Le mythe de la passivité juive face au nazisme
À la fin de ma critique du livre de feu David Cesarani, Final Solution: The Fate of the Jews, 1933–1949, je remarquai que « l’Holocauste », en tant que concept culturel, avait fait disparaître les Juifs en tant que participants actifs au cours de la Seconde Guerre mondiale[1]. Réagissant à cette représentation de la passivité juive pendant cette période, j’ai commenté : « En lisant les milliers et les milliers d’histoires de la Seconde Guerre mondiale, on a l’impression qu’il n’y a pas seulement une seule guerre, mais aussi un seul agresseur. Comment se fait-il que ‘les Juifs’ disparaissent de la scène historique en tant que belligérants en 1939, alors que les six années précédentes les avaient vus s’engager dans des guerres de propagande internationale, des manœuvres politiques et des assassinats ciblés dans plusieurs pays européens ? C’est une question qui n’est jamais posée. » L’ouvrage relativement court mais efficace de Benjamin Ginsberg, How the Jewish Defeated Hitler (2013), peut être considéré comme une exception significative à cette omission écrasante. Selon Ginsberg, les Juifs ont joué « un rôle majeur dans la défaite de l’Allemagne nazie[2] ».
Dans l’introduction de son livre, Ginsberg, qui est professeur de science politique à l’Université Johns Hopkins, présente la structure de son argumentation ainsi que sa définition de la résistance juive contre l’avancée du national-socialisme en Europe. La définition de Ginsberg de la résistance juive est importante car elle diffère considérablement de celle qui domine l’historiographie de l’Holocauste. En bref, l’argument historiographique d’avant les années 2010 se limitait à deux courants de pensée, tous deux biaisés et fautifs. Le premier courant était la négation même de l’idée de résistance juive. Il reposait sur des affirmations larmoyantes selon lesquelles les Juifs n’opposèrent aucune résistance à une hostilité allemande non provoquée et irrationnelle, et se laissèrent conduire au meurtre de masse comme « des agneaux à l’abattage ». Ce courant, bien représenté par The Holocaust: The Jewish Tragedy (Harper Collins, 1986) de Martin Gilbert, est surtout associé au jugement de Raul Hilberg selon laquelle « le modèle de réaction des Juifs est caractérisé par une absence presque totale de résistance ». Ce premier axe d’argumentation était particulièrement populaire dans la diaspora, en particulier aux États-Unis et en Grande-Bretagne. L’Holocauste s’est développé en tant que trope culturel dans ces pays en tandem avec le développement de ce courant lacrymal de l’historiographie.
L’idée d’une victimisation totalement passive était cependant moins populaire parmi les universitaires israéliens et les sionistes extrémistes en général. Aux yeux de ces Juifs, l’expérience juive pendant la Seconde Guerre mondiale avait renforcé et confirmé leurs arguments d’avant-guerre en faveur d’un foyer national juif, et c’était presque une question de fierté nationale que l’accent soit mis sur les efforts explicitement juifs pour lutter contre l’Allemagne national-socialiste. Dans ce contexte, des histoires ont commencé à émerger en Israël dans les années 1960, glorifiant la guerre partisane juive, ou des événements tels que le soulèvement de Varsovie. Ce deuxième courant de l’historiographie de la résistance juive retenait bien sûr l’idée que les juifs étaient victimes d’une hostilité allemande irrationnelle et non provoquée, mais il contestait leur passivité totale face à une telle hostilité et s’efforçait de mettre l’accent sur la participation juive armée dans les mouvements de résistance nationaux européens et dans la lutte partisane. Il véhiculait, dira-t-on, une idée de « victimisation musclée[3] ».
Ces deux thèses souffraient de graves défaillances méthodologiques et théoriques dans la mesure où elles limitaient la résistance juive à la sphère de l’action armée. Or même un regard rapide sur l’histoire juive suffit à se convaincre que, depuis le sac de Jérusalem par Titus en 70 après JC, les Juifs ont poursuivi leurs objectifs politiques par des moyens beaucoup plus subtils que les conflits armés. Le siècle précédant la Seconde Guerre mondiale a vu le développement de la politique juive moderne, impliquant la consolidation du pouvoir médiatique, le renforcement des réseaux politiques transnationaux, le développement de réseaux internationaux d’entraide juive (en particulier à la suite de l’affaire de Damas en 1840) et l’ascension des Juifs dans les gouvernements occidentaux. Il est donc remarquable que les discussions sur l’opposition juive au national-socialisme aient négligé ces sphères d’influence internationales terriblement efficaces. La contribution unique de Ginsberg est d’amener le débat sur la résistance juive dans ces domaines négligés. À travers quatre chapitres, Ginsberg explore l’activisme juif aux États-Unis, en Union soviétique, dans le domaine du contre-espionnage et dans la guerre de partisans, et soutient que les actions juives dans tous les domaines ont été cruciales pour la défaite de l’Allemagne national-socialiste.
Le chapitre sur l’Union soviétique est particulièrement intéressant. Pendant des siècles, les Juifs n’avaient pas les moyens de défense conventionnels dont disposait une nation menacée, et dans les années 1930, les Juifs formaient un groupe d’environ 18 millions de personnes dispersées à travers le monde. Cependant, pour compenser ces déficiences stratégiques, les Juifs pouvaient s’appuyer sur des siècles d’expérience dans des formes plus subtiles de diplomatie défensive, et dans les années 1930, cela impliquait « de travailler pour, avec et à travers des États et des dirigeants politiques qui partageaient leur hostilité envers l’Allemagne nazie[4] ». Ginsberg explique que dans les années 1930, les Juifs ont exercé une influence remarquable sur le gouvernement et la société soviétiques. Les Juifs ont joué un rôle crucial dans la fondation du Parti social-démocrate dans les années 1890, et le Bund socialiste juif a joué un rôle majeur dans la révolution avortée de 1905. Dans la période qui a précédé la révolution de 1917, les Juifs ont joué un rôle déterminant dans la direction des partis bolchevik et menchevik. Il était donc tout à fait prévisible qu’après la révolution, « parmi les premiers actes officiels des bolcheviks victorieux figurait l’interdiction des pogroms et des mouvements antisémites[5] ».
