Trois jours après la prise de Koundouz par les combattants talibans et deux jours après le lancement d’une contre-offensive de l’armée afghane, les combats se poursuivent aux alentours de la grande ville du nord-est de l’Afghanistan. Des informations contradictoires ont été diffusées ces dernières heures. Malgré leur supériorité théorique, les militaires afghans et leurs alliés ne semblaient pas avoir été en mesure de reprendre la ville aux islamistes, les autorités afghanes mettant en avant le difficile acheminement des renforts confrontés à des mines et engins piégés.
Des sources talibanes confirmées ont annoncé la progression des combattants islamistes dans le nord de la ville mercredi, avec notamment la prise de la citadelle de Bala Hissar. Ils dirigeraient toujours la majeure partie de la ville hier.
Engagement des forces de l’OTAN
Les forces afghanes contrôlaient alors l’aéroport, au sud de la ville, où des combats se déroulaient. Elles ont obtenu l’appui de forces aériennes de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) déployées en Afghanistan. Selon une source sécuritaire afghane, une quinzaine de combattants ont été tués dans les trois raids aériens, dont Mawlawi Salam, un important cadre provincial des talibans. Cette information a été démentie par ces derniers.
Des soldats de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS/ISAF), dont la mission s’est officiellement achevée au 1er janvier 2015, ont également été déployés sur le terrain. Il s’agit, selon une source occidentale, de soldats allemands, américains et britanniques, membres de forces spéciales. Le commandement américain a évoqué la mission générale de « conseil et de soutien » auprès des soldats afghans sans autre précision.
Les troupes allemandes, qui étaient chargées de gérer la cette zone dans le cadre de la FIAS, ont quitté les lieux de combats hier pour rejoindre leur base à Mazar-e-Sharif (Balkh, nord), la quatrième ville d’Afghanistan, à environ 150 kilomètres à l’ouest de Koundounz. Cette dernière a fait l’objet de menaces de la part des talibans.
Menaces sur Mazar-e-Sharif
« Si les frappes aériennes s’accentuent, nous pourrions nous retirer de Koundouz, mais nous comptons étendre la guerre vers Takhar et Mazar-e-Sharif »,
a déclaré un responsable taliban au Pakistan, à propos de cette région frontalière avec l’Ouzbékistan. Des talibans y avaient été massacrés peu à la fin de la guerre civile, durant les années 1997-1998 ; ce fut la dernière grande ville prise par les islamistes et ces derniers ont assassiné plusieurs centaines ou milliers d’opposants, notamment des chiites hazaras, en retour. Rapidement après l’invasion du pays en 2001, les anciens ennemis des talibans avaient repris la zone. Plusieurs centaines de talibans auraient alors été massacrés et leurs corps jetés dans des fosses communes selon certaines accusations1.
« Kaboul n’est qu’à 340 km (de Kunduz). Si nous avons réussi à prendre Kunduz, Kaboul ne sera pas plus difficile à prendre »,
a-t-il ajouté.
Le récent regain d’activité des talibans et les informations de ces derniers jours pourraient amener le gouvernement américain à reconsidérer leur retrait, prévu pour l’instant en 2016.
Un officiel afghan annonce la reprise de la ville
Dans la nuit, le porte-parole du ministère de l’Intérieur Sediq Sediqqi a annoncé que Koundouz avait été reprise.
« [La ville] est reprise et nettoyée de ses terroristes, lourdes pertes chez l’ennemi »,
a-t-il fait savoir.
L’information a été confirmée par l’ambassadeur afghan aux États-Unis, Abdullah Mohib, mais sans autres sources.
1Le « massacre de Dasht-e-Leili » a été évoqué dans le film Afghan Massacre : The Convoy of Death [Massacre afghan : le convoi de la mort] du réalisateur irlandais Jaime Doran aux méthodes et à la déontologie contestées. Plusieurs milliers de combattants talibans s’étaient rendus après la prise de Koundouz en 2001 par le Front uni islamique et national pour le salut de l’Afghanistan (Jabha-yi Muttahid-i Islami-yi Milli bara-yi Nijat-i Afghanistan, dit Alliance du Nord) soutenu par les Américains. Les prisonniers furent en partie incarcérés à la prison de Qala-e-Jangi, où une révolte très violente se transforma en bataille en décembre 2001. Les prisonniers survivants furent envoyés ensuite vers la prison de Shebergan. Plusieurs centaines d’entre eux seraient morts asphyxiés durant le transfert en convoi ferroviaire. D’autres auraient été ensuite torturés et exécutés dans la prison, toujours avec la présence de soldats américains.