Après les émissions de la BBC en langue française, créées depuis septembre 1939 « les Français parlent aux Français » depuis Londres fin mai 1944 ce fut « les Français bombardent les Français » …
A Gréville – Hague, cette humble plaque rappelant les victimes de la guerre, est apposée sur le muret de soutènement du terreplein entourant l’église, face à la statue du peintre Millet, la grande célébrité du lieu, non loin du monument aux morts, mais certainement pas mélangé avec !… (Sur la photo ci-dessous, cette plaque commémorative est le rectangle blanc à droite. )
C’est que les victimes civiles liées aux faits de guerre ne sont pas considérées comme des victimes « mortes pour la France ». Les lecteurs apprécieront…
Une plaque commémorative qui résume tout pour la commune en cinq ans d’occupation
- « tué par les Allemands » : un seul nom
- « Tués par les bombardements alliés » : seize noms dont deux familles complètes…
On n’évoque pas là les morts dans les populations des communes avoisinantes….
A propos de « Radio Londres »
« Les Français parlent aux Français » est l’émission quotidienne en langue française de la BBC.
Elle est diffusée primitivement à partir du 14 juillet 1940 sous le titre « Ici la France » puis, à partir du 6 septembre 1940, sous son titre aujourd’hui le plus connu, annoncé par les 4 premières notes du la cinquième symphonie de Beethoven.
De bons esprits s’étonneront que le principal organe médiatique francophone du temps, monté par les Alliés en Grande Bretagne, illustrant la figuration de la lettre v, synonyme de victoire, ait choisi comme indicatif une œuvre symphonique d’un compositeur allemand ! (En langage morse, la lettre v se note . . . – soit 3 brèves, suivies d’une longue)
On trouve dans ces émissions en langue française de Radio Londres, outre la ritournelle emblématique « Radio Paris ment, Radio Paris est allemand » du chansonnier alsacien André Isaac dit Pierre Dac, des émissions exhortant aux actions de résistance et désignant à la vindicte des réseaux, notamment communistes, les « collaborateurs » jugés à exécuter tel Ernest Jourdan dont toute la famille, gamine de 3 ans comprise sera impitoyablement massacrée à la suite de l’exécution du couple Basch dirigeant de la LDH…
Philippe Henriot dira alors sur Radio-Paris, s’en prenant à Pierre Dac, en évoquant ses origines juives et s’interrogeant sur ses motivations : « La France, qu’est-ce que cela peut bien signifier pour lui ? » (Philippe Henriot sera lui-même assassiné à Paris sur ordre de Londres, par la résistance le 28 juin1944…
Sur le plan opérationnel de liaison avec les maquis, on trouve surtout dans les émissions de radio Londres des messages qualifiés de « personnels » concernant les parachutages d’armes et même d’argent, parfois même de responsables (tel Jean Moulin) et les objectifs de sabotages voire de destructions ciblées ordonnées par Londres.
On observe aussi dans les émissions de Radio Londres des annonces codées concernant les activités spécifiquement associées aux membres du SOE, une structure purement britannique peu connue, créée par Churchill en 1940 et dissoute en 1946, dont la position vis-à-vis des instances politiques britanniques est aussi obscure qu’ambiguë : Le S O E (Special Operation executive).
Churchill conservera en permanence la haute main stratégique sur le SOE, notamment par l’intermédiaire de la London Controlling Section (LCS).
Cela explique que le SOE soit parfois désigné comme « armée secrète de Churchill ».
C’est l’organisation opérationnelle britannique chargée de l’action, du financement et de l’armement des réseaux résistants et des opérations de sabotage notamment en France dans l’attente de la reprise des opérations militaires dans les pays occupés alliés.
C’est surtout un organe de renseignement, d’infiltration, de propagande et de désinformation britannique, voire de mise en place d’actions terroristes commises sous faux drapeau : avec le NKVD soviétique ancêtre du KGB, avec lequel il a beaucoup collaboré en 44 / 45, le SOE sera le modèle de forces opérationnelles des diverses factions juives qui conduiront à la création des services secrets israéliens (aujourd’hui réaménagés entre le Mossad, l’Aman et le Shin Beth). Le Aman est le renseignement militaire.
Le Shin Bet (שב), aussi appelé le Shabak (שב »כ « Shabak », acronyme de Shérūt ha-Bītāhōn ha-Klālī שירות הביטחון הכללי) est le service de renseignement intérieur israélien. Le Shin Bet est donc l’un des 3 grands services de renseignement israéliens aux côtés de l’Aman (renseignement militaire) et du Mossad (renseignement extérieur). L’héritage institutionnel de la guerre pèsera lourd au Moyen Orient !
