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Sommaire :
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Les Berbères, une vieille histoire
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Les Berbères, de la conquête arabe à la conquête française
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Quand l’Algérie était une colonie turque
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La question « berbériste » (1949)
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Le congrès de la Soummam, une tentative berbériste ?
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Le coup d’Etat de l’armée des frontières (été 1962)
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Comment les Berbères se sont fait voler l’indépendance
Éditorial de Bernard Lugan
L’identité de l’Algérie
En 2004, Mohamed Chafik posa une question « Pourquoi le Maghreb arabe n’arrive-t-il pas à se former ? » Et il donna la réponse suivante : « C’est précisément parce qu’il n’est pas arabe ».
Cette interrogation-réponse était incluse dans un article publié dans Le Monde amazigh, (n°53, novembre 2004), dont le titre explosif était : « Et si l’on décolonisait l’Afrique du Nord pour de bon ! », ce qui signifiait, qu’après la colonisation française, les Berbères devraient se libérer de quatorze siècles de colonisation arabe…
En Algérie comme dans tout le Maghreb, les Berbères constituent le fond ancien de la population. Charles-André Julien écrivit à ce propos que « Le Maroc, l’Algérie et la Tunisie sont peuplés de Berbères que l’on qualifie audacieusement d’Arabes ». (Voir à ce sujet mon livre Histoire des Berbères).
Aujourd’hui, les berbérophones – et non tous les Berbères – ne représentent plus qu’environ 25% de la population de l’Algérie Ce recul est le produit d’une histoire complexe ayant connu une accélération depuis l’indépendance de 1962 qui vit le triomphe de l’idéologie arabo-musulmane.
Le nouvel Etat se construisit alors à travers l’éviction des maquisards berbères par l’Armée des frontières qui avait vécu la guerre, loin des combats, dans les camps de Tunisie et du Maroc.
Or, à l’image du colonel Boumediene dont la mère était Chaoui, ses chefs, même quand ils n’étaient pas Arabes, étaient acquis à l’idéologie arabiste. Pour eux, la berbérité représentait un danger existentiel pour le nationalisme algérien à construire. Voilà pourquoi, au mois d’août 1962, donc dès l’indépendance acquise, le gouvernement algérien supprima la chaire de kabyle de l’université d’Alger.
La légitimité du régime s’ancra alors sur la négation de l’histoire de l’Algérie et de sa composition ethnique, la revendication berbère étant présentée par le « Système » algérien comme une « conspiration séparatiste dirigée contre l’islam et la langue arabe ». Pour les dirigeants algériens, le fait d’être musulman impose en effet que l’on se rattache à la nation, à la civilisation arabe. Les partisans les plus radicaux de l’idéologie arabo-islamique soutenaient même que les Berbères étaient sortis de l’histoire et qu’ils ne peuvent accéder au Paradis qu’en se rattachant à des lignées arabes. Quant au ministre algérien de l’Education nationale, il déclara en 1962 que « Les Berbères sont une invention des Pères Blancs »…
Comme les berbéristes refusaient le dogme fondateur de l’Algérie arabe, comme l’amazighité affirmait la double composante du pays, arabe et berbère, le parti FLN parla de dérive « ethnique », « raciste » et « xénophobe » menaçant de détruire l’Etat.
Voilà pourquoi les Kabyles et les Chaoui se retrouvèrent citoyens d’une Algérie algérienne arabo-musulmane niant leur identité. D’où le problème de l’identité du pays et les non-dits existentiels qui le paralysent.
Bernard Lugan
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Le terme « berbère » provient du latin « barbarus » ,emprunté au grec,qui veut dire étranger ou barbare dans un sens péjoratif.
Il est à souligner que ce superlatif a été donné aux tribus amazighes par les Romains lors de leur conquête de l’Afrique du Nord.
Il serait plus judicieux donc de se nommer amazigh (qui veut dire libre ou noble)qui est nettement plus conforme à l’histoire et au caractère de l’homme amazigh.
Quand au mot »kabyle »,il est dérivé du mot arabe قباءل (phonétiquement kaba’il) qui veut dire « tribus ».
Il est à souligner que se dire actuellement amazigh ne veut pas dire automatiquement qu’on parle la langue amazighe.
La majorité des peuples de l’Afrique du Nord,actuellement le Maghreb, sont des descendants des tribu amazigh dont les Beni Fren ou Ifren d’où descendent les Béni Ouassine(Ouacin ou Wacin),qui vivent actuellement à Maghnia(Tlemcen) et une partie au Maroc,les Béni Ifren descendant eux-mêmes des Zénètes. L’aéroport de Tlemcen a été d’ailleurs baptisée Zenata.
Les imazighen(pluriel d’amazigh) sont connus dans l’Antiquité sous les noms de Libyens, Maures, Gétules, Garamantes ou encore Numides. Ils sont répartis dans une zone s’étendant de l’océan Atlantique à l’oasis de Siwa en Égypte, et de la mer Méditerranéeau fleuve Niger en Afrique de l’Ouest. Historiquement, ils parlaient des langues amazighes qui forment ensemble, la branche amazighe de la famille afro-asiatique.
Aujourd’hui, la majeure partie des Imazighen vivent en Afrique du Nord, surtout au Maroc, en Algérie, et en Libye. Des Imazighen résident aussi au Niger, Mali, Mauritanie, Tunisie, au Burkina Faso et en Égypte, de grandes diasporas vivent en France, en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Italie, au Canada et dans d’autres pays d’Europe.
La majorité des Imazighen sont musulmans sunnites. L’identité amazigh est généralement plus large que la langue et l’ethnicité et englobe toute l’histoire et la géographie de l’Afrique du Nord. Les Imazighen ne sont pas une ethnie entièrement homogène car ils englobent un éventail de sociétés et d’ascendances. Les forces unificatrices pour les peuples Imazighen peuvent être leur langue commune, ou une identification collective au patrimoine et l’histoire amazigh ,dont la principale est l’Islam et sa langue véhiculaire, l’arabe.
Il y a environ 28 à 38 millions de imazighophones en Afrique du Nord. Le nombre d’Imazighen ethniques est beaucoup plus élevé, car beaucoup parmi eux ne parlent plus l’ amazigh mais l’arabe maghrébin. La grande majorité de la population d’Afrique du Nord est d’origine amazighe, bien qu’en raison de l’arabisation, beaucoup d’imazighen ethniques s’identifient comme arabisés.
Si l’on compare les colonisations dont furent l’objet les Berbères, on constate que ces derniers, Chrétiens plusieurs siècles avant les Romains, virent leur religion adoptée par ces derniers, à l’inverse des Arabo-musulmans qui leur imposèrent leur religion en tranchant des têtes !
Quant à la colonisation française… elle fut vécue par nombre de tribus Berbères comme un retour des « Roumis », c’est à dire des Romains, sur une terre chrétienne.
Il ne faut pas oublier que les berbères furent intégrés à l’empire romain à tel point qu’il y eut à Rome trois Papes et pas moins de cinq Empereurs Berbères…
Que cela plaise ou non et pour l’une ou l’autre raison, ce n’en est pas moins ce que révèle toute analyse sérieuse de l’Histoire…