LA VICTOIRE EST SANS APPEL : le dimanche 18 mai, le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a été élu avec 74,31 % des suffrages exprimés à la présidence du parti, les Républicains, face à son concurrent, président du groupe des députés LR à l’Assemblée nationale, Laurent Wauquiez qui n’a réuni, malgré sa campagne très active, que 25,69 % des voix. Le résultat est d’autant plus significatif que la participation a été très élevée : 80,6 % des adhérents à jour de cotisation de LR (soit 98 110 sur 121 617 inscrits) ayant voté électroniquement pour choisir leur chef de file. Ce scrutin est une claque monumentale pour Wauquiez qui espérait créer la surprise et qui pensait avoir trouvé la formule magique en dénonçant une droite cohabitant avec le macronisme. Il faut dire que l’ex-président du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes était particulièrement mal placé pour adresser ce reproche à son rival puisque lui-même a validé la participation de son parti au gouvernement de François Bayrou, comme auparavant à celui de Michel Barnier, lui-même membre des Républicains, et qu’il a même tout tenté auprès du Béarnais en décembre dernier pour décrocher Bercy, Wauquiez se voyant sauver les finances de la France alors que notre pays croule sous une dette et des déficits faramineux que la gestion calamiteuse de la crise covidesque a encore fortement aggravés.
Alors qu’en décrochant la présidence des Républicains en 2017, Wauquiez semblait avoir toutes les cartes en main pour réussir — il n’avait pas alors de concurrent crédible au sein de son mouvement, Fillon et Sarkozy étant définitivement empêchés par leurs affaires judiciaires, et Marine Le Pen était alors très affaiblie par son débat catastrophique de l’entre-deux-tours avec Macron, le 3 mai 2017, sa nette défaite au second tour de la présidentielle et plus encore aux législatives subséquentes —, il n’a jamais réussi à émerger. Et ce que les media appellent « la droite républicaine » n’a cessé de s’effondrer depuis dix ans. On avait considéré que les 20 % obtenus par François Fillon au premier tour de la présidentielle d’avril 2017 étaient catastrophiques — il était en réalité à 1,3 % de la finale ; il lui manquait seulement deux bulletins par bureau de vote ! —. Cependant, ces 20 % doivent laisser rêveurs beaucoup d’actuels dirigeants de LR quand on les compare aux 4,78 % de Valérie Pécresse à la présidentielle du 10 avril 2022 et à tous les scores inférieurs à 10 % obtenus par LR lors des différentes consultations électorales depuis près d’une décennie.
BRUNO RETAILLEAU est-il à même de permettre à cette formation politique issue de la fusion du chiraquisme, du giscardisme et du balladurisme de jouer à nouveau les premiers rôles et d’emporter enfin une élection majeure, ce qui n’est plus arrivé depuis 2007 ? C’est en tout ce que souhaite l’intéressé qui manifestement utilise la Place Beauvau comme un tremplin pour son ambition présidentielle. A l’instar d’un de ses célèbres prédécesseurs, un certain Nicolas Sarkozy qui, grâce à ses formules-chocs, à ses interventions intempestives devant les micros et les caméras, et grâce aussi, il faut le dire, à son carnet d’adresses et à ses financements — qui lui reviennent aujourd’hui en boomerang —, est passé directement du ministère de l’Intérieur à l’Elysée. Il est vrai que géographiquement la Place Beauvau n’est guère éloignée du 55 rue du Faubourg Saint-Honoré où demeure le président de la République ! Retailleau, à vingt ans d’écart, brûle de réussir à son tour ce pari ambitieux. Il ne manque pas d’un certain nombre d’atouts pour le faire. Mais