PLUS LE TEMPS PASSE, plus les crimes vont loin dans l’horreur. Autrefois les meurtres et assassinats, sauf rares exceptions, ne concernaient que les adultes, aujourd’hui ils visent de plus en plus les jeunes filles et les enfants. Autrefois les crimes les plus atroces avaient lieu généralement la nuit, aujourd’hui ils peuvent aussi se produire en plein jour. Ce fut le cas du viol et du meurtre de Philippine, âgé de 19 ans et massacrée par un Marocain multirécidiviste de 22 ans, sous OQTF (obligation de quitter le territoire français) vers 14 heures le vendredi 20 septembre 2024 au Bois de Boulogne. C’est encore le cas du meurtre barbare de Louise, une fillette de onze ans — oui, onze ans ! —, scolarisée en sixième qui a reçu, à Epinay-sur-Orge dans l’Essonne, le vendredi 7 février vers 14 heures, à la sortie de son collège, dans un bois situé à quelques centaines de mètres seulement de son domicile, une dizaine au moins de coups de couteau par un certain Owen L., un jeune homme de 23 ans qui était dans une colère noire pour avoir perdu… à un jeu vidéo en ligne ! Cet individu a suivi la fillette jusque dans le bois où il s’est acharné sur elle. Elle a crié, elle s’est débattue — c’est ainsi qu’on a pu découvrir l’ADN du meurtrier car on a retrouvé des traces de son sang sous les ongles de Louise —. Mais que pouvait-elle faire face à un homme qui avait plus que deux fois son âge, était armé d’un Opinel et a multiplié sans interruption les coups d’une violence extrême, tel un fou, un possédé ? Il n’y avait aucun différend préalable, aucun contentieux entre la victime et l’assassin. La petite Louise a eu seulement la malchance de s’être trouvée au mauvais endroit au mauvais moment.
Le vendredi, au collège, elle finissait plus tôt les cours et avait prévenu ses parents, via son smartphone, qu’elle rentrait immédiatement au domicile qui n’était situé qu’à quelques minutes à pied du collège. Il était 14 heures. Elle avait toute la fin de la semaine pour faire ses devoirs, apprendre ses leçons. Elle avait la vie devant elle. Du moins le croyait-elle alors. Mais un jeune homme en casquette et doudoune noires l’a suivie, lui a parlé, lui a fait croire qu’il avait oublié son téléphone portable dans le bois à côté et lui a demandé si elle pouvait l’aider à le retrouver. Sa gentillesse l’aura perdue. Sa bonté l’aura conduite à la mort. Il avait déjà tenté le coup avec une autre collégienne qui, elle, avait refusé de le suivre et qui est aujourd’hui vivante. De nos jours, on ne peut plus dire à nos enfants de se montrer gentils, souriants et charitables avec des inconnus. C’est impossible. Ce temps-là est révolu. Ce serait une pure folie. Il faut au contraire leur dire de se méfier, de rester sur leurs gardes, d’éviter tout contact, de refuser tout dialogue, de ne pas se laisser entraîner par faiblesse, par bonasserie, par naïveté, par incapacité à dire non à ce qui peut s’achever en tragédie.
AVOIR PERDU dans un jeu en ligne est le mobile du crime. Apparemment il n’en est pas d’autre. Cela peut paraître dérisoire, fou, hallucinant, et pourtant c’est bien le cas. De l’aveu de son entourage, Owen L. passait ses journées à jouer à des jeux vidéo, c’est-à-dire à vivre en permanence dans le virtuel, et cela provoquait chez lui, quand il perdait, des colères effrayantes, meurtrières, sans limite. Il avait ainsi un jour failli tuer sa sœur sous le regard impuissant de ses parents, de sorte qu’elle avait déposé une main courante et ne lui adressait plus la parole depuis deux ans. Owen L. était considéré comme un jeune introverti (il faut se méfier des gens qui ne parlent pas du tout, ne communiquent pas), apparemment sans histoire, quoiqu’il ait déjà commis un vol et une tentative de vol. A chaque fois après avoir perdu à un jeu vidéo. Le scénario était toujours le même. Il fallait qu’il se calmât, qu’il retrouvât ses esprits, et pour ce faire, il lui fallait détrousser quelqu’un. Mais ce 7 février, premier vendredi du mois, les choses ont mal tourné : de détrousseur, il est devenu tueur, d’auteur de larcins, il est devenu un assassin. Sa colère était trop forte, trop violente, trop extrême. Alors il s’est acharné sur une pauvre enfant, sur une fillette fluette, visant particulièrement les zones vitales, comme l’ont constaté les enquêteurs. Puis il s’est à nouveau enfermé dans le mutisme, avant de craquer après 48 heures de garde à vue. La découverte de son ADN sur le corps ensanglanté de la fillette, la vidéosurveillance où l’on reconnaissait sa silhouette ont eu raison de son silence obstiné auprès des policiers. Owen L. a été mis en examen le 12 février au soir pour meurtre sur mineur de moins de quinze ans et placé en détention provisoire. Avant son procès d’ici un an ou deux en cour d’assise.
