Le mouvement Jeune Nation est fondé en 1949 par Albert Heuclin, mandataire aux Halles, Jean Marot, Jacques Wagner et les frères Sidos.
Les frères Sidos sont les fils de François Sidos, Croix de guerre 1914-1918, Légion d’honneur à titre militaire et inscrit au Livre d’Or des soldats de Verdun (sous le numéro 16066), ancien des Jeunesses patriotes et du Parti franciste, chargé de mission au cabinet du chef du gouvernement, délégué du Chef de l’État dans les Territoires occupés et inspecteur général adjoint des Forces du maintien de l’ordre de l’État français, fusillé après jugement expéditif en mars 1946 à La Rochelle.
Les frères sont trois à la fondation du mouvement : Jacques Sidos (condamné en 1946 pour « faits de collaboration ») ; Pierre Sidos (condamné en 1946 pour « appartenance au mouvement de jeunesse du Parti franciste »), secrétaire général et bientôt chef de Jeune Nation ; François Sidos, ancien combattant volontaire des Forces navales françaises libres pendant la Seconde Guerre mondiale, titulaire de la Croix de guerre 1939-1945 avec étoile de vermeil, ayant participé aux débarquements d’Italie et de Provence.
Le , le mouvement est présenté pour la première fois au siège du Souvenir napoléonien, rue du Cirque, et le il était officiellement déclaré à la Préfecture de police de Paris.
Le mouvement arbore la croix celtique, « symbole de la vie universelle ». Pierre Sidos en revendique la paternité :
« Nos ancêtres donnèrent du soleil, symbole de la vie, une représentation schématique reproduite sur les casques, les monnaies, les enseignes sous diverses formes, l’image de la course solaire est donc notre emblème national le plus ancien. L’adaptation moderne de cet emblème porte le nom de croix celtique » (Pierre Sidos, Jeune Nation, n° 19, juillet-août 1958).

Le mouvement Jeune nation se caractérisera par un anti-communisme virulent (mise à sac du Parti communiste, alors place Kossuth à Paris, à la suite de l’entrée des chars soviétiques dans Budapest en 1956) ; tout en refusant le « parapluie » américain. À ce titre, il conduira une importante manifestation en 1957 devant l’ambassade des États-Unis à Paris, en raison de livrai sons d’armes américaines aux ennemis de l’armée française, c’est-à-dire au FLN, par l’intermédiaire de la Tunisie. Jeune nation sera également à la pointe du combat pour le maintien de la présence française en Outre-Mer et, avant tout, pour un changement de régime politique en France.
Jeune Nation est dissous le 15 mai 1958 par un décret du gouvernement Pflimlin, à la suite de la journée du 13 mai (Putsch d’Alger dont le but est d’empêcher la constitution du gouvernement Pierre Pflimlin et d’imposer un changement de politique allant dans le sens du maintien de l’Algérie française au sein de la République) qui conduit au retour au pouvoir en France du général de Gaulle, dans un contexte insurrectionnel lié à l’instabilité gouvernementale et à la guerre d’Algérie.
Cependant Jeune Nation refuse cette forfaiture et le 5 juillet 1958 parait le premier numéro du journal Jeune Nation, présenté comme un bimensuel d’information et qui se veut l’organe du mouvement dissous. Le journal Jeune Nation rencontre le succès avec des articles signés Henry Coston, Maurice Bardèche, et Jacques Ploncard d’Assac. Le « NON » au référendum de Charles De Gaulle sur la constitution de la Ve République y est ardemment préconisé.
En décembre 1958, Jeune Nation publie ainsi son programme en 12 points : « Ce que veulent les nationalistes français » articulé en trois phases :
Phase 1 : renverser la République, abolir le parlementarisme, installer par la force un régime corporatiste et plébiscitaire, supprimer les élections, éliminer les partis politiques, évincer les « métèques » (Juifs, gens de couleur) qui « mettent en danger l’ethnie française »… « Notre pays a besoin d’une purification. Les nationalistes doivent prendre le pouvoir et instaurer une période transitoire et révolutionnaire avant l’édification de l’Etat nationaliste ».
Phase 2 : application de 5 mesures : maintien des colonies, reconquête du Maroc et de la Tunisie en réinstallant « l’œuvre civilisatrice de la France », protection du patrimoine national, refonte de l’armée dans ses missions de guerre et d’éducation de la jeunesse, loger les Français en récupérant les logements parisiens des parlementaires provinciaux, les locaux des partis politiques, expulser des logements tous les « métèques » et les organisations internationales. S’inspirant de la Charte du Travail de Vichy et du fascisme italien, Jeune Nation défend, dans le monde du travail, l’instauration du corporatisme. Le nouvel État nationaliste doit « éliminer le capitalisme apatride ».
Phase 3 : Instaurer l’État nationaliste, autoritaire, hiérarchisé, dirigé par une élite « d’hommes sélectionnés et formés politiquement ». Quant à l’Europe, elle doit être composée du « jeune berlinois en révolte contre le communisme, du Teddy Boy qui n’admet pas de voir un nègre avec une femme blanche, du phalangiste espagnol, du néofasciste italien, du nationaliste français et du parachutiste qui se bat en Algérie […] Notre nation se trouve le dos au mur et doit se défendre à la fois contre le matérialisme américain, contre le nationalisme soviétique et contre la montée des hommes de couleur ».
Le mouvement, lui, se reforme sous le nom de Parti nationaliste en 1959. En pratique, les militants du mouvement Jeune Nation deviennent automatiquement membres du nouveau parti dont les emblèmes sont le drapeau tricolore « de nos certitudes nationales » et la croix celtique « de nos espérances sociales ».
Le 6 février, un meeting organisé par ce nouveau parti compte plusieurs milliers de participants. Dans son discours, Pierre Sidos y réclame « la séparation de la synagogue et de l’État ». C’en est trop pour le pouvoir : à la demande de Jacques Soustelle, ministre de l’Information et de Michel Debré, Premier ministre, le président de la République Charles De Gaulle interdit le Parti nationaliste le 12 février 1959. Le journal Jeune Nation n’est pas touché par la mesure de dissolution.

Mais d’autres temps débutent qui appellent des combats sous d’autres formes : c’est le temps de la lutte pour l’Algérie Française et contre le régime gaulliste, liquidateur de la France impériale. L’Algérie Française étant le thème central de son combat politique, Jeune Nation va se fondre dans l’OAS métropole.
Succèdent alors pour Pierre Sidos deux ans et demi de clandestinité (du 24 janvier 1960, jour des barricades d’Alger, au 5 juillet 1962) où il combat pour que l’Algérie reste française. Il y soutiendra le soulèvement militaire d’Alger (21 avril 1961) et les actions menées par Jean-Marie Bastien-Thiry. Le 5 juillet 1962, il est arrêté par la police et transféré à la prison de la Santé le 14 juillet 1962. Après cinq procès dont deux pour « atteinte à la sûreté de l’État », il sortira de prison le 18 juin 1963.
Ainsi, premier mouvement nationaliste créé après-guerre, Jeune Nation fut le creuset d’une nouvelle génération de militants, un lieu où l’on fait ses premières armes afin de se former pour les combats futurs.
La lutte continue !
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