Dans la nuit du solstice de juin, en 1940, à trois heures du matin, dans les Vosges, je me souviens que je venais de prendre le quart pour cette veille un peu dérisoire que nous avions établie au cœur des bois qui dominent Biffontaine. Les avant-gardes allemandes avaient déjà pénétré dans le village, et nous étions entièrement cernés. On entendait sur la route passer des chars et des camions. Le canon tonnait à intervalles irréguliers sur les cols et sur les hauteurs. Nous attendions. Dans la belle nuit tiède et claire, sur la pente du sentier, nous pouvions réfléchir aux malheurs abattus sur la patrie. Où étaient ceux à qui nous tenions ? J’étais sans nouvelle des miens depuis 15 jours, mes amis été dispersés, les uns emprisonnés sous le coup d’accusations ignobles, les autres sur les routes, aux frontières rompues, sur mer. La France était à genoux, et on n’osait pas encore tout à fait croire que l’armistice était vraiment demandée. Le dernier communiqué officiel parlait de l’armée de l’Est formée sous les ordres du général de Condé, un des rares chefs qui eut le courage d’être opposé à la guerre de 1939, et refusa ensuite d’abandonner ses troupes. C’était la limite du solstice de juin…
Deux ans après, jour pour jour, dans la nuit du solstice de juin 1942 à trois heures du matin, dans la campagne d’Île-de-France, je pouvais songer à tout cela. Un feu de camp brûlait au pied du mât ou de jeunes équipiers, ouvriers et étudiants, avaient hissé le drapeau français. Ils m’avaient invité à passer ces deux jours avec eux. Toute la nuit, nous avons monté la garde, en nous relevant auprès de ce feu et de ce drapeau, en anniversaire des journées où le Maréchal a pris le pouvoir et sauver la patrie. La nuit, cette nuit elle aussi, était tiède, et claire et belle. Et je songeais à ces deux ans, aux combats de juin 1940, aux camarades tombés, à la nation épuisée, et à ceux des nôtres qui venaient de commencer leur troisième année de captivité. Pourtant, la vie courait encore dans nos veines et dans les leurs, la jeunesse, lentement, péniblement, apprenait des chemins nouveaux ; pourtant, dans l’enceinte de ce camp, on avait pu faire le salut aux couleurs et veiller toute une nuit sur le symbole de notre race. Pourtant, nous étions là, la jeunesse était là, et c’était parce qu’un jour de juin 1940 le Maréchal avait fait le geste décisif du salut, épargné la mort à des milliers d’hommes et la destruction totale à la patrie. Dans les étincelles des branches de sapins qui montaient du feu sacré, les images de l’ancienne veillée devaient d’abord laisser place à une immense reconnaissance.
Nous écrivions l’an passé, pour rappeler le même anniversaire :
« Si nous devons remercier le destin d’avoir donné à ce moment-là Philippe Pétain à la France, ce n’est pas seulement pour avoir sauvé de la mort des hommes et femmes de chez nous, c’est pour avoir montré par une divination singulière qu’au plus profond même du malheur, une voie été ouverte, pour avoir fait de cet armistice non seulement le dernier d’une suite des événements passés, mais le premier acte de grande politique ouvert sur l’avenir. Pour avoir signifié par là que nous abandonnions le mauvais allié qui nous avait entraîné puis trahi, que nous regardions la réalité en face et que nous désirions sauvegarder nos forces pour jouer notre rôle dans le monde nouveau qui, bon gré mal gré, était le monde d’aujourd’hui et de demain. »
Au milieu des fumées du feu de camp, telle était, cette nuit de solstice, la pensée qui pouvait renaître dans notre esprit.
