VERRA-T-ON à la fin du mois Jordan Bardella, Louis Aliot et Marion Maréchal rallumer la flamme de Yad Vashem ? C’est fort probable puisque ces trois personnalités vont participer, c’est officiel depuis le 12 de ce mois, les 26 et 27 mars, à la Conférence internationale de la lutte contre l’antisémitisme, à Jérusalem. C’est la première fois qu’un dirigeant du Rassemblement national, ex-Front national, en l’occurrence son président, son numéro un, est invité officiellement par le gouvernement israélien. Marion Maréchal a également confirmé sa présence à cette conférence auprès de l’AFP. Ainsi que le maire de Perpignan et premier vice-président du RN Louis Aliot, lui-même d’origine juive. En tant que président du Rassemblement National et président du groupe « Les Patriotes pour l’Europe » au Parlement européen, Jordan Bardella sera amené dans cette conférence à faire une intervention sur la montée de l’antisémitisme en France, depuis le 7 octobre 2023. Cela promet ! Le juvénile président du RN avait rencontré le ministre de la diaspora israélienne, Amichai Chikli, au CPAC (Conférence d’action politique conservatrice) à Washington en février dernier. Selon l’entourage du président du RN, l’invitation en Israël découle de cette rencontre.
Dans sa lettre d’invitation, le gouvernement de Benjamin Netanyahu précise que « cette conférence majeure réunira des dirigeants politiques, des organisations internationales, des envoyés spéciaux et des personnalités éminentes du monde entier pour discuter et répondre à la menace mondiale de l’antisémitisme moderne ». L’administration Netanyahu prévoit également des « visites spéciales » (sic) pour les deux eurodéputés et Aliot, « aux frontières sud et nord d’Israël afin de mieux comprendre le paysage géopolitique ». On voit mal comment Bardella, Maréchal et Aliot pourraient ne pas passer aussi par la case du Mémorial de la Shoah à Jérusalem (Yad Vashem), passage obligé pour tous les visiteurs officiels de l’entité sioniste qui se munissent d’une kipa et prennent, comme il sied là-bas, un air contrit et confit en dévotion holocaustique. Les dépêches d’agence qui évoquent cette participation de ces trois politiciens à cette conférence dite contre l’antisémitisme à Jérusalem insistent sur le fait que c’est la première fois que des figures de premier plan de « l’extrême droite française » sont invités à ce type de manifestations officielles.
EN EFFET, cette invitation est tout sauf anodine. C’est un point de bascule. Un point d’aboutissement. Et, disons-le, un point de non-retour. L’allégeance du Rassemblement national, de toutes ses composantes, de tous ses alliés au lobby juif et à l’entité sioniste est désormais absolue, inconditionnelle, totale, superlative. Le voyage officiel à Jérusalem est une étape obligatoire dans le processus de normalisation et de banalisation des mouvements populistes dits de droite. Aucune des grandes et moyennes formations politiques dites d’extrême droite par les grands media d’Europe n’y a échappé ces dernières années, ni l’Alliance nationale de Gianfranco Fini, qui fut sur ce plan un précurseur (ce qui ne l’a guère servi puisqu’il a totalement disparu depuis, ainsi que son parti, de la scène politique italienne), ni le Vlaams belang flamand, ni le FPÖ autrichien. Et tous les mouvements populistes d’Europe d’une certaine importance sont tous fanatiquement pro-israéliens de l’AfD allemande à la Ligue de Salvini en passant par le mouvement de Georgia Meloni, Frères d’Italie, jusqu’au parti de Viktor Orban en Hongrie, le Fidesz. Et c’est également le cas en France, on le sait, du Rassemblement national de Jordan Bardella et de Marine Le Pen, de Reconquête d’Eric Zemmour et d’Identité-Libertés (IDL), le nouveau parti-croupion de Marion Maréchal, allié au RN.
