Je le confesse : je suis de ceux qui, longtemps, ont regardé avec beaucoup de sympathie M. Zemmour, et mettaient même certains espoirs en lui. Nous n’ignorions alors ni sa pratique religieuse juive (malgré son athéisme) ni son gaullo-bonapartisme jacobin. Mais il osait : il osait critiquer l’attachement excessif de beaucoup de ses coreligionnaires à Israël et remettre en cause leur loyalisme ; il osait comparer Mohamed Merah à ses victimes juives car tous se faisaient enterrer à l’étranger, montrant leur peu d’attachement réel à la France ; il osait remettre en cause le « dogme » de l’innocence de Dreyfus, rappelant qu’elle n’avait jamais été vraiment démontrée ; il osait rappeler le rôle des Juifs dans le communisme, de la révolution de 1917 à mai 68, et son influence sur la montée antisémite de l’entre-deux-guerres ; il osait défendre le maréchal Pétain et Vichy au moyen de la vieille thèse de l’épée (de Gaulle) et du bouclier (Pétain), je reconnaissais là son courage sans l’approuver, car en l’occurrence l’épée avait comme seul objectif la destruction du bouclier, mais peu importe ici.
Néanmoins, il y avait déjà eu Destin français, avec des lignes affligeantes de louanges sur Israël, mais nous lui pardonnions alors en raison du reste ; et, surtout, son entrée en politique active en 2021. Dès les premiers mois, j’avais compris que toute audace de sa part était terminée : lui qui était contre l’avortement ne voulait plus remettre en cause la loi Veil ; lui qui était contre le « mariage homosexuel » ne voulait plus remettre en cause la loi Taubira ; lui qui défendait la liberté d’expression ne voulait plus remettre en cause la loi Gayssot ; lui qui défendait la peine de mort ne voulait plus revenir sur son abolition ; et, reniement suprême, alors même que ses soutiens s’en prenaient à Marine Le Pen qui renonçait à interdire la double nationalité, il annonçait quelques jours plus tard que lui non plus ne la remettrait pas en cause… Dès lors, la querelle aussi implacable que stupide entre les partisans d’Éric Zemmour et ceux de Marine Le Pen pour l’élection présidentielle n’avait plus aucun sens, car, au-delà des apparences, leurs programmes respectifs étaient quasiment identiques.
Mais le tournant définitif eut lieu le 7 octobre 2023 : ce jour-là, Zemmour fit le choix du soutien inconditionnel et total à Israël. Il se fait depuis l’apôtre de l’alliance judéo-chrétienne contre l’Islam, rejoignant docilement les rangs des relais français du Likoud, aux côtés de l’ex-député agresseur de nationalistes Meyer Habib, du Tartuffe de la liberté d’expression Gilles-William Goldnadel ou des hystériques Alain Finkielkraut et Élisabeth Lévy. Mais son parcours fait qu’il amène dans son sillage des « goyim » : Philippe de Villiers, Marion Maréchal (qui, même séparée de lui, reste d’un sionisme inconditionnel), et tant d’autres catholiques qui y voient l’aboutissement de quarante-cinq ans de judéo-christianisme pontifical (celui-ci contraire à l’Évangile, à toute la Tradition, aux Pères, aux Docteurs et à tout le magistère jusqu’à Paul VI).
Et aujourd’hui, M. Zemmour prêche. À l’occasion de la sortie de son dernier livre La messe n’est pas dite : le sursaut judéo-chrétien, il prêche infatigablement l’alliance entre Juifs et chrétiens, unis contre les musulmans. Et les catholiques français, même les traditionalistes, tendent l’oreille avec sympathie en l’écoutant dénoncer les désastres engendrés par l’immigration, les persécutions islamiques contre les chrétiens, la faiblesse et la complaisance de nos gouvernants face aux musulmans les plus radicaux, l’incompatibilité totale entre l’Évangile et le Coran. Il enfonce des portes ouvertes avec le talent qu’on lui connaît. Et le Français moyen, le catholique moyen, qui, dans les rues des grandes villes, ne voit pas de délinquants à kippa mais seulement des Arabes et des Africains pour la plupart musulmans, et qui voient aussi le soutien total d’une certaine extrême-gauche wokiste à la cause palestinienne, se dit qu’après tout, l’ennemi de mon ennemi est mon ami, alors vive Israël !
