La loi dite du « battement de cœur » (heartbeat act) votée par l’assemblée de l’État du Texas était entrée en vigueur ce mercredi 1er septembre dernier, interdisant l’avortement dès que l’activité cardiaque du fœtus débute, ce qui correspond environ à la sixième semaine de grossesse.
Il s’agit certes d’une mesure qu’en radical on peut estimer timide et insuffisante, bien évidemment ; mais elle avait le mérite de refermer grandement dans les faits la possibilité d’avorter, ce qui était déjà un premier pas et un progrès.
Si la jurisprudence de la Cour Suprême a reconnu à plusieurs reprises le recours à l’avortement comme un droit par le passé (cf : son arrêt fondateur : Roe v. Wade rendu en 1973), les magistrats de la Cour Suprême actuelle, remaniée par Donald Trump, seraient plutôt favorables à la restriction du droit à l’avortement. Mais la bataille juridique est cependant loin d’être gagnée.
La Cour s’est refusée pour l’heure à intervenir en urgence pour censurer ladite loi du battement de cœur, au motif que la loi du battement de cœur posait un problème juridique. En effet, la loi ne prévoit pas que l’État texan puisse engager des poursuites à l’égard des femmes qui recourraient à l’avortement hors des délais prévus, et ne prévoit qu’une procédure à l’initiative des citoyens à l’encontre, non des femmes qui recourraient à l’avortement hors délai, mais des médecins ou des personnes autres que les femmes qui concourraient à l’avortement.
Or, l’arrêt Roe v. Wade qui sert habituellement de base aux recours contre les lois anti-avortement, ne prévoit que l’interdiction pour le gouvernement de réglementer l’avortement hors du premier trimestre de grossesse ; elle ne prévoit rien en revanche dans le cas où aucune autorité gouvernementale ne serait désignée pour faire appliquer une loi restreignant l’avortement. La Cour Suprême se trouve donc face à une loi contournant astucieusement tous les précédents jurisprudentiels, ce qui lui offre l’occasion rêvée de valider la loi texane.
Ce qui semble inquiétant en revanche sont les manifestations qui ont eu lieu ce samedi 2 octobre, quelques jours avant la reprise des audiences de la Cour Suprême. Des « marches de femmes » (bien masquées, avec leur dreads et leurs tee-shirts de souillons) ont ainsi eu lieu dans diverses villes, notamment à Washington.
Il faut d’ailleurs remarquer qu’à la demande des organisatrices desdites marches, une proposition de loi a été adoptée à la Chambre des représentants (où les démocrates sont majoritaires) dans le but de faire inscrire le droit à l’avortement dans la loi fédérale afin de bloquer la décision de la Cour Suprême dans le cas où elle rendrait un arrêt en rupture avec l’arrêt Roe v. Wade, ce qui ruinerait toute la stratégie juridique de contournement échafaudée par l’assemblée du Texas dans la loi du battement de cœur. Il faudra cependant que cette loi d’inscription du droit à l’avortement dans la loi fédérale passe l’étape du Sénat (où les républicains sont majoritaires) ce qui, fort heureusement, ne semble pas si évident.
Espérons que des vies d’enfants seront sauvées en définitive au Texas. Espérons que le Texas se lève et se batte pour sa vie et sa liberté. Et pas seulement par le biais de détours juridiques avisés.
Espérons qu’un jour les cow-boys feront danser les pieds tendres. Qu’un jour ils chausseront leurs éperons, coifferont leurs chapeaux, et galoperont avec leurs Winch, Colt Paterson et Walker à la ceinture, pour faire des États-Unis une nation de la terre et de l’honneur.
Yee-ha !
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