Cette participation à cette conférence contre l’antisémitisme est particulièrement indécente au moment même où l’entité sioniste a perpétré un véritable génocide à Gaza, faisant des centaines de milliers de morts et de blessés parmi une population civile innocente, utilisant cyniquement et délibérément l’arme de la famine pour venir à bout d’un peuple martyrisé, bombardé plus de cent mille fois — oui, cent mille fois ! — depuis le 7 octobre 2023, dont les droits les plus élémentaires et les plus fondamentaux sont chaque jour foulés au pied, dont les hôpitaux, les écoles, les cimetières, les maisons, les immeubles, les champs et les vergers, les dispensaires, les orphelinats, les lieux de culte, les tentes et camps de réfugiés, les routes et toutes les infrastructures sont systématiquement détruits, bombardés, saccagés, anéantis. Et la Cisjordanie n’est guère mieux lotie avec les expulsions et expatriations massives, systémiques, les meurtres de sang-froid commis par des colons israéliens qui tuent en toute impunité du Palestinien comme d’autres jouent aux fléchettes ou aux jeux vidéo, les incursions régulières et d’une sauvagerie inouïe de l’armée israélienne, sans parler des humiliations quotidiennes, des emprisonnements massifs, des tortures, des fouilles, des coups, des intimidations. Et voilà que, au moment où nous écrivons ces lignes, sévit depuis une quinzaine de jours un nouveau, un énième blocus total, décidé et imposé par le gouvernement Netanyahu, de sorte que ne peuvent plus entrer actuellement dans la bande de Gaza ni vivres, ni médicaments, ni aucune autre denrée, fussent-elles de première nécessité. Et que dire du machiavélique plan Trump, approuvé par Netanyahu, visant à déporter définitivement les plus de deux millions de Gazaouis pour offrir ce territoire à l’entité sioniste et en faire une Riviera avec des immeubles, des hôtels et des villas de luxe pour milliardaires qui pourront se détendre, folâtrer, déguster de délicieux cocktails et se faire bronzer sur les plages de sable fin au-dessus des ossements et des cendres de tout un peuple génocidé, à commencer par les femmes et les enfants, premières victimes de cette boucherie casher !
EH BIEN, Bardella, Maréchal et Aliot n’auront pas un mot pour le martyre du peuple palestinien, ils seront tout fiel pour le Hamas et la résistance armée palestinienne et pour tous les Palestiniens qui refusent d’être esclaves, d’être dépossédés de leur terre et de leurs droits et qu’on tue leurs enfants impunément, mais ils seront tout miel pour le génocidaire Netanyahu, véritable boucher, pour la criminelle entité sioniste et répèteront les éléments de langage du Lobby selon lesquels l’antisionisme, c’est-à-dire en réalité la condamnation morale et politique du comportement génocidaire du gouvernement israélien, est la forme moderne de l’antisémitisme. Car l’on fait aujourd’hui à l’antisionisme, c’est-à-dire aux avocats et soutiens de la cause palestinienne, ou tout simplement à toutes les personnes ayant du cœur et étant donc légitimement révoltées par le carnage qui a lieu en Palestine occupée, le même procès que l’on instruit depuis des décennies contre le révisionnisme historique frauduleusement assimilé à l’antisémitisme.
Car tout ce qui gêne ou contrarie le puissant et influent Lobby est considéré comme antisémite avec toute la relégation sociologique, toute la disqualification sociale, morale, politique, judiciaire, pénale voire parfois la violence physique qu’implique aujourd’hui ce sobriquet. On en est aujourd’hui à considérer que LFI, pourtant très à gauche et certes détestable à bien des égards dans moult de ses propositions et analyses, est antisémite parce que le parti de Mélenchon a édité une affiche contre Hanouna considéré par la France insoumise comme un des représentants de l’extrême droite actuelle. Ce simple fait (une affiche avec le visage d’Hanouna où il n’est nullement question de sa judéité, ni même de son soutien à l’entité) a suffi pour que le Lobby instruisît de plus belle un procès en antisémitisme contre LFI à laquelle il est en réalité reproché de n’être pas impeccablement alignée sur l’entité sioniste comme le reste de la classe politique désireuse de rester dans les petits papiers du CRIF.