Les Juifs ont joué un rôle majeur dans le Parti communiste et l’État soviétique, prenant des postes clés dans des domaines tels que « les affaires étrangères, la propagande, les finances, l’administration et la production industrielle[6] ». La moitié du premier Politburo de Lénine était composée de juifs, et pendant les premières décennies du régime communiste, les Juifs étaient « particulièrement importants » dans les services de sécurité. Par exemple, le pharmacien juif Genrikh Yagoda était à la tête de la police secrète dans les années 1930 et se spécialisait dans la préparation de poisons que ses agents utiliseraient pour liquider les opposants de Staline. Ginsberg ajoute que « parmi d’autres officiers de la police secrète juive de haut rang figuraient M. T. Gay, qui dirigeait le département spécial qui a procédé à des arrestations massives pendant la ‘Grande Terreur’ des années 1930, ainsi que A. A. Slutsky et Boris Berman, qui étaient en charge de la terreur soviétique et de l’espionnage à l’étranger. »
S’élevant rapidement au rang d’élite dans la société soviétique, les Juifs jouissaient d’un accès privilégié aux professions et aux positions politiques et culturelles influentes. « Bien que représentant moins de 2% de la population totale, entre 1929 et 1939, les juifs constituaient 11% des étudiants des universités soviétiques. Ils formaient 17% des étudiants universitaires à Moscou, 19% à Leningrad, 24% à Kharkov et 35,6% à Kiev[7]. » Ginsberg ajoute que « les Juifs étaient devenus la colonne vertébrale de la bureaucratie soviétique et constituaient une grande partie des médecins, dentistes, pharmaciens et autres professionnels du pays, ainsi que près de 20 pour cent des scientifiques et des professeurs d’université dans les grandes villes comme Moscou et Leningrad[8]. » Le journaliste le plus influent d’URSS, Mikhail Koltsov, était juif, tandis que le présentateur officiel de la radio de l’Union soviétique, Yuri Levitan, était également juif. Les autres Juifs culturellement influents étaient Semyon Lozovsky, porte-parole en chef de la presse soviétique, Ilya Ehrenberg, le principal propagandiste du sentiment anti-allemand, et Vasily Grossman, le correspondant de guerre le plus influent de l’armée soviétique. L’industrie cinématographique soviétique était également dominée par les juifs Sergei Eisenstein, Mikhail Romm, Mark Donskoy, Leonid Lukov et Yuli Reisman. Ainsi, alors que les Juifs n’avaient apparemment pas de nation propre, Ginsberg fait remarquer qu’ils « avaient beaucoup d’influence au sein du nouvel État soviétique[9] ».
Ces Juifs soviétiques ont utilisé leur influence pour combattre la menace venant de l’Allemagne national-socialiste. Au cours des premières semaines de l’attaque allemande, la Wehrmacht a détruit plus de 17 000 avions soviétiques, 20 000 chars et 100 000 canons lourds et mortiers. Pas moins de 5 millions de soldats soviétiques avaient été tués, capturés ou portés disparus au combat. Les Juifs avaient un intérêt évident à lutter contre cette fatalité et ont inondé les positions influentes de l’armée afin de motiver un effort de résistance fanatique. Comme le note Ginsberg, les soldats remarquaient qu’aucun Juif ne se trouvait sur les lignes de front (et cela fut répété par Alexandre Soljenitsyne)[10]. Ginsberg lui-même concède que les Juifs « ont cherché les refuges qu’ils ont pu trouver et ont préféré les affectations à l’arrière du front[11] ». Cependant, les Juifs étaient sur-représentés parmi les officiers, et comprenaient plus de dix pour cent des commissaires politiques—les principaux responsables de l’application des doctrines gouvernementales. Le népotisme ethnique a eu pour résultat qu’un grand nombre de médailles imméritées ont été attribuées à des soldats juifs, au point qu’en 1943 le régime soviétique a été contraint de réduire ce nombre (pour éviter d’offenser les combattants non juifs) en publiant la déclaration suivante : « Les médailles pour conduite distinguée doivent être décernées aux hommes de toutes les nations, mais dans certaines limites pour les juifs. »
En dehors de la guerre proprement dite, les Juifs étaient essentiellement des maîtres d’esclaves supervisant la vaste sphère de la production de guerre soviétique. Les millions de Russes travaillant sans répit dans les usines de munitions passèrent sous le contrôle de Boris Vannikov, commissaire adjoint du peuple aux armements, tandis que les mouvements massifs de travailleurs étaient orchestrés par le commissaire aux transports, Lazar Kaganovich. Les ouvriers chargés de construire de plus en plus d’usines étaient sous le contrôle du directeur du Commissariat à la construction, le Juif Semyon Ginsburg. La production d’acier (Semyon Reznikov), l’aviation (Solomon Sendler), la construction navale (Grigory Kaplun), l’industrie chimique (Leon Loshkin) et les domaines de l’électricité, de l’industrie lourde et du carburant étaient sous autorité juive. La vaste main-d’œuvre russe était essentiellement sous contrôle juif et utilisée pour défendre les intérêts juifs. En Allemagne, la main-d’œuvre ne travaillait que de jour et continuait à produire des biens de consommation, tandis que les enfants allaient à l’école et les femmes restaient à la maison. Mais en Union soviétique, les usines supervisées par les Juifs fonctionnaient à chaque minute de chaque jour, deux millions de femmes étaient enrôlées dans l’armée, et les enfants étaient contraints à entrer dans les systèmes de production. Un travailleur devait se présenter au travail 66 heures par semaine, avec un seul jour de congé par mois[12].
