LE SUCCESSEUR de François a donc été élu, le 8 mai 2025, au quatrième tour de scrutin, après à peine vingt-quatre heures. Beaucoup pensaient que, compte tenu du nombre des électeurs (133 au total) venant d’un très grand nombre de pays (70 en tout), le conclave s’étendrait sur plusieurs jours et qu’il serait difficile d’atteindre rapidement le minimum requis, soit 89 voix, correspondant aux deux tiers des votants. Or, il n’en a rien été. Comme si l’élection de l’Américain Robert Francis Prevost, qui a pris le nom de Léon XIV, avait été programmée. Beaucoup d’observateurs ont affirmé que Léon XIV sur le fond plaçait ses pas dans ceux de François mais qu’en revanche sur la forme il serait différent. De fait, Robert Francis Prevost, né le 14 septembre 1955 à Chicago dans l’Illinois, a été un très proche collaborateur de Bergoglio qui l’a créé cardinal le 30 septembre 2023 et qui l’a nommé la même année « préfet de la Congrégation des évêques », un poste influent et stratégique s’il en est.
C’est à ce titre qu’il a démis de ses fonctions, en plein accord avec François, deux prélats conciliaires conservateurs : Mgr Joseph Edward Strickland, évêque de Tyler au Texas en 2023 et Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon en 2025. Cela en dit long sur l’orientation fondamentalement progressiste du successeur de François malgré des apparences plus conservatrices et pondérées. Le futur Léon XIV avait ainsi approuvé les positions de François concernant la communion sacramentelle donnée aux divorcés remariés. Et il ne s’était nullement opposé publiquement aux bénédictions de paires homosexuelles également autorisées par Bergoglio, même s’il a tenu ici et là des propos quelque peu ambigus sur le sujet, comme savent si bien le faire les modernistes qui multiplient les équivocités volontaires.
SON ADHÉSION pleine et entière à Vatican II et aux réformes disciplinaires, liturgiques, pastorales et doctrinales qui l’ont suivi ne fait également aucun doute. Lors de son discours au « Collège des Cardinaux », le 10 mai, il a ainsi déclaré de manière claire et explicite : « Et à cet égard, je voudrais que nous renouvelions ensemble, aujourd’hui, notre pleine adhésion au chemin que l’Eglise universelle suit depuis des décennies dans le sillage du Concile Vatican II. » Par conséquent, il n’y a aucun changement sur le fond à attendre. D’ailleurs, Léon XIV, du fait de son âge (69 ans), n’a connu pour ainsi dire que l’église conciliaire et post-conciliaire, contrairement à ses prédécesseurs. En effet, le Pape Pie XII est mort quand il avait à peine trois ans. Au moment de l’ouverture de Vatican II, il avait sept ans et, à sa clôture en décembre 1965, il avait seulement dix ans. Lorsque Paul VI — qu’il a cité élogieusement à la fin de son discours aux cardinaux, ce qui est là aussi un signe fort —, a promulgué la nouvelle messe, le 3 avril 1969, il avait treize ans. Il a été ordonné prêtre dans le nouveau rite en 1982 et fait évêque, également dans le nouveau rite, en 2014.
Léon XIV partage également les positions de François sur le climat, le réchauffement climatique, sur les migrants — il a par le passé fustigé dans des déclarations et dans des tweets la politique de Trump à l’égard des immigrés clandestins aux Etats-Unis — et il a approuvé les déclarations de son prédécesseur qui s’est rendu à Lampedusa, à Lesbos, à Marseille et qui, chaque fois, a appelé énergiquement l’Europe à accueillir davantage de migrants, rappelons-le, pour la plupart mahométans, et à faire preuve de davantage d’ouverture et de générosité. D’ailleurs, dans son premier et bref discours, sur le balcon de la basilique saint-Pierre, le 8 mai au soir, Léon XIV a appelé à construire des ponts, a appelé au dialogue, à une « Eglise ouverte », proche des périphéries. On sait ce que tout cela veut dire pour les dignitaires conciliaires. Dans cette même allocution, il s’est réclamé explicitement d’une « Eglise synodale », attachée à la collégialité conciliaire, s’inscrivant là aussi, de manière très claire, dans la stricte et totale continuité de Bergoglio.
C’EST PAR AILLEURS tout un symbole que soit élu sur le siège de Pierre un Américain le jour du quatre-vingtième anniversaire de la capitulation allemande, le 8 mai 1945. Car le principal vainqueur de la Seconde Guerre mondiale n’est autre que les Etats-Unis d’Amérique et non la vieille Europe qui est sortie très affaiblie de ce conflit. A ce propos, si Robert Francis Prevost se réclame du Pape Léon XIII, c’est uniquement pour ses positions sur la question sociale et singulièrement pour sa célèbre encyclique Rerum novarum le 15 mai 1891. Mais il est bien certain qu’il ne suivra nullement Léon XIII dans son rejet très clair et motivé doctrinalement de la franc-maçonnerie et de l’américanisme. Non plus que sur son adhésion à la doctrine catholique traditionnelle rejetant la liberté religieuse, l’œcuménisme libéral, la collégialité et la soumission à la synagogue. A peine élu, Léon XIV a en effet reçu les félicitations chaleureuses du B’nai B’rith, puissante organisation mondiale judéo-maçonnique.