LA PARTICIPATION active à cette conférence de Bardella, Maréchal et Aliot, avec l’approbation explicite et l’entière complicité de Marine Le Pen, est donc une honte, ce voyage officiel à Jérusalem une infamie. Car l’un et l’autre cautionnent une ignominie, un mensonge, une injustice, un crime, un génocide. Comment croire que ces personnalités pourront délivrer la France des maux qui la frappent et des périls existentiels qui la menacent, ce qui exige beaucoup de courage et de force d’âme, quand elles se vautrent à ce point dans la judéoservilité, quand elles font preuve d’une telle écœurante lâcheté, quand elles pactisent ainsi avec le diable ? Marion Maréchal avait osé dire, à la mort de son grand-père, en janvier dernier, qu’il n’avait pas à s’inquiéter, qu’elle poursuivait son combat, qu’elle serait fidèle jusqu’au bout à la mission qu’il lui avait confiée. Mais tout cela, ce ne sont que des mots. Une posture. Et, disons-le, une imposture. Car jamais Jean-Marie Le Pen n’est allé à Yad Vashem. Jamais il n’a rampé devant le Lobby ni n’a aliéné sa liberté de pensée, de parole et d’action pour lui complaire, même s’il fut (hélas) pendant longtemps pro-israélien avant toutefois d’évoluer fortement à la fin de sa vie, dénonçant à plusieurs reprises dans son journal de bord hebdomadaire le traitement inhumain des Palestiniens et une bande de Gaza assimilée à « un camp de concentration à ciel ouvert ». Mais il est vrai que Marion Maréchal, comme sa tante, avait publiquement condamné le mot “fournée” utilisé par le Menhir en 2014 à propos de Patrick Bruel et des artistes hostiles au Front national, puis le mot “détail” repris en 2015 chez Jean-Jacques Bourdin. Elle ne s’était nullement opposé, bien au contraire, à l’exclusion du Front national de son aïeul, ni à la suppression de sa présidence d’honneur, ni à l’interdiction qui lui avait été faite de venir au bureau politique du FN. En 2018, elle avait même très officiellement fait retirer le nom Le Pen de son patronyme, ne gardant que celui de Maréchal. Difficile d’aller plus loin dans l’ignominie. Et dire que c’est cette personne d’un tel courage et d’une telle moralité que des gens dans nos milieux applaudissent et prennent pour une nouvelle Pucelle ! On a vraiment les représentants qu’on mérite !
Qu’il est loin décidément le temps où les dirigeants de la droite nationale et nationaliste se battaient avec bravoure et ténacité pour des convictions et refusaient, quoi qu’il leur en coûtât, de passer sous les fourches caudines des coteries ! C’est à cela aussi que l’on mesure à quel point nous avons changé d’époque et de monde. Désormais nous n’avons pour nous représenter que des traîtres et des larves, des zéros et des anti-héros, des lavettes et des lopettes, des renégats à la kippa. C’est le triomphe de CRIF et Châtiment ! Que ce voyage officiel à Jérusalem ait lieu moins de trois mois après la mort de Jean-Marie Le Pen est tout un symbole. Sinistre et cynique. Funeste et lugubre. Après le saccage de sa tombe, c’est une nouvelle profanation. En un sens pire encore que la première. Car celle-ci n’est pas seulement matérielle mais morale et spirituelle. Et parce qu’elle émane non pas d’inconnus ou d’adversaires mais de ses héritiers biologiques et politiques, de sa petite-fille (Maréchal), de son ex-gendre officieux (Aliot) et de son successeur (Bardella) à la tête du parti qu’il avait fondé et présidé pendant quelque quarante années. Mais on le sait depuis Judas, on n’est jamais trahi que par les siens. […]
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Source : Éditorial de Rivarol