Nous pensions toujours à nos morts, sous la nuit fraternelle et calme. Nous pensions aux paroles de l’adversaire, qu’on ne récusera point. « Je tiens à rendre hommage, disait le général Keitel, à la bravoure du soldat français et à honorer la mémoire de tous ceux qui versèrent, de part et d’autre, leur sang pour la patrie. » Et le préambule aux conditions d’armistice disait encore au nom du chancelier Hitler :
« La France a été vaincue et s’est effondrée après une résistance héroïque, à la suite de nombreuses batailles sanglantes. L’Allemagne n’a pas l’intention de donner aux conditions d’armistice et aux pourparlers d’armistice un caractère d’ignominie à l’égard d’un adversaire aussi brave. »
Et nous pensions à celui qui, dans les jours sombres où dut cessez le feu, déclara à son peuple :
« Le combat reste le même. Il s’agit de la France, de son sol, de ses fils »
Le combat reste le même… Le magnifique discours de Pierre Laval, cet appel à la vérité, au bon sens, nous l’a rappelé lundi dernier avec un sens profond du pathétique français, il a su expliquer comment de nos malheurs pouvait naître une espérance, et donner un sens précis en tout cas à ce grand songe de « la relève » dont nous parlions sans trop y croire, dans nos camps de prisonniers. Ce que le gouvernement et le peuple, unis, peuvent faire, est d’un prix incalculable, puisque tout à la fois la France pourra retrouver ses combattants captifs et elle pourra prendre sa place dans l’avenir. Depuis plusieurs semaines, nous savions que les négociateurs français donnaient tout leur travail à cette question capitale. Les paroles de Pierre Laval ont apporté la confirmation que telle était la seule voie.
On nous parle de temps à autre de la réserve qui s’impose à nous, de l’attente où nous devrions nous maintenir. Dans l’admirable livre que Georges Blond a consacré à « l’épopée silencieuse » de la Marine française pendant cette triste guerre, je trouve cette phrase qui me paraît aussi juste que dure : « De ceux qui parle de l’amertume de la défaite de la douleur de la défaite, beaucoup devraient se taire : tout ce qui n’a fait que fuir à la plus grande vitesse possible et que l’armistice en sommes a sauvé, tout cela, en vérité, devrait se taire. » Ceux qui n’ont pas fui (parfois, ils auraient pu, bien raisonnablement sinon honorablement), ceux qui ont compris sur quelques crêtes, à l’ombre des pins, sur quelques navires réquisitionnés, sur quelques routes perdues, creusées par des bombes, ceux qui ont compris que soudain tout était fini, ceux-là savent ce que fut l’amertume de la défaite mais ils savent aussi ce qu’elle a sauvé et ils savent qu’en elle-même, on peut trouver de quoi construire un avenir plus juste.
Qu’on me permette de laisser superposer en moi ces deux veillées des solstices de juin, où chaque fois, et de façon différente, montaient, sous les arbres et le ciel éclatant, les nuages de la patrie. J’aime cette heure solitaire du milieu de la nuit en été, lorsqu’on est seul auprès des ombres endormies, et lorsqu’on peut laisser parler autour de soi des fantômes fraternels, et le regret, et le souvenir, et l’espérance. Cette espérance, elle était bien vague et bien transparente dans la nuit de l’autre solstice : quoi que l’on dise, et malgré les menaces que nous n’ignorons pas et l’incertitude que fait peser sur nous notre propre timidité, elle est plus grande aujourd’hui. Pierre Laval a parlé des heures sombres qu’il avait connues, il a mis l’accent sur le problème essentiel, celui devant lequel s’effacent tous les autres (et même ce problème intérieur du fascisme français que nous n’abandonnerons jamais) : « nous aurons un jour à négocier la paix. » Mais en dressant devant notre peuple la réalité tout entière, il a clairement dit en même temps que l’espérance était entre ses mains, s’il le voulait vraiment.
Si demain, la jeunesse de France, si inquiète, si divisée, comprend – si on lui fait comprendre – quelles tâches impériales s’offrent encore à elle, alors elle perdra cette mentalité de vaincus dont parlait Pierre Laval, qui ne voit d’autre solution qu’une « revanche » criminelle ou qu’une indifférence soumise. Nous ne voulons, nous, ni des massacres périodiques, ni de l’accablement. Nous voulons la force dans la joie, nous voulons l’exaltation des foules jeunes et des travaux, ce dont tant de pays étrangers nous ont offert l’image, le fascisme étoilé et rayonnant, avec ses chansons et son labeur, ses drapeaux dans le vent du matin. À nos camarades des solstices de juin, à ceux qui nous entouraient dans l’amertume de la défaite ou dans la fragile espérance de la résurrection, c’est cela que nous voulons redire. Quand les flammes montantes du feu de camp coloraient soudain le pavillon hissé au sommet du mât dans la nuit, elles nous donnaient les conseils de l’intelligence et de la foi, et les conseils de la volonté, et ceux aussi de la communauté dans l’action. Car le veilleur solitaire n’est jamais seul, et il se sait entouré par ceux qui, demain, seront éveillés et debout.
