Certains camarades nationalistes, français, belges, italiens et un Américain, ont pu goûter ces derniers mois une petite tranche de vie au Liban et en Syrie
Pendant presque deux décennies (de 1975 à 1990), Beyrouth a été ravagée par la guerre civile et à nouveau en 2006. Plusieurs quartiers de la ville en portent encore les traces et l’armée est omniprésente ; diverses rues sont interdites à la circulation, non pas comme à Paris, à Francfort, à Barcelone ou à Bruxelles afin de complaire aux « bobos » et persécuter les automobilistes ou au prétexte de « Je suis Charlie », mais tout simplement pour éviter les attentats à la voiture piégée, spécialité des sunnites de la région.
Il est à retenir que la moitié de la population du Liban vit dans la capitale, Beyrouth (2 150 000 habitants) ce qui explique en grande partie les embouteillages de 7 h à 23 h !
Réelle cité cosmopolite, carrefour multiculturel de la zone, croisement pluriethnique du Proche-Orient, ce centre marchand depuis des siècles véritable vitrine de la région, ne peut en aucun cas être un exemple d’importation chez nous, tel que le souhaiteraient des utopistes comme MM. Hollande, BHL, Cameron, Renzi et C°.
Évidemment et pour ceux d’entre nous qui en ont vu les coulisses, la vie des beyrouthins n’est pas « un long fleuve tranquille ». Beaucoup sont armés et les milices surveillent et défendent leur quartier.
Le nord-est du pays a aussi subi l’invasion de djihadistes étrangers appartenant au Front pour la victoire du peuple du Levant (Jabhat an-Nuṣrah li-Ahl ash-Shām dit Front al-Nosra) et l’État islamique (ÉI), qui ont kidnappé 26 soldats et policiers libanais début août 2014 à Ersal. Trois ont été décapités et al-Nosra demande que tous les prisonniers islamistes détenus par la justice libanaise pour actes de terrorisme au Liban soient libérés. Et l’on sait maintenant qu’al-Nosra, sur le plan logistique, est aidé par l’armée israélienne qui opère des bombardements à l’intérieur de la Syrie elle-même pour aider les combattants takfiristes. De plus, les blessés d’al-Nosra sont soignés dans les hôpitaux israéliens, comme déjà filmé par les télévisions sionistes. De hauts gradés de Tsahal l’ont admis et reconnu.
À moins de 70 kilomètres de Beyrouth, le port de Tripoli (2e ville du Liban) a été le théâtre d’affrontements armés entre le 20 et le 28 octobre 2014 ; de violents combats ont opposé l’armée libanaise aux miliciens islamistes de Chadi Mawlaoui et Oussama Mansour. « Il n’y aura pas de cessez-le-feu, car l’armée est décidée à en finir avec la situation anormale à Tripoli » avait déclaré un officier. Ces combats ont fait de nombreuses victimes militaires et civiles et les bombardements de part et d’autre ont provoqué des dizaines d’incendies dans le centre-ville. On vous en a parlé ? NON ?
Eh bien à Beyrouth, la situation aussi est tendue…très tendue.
Parce que le pays du Cèdre n’a pas échappé au conflit régional et que les politiciens comme la société civile sont divisés entre défenseurs et opposants au régime de Damas.
Un État en déliquescence ?
Au Liban, il n’y a plus de président de la république depuis un an, en raison de l’incapacité du Parlement libanais à se mettre d’accord sur un candidat. Cet imbroglio dure depuis longtemps avec le refus de faire voter une loi électorale équitable (avec un scrutin proportionnel) et le refus en 2013 de tenir des élections législatives au prétexte d’insécurité, ce qui a conduit le Parlement à proroger sa législature à deux reprises.
