Les États-Unis n’ont pas du tout apprécié l’achat de drones iraniens par la Russie et vont sans doute présenter une résolution devant l’ONU pour non-respect par la Russie d’une clause de la résolution 2231.
La situation est ubuesque, comme souvent avec l’ONU, car si la Russie a effectivement voté en faveur de cette résolution, les États-Unis, eux, l’ont votée, puis, l’ont dénoncée: ils se proposent donc de faire adopter des sanctions contre la Russie par l’ONU sur la base d’une résolution dont ils sont sortis.
La Russie ayant un droit de veto, la résolution pour la sanctionner n’a aucune chance de passer, la manœuvre n’est toutefois pas sans intérêt, car elle va obliger les pays à voter pour ou contre, et c’est naturellement la Chine qui est la plus attendue au tournant, mais aussi l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud, l’Arabie Saoudite … bref, il s’agit de faire prendre parti pour ou contre la Russie dans la guerre en Ukraine.
La résolution de l’ONU 2231 a été adoptée de 14 juillet 2015, c’est cette résolution qu’on appelle «accord sur le nucléaire iranien».
Voici le début de son préambule, il indique clairement ses principaux promoteurs, dont les États-Unis et la Russie:
Se félicitant des efforts diplomatiques déployés par l’Allemagne, la Chine, les États-Unis, la Fédération de Russie, la France, le Royaume-Uni, la Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et la République islamique d’Iran afin de parvenir à une solution globale, de long terme et appropriée à la question du nucléaire iranien, qui ont abouti à l’adoption, le 14 juillet 2015, du Plan d’action global commun (S/2015/544, annexe A à la présente résolution) et à la création de la Commission conjointe.
Comme on sait, la Russie a acheté – ou fabriqué sous licence, des drones Shahid-136 renommé géranium-2 en russe, petite ironie de l’histoire, en français, géranium n’est pas phonétiquement très éloigné d’uranium, le jeu de mots ne fonctionne pas du tout en russe, mais il fonctionne très bien dans la langue internationale, l’anglais.
En outre, selon les dernières rumeurs, l’Iran se préparerait à livrer à la Russie le premier lot de missiles Fateh-110 et Zolfaghar, deux missiles balistiques à courte portée bien connus, capables de frapper des cibles à des distances de 300 et 700 kilomètres.
Or, le paragraphe 6 de l’annexe B de la résolution 2231 prévoit l’interdiction d’importer des armes en provenance d’Iran (dans le but évident de pénaliser le développement du complexe militaro-industriel de l’Iran) :
Paragraphe 6 b) De prendre les mesures nécessaires pour empêcher, sauf si le Conseil de sécurité en décide autrement à l’avance au cas par cas, la fourniture, la vente ou le transfert par leurs ressortissants, ou au moyen de navires ou d’aéronefs battant leur pavillon, d’armes ou de matériels connexes provenant d’Iran, qu’ils soient ou non originaires du territoire iranien, jusqu’au cinquième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure;
Cet alinéa est toutefois caduque, puisque nous avons dépassé son échéance d’application : la résolution est passée en 2015, la clause valait pour une durée de 5 ans.