Robert Brasillach, 1942
Les feux de joie du solstice d’été , le 24 Juin , c’est l’ancien culte Solaire Germanique / Celtique ( la fète de la Saint Jean pour les Chrétiens ) cest le symbole de l « Eternel Retour de la conscience ( ou l’àme ) immortelle dans la matiere pour parfaire son évolution et celle de l’Humanité .
A part ça , le soleil est en retard sur le programme pour le moment chez moi .Il fait 13° ,heureusement que ça se réchauffe .
Oui Brasillach est bien. Mais nous sommes prisonniers. À quand notre libération ? Peut-être viendra-t-elle de Gaza ?
Baudouin
A la lecture d’un tel texte, l’on se demande comment cet homme au courage tranquille, animé par la foi et l’espérance, a pu être fusillé. L’image du martyr sacrifié pour la croyance en un monde meilleur. Incompréhensible pour ceux d’en face. Ceux pour qui le mot Solstice est un anathème, tant ils sont déconnectés de l’essence même de la Vie.
Nous te saluons Robert Brasillach
Un livre qui explique tout sur le sujet :
https://europa-diffusion.com/fr/accueil/9244-symbolisme-du-solstice-d-hiver.html
Nul doute que je vais en scandaliser plus d’un, mais je n’adhère pas à l’esprit dont résonne ce texte de Brasillach, quelque peu confus mais dont l’idée maîtresse et la conclusion éclatent enfin dans le dernier paragraphe avec cette phrase, en complet décalage avec les urgences de son temps : « Nous voulons la force dans la joie, nous voulons l’exaltation des foules jeunes et des travaux, ce dont tant de pays étrangers nous ont offert l’image, le fascisme étoilé et rayonnant, avec ses chansons et son labeur, ses drapeaux dans le vent du matin ».
A-t-on vu un Roger Degueldre, un Bastien Thiry, un Antoine Argoud tenir des propos dans ce style au milieu de la tourmente qu’ils connurent à leur tour en 1961-62, et imagine-t-on que cela aurait pu leur venir à l’idée ?
Dans son article publié à peu près au même moment que celui-ci, « vers des temps chaotiques », André Gandillon parie sur l’avenir en suggérant de nous emparer des médias et de former ceux d’entre nous dont on peut encore éveiller l’esprit. Il commet la même erreur que Brasillach, passé à côté d’un combat commencé avant et déjà gagné par d’autres, mais s’imaginant que des mesurettes pourraient, un jour, rattraper une situation qui ne pourra plus l’être.
Que faut-il donc faire, me rétorquera-t-on ? Eh bien plus rien, puisque maintenant, c’est clair, il est trop tard, autant pour les urnes, que pour l’édification des jeunes ou encore pour le Petit-Clamart !
Chacun n’a plus qu’à crever dans son coin, en espérant mourir debout, quand les bougnoules ou les rouges viendront le chercher dans son fauteuil.
Peut-être Brasillach se faisait-il des illusions sur les idées des Français de son temps, brisés par la Grande Guerre ? C’est possible.
Ce qui est sûr, en marge, c’est que AH a commis l’erreur de ne pas exiger un traité de paix, qui eût sorti la France de la guerre en lui laissant son Empire, en assurant à son chef un prestige encore plus grand, et en diminuant le front à l’ouest. Franco, militaire très classique, a vu la faute : « Il est fou ! » Mais AH se méfiait des Français…
Français si minoritairement engagés par la suite dans deux camps rivaux.
Quand au solstice d’été, il y a aussi celui de Montherlant, beau texte.
A l’époque où la « Nouvelle Droite » se faisait des illusions, quelqu’un avait proposé d’organiser un feu de la Saint-Jean / Solstice inauguré par le président de la République sur la hauteur de Montmartre à Paris (Mont Mercure devenu Mont des Martyrs). Chirac trouve ça formidable, approuve… Le temps que Jack Lang ouvre le pare-feu : noyer cette velléité culturelle sous la « fête de la musique », fixée, date mobile, au 21 juin. Recouvrir pour empêcher le retour du rythme naturel de la culture. Après quoi les « militants identitaire », comme on ne les désignait pas encore, retournèrent à leur(s) ghetto(s).
N. B. : Notons que les solstices ont pris de l’importance avec la Néolithisation agricole. Auparavant le début de l’année était le 21 mars (à Rome, et encore chez les iranophones de toutes ethnies, Nau Roz).
Je ne vois pas non plus les chefs militaires des années 1960 trop fêter les solstices, ou la Saint-Jean (M…).