Ces nombreux français de droite qui raisonnent ainsi ignorent ou oublient beaucoup de choses.
D’abord, si le Coran est incompatible avec l’Évangile, il respecte tout de même Jésus et la Vierge Marie : on notera au passage qu’au moment même où Zemmour parcourt les plateaux télé, la République islamique d’Iran, censée être le mal absolu, inaugure une station de métro à Téhéran nommée en l’honneur de la Très Sainte Vierge Marie, avec statue la représentant ; au contraire, le Talmud, que M. Zemmour a abondamment étudié dans son enfance, insulte et maudit par les pires blasphèmes Notre Seigneur et Sa Sainte Mère, traitant celle-ci de prostituée, sans parler évidemment des innombrables commandements enseignant la haine des non-juifs, particulièrement des chrétiens, dont il est dit qu’ils sont des animaux à apparence humaine.
Ensuite, s’il est facile d’énumérer les exactions du terrorisme islamique, il est néanmoins utile de rappeler qui a lutté contre : sur les 170 000 morts de l’armée syrienne et de ses milices alliées qui ont combattu l’État Islamique et les différents groupes islamistes, souvent soutenus par l’Occident, la plupart étaient musulmans. Pareil en Irak. Avant que la Russie n’intervienne, ce sont seulement les gouvernements musulmans de Syrie et d’Irak et les « horribles islamistes » de l’Iran et du Hezbollah libanais qui ont combattu sur le terrain les massacreurs de chrétiens et de biens d’autres d’ailleurs (la plupart de leurs victimes étaient musulmanes). Pendant ce temps-là, Israël soignait les blessés de l’État Islamique car « l’ennemi de mon ennemi… ». Rappelons que c’est cet État Islamique, et non pas le Hamas ou le Hezbollah, qui a perpétré les attentats tuant des centaines de Français sur notre sol. De même, c’est bien le très musulman maréchal Abdel Fattah Al-Sissi qui a renversé les islamistes en Égypte, sauvant par là-même la communauté copte. Qu’on le veuille ou non, ce sont des musulmans qui, au Moyen-Orient, sur le terrain, combattent réellement ces groupes terroristes, loin des plateaux télé où pérorent les Zemmour et consorts.
L’erreur fondamentale est de faire de l’islam un bloc monolithique, et des Musulmans une armée rangée en bataille. Les Musulmans sont extrêmement divisés : pour des raisons religieuses, pour des raisons ethniques, pour des raisons politiques. Cela n’a aucun sens de déclarer la guerre totale à une cinquantaine de pays et à des centaines de millions de personnes. L’islamisation de la France tant dénoncée par Zemmour n’est que la conséquence de l’immigration : réglons le problème de l’immigration massive et incontrôlée, de la délinquance en grande partie d’origine immigrée, et le problème de l’islam ne se posera même plus.
Il ne nous appartient pas de juger de la sincérité d’Éric Zemmour, mais la droite israélienne, qui fait les yeux doux aux nationalistes européens défenseurs de la « civilisation judéo-chrétienne », est la même qui, chez elle, persécute les chrétiens, détruit les églises, crache sur les pèlerins à Jérusalem, chasse les fidèles de leurs terres en Cisjordanie, les massacre au même titre que les musulmans à Gaza ou au Liban. Ces gens-là sont des menteurs, leur « main tendue » n’est qu’un leurre, ils nous détestent. Ils sont les dignes successeurs des Pharisiens dont ils se revendiquent : ils haïssent les chrétiens comme leurs ancêtres haïssaient le Christ. Pour eux, rien n’a changé depuis deux mille ans, et comme le disait Édouard Drumont : « C’est le même mensonge, la même haine, le même peuple. »
Quentin Douté,
Secrétaire général du Mouvement National-Catholique
Source : Mouvement National-Catholique





























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