Comme à chaque fois dans ce genre de meurtres affreux on nous répète que le collège que fréquentait Louise était tranquille, que la zone pavillonnaire où elle vivait avec sa grande sœur et ses parents était paisible. Comme à chaque fois on a activé des cellules de soutien psychologique pour les autres élèves du collège. Comme à chaque fois on a apporté des fleurs, des bougies, des peluches de la petite suppliciée, martyrisée, assassinée. Comme à chaque fois une cagnotte a été ouverte pour aider les parents à régler les frais d’obsèques et les gens qui sont naturellement émus par ce drame atroce qui pourrait demain, n’importe où, n’importe quand, concerner leur progéniture se montrent généreux. Comme à chaque fois chacun dit son incompréhension et son effroi. Mais hélas il n’est pas besoin d’être devin pour savoir, pour prédire que ce genre de crimes atroces va se reproduire et se multiplier vu l’état de la société, des consciences, des mœurs, des familles, des individus. Owen L. n’est pas le seul de sa génération, tant s’en faut, à être accro aux jeux vidéo. Il n’est pas le seul à ne vivre que dans et pour le virtuel. C’est chose courante désormais.
L’INVENTION du smartphone en 2007 a bouleversé la vie et les mœurs de nos contemporains. Bien plus encore que la télévision naguère. Et la généralisation des ordinateurs, des tablettes, des écrans, des jeux vidéos est une révolution dont on ne mesure pas encore assez les conséquences incommensurables, inouïes, effrayantes. Non seulement nous vivons la fin de la civilisation Gutenberg avec l’abandon quasiment total de la lecture des livres, des journaux et des revues papier par les nouvelles générations mais la massification de l’usage des jeux vidéo et des réseaux sociaux conduit à une régression intellectuelle, morale et spirituelle sans précédent. Qui fait froid dans le dos. Qui glace le sang. Loin de favoriser l’amitié, la convivialité, la bienveillance, la concorde, l’empathie, les réseaux sociaux ne fonctionnent que sur le mode de l’agressivité, de l’injure, de l’anathème. Ils ne sont pas adaptés à la nature humaine qui a besoin de temps pour réfléchir, pour réagir, pour décider. Là tout se fait en un instant, tout démarre au quart de tour, tout est fait pour favoriser les mouvements impétueux et tumultueux, empressés et déréglés, de notre nature blessée par le péché originel. Naguère, lorsqu’on recevait une lettre d’insulte, ou en tout cas fort désagréable, si l’émotion était vive en la lisant, on pouvait reprendre ses esprits par la suite. On reposait la missive agressive et vu le temps qu’il fallait pour prendre du papier, un stylo, rédiger à la main une réponse, trouver une enveloppe, la timbrer, aller la poster, la colère pouvait retomber, la fureur s’estomper. Avec Internet, il suffit d’un simple clic, d’une fraction de seconde pour répondre, riposter, répliquer. Disons-le franchement, pour l’essentiel, les réseaux sociaux ne sont qu’un torrent de boue et de haine. Il y a d’abord tout ce qu’on peut y voir et qui blesse la vertu. Mais il est peut-être pire encore, la perte de temps et d’énergie. Le dégoût de notre devoir d’état. La perte totale de l’esprit de prière, d’oraison et de contemplation. L’abaissement de l’âme et de l’esprit. L’obscurcissement de l’intelligence. Et plus encore le desséchement du cœur. On ne peut véritablement aimer que ce qui est réel, concret, vivant et non ce qui est virtuel. On ne peut se donner véritablement qu’à un autre être et non à un fantôme, à des algorithmes. Nous vivons le temps des barbares fulminant devant leur clavier d’ordinateur et rendus incapables de toute vie intérieure.