En plus de posséder une main-d’œuvre vaste et captive pour la production de guerre, les Juifs se sont également engagés dans des efforts intensifs de mobilisation populaire. Cela était nécessaire parce que de nombreux citoyens de l’URSS « détestaient le régime », qui avait déraciné, dépossédé et affamé des millions de paysans. Ginsberg démontre que les Juifs dominaient le mécanisme de persuasion et de coercition du peuple, manoeuvrant efficacement l’opinion publique en accord avec les intérêts juifs. Dans le domaine de la coercition, les Juifs occupaient une place importante dans le NKVD, et le chef des officiers politiques de l’armée était Lev Mekhlis, un communiste juif qui avait joué un rôle majeur dans les purges militaires des années 1930. L’une des principales responsabilités de Mekhlis était de « s’assurer que les soldats combattaient et ne se rendaient pas ». Mais les juifs étaient beaucoup plus influents dans le domaine de la persuasion. Dans l’armée, des ouvriers politiques appelés politruks étaient affectés à des unités militaires afin de faire respecter la discipline et de faire également la leçon aux troupes sur leurs devoirs envers la patrie et sur la nature bestiale des Allemands. Ginsberg souligne que les Juifs étaient extrêmement surreprésentés parmi les politruks et furent déterminants pour empêcher les cas de capitulation soviétique massive. L’industrie cinématographique soviétique dominée par les Juifs s’est également consacrée à « exhorter les citoyens effrayés et épuisés à combattre les Allemands[13] ». Mikhail Romm et Mark Donskoy se sont tous deux spécialisés dans des films dépeignant la torture brutale des femmes russes par les Allemands. De tels films juifs ont ensuite été « montrés tout au long de la guerre pour attiser les sentiments de nationalisme russe et de haine pour les Allemands[14] ».
Le journal officiel de l’armée, Red Star, était édité par le juif David Ortenberg. Ortenberg a travaillé en tandem avec son co-ethnique Ilya Ehrenberg pour créer une propagande appelant « chaque citoyen soviétique à tuer les Allemands ». L’un des slogans les plus célèbres d’Ehrenberg était : « Si vous avez tué un Allemand, tuez-en un autre. Il n’y a rien de plus joyeux que les cadavres allemands[15]. » Des propagandistes juifs comme Ortenberg et Ehrenberg ont également travaillé à l’étranger pour renforcer le soutien à la cause soviétique. « Le principal véhicule de cet effort était le Comité antifasciste juif (CAJ) composé de personnalités politiques et d’intellectuels juifs soviétiques éminents. » Le CAJ a levé des fonds aux États-Unis et en Grande-Bretagne. « Bien qu’étant théoriquement une entité indépendante dirigée par le célèbre acteur juif soviétique Solomon Mikoels, le CAJ faisait en fait partie du bureau d’information soviétique et était étroitement surveillé par un fonctionnaire juif du NKVD, Sergei Shpigelglaz[16]. »
Le CAJ n’a eu aucun mal à établir des contacts avec des réseaux tout aussi influents aux États-Unis parce que cette nation avait elle aussi connu, pendant la Seconde Guerre mondiale, une montée en puissance des Juifs. Le chapitre de Ginsberg sur les États-Unis est peut-être le plus intéressant de tous. L’auteur commence par dresser un tableau de la montée des Juifs sous Roosevelt—une « longue ascension vers le pouvoir et la prééminence[17] ». Plus de 15% des personnes nommées au plus haut niveau par Roosevelt étaient des Juifs—à une époque où les Juifs constituaient moins de 3% de la population. Les Juifs sont devenus un élément si important et visible du programme New Deal de Roosevelt (un terme inventé par le juif Samuel Rosenman) que les opposants l’ont appelé le Jew Deal. Bien que n’étant en apparence qu’un programme purement économique, le New Deal a fonctionné comme une passerelle pour les Juifs vers un éventail d’influence beaucoup plus large.
Parmi les personnalités juives les plus importantes dans et autour de l’administration Roosevelt figuraient Henry Morgenthau (secrétaire au Trésor), Felix Frankfurter (nommé à la Cour suprême), Louis Brandeis (juge de la Cour suprême), Jerome Frank et Abe Fortas (Securities and Exchange Commission), Isador Lubin (Bureau of Labor Statistics), Charles Wyzanski (Département du travail), David Niles (Assistant spécial de la Maison Blanche), David Lilienthal (président de la Tennessee Valley Authority), Nathan Strauss (US Housing Authority) et Benjamin Cohen, l’auteur de la plupart des lois du New Deal. Ces Juifs, et d’autres de niveau inférieur dans et autour de l’administration Roosevelt, ont joué un rôle déterminant dans le travail de sape contre l’isolationnisme américain. Ginsberg déclare qu’en combinaison avec des groupes juifs organisés, ces personnages ont joué un rôle crucial pour jeter « le discrédit sur l’isolationnisme et retourner l’opinion américaine contre l’Allemagne[18] ».