il cumule aussi des faiblesses, bien plus grandes que celle de son prédécesseur. Son premier atout, c’est indubitablement sa visibilité médiatique. Aujourd’hui la politique se réduit essentiellement à l’art de la communication et donc bien souvent de la manipulation. Le magistère de la parole tient lieu d’action. Et on a le sentiment que les électeurs pour la plupart d’entre eux se contentent aujourd’hui de paroles martiales, de fortes promesses, même si les unes et les autres ne sont jamais suivies d’effets. Comme si le corps électoral avait appris à se satisfaire des apparences et finalement à se complaire, consciemment ou non, dans le mensonge, les artifices et les illusions. Le second atout de Retailleau, c’est l’état de faiblesse relative de ses principaux concurrents. Le Rassemblement national qui semblait avoir le vent en poupe voit sa dynamique freinée par la condamnation judiciaire avec exécution provisoire de Marine Le Pen, le 31 mars dernier, et par les doutes autour de la crédibilité de la candidature de son très probable remplaçant, le juvénile et célibataire Jordan Bardella, qui n’a pas encore trente ans et qui n’a aucune formation, aucun métier, sinon celui d’être un professionnel de la politique. Quant à ses concurrents du « bloc central » (Edouard Philippe, Gabriel Attal, voire Gérald Darmanin), ils semblent actuellement patiner, avoir du mal à se départager et à dominer leur camp de manière incontestée. Troisième atout de Retailleau : bien qu’il ait 64 ans, il apparaît comme un homme neuf — le grand public ne le connaissait pas jusqu’à une époque très récente — et apparemment sans casseroles et sans histoire.
Mais le ministre de l’Intérieur a aussi de lourds et incontestables handicaps. Le principal étant le rétrécissement de la base sociologique et électorale de LR. Les électeurs de cette formation politique sont pour la plupart âgés, bourgeois, de classe supérieure, et ne constituent pas à eux seuls une base suffisante pour parvenir au deuxième tour d’une présidentielle. Il lui faut donc absolument élargir son électorat à la fois du côté du RN, ce qui implique de séduire une part non négligeable des milieux populaires ce qui, vu son profil, sera très difficile, mais aussi du côté du centre macronien, ce qui suppose qu’il n’aille pas trop loin dans la radicalité de son discours et de ses propositions politiques. Autre handicap : la difficulté de séduire un électorat en attente d’une politique ferme sur les sujets régaliens (immigration, insécurité, narcotrafic, etc.) et le fait de rester durablement dans un gouvernement essentiellement centriste et macronien où, de surcroît, LR ne dispose pas d’une majorité à l’Assemblée, tant s’en faut. Il est probable que Retailleau sera conduit à quitter le gouvernement à un moment ou à un autre, peut-être au lendemain des municipales du printemps 2026, peut-être dans un an, peut-être avant — surtout si le gouvernement devait cet automne être censuré — s’il ne veut pas trop abîmer son image et qu’on nourrisse contre lui un procès en immobilisme voire en duplicité. C’est ce que Macron avait fait en 2016 un an avant la présidentielle : pour ne pas être carbonisé avec François Hollande, il avait quitté Bercy pour créer son parti, En marche, en avril 2016, et briguer la magistrature suprême. Cela lui avait réussi. Il avait lui aussi bénéficié de nombreux financements et d’une forte couverture médiatique. Plutôt que de sombrer avec un autre François, Bayrou cette fois, Retailleau pourrait donc être tenté courant 2026 de quitter à son tour le navire pour concourir à l’élection-reine de la Vème République.