On peut aussi penser que le choix d’un Américain ne tient pas au hasard. Les finances du Vatican étant en grande difficulté et les donateurs états-uniens étant plus nombreux et beaucoup plus riches que partout ailleurs dans le monde, c’est très probablement un gage qui leur a ainsi été donné et cela témoigne symboliquement d’un nouveau recul du Vieux Continent.
S’IL POURSUIVRA selon toute vraisemblance les grandes orientations de François sur le fond, Léon XIV sera en revanche assez différent sur la forme, et donc d’autant plus efficace dans ses desseins. Le style très provocateur, brut de décoffrage d’un Bergoglio multipliant les excentricités et les incongruités (un jour il s’était même affiché avec un nez rouge de clown, tout en étant en soutane blanche !) avait en effet indisposé et crispé une frange des conservateurs, certains prélats, ce qui ne s’était quasiment jamais vu jusque-là, se permettant même de le critiquer, de s’en démarquer publiquement, sans toutefois aller plus loin dans leur distanciation que le fait d’afficher certains réserves purement verbales. Léon XIV sera probablement beaucoup plus habile et apparemment conservateur, sinon traditionnel, sur la forme (il a ainsi loué les formes de piété populaire, a prononcé en latin avec solennité et gravité sa bénédiction le 8 mai, a revêtu des ornements beaucoup moins sobres que François, lequel s’était même promené en pantalon en fauteuil roulant quelques jours avant de mourir dans la basilique saint-Pierre !), tout en restant tout autant révolutionnaire et moderniste sur le fond, ce qui sera d’autant plus redoutable. Léon XIV a ainsi déjà décidé de ne plus loger à la résidence Sainte-Marthe, contrairement à François, et d’occuper les « appartements pontificaux » comme Jean-Paul II et Benoît XVI. Contrairement à son prédécesseur, il a fortement insisté sur son titre de « vicaire du Christ », de « successeur de Pierre », alors que François se définissait surtout, voire seulement, comme « évêque de Rome ». Cette différence est loin d’être totalement anecdotique. Il entend s’affirmer haut et fort.
Il ne faut pas oublier non plus que Léon XIV est docteur en droit canon et qu’il pourrait donc se montrer beaucoup moins complaisant que son prédécesseur avec la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X. Bergoglio ne se souciait guère en effet des questions juridiques et canoniques. Il en ira probablement tout autrement avec Léon XIV qui pourrait se montrer beaucoup plus exigeant sur ce point et ne pas accorder facilement des facilités à l’œuvre fondée par Mgr Marcel Lefebvre, alors même que la FSSPX n’a aujourd’hui plus que deux évêques relativement âgés, Mgr Fellay (67 ans) et Mgr de Galarreta (68 ans, et en mauvaise santé. Fin avril, ce dernier a dû annuler sine die diverses cérémonies de confirmation prévues de longue date en Bretagne). Il sera en tout cas intéressant de voir comment évoluent les relations dans les années qui viennent entre Léon XIV et Ecône. D’autant que le successeur de François pourrait rester longtemps, du fait de son âge, peut-être quinze à vingt ans, et qu’il aura donc a priori le temps de poursuivre à sa guise les réformes conciliaires et d’imprimer sa marque.
LA CRISE DE L’EGLISE, on le voit, n’est donc pas derrière nous. Il faut se garder de toute illusion, de tout sentimentalisme, de tout optimisme déconnecté du réel et de la doctrine et s’interdire de voir les choses non telles qu’elles sont mais telles qu’on voudrait qu’elles soient. Tant qu’on se réclamera du funeste conciliabule Vatican II, rien ne pourra être redressé. De plus, la perte de la Foi — et des principes moraux qui lui sont consubstantiels — est aujourd’hui quasiment universelle, plus profonde et dramatique que jamais. Nous vivons à n’en pas douter des temps apocalyptiques, antéchristiques et eschatologiques.
Dans les ténèbres actuelles, qui s’éternisent, s’obscurcissent encore, et dont on ne voit pas l’issue, à vue humaine, plus que jamais, il faut envers et malgré tout garder et faire croître en soi la Foi, l’Espérance et la Charité. En conservant les pieds sur Terre. Et les yeux levés au Ciel. […]
RIVAROL, <[email protected]>
Source : Éditorial de Rivarol
Tout fout le camp …. le new pape est woke comme le précédent . J’ai tout de suite remarqué qu’il avait un profil plutot exotique ,pas très catholique ,bien que très beau ( d’après les religieuses ) ,comme le précedent ..