La même période marqua également le début de la fin pour l’establishment WASP, principalement parce que les WASP (en tant que l’un des seuls éléments anglophiles de l’Amérique blanche) ont décidé de conclure un mariage de convenance avec les Juifs afin de lutter contre l’isolationnisme. Mettant de côté leur hostilité traditionnelle envers les Juifs, les protestants anglo-saxons du Nord-Est ont conclu des pactes organisationnels formels avec des propagandistes juifs. Cela donna notamment le Century Group, qui « travailla vigoureusement pour une intervention américaine contre la puissance croissante de l’Allemagne nazie[19]. » Dans le Century Group, des Juifs comme James Warburg, Walter Wanger et Harold Guinzberg côtoyaient Ward Chaney, Joseph Alsop, Frank Polk, Dean Acheson et Allen W. Dulles. Après la défaite de la France en 1940, le Century Group a appelé les États-Unis à déclarer la guerre à l’Allemagne sans attendre d’être attaqués. Une autre stratégie du Century Group était de parrainer des célébrités pour qu’elles prononcent des discours anti-allemands, notamment en réponse aux réunions pro-isolationnistes dirigées par des personnalités telles que Charles Lindbergh. Les réseaux de médias contrôlés par le Century Group ont manipulé l’opinion publique en mettant en avant des discours anti-allemands tout en « reléguant les points de vue opposés, tels que ceux exprimés par Charles Lindbergh, aux dernières pages[20]. »
Les Juifs ont joué un rôle crucial dans l’envoi de destroyers et de matériel militaire en Grande-Bretagne. En plus d’essayer de faire basculer l’opinion publique dans une direction anti-allemande, c’est Benjamin Cohen (sur l’insistance de Felix Frankfurter) qui envoya un mémorandum à Roosevelt affirmant qu’il avait l’autorité légale pour fournir aux Alliés les destroyers sans consulter le Congrès[21]. Le Fight for Freedom Committee (FFF), un autre groupe réunissant des Juifs et des membres de l’establishment WASP de l’Est, fut un autre organe partisan de ce programme, ainsi que du programme Lend Lease qui a aidé à le financer. Comme c’était le cas dans beaucoup de ces groupes, son leadership visible était WASP, mais son influence dérivait de Juifs socialement et culturellement éminents, en l’occurence Warburg et Guinzburg du Century Group, ainsi que les producteurs hollywoodiens Jack et Harry Warner, le leader syndical Abe Rosenfield et l’homme d’affaires new-yorkais Mac Kreindler. Le FFF, qui entretenait également des relations étroites avec les services de renseignement britanniques, a joué un rôle déterminant dans une longue campagne anti-Lindbergh et a réussi à établir une confusion entre « pro-isolationnisme » et « pro-Allemands » dans l’esprit du public. Des groupes juifs comme le Comité juif américain ou la Ligue anti-diffamation ont également sapé la position isolationniste par la propagande et l’infiltration. « Un agent de la Ligue anti-diffamation, Marjorie Lane, est devenu un membre actif et de confiance d’un certain nombre de groupes isolationnistes et antisémites, notamment Women for the USA, Women United et Mothers Mobilize for America[22]. »
Tout comme en Union soviétique, les Juifs américains ont utilisé l’industrie cinématographique pour mobiliser le soutien des non-juifs en faveur des intérêts juifs. La plupart des studios de cinéma américains avaient été fondés par des Juifs, et les années 1930 furent marquées par une vague de productions anti-allemandes. Roosevelt remerciera plus tard personnellement l’industrie cinématographique pour sa « splendide coopération avec tous ceux qui dirigent l’expansion de nos forces de défense » et intervint pour obtenir une réduction de peine pour le patron de la Twentieth Century Fox, Joseph Schenk, condamné pour évasion fiscale (un incident qui préfigurait le pardon de Marc Rich sous Bill Clinton pour le même crime)[23]. Les médias d’information étaient également très impliqués dans l’effort pour retourner l’opinion publique ; et CBS et NBC (deux des réseaux les plus importants) appartenaient à des Juifs[24].
Après le déclenchement de la guerre, les Juifs ont joué un rôle déterminant dans la restructuration de l’économie américaine afin de financer son coût, en inaugurant ce qu’on a appelé « le complexe militaro-industriel » et l’expansion massive du pouvoir gouvernemental. L’une des activités les plus caractéristiques des Juifs dans l’histoire est leur implication dans les systèmes d’imposition. Fidèles à cette tradition, au début des années 40, les Juifs ont réussi à transformer l’économie américaine en une économie basée sur la fiscalité de masse. Le département du Trésor était bien sûr dirigé par Henry Morgenthau, mais ce qui est moins connu, c’est que Morgenthau a très fortement doté son département de confrères juifs, dont Jacob Viner, Walter Salant, Herbert Stein et Milton Friedman. Ginsberg déclare que ces Juifs « ont fondamentalement changé le système fiscal américain[25] ». Ce n’est pas sans ironie que, tandis que Roosevelt pardonnait facilement à des Juifs de haut rang comme Joseph Schenk condamné pour évasion fiscale à grande échelle, les Juifs de son administration défendaient l’introduction de la retenue sur la masse salariale ou de la « perception à la source » pour le travailleur ordinaire.
Bien que le seizième amendement de la Constitution, ratifié en 1913, autorisait déjà la perception d’un impôt sur le revenu, le système des exemptions et des seuils signifiait qu’avant le New Deal, seuls 3% des Américains y étaient soumis. En 1940, l’équipe juive de Morgenthau avait assujettis plus de 5 millions d’Américains à l’impôt sur le revenu. Puis la loi de 1942 sur le revenu, concoctée par la même équipe, porta à 40 millions le nombre d’Américains payant des impôts sur le revenu—une décision que Ginsberg décrit comme un « tournant dans l’histoire de l’impôt sur le revenu américain ». Pour imposer aux Américains une transition aussi monumentale, les Juifs ont utilisé à peu près le même style de propagande que leurs homologues de l’Union soviétique pour assurer l’adhésion populaire à l’effort de guerre : la persuasion et la coercition.