Les coutumes vécues, l’identité, cela ne se décrète pas, c’est transmis. Maintenant, j’ai lu ceci : « l’innovation d’aujourd’hui, c’est la tradition de demain.
Pour ne pas finir sur une note trop désolante…
Bonjour Henriot, je vois que vous n’êtes pas loin de partager mon propre pessimisme.
C’est un fait que nous ne parvenions déjà plus, du temps de Brasillach, à « parler » à nos compatriotes et contemporains – et aujourd’hui moins que jamais, comme l’illustre une nouvelle fois, et sans surprise, l’actuelle « campagne » pour ces législatives anticipées, dominée par le torrent de haine, de propagande et de désinformation déversé par les gauchos-mondialistes de toutes chapelles.
Pour résumer les choses en une formule, la Droite (la vraie) est devenue invisible et son message inaudible.
Il y a deux raisons essentielles à cela : on nous a mis sur le dos le national-socialisme allemand, et l’opération a été d’autant plus aisée que les français, d’abord les reins cassés par la Grande Guerre, se sont vautrés ensuite dans la décadence.
Le solstice d’été est un symbole qui ne parle plus, et à part nous personne ne lit plus Brasillach, ni même n’aurait l’idée de le lire.
Il va falloir adapter notre communication. C’est en pure perte que nous tenterions, aujourd’hui, une réhabilitation de nos aînés ou de leur message dans leurs termes.
Bonsoir GL.
Le « style fasciste » était-il adapté à la France de années 20 et 30 ?
Je n’y étais pas, mais je ne le crois pas : une bonne partie du peuple (des « classes populaires »), et notamment des ouvriers, avait le sentiment, assez fondé, d’avoir été les victimes d’un jeu cruel au bénéfices d’autrui. Ils devinrent malthusiens et pacifistes en pensant qu’il ne servait à rien d’avoir des enfants pour en faire de la chair à canon. Malgré les avertissements des années 1880-1910ss, emportée par une propagande ronflante (« La mort n’est rien, vive la tombe » se lit sur la tombe de Syveton, l’une des victimes de l’Affaire), La « Droite » était toujours militariste, malgré l’affaire du Chemin des Dames et autres crimes. Klotz claironnait : « L’Allemagne paiera », on n’attendait plus rien, cependant qu’un faux espoir se levait à l’Est, dans la future « patrie des travailleurs ». L’Allemagne, elle, avait à se relever et à cet égard était un peuple jeune. Mais la nation française n’avait pas besoin d’un Etat nouveau, elle s’était habituée à sa République, malgré des contestations de plus en plus marginales, et n’était plus capable de former une « communauté du peuple ». Le style para-militaire, le culte du « chef », c’est très 1930, mais c’était déjà marginal. Voyez le parti qu’en a tiré Jean Renoir dans son film de propagande « La vie est à nous ». Nous devons néanmoins encourager ceux qui cherchent et trouvent des vérités sur la WWII, mais cela n’ébranlera pas le monde : ce n’est pas un argument politique de masse, même si l’image fantasmée par les « Antifascistes » est effectivement un arsenal politique massivement assenée depuis des décennies (antinomie apparente). Il y a des pentes qui ne se remontent pas. Une certaine Droite française donne l’impression d’avoir deux, ou quatre, guerres de retard. Quelqu’un a rappelé – je ne sais plus sur quel site -, l’avertissement d’Ernest Renan à Déroulède : « Jeune homme, la France se meurt, ne troublez pas son agonie… », et c’était vers 1880. Peine perdue. Mais est-ce seulement une question d’attardement des modes ?
Donc posons-nous la question : qu’est-ce qui peut encore réunir des Français en l’état actuel des choses ? Marx était un théoricien, Lénine a osé la question brutale « Que faire ? »
Unde : Qu’est-ce qui vaut d’être sauvé ? Des frontières ? Les taches roses sur les vieux planisphères ? La francophonie, cette patrie de substitution des Souverainistes ? Les institutions, quel qu’en soit le contenu humain ? Les églises désertées par un peuple qui n’est plus ? La notion de Droite même ne me dit rien de bon. Je ne peux la faire mienne.
Mais cela n’empêche pas de réfléchir aux notions de fond : appartenances, territoire(s), groupe, critères d’appartenance, tradition et héritage, écosystème, oecologie, éthologie, religiones (pl.), quand « la » civilisation désormais mondiale (malgré la farce théorique de la « multipolarité ») paraît se heurter à ses contradictions, à son néant.