On observera d’abord depuis la Grande Bretagne :
- les actions aériennes de mitraillage dès le début du second trimestre 44 (les trains seront particulièrement ciblés et les mécaniciens payeront un lourd tribut au jeu de tir aux pigeons des aviateurs)
- ensuite les bombardements proprement dit.
La configuration particulière de la Manche, son isolement lié à sa configuration de presqu’île (Cotentin), expliquent que les voies ferrées (le réseau des voies secondaires était alors extrêmement dense et reliait toutes les localités jusqu’au au niveau cantonal) aient été alors les principales artères de pénétration et d’échanges.
Nous ne saurions mieux faire que recommander aux lecteurs les ouvrages de Michel Boivin et Bernard Garnier sur les victimes civiles associées aux opérations militaires alliée, notamment aérienne (pré et post) débarquements.
Voir notamment « Les victimes civiles de la manche » publié pour le cinquantenaire de la « libération » bien évidemment épuisé aujourd’hui et non réédité, (mais disponible en format « Kindle » pour moins de 10 €).
Parfois, surtout à partir de la fin juin 44, compte tenu du débarquement et des massacres occasionnés par les bombardements préparatoires, nettement mal perçus par les indigènes, (on se demande bien pourquoi !), il y aura avertissement des « alliés » de certaines actions aériennes visant des zones à forte densité de population ce qui se traduira par des lâchés de tracts effectués le plus souvent au hasard dont peu finiront entre les mains des futures victimes potentielles.
Notamment après le 6 juin, les épouvantables pilonnage subi par Saint Lô, Coutances, Carentan et Valognes, qui ont transformé ces villes en Gaza avant l’heure, ont marqué les esprits pendant des décennies.
Mais ce ne fut évidemment pas le cas avant le fameux 6 juin 1944 où au-delà des bombardements massifs d’origine américaine et anglaise, des unités françaises ont pris leur part !
En cette période de désinformation et d’affabulations chroniques, cette précision me semble utile à donner…
Tout comme le fait que ma famille maternelle étant issue de ce nord Cotentin, je connais parfaitement ce secteur dès la fin des années cinquante : j’y ai fait mes premiers pas…
J’ai toujours été frappé dans ma jeunesse (années 50 à 70) de ce que les gens de la Hague, parlaient très peu de la guerre, n’évoquaient que rarement les Allemands, mais jamais les Américains
Le premier nom que porte la plaque de Gréville est celui, de Hyacinthe Lemarinel
Un crime honteux, perpétré par l’occupant : il en fallait bien au moins un ! (Car l’Histoire montrera hélas que les exactions perpétrées contre les populations civiles en Normandie et dans la Manche en particulier, furent dans leur immense majorité du fait des troupes américaines…)
Lemarinel est effectivement une victime de l’envahisseur allemand, abattu pour avoir refusé de donner du calvados à deux soldats passablement éméchés le soir du 1er mai…
La mention « Mort pour la France » lui est attribuée.
Les autres, tués la nuit du 31 mai au 1er juin par les bombardements alliés, n’auront pas même cet honneur…
« Dans la nuit du 31 mai au 1er juin 1944, 1 500 bombes sont déversées sur la Hague. La vallée du Hubilan, et le hameau aux Fèvres à Gréville-Hague, sont complètement rasés. »
« 129 soldats allemands sont tués, mais également 15 civils. Les quatre membres de la famille Lefranc, les parents et leurs deux fils, ainsi que leur petit commis, Bernard Jeanne, 17 ans, sont morts, ensevelis sous l’escalier. Tous les membres de la famille Leneveu, présents dans leur maison de Gréville sont, eux, décimés. Les parents, et huit des neufs enfants, périssent dans le bombardement. »
La raison stratégique de ce bombardement, révélée beaucoup plus tard, était la destruction des stations d’écoute radio allemandes. Visiblement les alliés ne savaient pas trop où elles se trouvaient même si le manoir de Dur Ecu, qui semblait concerné, sera effectivement partiellement détruit avec la station qui le jouxtait : une mission effectuée par une escadrille française !
« [Le bombardement] a été effectué par le squadron 346 de la Royal Air Force.
C’est en fait une escadrille française , le groupe 2/23 « Guyenne », organisée en squadron le 16 mai 1944 sur la base d’Elvington (Yorkshire) à partir d’équipages de l’armée de l’air française qui étaient arrivés via Liverpool après avoir combattu aux côtés des forces alliées en Afrique du Nord dans l’âpre conflit avec l’Africa Corps nazi. Avant le débarquement allié d’Afrique du Nord, sur instruction de son haut-commandement fidèle à Vichy, Guyenne avait légèrement bombardé Gibraltar, en représailles pour Mers El Kebir, puis les forces alliées débarquantes en Afrique du Nord …
Ils furent rejoints à Elvington par d’autres équipages français qui avaient quitté leur patrie plus tôt.