Dans le domaine de la persuasion, les fonctionnaires juifs du Trésor « ont présenté le paiement des impôts comme un devoir patriotique et ont lancé une vaste campagne de propagande pour convaincre les Américains que le paiement des impôts était une forme de sacrifice nécessaire pour gagner la guerre[26]. » Ginsberg ajoute que « les studios de films et les réseaux radio juifs, ainsi que les compositeurs et les personnalités médiatiques juives, ont joué un rôle actif. » À la demande de Mogenthau, son co-ethnique Irving Berlin a écrit une chanson, « jouée sans cesse à la radio », intitulée « J’ai payé mon impôt sur le revenu aujourd’hui », ciblée sur les Américains à faible revenu qui n’avaient jamais auparavant été invités à payer des impôts sur le revenu. Soupçonnant que cela ne suffirait pas, Morgenthau, avec Milton Friedman et Elisha Friedman, a fait pression pour un système coercitif permanent de retenues salariales. Ginsberg commente :
« Le résultat de l’augmentation progressive des taux d’imposition infligée chaque année entre 1940 et la fin de la guerre, accompagnée d’une retenue sur les salaires, a été la conversion de l’impôt sur le revenu d’un impôt mineur prélevé sur les riches Américains en un impôt majeur prélevé sur tous les Américains ; autrement dit, d’une taxe de classe à une taxe de masse. […] Selon Elisha Friedman, l’une des clés du succès, en plus de la collecte à la source, était le gradualisme. Augmenter progressivement les impôts, a déclaré Friedman au Congrès, ‘a habitué l’esprit des gens à la chose’ et a réduit les risques de résistance fiscale et d’opposition politique[27]. »
Le gradualisme est une stratégie qui a la même efficacité dévastatrice dans les sociétés européennes en ce qui concerne l’immigration et la lente érosion des droits et des libertés.
La vente d’obligations d’État était un autre moyen de générer des revenus pour l’effort de guerre, et là aussi l’influence juive dans le Trésor et au-delà a été cruciale. Les deux noms les plus associés à la vulgarisation des ventes d’obligations de guerre (war bonds) étaient Irving Berlin (qui a écrit la chanson « Any Bonds Today? » à la demande de Morgenthau) et Bugs Bunny. Ginsberg écrit que « Bugs, avec ses amis animés Elmer Fudd et Porky Pig, a été créé par un producteur juif, Leon Schlesinger, pour le Warner Brothers Studio, propriété juive. » Bugs avait été conçu à la fin des années 1930 pour rivaliser avec le personnage animé populaire du Judenfrei Disney Studio, Mickey Mouse. Contrairement au Mickey purement américain, Bugs était essentiellement juif, arborant un épais accent de Brooklyn et était « sarcastique et irrespectueux[28] ». Après avoir été approché par le Trésor, le studio a produit une série de dessins animés de Bugs Bunny faisant, à ses frais, la promotion des obligations de guerre.
Les Juifs étaient bien sûr également dominants dans la production de propagande américaine en temps de guerre. La plus grande organisation consacrée à cette entreprise était l’Office of War Information (OWI). L’OWI comptait beaucoup d’écrivains juifs, le plus important étant Samuel Lubell. Lubell et l’OWI ont rédigé un grand nombre de brochures et de directives diffusées à tous les organes de communication publique dans le but de renforcer l’hostilité envers l’Allemagne. Des directives ont même été émises à l’intention de l’industrie cinématographique, bien que, comme le remarque Ginsberg, « un peu comme leurs homologues soviétiques, le vaste cadre hollywoodien de chefs de studio, de producteurs et de réalisateurs juifs n’avait guère besoin d’être poussé à se joindre à l’effort de guerre. […] La plupart des grands films de propagande de cette époque ont été écrits, produits ou réalisés (ou les trois) par des cinéastes juifs d’Hollywood. Plusieurs des films célèbres de Frank Capra ont en fait été écrits par Julius et Philip Epstein[29]. » Le film de guerre le plus célèbre, Casablanca, a été financé par les frères Warner, produit par Hal Wallis, réalisé par Michael Curtiz et écrit par Julius et Philip Epstein et par Howard Koch—tous membres de l’élite dirigeante juive d’Hollywood. Le résultat global des activités de ce réseau fut que le peuple américain « fut nourri en permanence par des matériaux mettant l’accent sur la nécessité de soutenir l’effort de guerre[30] ».
Mis à part le réseautage juif aux États-Unis et en Union soviétique, les Juifs posaient également d’énormes problèmes au national-socialisme via leurs efforts dans les opérations de renseignement internationales. Le décryptage de code et le renseignement électromagnétique sont apparus pour la première fois de manière significative pendant la Première Guerre mondiale, et en 1919, l’armée américaine a formé le Cipher Bureau (Bureau de cryptographie), parfois connu sous le nom de « Black Chamber ». Déguisé en société civile privée, cet organisme était fortement impliqué dans le décodage des communications diplomatiques des autres pays. Cependant, en 1929, le secrétaire d’État Henry Stimson déclara : « Les gentlemen ne lisent pas le courrier des autres », et a terminé le financement du Cipher Bureau, le forçant à fermer. L’armée a alors décidé de créer le Service de renseignement sur les signaux (Signals Intelligence Service, SIS) et l’a placé sous la direction de William Friedman, un immigré juif russe spécialisé dans le décryptage des messages codés. L’abandon du comportement de gentleman prôné par Stimson conduira à la création de l’Agence de sécurité nationale (National Security Agency) sous la direction de Friedman—un changement social et politique au moins aussi profond que les transformations de l’impôt sur le revenu entreprises par les Juifs du Trésor.
