Victoire surprise des conservateurs
À l’issue du premier tour, le candidat de l’opposition Andrzej Duda est arrivé en tête en totalisant 34,76 % des voix (5 179 092 suffrages) devançant le président sortant, Bronislaw Komorowski, qui ne recueille que 33,77 % (5 031 060). Ce dernier était pourtant annoncé largement vainqueur par les sondeurs ; les dernières enquêtes d’opinion lui accordaient entre 33,3 et 39,7 %. À l’inverse, Andrzej Duda n’était crédité que de 27 % à 31 %.
Andrzej Duda, membre du parti conservateur Droit et Justice, fut ministre de la Justice de Lech Kaczynski avant la mort de ce dernier. Il avait été nommé candidat de son parti à la surprise générale après le retrait de Jaroslaw Kaczynski en novembre dernier. Il a axé sa campagne sur la défense des valeurs chrétiennes traditionnelles, la lutte contre les inégalités sociales, affichant clairement sa méfiance vis-à-vis de l’Union européenne (UE). Dans un contexte régional très tendu, Droit et Justice s’est rapproché de l’alliance américaine par crainte de la Russie, une tendance assez générale ; son candidat avait pourtant moins insisté que son adversaire sur l’actuelle guerre en Ukraine.
Un rockeur à droite en troisième place, mais pas de surprise pour les nationalistes
Autre grosse surprise de ce scrutin, le ‘rockeur’ Pawel Kukiz, avatar local de la candidature dissidente issue de la société civile, totalise plus de 20 % des voix (exactement 20,8 %, 3 099 079 voix). Les derniers sondages lui donnaient entre 13 % et 19 %. Relativement conservateur sur des questions sociétales (il s’oppose à l’adoption d’enfants par les paires de déviants), il a appartenu au comité d’organisation de la Marche du 11 novembre, aux côtés des organisations nationalistes.
Parmi les 23 candidats au total, onze étaient parvenus à recueillir les 100 000 signatures de citoyens nécessaires pour affronter les urnes. C’était le cas de Marian Kowalski pour le Mouvement national (RN, Ruch Narodowy). Dans un contexte difficile dans un pays votant largement à droite et où la plupart des candidats affichent des positions recoupant celles des nationalistes (défense de la famille notamment), 77 630 Polonais ont voté pour lui (0,52 %). Il devait affronter des candidats de partis libéraux anti-UE (Congrès de la Nouvelle Droite, 0,46 %) ou conservateurs agrariens (Parti du peuple polonais, 1,9 %), etc.
La gauche est totalement laminée. Magdalena Ogórek, candidate « indépendante » soutenue notamment l’Alliance de la gauche démocratique n’obtient que 2,38 %. La gauche décline de façon quasi constante depuis la fin des années 1990.
Un second tour incertain
Les négociations et rencontres ont commencé ce lundi entre les différents groupes politiques. Le deuxième tour se déroulera dans quinze jours et apparaît aujourd’hui très indécis. Les sondages accordaient jusqu’ici une large avance au président sortant. Le 7 mai l’institut Millward Brown créditait le candidat libéral-centriste de 54 %, contre 41 % au candidat conservateur et 5 % d’indécis.
D’autres indécis pourraient faire basculer le scrutin : les abstentionnistes. Au premier tour, le taux de participation n’a été que de 48,96 %.
Au lendemain du premier tour, la seule alliance des deux candidats d’opposition peut suffire à chuter le sortant. S’il n’appellera sans doute pas à voter pour ce dernier, Pawel Kukiz pourrait n’apporter son soutien au second tour à personne ; le choix de ses électeurs, abstention ou vote conservateur, sera en mesure de faire basculer le scrutin. Sans surprise, le candidat conservateur a reçu le soutien pour le second tour des organisations proches de ses idées politiques, sociales et morales. Au contraire, le président sortant est soutenu par les centristes et les libéraux.
Cela laisse augurer des élections législatives difficiles pour la Plate-forme civique, le parti centriste libéral et européiste qui soutient le président sortant et au contraire laisse de grands espoirs pour l’opposition de droite.