Par contre, l’alinéa C du même paragraphe concerne l’interdiction d’importation de matériel balistique iranien, lui, n’arrive à échéance qu’en 2023, le but de cette interdiction était d’entraver le développement de l’industrie balistique iranienne pour l’empêcher d’acquérir des vecteurs susceptibles de porter une ogive nucléaire, c’est un article assez imbuvable, en résumé, il est demandé à tous les États de geler les fonds de pays qui auraient acheté des missiles à l’Iran:
Paragraphe 6 c) Jusqu’au huitième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure, de continuer de geler les fonds et autres avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire à la date de l’adoption du Plan d’action, et de geler les fonds et autres avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire à tout moment par la suite, qui appartiennent ou sont sous le contrôle de personnes ou d’entités visées dans la liste établie et tenue à jour par le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1737 (2006) à la date de l’adoption de la nouvelle résolution du Conseil, à l’exception des personnes et entités visées dans la pièce ci-jointe, ou radiées de la liste par le Conseil, et de geler ceux des autres personnes et entités qui pourront être désignées par le Conseil comme: ayant participé, étant directement associées ou ayant apporté leur concours à des activités nucléaires iraniennes posant un risque de prolifération, entreprises en violation des engagements souscrits par l’Iran dans le Plan d’action ou à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, notamment en participant à l’achat d’articles, de biens, de matériel, de matières et de technologies interdits visés dans la présente déclaration; ayant aidé des personnes ou entités désignées à se soustraire aux obligations imposées par le Plan d’action ou à agir de manière incompatible avec celui-ci ou avec la nouvelle résolution du Conseil; ayant agi pour le compte de personnes ou d’entités désignées ou sous leurs ordres; ou ayant été la propriété ou sous le contrôle de personnes ou d’entités désignées, y compris par des moyens illicites;
Une fois de plus, on voit bien que les résolutions de l’ONU n’ont pas une très grande portée technique:
- La Russie a quand même livré des missiles antiaériens S300 à l’Iran postérieurement à cette résolution, certes, en vertu d’un contrat remontant à 2008, donc antérieur à la résolution.
- L’Iran, même sans l’aide extérieure, du moins officielle, a quand même bien réussi à développer son industrie balistique
- La Russie est en train d’acheter des drones et des missiles à l’Iran, il est vrai que les deux pays peuvent difficilement être plus sanctionnés qu’ils ne le sont déjà.
Mais à l’ONU, l’enjeu n’est pas technique, il s’agit uniquement de développer tout un jeu diplomatique d’influence, de menace et de sanction dans le but d’obliger les pays à se ranger pour ou contre les États-Unis et Israël.
S’agissant d’Israël, il faut bien remarquer que cette résolution sur le nucléaire iranien était assez révoltante, non seulement on visait le nucléaire militaire, mais aussi les missiles, en gros, l’Iran n’avait pas le droit de se défendre contre Israël
Source pour l’information sujet de l’article, Ria Novosti : L’Occident a trouvé des drones iraniens en provenance de Russie – RIA Novosti, 20.10.2022
Annexe B (extraits) :
(…)
3 – L’Iran est tenu de ne mener aucune activité liée aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des armes nucléaires, y compris les tirs recourant à la technologie des missiles balistiques, jusqu’au huitième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure.
4 – Tous les États peuvent participer aux activités décrites ci-dessous et les permettre à condition que le Conseil de sécurité les autorise au préalable, au cas par cas :
4 – Tous les États peuvent participer aux activités décrites ci-dessous et les permettre à condition que le Conseil de sécurité les autorise au préalable, au cas par cas :
a) La fourniture, la vente ou le transfert, directs ou indirects, à partir de leur territoire ou par leurs ressortissants, ou au moyen de navires ou d’aéronefs battant leur pavillon à destination ou en provenance de l’Iran, ou en vue de leur utilisation en Iran ou à son profit, de tous articles, matières, équipements, biens et technologies visés dans le document S/2015/546, qu’ils soient originaires ou non de leur territoire, et de tous articles, matières, équipements, biens et technologies qui, selon eux, pourraient contribuer à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires;
b) La fourniture à l’Iran de toute technologie ou assistance technique, formation ou aide financière et de tous investissements, services de courtage ou autres, et le transfert de ressources ou de services financiers, ou l’acquisition, par l’Iran, d’une participation dans une activité commerciale conduite dans un autre État, liés à la fourniture, à la vente, au transfert, à la fabrication ou à l’utilisation des articles, matières, équipements, biens et technologies visés à l’alinéa a) ci-dessus ou en rapport avec les activités décrites au paragraphe 3; sous réserve, si le Conseil de sécurité donne son autorisation, que :