De nombreux soldats traditionnels se moquaient de l’adoption massive de ce qu’ils considéraient comme des tactiques juives sournoises. En particulier, il y avait au sein de la Navy une forte résistance à l’idée de travailler avec le SIS de Friedman. Ginsberg fait remarquer :
« Les rivalités interservices normales étaient exacerbées par le fait que les officiers du Renseignement de la Navy ne voulaient pas coopérer avec une unité de l’armée dirigée par un Juif et employant nombre de Juifs dans ses échelons supérieurs. La Navy avait la réputation d’être encore plus antisémite que l’Armée, et selon un officier de la Marine britannique qui a visité l’unité de cryptologie de la marine américaine, ‘l’aversion pour les Juifs répandue dans la Marine américaine est un facteur à prendre en compte dans l’animosité qui prévaut entre les opérations de décryptage de code de l’Armée et de la Marine, car presque tous les principaux cryptographes de l’armée [William Friedman, Abraham Sinkov, Solomon Kullback et Geneviève Feinstein] sont juifs.’[31] »
Outre leurs succès en décryptage de code au SIS, les Juifs occupaient une place importante dans le Renseignement. L’un des espions soviétiques les plus importants était Leopold Trepper, un communiste juif qui exploitait un réseau d’espionnage connu des Allemands sous le nom de « l’Orchestre rouge ». Se faisant passer pour un industriel canadien, Trepper et son camarade communiste juif Leo Grossvogel dirigeaient une firme d’import-export à l’échelle européenne, par l’entremise de plusieurs hommes de paille qui ignoraient que l’entreprise était liée au renseignement militaire soviétique [GRU]. Une fois la mise en place initiale effectuée, le GRU a envoyé d’autres membres de « l’Orchestre », à savoir Anatoli Gurewitsch, Hermann Isbutsky, Isidor Springer, David Kamy et Sophie Poznanska—tous juifs. Ils ont ensuite été rejoints par d’autres communistes juifs : Abraham Raichmann (de Belgique) et Hillel Katz (de Pologne). Après la défaite de la France en 1940, Trepper créa deux sociétés à Paris, Simex et Simexco. Après avoir sollicité des contrats allemands, l’Orchestre Rouge a pu obtenir des laissez-passer pour les milieux commerciaux allemands, leur permettant de recueillir des informations sur les préparatifs allemands pour une attaque contre l’URSS. L’atout le plus dévastateur de l’Orchestre Rouge était cependant un traître allemand : l’aristocrate anti-nazi Harro Schultze-Boysen, qui a fourni aux communistes juifs des volumes d’informations du ministère de l’aviation dans lequel il travaillait. Les Allemands affirmeraient plus tard que l’Orchestre Rouge était responsable de la perte de 200 000 vies allemandes. Le groupe a finalement été dissout en 1942 lorsque l’équipement de radiogoniométrie allemand a pu localiser l’origine des émissions de radio de l’Orchestre Rouge. Tout son personnel a été identifié et arrêté lors d’une série rapide de raids.
D’autres réseaux d’espionnage importants étaient les Trois Rouges (Red Three), dont deux étaient exploités depuis la Suisse par le Juif hongrois Alexander Rado, et l’autre par la Juive polonaise Rachel Dubendorfer, qui réussit à obtenir une connaissance préalable des plans allemands d’attaque sur Stalingrad et des champs pétrolifères du Caucase. Puisque les renseignements acquis venaient directement d’Hitler, ils se sont avérés « inestimables pour les Soviétiques ». En permettant aux forces soviétiques de contrer les Allemands et de les vaincre finalement à Stalingrad, l’espionnage juif a coûté aux forces allemandes des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers de vies.
Les Soviétiques étaient bien sûr conscients de la menace d’opérations allemandes similaires. La principale agence de contre-espionnage de l’Union soviétique était SMERSH, acronyme de Smert Shpionam, ou « Mort aux espions ». Les Juifs étaient extrêmement surreprésentés au SMERSH, et Ginsberg remarque que « les Juifs ont joué un rôle important au sein du SMERSH tout au long de la guerre[32]. » Supervisée par des Juifs tels que Iakov Serebrianski, Isidor Makliarskii et Vilyam Fisher, la cohésion ethnique étroite des cercles de renseignement soviétiques signifiait que l’infiltration par des agents non juifs était particulièrement difficile. « Au cours de la guerre, le SMERSH a tué ou capturé à lui seul près de 40 000 sur les 44 000 agents que les Allemands reconnaissent avoir envoyés en URSS. » C’est un niveau de réussite remarquable.
Les agences d’espionnage britanniques et américaines étaient également fortement juives. Le Special Operations Executive (SOE) britannique, qui jouerait un rôle déterminant dans l’assassinat de Reinhard Heydrich, a employé plus de 1000 espions juifs, dont les plus célèbres étaient les femmes espions Vera Atkins (née Vera Rosenberg) et la juive française Denise Bloch (exécutée plus tard au camp de concentration de Ravensbruck). Le directeur du SOE était le banquier juif Sir Charles Hambro, tandis que son cryptographe en chef était le juif Leo Marks. L’équivalent américain du SOE était l’Office of Strategic Services (OSS), une des premières incarnations de la CIA. En plus de se vanter d’un grand nombre d’espions juifs, Ginsberg écrit qu’un groupe d’ « analystes » au sein de l’OSS « se composait d’un certain nombre d’intellectuels juifs réfugiés associés aux théoriciens sociaux néo-marxistes qu’on nomme l’École de Francfort. Ceux-ci comprenaient des sommités telles que Franz Neumann, Herbert Marcuse et Otto Kirchheimer[33]. » Ces intellectuels de l’École de Francfort ont été chargés d’évaluer les perspectives de propagande et de guerre psychologique comme armes contre le peuple allemand.
