Léonard de Vinci (1452-1519) est le plus célèbre des artistes de la Renaissance italienne. Chose pas si commune, il avait déjà été une vedette de son vivant, de 1482, et sa première présence à la cour des ducs de Milan, à sa mort à Ambroise en 1519, comme artiste invité à la cour (itinérante) du roi de France François Ier. Contrairement à une légende royaliste du XIXème siècle, représentée en un tableau très populaire, Léonard n’est pas mort pour autant dans les bras du roi. Mais François Ier l’a tenu en très haute estime, c’est indiscutable.
Léonard de Vinci a effectivement été un grand artiste –se voyant comme un peintre avant tout- et un ingénieur talentueux, aux idées visionnaires pour son époque. Le point commun entre les deux est un véritable génie du dessin. Léonard sait absolument tout dessiner, alliant grande précision, et, quand le sujet s’y prête, sensibilité, des portraits humains aux animaux, en passant par les études anatomiques et les projets de construction des plus divers, des forteresses aux canaux, et aussi ses fameuses machines. Ces dernières relèvent du rêve d’ingénieur, mais déjà quand même d’un ingénieur, pas d’un pur rêveur. Certes, elles n’auraient pas fonctionné en état pour la plupart. Il aurait manqué un moteur pour ses chars, ses avions, ses hélicoptères, ses sous-marins, et Léonard n’a inventé ni machine à vapeur ni moteur à explosion…Mais les ébauches bien reconnaissables, en avance de plusieurs siècles, ont été effectivement pensées et envisagées avec une relative précision. Il est vrai qu’il s’agit de la synthèse de spéculations dans l’air de son temps, plus que de pures inventions propres, mais l’ensemble reste impressionnant, et à voir dans l’exposition.
Ce talent unique pour le dessin n’a pas empêché Léonard de réfléchir énormément sur la peinture, en cherchant à appliquer ses spéculations. Ces dernières ont connu des variations constantes, et ses œuvres ont été travaillées, retouchées par Léonard, sur des années, voire des décennies, ce qui serait le cas de la Joconde (à voir dans sa salle d’exposition permanente). A l’origine simple portrait de commande de son épouse par un mari, jamais livré, il est devenu une œuvre-manifeste. Aussi Léonard a-t-il peint très peu de tableaux au final, constat fait dès son époque, et par son premier biographe Vasari. Ainsi les experts d’aujourd’hui ne reconnaissent à Léonard que 15 à 20 tableaux authentiques, ce qui est très peu, et l’enjeu pour les 5 discutés –et très crédibles quand même-, est absolument énorme. L’exposition présente 11 de ses tableaux, ce qui en fait un rassemblement absolument historique, que l’on ne peut voir qu’une fois dans une vie, et donc à ne pas manquer.
Parmi les tableaux à admirer particulièrement lors de l’exposition, signalons l’Annonciation (1475), œuvre s’inscrivant dans la meilleure tradition florentine –de Fra Angelico à Botticelli-, la Dame à l’Hermine (1490), femme extraordinairement belle, une maîtresse du duc de Milan Ludovic le More, et la Belle Ferronnière (nom traditionnel fautif), probablement aussi une dame de la cour du duc de Milan, elle également très belle, et qui regarde le spectateur alors que la précédente s’évade en rêveries. Ces deux portraits resplendissent de vie.
Enfin, Léonard a été bien employé par François Ier : il a inspiré les dessins du château de Chambord, et, conçu éphémère cité-utopique oubliée, les plans de la nouvelle capitale française à Romorantin. Il a partagé une vision commune avec un jeune roi désireux de construire une ville idéale au centre de son royaume, rayonnant sur toute la France par des routes et des canaux nouveaux. Ce dernier projet a été annulé par la mort de Léonard, et les besoins de financement des guerres continuelles à partir de 1520. Il est à redécouvrir à l’occasion de l’exposition.
L’exposition de Léonard est à absolument ne pas manquer. Déplorons seulement le caractère compliqué de la réservation obligatoire, et des foules trop denses malgré tout de visiteurs.
Scipion de SALM
ExpositionLéonard de Vinci
du 24 Octobre 2019 au 24 Février 2020
Musée du Louvre. Paris.