusé de répondre aux demandes des éleveurs durant des années ; le gouvernement Valls-Hollande particulièrement s’est montré ces derniers mois totalement insensible à la situation des paysans, lui qui a distribué des milliards dans les cités occupées ou annulé les dettes de divers pays africains.
Sur ordre de François Hollande, qui peut difficilement se permettre des manifestations durables, le gouvernement a fini tardivement par réagir. Le ministre de l’Agriculture a annoncé mercredi dernier 24 mesures, répondant partiellement aux demandes des éleveurs, et « coûtant » 600 millions d’euros.
Peu rassurés par ces annonces, les producteurs ont annoncé la poursuite d’un mouvement largement compris et soutenu par les Français à en croire les sondages d’opinion1. Si les grosses actions semblent devoir provisoirement cesser, les éleveurs ont annoncé des ouvertures de barrières de péage, des opérations escargot et des actions de vérification dans les camions et les supermarchés. Samedi, des actions plus virulentes – déversement de fumiers, incendie de bottes de paille et de pneus, etc. – étaient toujours constatées. Si le gouvernement venait encore à manquer à sa parole, comme les Français le pensent et comme il l’a déjà maintes fois fait, la prochaine éruption de colère paysanne pourrait être d’une grande violence.
1Selon une enquête BVA, 88 % des sondés approuvent la contestation des éleveurs et 81 % affirment être prêts à payer plus cher pour de la viande et du lait produit en France. Sans surprise, 78 % des personnes interrogées ne font pas confiance au gouvernement pour résoudre la situation.