Il a été prédit que les derniers temps seraient marqués non seulement par une perte générale de la foi mais peut-être plus encore par un refroidissement de la charité et un tarissement de la grâce. Nous y sommes. Et le pire, c’est que les utilisateurs compulsifs de ces appareils ne se rendent même pas compte de leur état, n’y prêtent même pas attention. Et les choses assurément vont continuer à empirer. Inexorablement. Macron présidait il y a quelques jours au Grand Palais à Paris, en présence d’un grand nombre de chefs d’Etat et de gouvernement, de dirigeants d’entreprises, d’artistes et de journalistes, un « sommet international pour l’action sur l’intelligence artificielle ». Ce qui se prépare est proprement terrifiant. On va aller encore plus loin dans l’omniprésence et l’omnipotence du virtuel et de l’artificiel. Marc Zuckerberg, dirigeant du groupe Meta, a récemment annoncé que bientôt on n’aurait plus besoin de smartphones mais que tout se trouverait dans nos lunettes qui seraient un véritable ordinateur.
NOUS VIVONS une révolution anthropologique fondée sur le transhumanisme, le tout technique et l’homme augmenté. Et nous n’en sommes qu’à ses prodromes. La civilisation chrétienne était celle de l’Incarnation, du Verbe qui se fait homme et se dévoue, se sacrifie pour l’humanité qu’Il est venu sauver. Se met en place une nouvelle civilisation, ou plutôt une contre-civilisation, qui repose sur la désincarnation, la déshumanisation à un niveau jamais atteint dans l’histoire et qui ne réalise rien moins qu’une contre-Incarnation. Tout est inversé. Le virtuel se substitue au réel, l’artificiel au naturel, le frelaté à l’authentique, le faux au vrai, le laid au beau, le mal au bien. C’est proprement satanique. Ce n’est pas seulement un changement d’époque que nous vivons, c’est un changement de paradigme, c’est un bouleversement sans précédent des repères. Il n’y a plus d’homme ni de femme, il n’y a plus d’être de chair et de sang. Il n’y a que des casques de réalité virtuelle et le metaverse, des représentations virtuelles ou avatars. Un univers virtuel en 3D ou en 2D où l’on peut effectuer diverses activités, par exemple acquérir des terrains, faire ses courses, créer des magasins numériques, assister à des visioconférences, jouer à des jeux. Sait-on que de plus en plus de médecins consultent désormais par visioconférence, n’auscultant donc même plus le patient, ce qui rend pour le moins aléatoire le diagnostic ?
Comme l’avait prédit Georges Bernanos dans La France contre les robots il y a quatre-vingts ans, ce n’est plus l’homme qui l’emporte sur la technique. C’est la technique qui l’emporte sur l’homme, qui le façonne, le transforme, le domine, l’asservit. Il renonce à son humanité pour devenir un appendice de la technique. Son jouet, son esclave, sa chose. Mesure-t-on la gravité inouïe des temps que nous vivons et du futur apocalyptique que l’on nous prépare ? Plus que jamais, plus que tout, en ces temps enténébrés, il faut « tenter de vivre », pour citer le Cimetière marin de Paul Valéry. Et vivre dans le vrai car, comme l’enseigne saint Thomas d’Aquin, la vérité est l’adéquation de l’intelligence au réel, et non pas au virtuel. Vivre en conformité avec notre nature humaine, ce qui implique de répudier et de rejeter ce qui est contre-nature. Vivre en harmonie avec la nature, avec ses semblables, s’émerveiller du spectacle de la Création qui manifeste si magnifiquement les grandeurs de Dieu, vivre dans le réel, là où l’on peut se donner, se dévouer, se transcender, aimer tendrement chaque jour et être aimé en retour. En gardant fermement les pieds sur Terre. Et les yeux levés au Ciel. […]
RIVAROL, <[email protected]>
Source : Éditorial de Rivarol
L’idée que les jeunes seraient totalement dans le virtuel tandis que les vieux iraient marcher dehors est totalement fausse:
les vieux sont tout aussi intoxiqués de leur portable, TV etc.
Ils sont même incapables d’aller au resto sans leur portable, il peut leur arriver d’oublier de mettre une couche ou de prendre leur canne, mais le portable, jamais.
C’est l’histoire d’une sphère à Las Vegas qui à l’extérieur représente l' »oeil qui voit tout » et où à l’intérieur des films sont projetés à 360°, l’auteur prouve le lien qui existe avec les casques virtuels qui ne sont que des masques à défragmentation de l’esprit humain pour le reprogrammer comme dans celui du programme « Papillon ».
Aura, Hypnose et la Sphère de Las Vegas : Quand le Divertissement Cache un Programme !?