Dans tous les organes constitutionnels on retrouve les logiques communautaires avec du côté sunnite la famille Hariri (soutenue par l’Arabie séoudite) , les chiites avec Hassan Nassralah et le Parti d’Allah (Hezbollah) (soutenus par l’Iran) , les druzes avec leurs leaders Walid Joumblad d’un côté – président du PSP, vice-président de l’Internationale socialiste, ami de François Hollande, milliardaire – (ennemi de la Syrie) et opposé à Wi’am Wahhab – ex-ministre, député, tribun charismatique et fervent soutien de Bachar el-Assad –, les Kataeb des phalangistes chrétiens (proches d’Israël) qui viennent d’élire ce 14 juin leur 7e président, Samy Gemayel, 34 ans (fils de l’ex-président du Liban Amine Gemayel) , sans oublier certaines factions palestiniennes ou juives.
C’est pourquoi, le général Michel Aoun, qui dispose de la plus forte représentation de députés chrétiens (le Courant patriotique libre) revendique la fonction de président de la république, fort de son alliance avec le Hezbollah et de sa récente réconciliation avec Samir Geagea, le chef des Forces libanaises. Le titre du 9 juin 2015 en 1ère page du quotidien L’Orient-Le Jour est limpide :
« le diktat du Hezbollah : Aoun ou personne ».
Malgré cette situation chaotique du pays, la société libanaise s’est habituée à une autogestion, notamment depuis la guerre civile de 1975-1990, car insatisfaite de l’ingérence communautariste et de la corruption de son État. En attendant mieux, les gens s’organisent comme ils peuvent dans le secteur privé comme dans le public, afin d’assurer le fonctionnement de l’économie et de l’administration.
Et c’est dans ce contexte pour le moins perturbé que les parlementaires français Bruno Le Maire et Alain Marsaud se sont rendu les 17 et 18 juin à Beyrouth à l’invitation de la section des Républicains du Liban. Lors d’un meeting à l’hôtel « The Smallville », B. Le Maire à confirmé son hostilité à Bachar el-Assad en affirmant qu’il faudrait aussi « aller bombarder Damas »…
Trois points cruciaux restent toujours à résoudre :
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Comment faire face au danger de l’ÉI du Front al-Nosra, pour épargner au Liban le sort de l’Irak et de la Syrie ?
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Actions militaires à mener à Ersal, dans le nord-est des Monts du Liban et au Sud du pays?
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Établissements de camps de réfugiés (40 % de la population libanaise) pour 1,3 million recensés et 500.000 clandestins ?
Avec la guerre en Syrie, le Liban est également touché, avec l’afflux des réfugiés depuis 4 ans. Au début, beaucoup de familles pauvres habitant près des frontières avaient accueilli leurs parents syriens. Mais dans ces villages, la population réfugiée a rapidement compté 4 à 5 fois plus que les Libanais d’origine, ce qui a entraîné la mise en place de camps (notamment près de Ersal, Marj, Anjar et de Zahlé, entre autres) où se sont infiltrés des membres de l’ÉI et d’al-Nosra qui ont évidemment développé les combats sur le sol libanais.
« Nos amis et alliés ont fondé pour détruire le Hezbollah ».
C’est par cette déclaration que le général Wesley Clark a confirmé fin février 2015 les responsabilités des États-Unis, de l’Arabie séoudite, de la Turquie, du Qatar et d’Israël dans le recrutement, la formation, l’armement et le financement des différentes composantes issues de La Base (el-Qaïda) en Irak et au Levant et ce, dès avril 2006 ! Depuis 9 ans les USA sèment le mensonge et la mort…
Certaines sources affirment aujourd’hui que les katibas de Daesh sont les mieux armées et les plus aguerries de tous le Proche-Orient, car avec la prise de Mossoul en juin 2014, les armements récupérés auprès des groupes ralliés de l’Armée syrienne libre (ASL) et les approvisionnements largués par les avions de la coalition, les takfiristes possèdent plusieurs milliers de véhicules blindés, d’innombrables camions, des batteries d’artillerie de 155mm M-198, des milliers de mitrailleuses PKC, des missiles Milan, Tow, FN 6 et Stinger, ainsi qu’un matériel de transmissions plus performant que les armées syrienne et irakienne, avec en prime un « moral d’acier »…
Une anecdote, parmi d’autres : le 14 mai 2015, le général Thomas Weidley, numéro 2 du commandement US en Irak avait affirmé : « les extrémistes sont sur la défensive et incapables de rassembler des forces importantes pour lancer des attaques coordonnées. C’est le résultat des campagnes aériennes menées avec nos alliés. » Effectivement, en un mois, ce sont plus de 170 raids aériens qui ont bombardé les colonnes islamistes. Mais le 19 mai 2015, la ville de Ramadi tombait aux mains des takfiristes de l’ÉI, parce que la 8e division irakienne abandonnait à toute vitesse ses positions en emportant ses chars, ses véhicules blindés, et ses soldats, entassés pêle-mêle dans les camions…sans combattre !