QUELLE que soit l’issue de son entreprise, qu’elle soit ou non couronnée de succès sur le plan électoral, il convient de ne se faire aucune illusion et il faut bien constater que ne demeurent aujourd’hui de la droite que quelques mâles propos sur les sujets régaliens. Les dirigeants dits de droite, toutes tendances confondues, ont abandonné tout le reste, et notamment toutes les positions traditionnelles sur les questions dites sociétales, la défense des bonnes mœurs, de la vie, de la famille. Alors que Retailleau est pourtant sur le papier un des moins mauvais sur tous ces sujets — on l’a vu lorsqu’il était président de groupe des sénateurs LR —, qu’il était défavorable à la constitutionnalisation du « droit à l’avortement », qu’il se dit opposé à l’euthanasie, qu’il fut contre le Pacs et le « mariage pour tous », force est de reconnaître que, depuis qu’il est ministre il a abdiqué, démissionné sur tous ces sujets pourtant vitaux. A peine nommé place Beauvau, il affirmait au 20 heures de TF1 qu’il n’était pas contre « le mariage pour tous ». On le dit opposé à l’actuel projet de loi légalisant le suicide assisté et l’euthanasie — qui sera examiné par l’Assemblée nationale, puis soumis au vote des députés, à partir du 27 mai — mais le gouvernement défendant ce texte abominable, on le voit mal se soustraire à la solidarité gouvernementale au nom de ses convictions sur le sujet. C’est pourtant ce qu’il devrait impérativement faire, lui qu’on présente comme un catholique vendéen pratiquant, voire fervent. Mais il est certain que, dans une France très déchristianisée et sans repères, il est plus difficile et moins populaire de militer activement contre l’euthanasie et le suicide assisté que de faire de tonitruantes déclarations, purement verbales, contre le narcotrafic, les OQTF et l’immigration clandestine. Surtout si l’on veut s’installer à l’Elysée !
De plus, Retailleau, comme toute la “droite” actuelle, d’Edouard Philippe à Marine Le Pen, est totalement soumis au lobby judéo-sioniste. Un très proche de Retailleau, le sénateur Stéphane Le Rudulier, a récemment déposé au bureau de la Haute Assemblée une proposition de loi prévoyant de condamner jusqu’à cinq ans de prison ferme et 100 000 euros d’amende toute critique de l’Etat d’Israël ! Et LR, comme le RN, comme Reconquête, comme Horizons, comme Renaissance, ne trouve rien à redire au génocide perpétré à Gaza, à l’utilisation délibérée de la famine pour parvenir à ses fins, au nettoyage ethnique, au Grand Remplacement des autochtones, exterminés pour les uns, blessés et déportés pour les autres. Mais, lorsqu’elles s’opèrent dans ce sens, les déportations et les crimes de masse sont manifestement autorisés, voire justifiés ! Le 16 mai, invitée de la chaîne israélienne, i24 News, Marine Le Pen a ainsi fermement défendu la politique génocidaire du boucher en chef Netanyahu : « Israël fait ce qu’il peut dans une situation extrêmement difficile ». Voilà tout ce qu’elle a trouvé à dire sur le sujet ! C’est à la fois lamentable, abject et odieux. On voit clairement le but de la “dédiabolisation” du FN et de l’exclusion de Jean-Marie Le Pen : la soumission jusqu’à la nausée, jusqu’au crime, au lobby juif (comme d’ailleurs le consentement explicite au massacre industriel des innocents par l’avortement de masse) et à une entité sioniste inhumaine et criminelle. Mais si Retailleau, Wauquiez, ou n’importe quel politicien de droite ou du centre — et même souvent de gauche désormais — avait été invité sur la même chaîne, il aurait à n’en pas douter tenu des propos voisins ou identiques. C’est à cela aussi, et peut-être surtout, qu’on mesure qu’il n’est plus de vraie droite en France, indépendante de puissants et nocifs lobbies, et n’ayant véritablement au cœur que l’amour de notre pays et le service du bien, du beau, du vrai. […]
RIVAROL, <[email protected]>
Source : Éditorial de Rivarol
Article assez indulgent pour Retailleau et coup de pied de l’âne à Marine Le Pen, peut-être justifié, mais hors de propos dans cet article. Dans tous les cas pour combattre le RN Retailleau aura l’appui de Reconquête, du PDF, de Phillipot, d’Asselinau, des abstentionnistes mondains anti-Marine. Cela fera les 10/12 points qui manqueront au premier tour pour le RN. LFI peut dormir tranquille, la lutte contre le fascisme Mariniste l’extrême-droite s’en charge.
Je vous fais grâce de ce que puis penser à l’égard de cet individu et de ses semblables qui l’ont élu, mis en place et qui le soutiennent.
« Tout changer pour que rien ne change » (Le Guépard)