a) le contrat de fourniture de ces articles ou de cette assistance prévoie des garanties d’utilisation finale appropriées;
b) l’Iran s’engage à ne pas utiliser ces articles pour mettre au point des vecteurs d’armes nucléaires; Le présent paragraphe s’appliquera jusqu’au huitième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure;
5 – Tous les États peuvent participer aux activités décrites ci-après et les autoriser à condition que le Conseil de sécurité les autorise au préalable, au cas par cas :
la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects à l’Iran, ou en vue de leur utilisation en Iran ou à son profit, à partir de leur territoire ou à travers de celui-ci ou par leurs ressortissants ou des personnes relevant de leur juridiction, ou au moyen de navires ou d’aéronefs battant leur pavillon, qu’ils soient ou non originaires de leur territoire, de chars de combat, de véhicules blindés de combat, de systèmes d’artillerie de gros calibre, d’avions de combat, d’hélicoptères d’attaque, de navires de guerre, de missiles et de systèmes de missiles tels que définis aux fins du Registre des armes classiques de l’Organisation des Nations Unies, ou de matériel connexe, y compris leurs pièces détachées; la fourniture à l’Iran, par leurs ressortissants ou à partir de leur territoire ou à travers de celui-ci, de toute formation technique, ressources financières ou services financiers, conseils, autres services ou aide liés à la fourniture, à la vente, au transfert, à la fabrication, à l’entretien ou à l’utilisation des armes et matériels connexes dans cet alinéa
Le présent paragraphe s’appliquera jusqu’au cinquième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure
6 – Tous les États sont tenus :
a) De prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que toute activité visée aux paragraphes 2, 4 et 5 se produisant sur leur territoire, ou faisant intervenir leurs ressortissants ou des personnes relevant de leur juridiction ou des navires ou aéronefs battant leur pavillon, soit strictement conforme aux dispositions pertinentes de ces paragraphes, ainsi que d’empêcher et interdire toute activité incompatible avec ces dispositions, jusqu’au dixième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure;
b) De prendre les mesures nécessaires pour empêcher, sauf si le Conseil de sécurité en décide autrement à l’avance au cas par cas, la fourniture, la vente ou le transfert par leurs ressortissants, ou au moyen de navires ou d’aéronefs battant leur pavillon, d’armes ou de matériels connexes provenant d’Iran, qu’ils soient ou non originaires du territoire iranien, jusqu’au cinquième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure;
c) Jusqu’au huitième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure, de continuer de geler les fonds et autres avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire à la date de l’adoption du Plan d’action, et de geler les fonds et autres avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire à tout moment par la suite, qui appartiennent ou sont sous le contrôle de personnes ou d’entités visées dans la liste établie et tenue à jour par le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1737 (2006) à la date de l’adoption de la nouvelle résolution du Conseil, à l’exception des personnes et entités visées dans la pièce ci-jointe, ou radiées de la liste par le Conseil, et de geler ceux des autres personnes et entités qui pourront être désignées par le Conseil comme : ayant participé, étant directement associées ou ayant apporté leur concours à des activités nucléaires iraniennes posant un risque de prolifération, entreprises en violation des engagements souscrits par l’Iran dans le Plan d’action ou à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, notamment en participant à l’achat d’articles, de biens, de matériel, de matières et de technologies interdits visés dans la présente déclaration; ayant aidé des personnes ou entités désignées à se soustraire aux obligations imposées par le Plan d’action ou à agir de manière incompatible avec celui-ci ou avec la nouvelle résolution du Conseil; ayant agi pour le compte de personnes ou d’entités désignées ou sous leurs ordres; ou ayant été la propriété ou sous le contrôle de personnes ou d’entités désignées, y compris par des moyens illicites;
Marrant ce drone, on le croirait sorti d’une BD avec Mortimer ou Black aux commandes, quelque part au-dessus du détroit d’Ormuz.
Sauf que Nasir, le fidèle serviteur, est devenu Premier ministre du royaume de sa Majesté Charles III qui commence bien son règne
Et sauf que le drone en question est iranien … le monde à l’envers.
Selensky et son gouvernement ont été voté par le peuple ukrainien « nazie » – ubuesque ?