La prétendue Coalition de 22 États affirme disposer d’un nombre supérieur d’hommes qui seraient mieux formés et équipés de meilleurs matériels que l’ÉI. Pourtant, et depuis de longs mois, elle n’a pas fait reculer l’Émirat islamique parce que, bien au contraire, celui-ci ne cesse de conquérir de nouvelles routes et de carrefours stratégiques, comme Palmyre le 20 mai dernier.
De son côté le chef d’al-Nosra, Abou Mohammad al-Joulani, recruté, financé, armé et nourri par le Qatar, la Turquie, l’Arabie Saoudite et Israël, avait déclaré fin mai dans une interview à la TV satellitaire al-Jazira que « la doctrine de notre groupe ne prévoit pas d’attaque, ni d’agression de l’Occident » ( ???) …pour le moment. Par contre, mercredi 10 juin, il a ordonné le massacre de 32 Druzes dans le village de Qalb Lozé (province d’Idleb) en Syrie. On vous en a parlé ?
Billard à trois bandes en Syrie.
Hormis les négociations entre les USA (5+1) et l’Iran sur le nucléaire, les pourparlers entre l’UE et la Russie concernant l’Ukraine et les relations entre l’Iran et la Russie, il est indéniable que l’Irak et la Syrie se retrouvent au centre du jeu.
Le dossier ukrainien absorbe beaucoup d’énergie pour la Russie et affaiblit sa marge de manœuvre en Syrie, car Poutine ne peut se battre sur deux fronts à la fois. Moscou pousse au dialogue national en Syrie, mais à deux conditions : primo, les instances gouvernementales devront rester en place, mais peut-être sans Assad ; secundo, la souveraineté et l’intégrité du territoire de la Syrie ne devront pas être remises en cause.
Il serait donc probable qu’un consensus se fasse jour entre Russes et Occidentaux pour une coopération contre le terrorisme et l’intégrisme religieux.
Fait nouveau, la Russie cherche de nouveaux partenaires dans la région tels Israël, la Turquie, l’Arabie séoudite (présente au forum de Saint-Pétersbourg le 18 juin) et l’Égypte du maréchal el-Sissi.
Le destin du président Bachar el-Assad tient donc uniquement à la solidité de ses alliances avec l’Iran et la Russie.
Par ailleurs, il est tout de même extraordinaire de constater aujourd’hui que plusieurs éditorialistes de la presse française admettent l’insanité de la politique menée par le gouvernement français – et l’ensemble de la communauté européenne – à l’égard de la Syrie depuis 4 ans. Ainsi on a pu lire des articles titrés « Il faut sauver le soldat Bachar. » dans certains hebdomadaires parisiens.
Les journalistes ouvriraient-ils les yeux alors qu’avant, le président syrien était pire que Lucifer…
Un accord USA-IRAN ou… rien.
Les cinq puissances du Conseil de Sécurité et l’Allemagne devraient prochainement lever l’embargo et les Américains pourraient aussitôt restituer 25% des avoirs iraniens bloqués (soit 50 milliards USD). En même temps, Téhéran et Washington se partageraient le Moyen-Orient, sous la forme d’un Yalta régional. Parce que l’objectif stratégique des USA avec cet accord est de rétablir l’Iran dans le rôle qu’il exerçait à l’époque du Shah, c’est-à-dire celui de gendarme régional. En acceptant, Téhéran renoncerait à la doctrine anti-impérialiste de l’imam Khomeiny.
