Poursuite des violences
D’importants combats se sont déroulés à nouveau vendredi en Turquie dans un contexte de guerre de plus en plus marqué avec la minorité kurde. Dans la province d’Hakkari (extrême sud-est), six soldats ont été tués et quatre autre blessés par les combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, Partiya Karkerên Kurdistan). Un soldat est mort dans la province de Bingol (centre est) lors de l’explosion d’une mine et deux hommes du PKK ont été tués dans les affrontements qui ont suivi. À Nusaybin (Mardin, sud-est), deux policiers ont été blessés lors de l’attaque d’un convoi selon des chiffres repris par les médiats.
De violents combats étaient signalés vendredi soir à Dağlıca et Aktutun, dans l’extrême sud-est de la Turquie, tout près de la frontière avec la Syrie.
La Force de défense du peuple (HPG, Hêzên Parastina Gel), branche militaire du PKK, a affirmé avoir tué 26 membres des forces de sécurité depuis jeudi et causé environ 250 « pertes » à l’ennemi depuis le déclenchement des hostilités mi-juillet.
Selon des sources recoupées par les médiats occidentaux, 37 membres des forces de sécurité turques sont morts depuis la mi-juillet dans la guerre déclenchée par le gouvernement contre les activistes kurdes. En comptabilisant les combattants tués lors des nombreux raids aériens menés en Irak, ces derniers auraient perdu plusieurs centaines d’hommes.
Les autorités ont par ailleurs fait arrêter plusieurs centaines de Kurdes accusés d’appartenir au PKK – la majorité des 1 700 individus arrêtés depuis la mi-juillet et parmi lesquels quelques très rares tueurs de l’État islamique (ÉI) et quelques membres du Front-Parti pour la libération du peuple révolutionnaire (DHKP-C, Devrimci Halk Kurtuluş Partisi-Cephesi).
Menaces du PKK
Dans la journée, le groupe indépendantiste marxiste avait menacé le gouvernement turc, par la voix de Murat Karayılan, de « payer le prix fort » s’il ne cessait pas ses attaques, au lendemain de la mort d’un membre du PKK dans la région de Diyarbakir.
« Nous respectons toujours le message donné par notre chef en 2013, et nous maintenons la même position. Cependant, l’AKP [Parti pour la justice et le développement (AKP, Adalet ve Kalkınma Partisi) du gouvernement turc] a mis fin au cessez-le-feu en nous attaquant au prétexte du meurtre à Ceylanpınar de deux policiers par un groupe n’étant pas précisément affilié à nous. Cependant, ils avaient déjà lancé une guerre contre nous avant cela. Le massacre de Suruç, qui a coûté la vie de 32 jeunes, a été perpétré par l’État lui-même. L’AKP n’a jamais cessé la guerre depuis 2013. Nous avons déclaré un cessez-le-feu dans Kurdistan du Nord, mais l’AKP a attaqué les Kurdes à Rojava, en Syrie, et a déclaré une guerre contre nous aux cotés de l’État islamique »,
a précisé ce responsable.
(Nouvelle) déclaration d’indépendance de communautés kurdes
Ce samedi est considéré comme une fête par le PKK : le 15 août 2015 marque le 31e anniversaire du soulèvement armé des indépendantistes kurdes. C’est en 1984 qu’Abdullah Öcalan, chef du PKK, actuellement emprisonné, fit basculer le mouvement indépendantiste dans la lutte armée en ordonnant l’attaque de deux postes de l’armée. Un gendarme avait été tué et une dizaine de membres des forces de sécurité avaient été blessés. Depuis, le conflit a fait environ 45 000 morts.
Des responsables politiques locaux ont publié hier des communiqués – peu diffusés, la censure de la Turquie s’exerçant farouchement, notamment contre les réseaux sociaux – annonçant leur état de sécession. Ils affirment ne plus reconnaître désormais les lois de la Turquie. Si ce n’est pas la première fois que de telles annonces ont lieu, elles interviennent dans un contexte national et international très particulier, alors que l’audience du mouvement indépendantiste kurde n’a jamais été aussi grande et que son pouvoir au-delà des frontières, grâce à la déstabilisation engendrée par l’État islamique, n’a jamais été aussi fort.
Malgré la crise et la multiplication des incidents, le président islamiste turc Recep Tayyip Erdogan a rappelé le caractère total de l’offensive contre le PKK, évoquant un engagement qui n’était « pas temporaire », signifiant sa volonté d’éradiquer définitivement ses irréductibles ennemis kurdes.
« Vous ne devriez pas penser qu’ils sont forts… Ils sont voués à l’échec »,
a-t-il déclaré lors d’une réunion politique à ses partisans à propos des Kurdes, ajoutant :
« Des groupes terroristes sont derrière eux, tandis que nous avons Allah et le peuple avec nous ».