Le président turc Recep Tayyip Erdogan s’est rendu en Albanie pour inaugurer une nouvelle mosquée à Tirana, la plus grande mosquée des Balkans, dont la construction a été financée par la Turquie. Ce n’est pas sa première visite à Tirana, mais cette fois l’accent a été mis sur la politique turque dans les Balkans. Cette visite intervient après que le Premier ministre albanais Edi Rama a annoncé le 23 septembre devant l’Assemblée générale des Nations Unies à New York que son pays « prévoyait d’établir un Etat souverain pour les musulmans bektachis, semblable au Vatican, dans la capitale Tirana » selon The Week.
La secte des Bektachis représente la quatrième plus grande communauté religieuse d’Albanie après les musulmans sunnites et les chrétiens. Mais même la publication turque pro-gouvernementale Hürriyet se pose la question : « Pourquoi le Premier ministre albanais Rama, un chrétien catholique, a-t-il soudainement décidé d’attribuer des terres de la capitale de son pays pour créer un État musulman souverain et tenter de mobiliser le soutien international pour sa reconnaissance ? »
Pourquoi les Bektashis auraient besoin d’un État souverain ? Seuls le Premier ministre Rama et le chef spirituel de cet ordre, l’ancien officier de l’armée albanaise Edmond Brahimaj, connu de ses partisans sous le nom de Baba Mondi, le savent…
Entre-temps, les promoteurs de ce « Vatican albanais » ont déjà annoncé le périmètre du projet : le territoire du nouvel État occupera plusieurs quartiers de la partie orientale de Tirana, qui appartiennent désormais à la communauté Bektash (soit environ 1/4 de la superficie du Vatican). Il y aura un bâtiment pour les réunions et les prières, un musée de l’ordre, des archives, un hôpital et des bureaux administratifs. Le nouvel État n’aura cependant – pour le moment – ni armée, ni service frontalier, ni tribunaux, mais il disposera de services de renseignements « parce qu’il a des ennemis »…
Le chef à vie de ce « Vatican albanais » serait évidemment le promoteur du projet, Baba Mondi, dont le pouvoir deviendra pratiquement absolu dans cet « État souverain de l’Ordre Bektachis » (ce sera le nom officiel du nouvel État).

La secte des derviches « Bektachis » est né au XIIIe siècle sur le territoire de la Turquie moderne. Pendant de nombreux siècles, les membres étaient les janissaires, l’infanterie régulière de l’Empire ottoman. Après son effondrement, l’arrivée au pouvoir de Kemal Atatürk et le début du processus de laïcisation du pays, les Bektachis ont été soumis à une répression. Beaucoup d’entre eux ont quitté la Turquie et l’Albanie est devenue alors le nouveau centre d’activité des Bektachis. Les Bektachis sont proches des chiites (ils adorent Ali, le gendre du Prophète). Les Bektachis ne suivent pas les règles de la charia et professent une compréhension allégorique du Coran, ils célèbrent le « Nowruz » zoroastrien comme étant l’anniversaire d’Ali et pratiquent une confession annuelle.
Néanmoins, en Turquie même, selon le ministère de l’Intérieur du pays, il y a 12,5 millions d’adeptes de cette secte, soit bien plus qu’en Albanie…
Selon les analystes, si les Bektachis, acquéraient un État et ses apparences, ils seraient susceptibles de poursuive leurs intérêts plus largement dans la région, non seulement en Albanie et dans les Balkans, mais aussi dans le reste de l’Europe…
Qui est derrière le soutien à la secte des Bektachis et à quelles fins ? Telle est la question. Peut-on imaginer que ce ne soit pas les États-Unis et Israël ? Ils sont très probablement à la manœuvre derrière cette décision du gouvernement albanais.
Quant à la Turquie, sous la présidence d’Erdogan, elle semble défendre ses intérêts et son influence. Quoi de plus normal, excepté en Europe où tout est inversé ?