Mais pour que cet accord soit accepté par l’opinion publique mondiale, il faut aussi un cessez-le-feu général dans la zone et là, c’est plus compliqué, car impliquant deux objectifs yankees : d’abord une garantie de la sécurité de l’État hébreu et le contrôle des ressources énergétiques ensuite ; car ce n’est plus un secret que l’exploitation du pétrole et la découverte de nouveaux gisements de gaz dans la région, sont aussi à l’origine du conflit, et ce dès 1993.
Cela suppose une pacification de l’Irak, de la Syrie et du Liban.
Il faudrait donc que les parties admettent que les frontières ne puissent être modifiées que par la négociation et non par la force. Que les USA abandonnent leur stratégie du chaos appliquée depuis 1980 et que l’Iran renonce à ses critiques contre le « Grand Satan ».
Pour parvenir à ces accords, le président Obama a publiquement reconnu le bien-fondé des fatwas de l’imam Khomeiny et de l’ayatollah Khamenei qui tous les deux avaient condamné l’usage de la bombe atomique et des armes de destruction massive, comme contraire à l’Islam (il y a déjà plus de 30 ans) et ils avaient tous les deux interdit la recherche, le stockage et l’usage de ce type d’arme. Peu de médias en avaient fait état. Dès lors, les pourparlers étant recadrés, il s’agissait plutôt de l’utilisation du nucléaire civil à des fins militaires, tels que les moteurs atomiques dans les navires de guerre ou les technologiques nucléaires très avancées dont les USA veulent priver les autres pays.*
Conférence internationale pour la reconstruction de la Syrie.
Organisée par les chambres d’industrie de Damas, sous l’égide du ministère de l’Industrie, elle a eu lieu les 10 /11 juin au Sham Hôtel, avec environ 400 participants de pays limitrophes et de Syrie, d’une délégation turque et 2 représentants belges, en l’absence d’autre pays européens.
Le ministre de l’Industrie, Kamaleddine Tou’meh a précisé que la situation de la Syrie n’a pas empêché le gouvernement d’appliquer les impératifs de l’économie nationale par l’application de mesures rationnelles qui ont permis l’équilibre entre les possibilités et les priorités, de combler les lacunes entre les ressources et les dépenses et entre les importations et les exportations.
Le ministre a fait valoir que le gouvernement a mobilisé toutes les énergies humaines du secteur public et du secteur privé afin de surmonter les obstacles qui entravaient les investissements intérieurs et extérieurs.
Dans son allocution, le ministre de l’Industrie a fait part de son souci de développer le secteur privé en poursuivant la réforme économique et administrative en cours et la prochaine promulgation d’une législation adéquate.
Tout au long des différents contacts que nous avons pu prendre durant notre séjour à Damas, il en est ressorti que les entrepreneurs, les TPE ou les PME, observent avec attention les conséquences des accords USA-IRAN. Ce fut l’un des sujets les plus abordés, outre le contexte des futures élections au Liban (courant septembre 2015). Dans cette optique post-terrorisme, la plupart parlent de « pacification » et donc de reconstruction de la Syrie, pour laquelle le pays attend des participations étrangères dans les domaines les plus variés : infrastructures, santé publique, enseignement, épuration des eaux, immobilier, pétrole et gaz, électricité, informatique et télécommunications. L’ensemble étant chiffré à plus de 400 milliards de dollars.
À noter qu’un immense gisement de gaz aurait été découvert depuis quelques années entre Damas et Homs, et que ces réserves dépasseraient de loin celle du Qatar…
Durant notre séjour, nous avons été reçus avec l’extrême gentillesse des Damascènes et nous n’avons pas vu ou entendu de tirs ou d’explosions dans la ville ou les banlieues. Par contre le mercredi 17 juin, la milice Jaïch al-Islam, dirigée par le pro-séoudien Zahrane Allouche, a bombardé les quartiers résidentiels et particulièrement la place Aarnous, faisant 11 morts.
Pieter KERSTENS (écrit à Damas le 13 juin 2015)
* Pour votre information : saviez-vous qu’une bombe à neutron a été larguée au Yémen, au nord de la banlieue de Sanaa, le 20 mai 2015 ? Consultez l’interview du professeur Bassam Tahhan sur youtube v=WKpUv/8c1fpM ou le site www.eurasiexpress.com.