Le dernier chapitre de Ginsberg traite de l’activité des Juifs dans la lutte partisane armée. Je l’ai trouvé particulièrement intéressant parce que, tout comme les dernières sections du livre The Final Solution de David Cesarani, les récits de cette activité apportent une justification claire (généralement ignorée) du traitement de plus en plus dur par l’armée allemande des populations juives à sa portée. Le premier point à souligner est que les populations juives étaient mortelles pour les aspirations militaires allemandes. Par exemple, alors que plus de 25 pour cent des juifs français étaient impliqués dans des efforts de résistance, seulement un pour cent de la population non juive était engagé dans des activités similaires[34]. L’hymne de la résistance française a été écrit par le romancier juif Joseph Kessel, tandis que le roman anti-allemand le plus populaire en français de l’époque, La Silence de la mer, a été écrit par l’immigrant juif hongrois Jean Bruller. Deux des résistants les plus importants en France étaient Jean-Pierre Lévy (qui dirigeait le noyau de « l’armée secrète » de De Gaulle) et Léo Goldenberg qui dirigeait le principal mouvement de résistance parisien.
En Belgique, « les résistants les plus militants étaient des Juifs », et le réseau de résistance (RR) du pays, fortement juif, était responsable de multiples actes de sabotage ainsi que de l’assassinat ciblé de Juifs coopérant avec les Allemands. La résistance en Grèce a été orchestrée par l’Armée populaire de libération grecque (ELAS). Ginsberg écrit qu’ « un pourcentage significatif des officiers et dirigeants de l’ELAS étaient des Juifs » qui ont adopté des noms grecs[35]. Les partisans juifs grecs ont été responsables de la mort de plus de 2000 soldats allemands et ont obligé les Allemand à déployer toute une division de combat afin de contrer les efforts de sabotage constants. De même, en Yougoslavie, « plusieurs milliers de Juifs ont combattu dans la résistance[36] ».
L’activité de partisans de loin la plus destructrice a eu lieu en Union soviétique où « très souvent, ces premiers groupes résistants étaient dirigés par des communistes juifs[37] ». La guerre de partisans a été implacable et dévastatrice depuis les premiers jours de l’invasion de l’Union soviétique, et a finalement poussé Hitler à publier un mémorandum destiné aux forces armées exigeant la propagation d’une « sorte de terreur qui ferait perdre à la population tout intérêt pour le sabotage ». Cependant, il y avait souvent une déconnexion entre les populations locales et les partisans opérant en leur sein. En effet, parce que de nombreux partisans étaient juifs (et donc des étrangers dévoués au régime), de nombreux villageois fournissaient facilement aux Allemands des informations sur ces mouvements partisans. Bien qu’ils ne représentent qu’un pourcentage relativement faible de la population de l’Union soviétique, les Juifs occupaient bon nombre des rôles les plus influents dans le mouvement partisan. Pour cette raison, les actions antisémites au sein du mouvement sont devenues sujettes à des châtiments extrêmes et un dirigeant partisan ukrainien de premier plan a été exécuté pour avoir tué cinq Juifs[38].
Selon des sources soviétiques, les partisans ont tué 500 000 Allemands en Biélorussie et 460 000 en Ukraine, et ont détruit ou capturé 5 000 locomotives, 50 000 wagons de chemin de fer et 15 000 automobiles allemandes. Même si les historiens débattent de ces chiffres, il est clair que l’activité partisane a été extrêmement préjudiciable à l’effort de guerre allemand. En raison de leurs lignes d’approvisionnement extrêmement longues et de leur planification logistique souvent ad hoc, les Allemands craignaient les activités des partisans comme la peste, et celles-ci étaient souvent particulièrement dévastatrice dans et autour des zones juives. C’est cela, plutôt que des préjugés irrationnels, qui a fourni aux Allemands la logique de la déportation et de la concentration massives des populations juives en temps de guerre, et a incité des mesures plus dures comme moyen de dissuasion contre de futures attaques. Si l’exploration de Ginsberg sur l’activité partisane juive est succincte et utile, elle est en fin de compte inférieure au traitement de Cesarani sur le même sujet, à la fois en termes d’informations factuelles et d’analyse. Pour cette raison et d’autres, c’était à mon avis le plus faible des quatre grands chapitres de How the Jews Defeated Hitler.
Le bref chapitre de conclusion de Ginsberg, intitulé « De la tragédie à la farce », frappe le lecteur comme un ajout étrange et mal adapté, destiné probablement à épaissir un peu le manuscrit. Ginsberg se lance dans une charge personnelle de style néo-conservateur contre « l’antisionisme libéral ». Ginsberg attaque le Comité des activités antiaméricaines de la Chambre (House Un-American Activities Committee) et taxe la gauche contemporaine américaine et européenne d’antisémitisme. Il discute de « l’antisémitisme noir » et des « Juifs qui se détestent d’eux-mêmes ». Il est vraiment remarquable qu’à la fin d’un volume qui discute essentiellement de l’importance de l’influence juive et qui rejette la notion de victimisation juive, Ginsberg se sente obligé de sortir son dernier chapitre de la propagande victimaire de l’ADL (Anti-Defamation League). Je pense que c’est à la fois un effet de la nature intérieure de Ginsberg (indiqué par sa propre bibliographie) reprenant le dessus, et une stratégie visant à apaiser les Juifs de la culture dominante par une thématique politiquement correcte.
How the Jews Defeated Hitler est néanmoins un guide factuel, concis et efficace sur l’étendue du pouvoir et de l’influence des Juifs avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Le fait que Ginsberg place les Juifs dans un rôle de belligérant, à la fois en termes de conflit armé et dans des formes plus abstraites de guerre, est une contribution bienvenue et très nouvelle à l’historiographie traditionnelle sur les expériences et les actions des Juifs pendant cette période. Le style d’écriture de Ginsberg est assez fade, mais les faits relayés et la division de chaque chapitre en plusieurs sections font que ce n’est pas un volume ennuyeux. La qualité de production du livre de poche est également assez bonne.