Sa première mission eut lieu cette nuit du 1er juin en visant les installations radio de ce que l’Intelligence Service désignait alors comme la « station Y » de la « la Ferme d’Urville ».
Effectivement sur les hauteurs qui dominent Dur-Ecu, au niveau du Hameau Capel se trouvait un ensemble de « blockhaus » allemands, centré autour d’un poste d’écoute radio et destiné à le protéger. Il comportait1 une casemate pas encore équipée de canon, le poste d’écoute proprement dit, un poste de projecteur de DCA et un nid de mitrailleuses anti aériennes. Il s’agit donc d’un 3ème poste d’écoute, après celui de Gréville et celui du fort de Nacqueville. »
…/… « Le terme « Ferme d’Urville » est utilisé par la RAF sans que l’on sache trop s’il s’agit précisément du site sur Urville uniquement ou de l’ensemble formé par les 3 sites bombardés.
Des sites internet australiens parlent de la Ferme d’Urville dans le Pas-de-Calais, comme quoi on peut être mauvais géographe et bon bombardier.«(sic !)
Le rapport d’opération [document 467] parle de « tir très concentré », ce qui -vu du sol- paraît un euphémisme. »
Bref on reconnaît à l’époque avoir été dans le grand n’importe quoi…
Par égard pour la partialité et le cynisme de l’auteur de ces lignes, nous ne mentionneront pas son nom que les lecteurs pourront trouver d’eux même en suivant la référence de l’article….
Mais l’affaire ne s’arrête pas là….
Il semblait clair, dans ma jeunesse, pour l‘ensemble de la population témoin du secteur de Gréville, qui était encore bien vivante en ce temps-là et en âge d’analyser les choses, que les bombes tombées à Gréville notamment sur la maison de la famille Leneveu n’auraient jamais dû être larguées là…
De bonnes langues insistaient sur le fait que, mal piloté ou mal dirigé, un des avions avait raté sa mission et s’apprêtait à regagner l’Angleterre… Il est vrai que si des analystes dits historiens australiens placent encore aujourd’hui Urville, dans le Pas de Calais, on peut s’attendre à tout de la part d’un pilote français désorienté nouvellement arrivé depuis Gibraltar, comme le fait de s’alléger avant de franchir la Manche, en vidant ses soutes au hasard, sans attendre même de survoler la mer !
Nous ne trancherons pas, d’autant que les très rares témoins du temps encore en vie, alors en âge de comprendre, ont aujourd’hui au moins quatre-vingt-dix ans !…
Depuis, toute une littérature a vu le jour sous la plume de gens dont l’impartialité et la rigueur ne sont pas forcément les valeurs dominantes et où la propagande pro-alliés est la règle…
Mais clairement tous les pilotes alliés n’avaient pas l’éthique et la noblesse d’âme d’un Jean Maridor, le célèbre chasseur de V1 qui n’hésita pas à se sacrifier en toute connaissance de cause, le 3 août 44, pour éviter la chute inéluctable du missile qu’il poursuivait sur l’hôpital de Beneden (Kent).
Nous en reparlerons !
Article en plein dans l’actualité, Bernard Cazeneuve, le député-maire de Cherbourg – dans la Manche – vient de perdre son épouse hier, le 2 juin 2024.
Seulement, en fait de plaque commémorative, Bernard Cazeneuve préférait être vu en train d’en inaugurer une autre:
https://france3-regions.francetvinfo.fr/normandie/manche/cherbourg-cotentin/cherbourg-cotentin-memorial-departemental-shoah-justes-inaugure-1880688.html
Le plus terrible pour la plaque de Gréville, avec les Coupey – Jeanne – Lefranc – Leneveu, pas de Lévy au demeurant, c’est qu’eux aussi, d’une certaine manière, sont mis au passif des Allemands.
Notre ami Claude oublie de parler des bombes au phosphore et les habitants qui cramaient dans leur cave, ou brûlaient encore en se jetant dans les mares…
Et on va avoir droit, ad nauseam, aux photos des cimetières aux croix blanches où gisent les gentils yankees venus libérer la France. Pas un mot sur les villes normandes rasées et les milliers de victimes civiles des bombardements « alliés ».
De toute façon, les « américains » (terme impropre) ont tous les droits , même d’envoyer des bombes atomiques sur les populations et s’en sortir comme étant les gentils…
la plaque commémorative en début d’article peut laisser penser que les civils sont morts sous des bombardements allemands
Exact