Comme toujours lorsque je lis un livre d’histoire, je me demande après lecture s’il y a des leçons valables à tirer du matériel et des arguments présentés. Dans ce cas, je me suis souvenu d’un chapitre du livre de Kevin MacDonald, Separation and Its Discontents, dans lequel MacDonald avance un argument très fort selon lequel le national-socialisme était une stratégie évolutionniste de groupe qui, à bien des égards, reflétait celle du judaïsme. Je suis fondamentalement d’accord avec cette évaluation, mais le volume de Ginsberg m’a incité à conclure que le national-socialisme n’avait pas réussi à refléter un élément crucial de la stratégie évolutionniste juive moderne, à savoir sa nature internationale. L’Allemagne n’a finalement eu aucune réponse pour le vaste exercice du pouvoir international juif à l’époque, et c’est cette expression de pouvoir et d’influence qui, dans l’acte final, a été la façon dont les Juifs ont vaincu Hitler.
Les membres du mouvement contemporain de défense des Blancs (White Advocacy), l’Alt Right, les nationalistes blancs — ou quelque soit la manière dont ils choisissent de se nommer — feraient bien de tenir compte de cette leçon lorsqu’ils réfléchissent à la manière de contrer les manifestations modernes de l’influence juive. Je vois très souvent des expressions de mépris commun pour les Juifs qui risquent de sous-estimer leur formidable force. J’essaie toujours de garder à l’esprit que des hommes beaucoup plus sages que moi ont été aux prises avec ce problème. La tâche ardue qui nous attend est de relever un défi où beaucoup avant nous ont échoué. L’une des principales raisons de l’échec de nos prédécesseurs a été l’enracinement de leurs efforts dans le nationalisme de l’État-nation. Ce mouvement peut et doit évoluer et adopter un système de « nationalisme international blanc ». Aujourd’hui, l’État-nation est réduit à une expression du mondialisme civique. La citoyenneté, c’est de la paperasse et rien de plus. Les frontières sont faibles et continueront de se désintégrer. Notre force ne peut venir que de la coopération transfrontalière.
Je terminerai par les mêmes réflexions que celles qui me sont venues à l’esprit à la fin de mon article de 2015 sur la dépossession allemande sous Merkel :
À l’heure de notre dépossession, il n’y a pas de nationalisme allemand, de nationalisme anglais, de nationalisme français ou de nationalisme suédois. Votre combat est le mien et mon combat est le vôtre. Si une nation blanche tombe, nous tombons tous. Pour paraphraser John Donne :
« Aucune nation blanche n’est une île à part entière ; chaque homme blanc est une partie de la race, un morceau du continent. Si une motte est emportée par la mer, l’Europe en est diminuée d’autant, et pareillement si c’est un promontoire, et pareillement si c’est la demeure de ton ami ou la tienne : la mort de toute nation européenne me diminue, parce que je suis lié à elle. Et donc n’envoie jamais demander pour qui sonne le glas ; il sonne pour toi. »
Andrew Joyce
Traduction : Laurent Guyénot
Source : theoccidentalobserver.net
Benjamin Ginsberg, How the Jews Defeated Hitler: Exploding the Myth of Jewish Passivity in the Face of Nazism, paru chez Rowman & Littlefield en 2013.C
Notes :
[1] Andrew Joyce, « A Tactical Retreat on the Holocaust: Review of Final Solution: The Fate of the Jews, 1933-1949 by David Cesarani », The Occidental Quarterly, Vol. 16, No. 4 (Hivers 2016-2017).
[2] B. Ginsburg, How the Jews Defeated Hitler: Exploding the Myth of Passivity in the Face of Nazism, New York: Rowman & Littlefield, 2016, p.1.
[3] Pour un aperçu plus vaste de ce genre d’argument, lire O. Kenan, Between Memory and History: The Evolution of Israeli Historiography of the Holocaust, 1945-1961, Peter Lang Publishing, 2003.
[4] Ginsberg, p.7.
[5] Ginsberg, p. 9.
[6] Ginsberg, p. 9.
[7] Ginsberg, p. 10.
[8] Ibid.
[9] Ginsberg, p. 11.
[10] Ginsberg, p. 18.
[11] Ibid.
[12] Ginsberg, p. 32.
[13] Ginsberg, p. 34.
[14] Ibid.
[15] Ibid.
[16] Ibid.
[17] Ginsberg, p. 37.
[18] Ginsberg, p. 40.
[19] Ginsberg, p. 41.
[20] Ginsberg, p. 42.
[21] Ginsberg, p. 43.
[22] Ginsberg, p. 46.
[23] Ginsberg, p. 49.
[24] Ibid.
[25] Ginsberg, p. 56.
[26] Ginsberg, p. 58.
[27] Ginsberg, p. 59.
[28] Ginsberg, p. 61.
[29] Ginsberg, p. 63.
[30] Ginsberg, p. 65.
[31] Ginsberg, p. 72.
[32] Ginsberg, p. 87.
[33] Ginsberg, p. 96.
[34] Ginsberg, p. 101.
[35] Ginsberg, p. 110.
[36] Ginsberg, p. 111.
[37] Ginsberg, p. 113.
[38] Ginsberg, p. 117.
lire la controverse de sion de douglas Reed ,chapitre 41 page 454.
on apprend que en 1942 des juifs américains transmettaient à Staline du matériel et les plans du projet Manhattan ; la fabrication de la première bombe atomique.