SANS SURPRISE LE PREMIER TOUR des élections législatives a d’abord été marqué par un taux d’abstention record : 52,49 % des inscrits, 1,2 % de plus qu’il y a cinq ans. Ce qui est le niveau le plus élevé depuis le début de la Ve République pour un scrutin législatif. Il faut dire que depuis une trentaine d’années la participation n’a cessé de reculer pour l’élection visant à renouveler la représentation nationale. L’instauration du quinquennat, la présidentialisation du régime, la dépolitisation générale, le sentiment que rien ne change, que l’on se rende ou non dans l’isoloir, expliquent ce désintérêt d’une grande partie des Français pour ces élections. Comme toujours, les commentateurs et politiques font mine de s’affliger de cette abstention chaque fois plus massive mais une fois que les premières estimations des résultats tombent à vingt heures précises, on ne parle plus du tout de cette question. Pourtant, cette très forte abstention touchant plus de 25 millions de personnes inscrites sur les listes électorales démontre la profonde insatisfaction des citoyens envers l’offre politique, tout comme les quelque 512 000 bulletins blancs et nuls.
Et les résultats eux-mêmes témoignent de ce malaise grandissant car aucun parti, aucune coalition, aucune personnalité politique ne réalise le 12 juin au soir une performance triomphale. C’est l’ère du désenchantement. Personne ne séduit véritablement une fraction importante de l’opinion. Sur les 577 circonscriptions de métropole et d’outre-mer on ne recense au total que cinq élus au soir du premier tour : quatre pour la Nouvelle union populaire, écologique et sociale (NUPES) de Mélenchon et un seul pour la majorité présidentielle. Les électeurs sont donc appelés à se déplacer à nouveau dimanche prochain dans 572 des 577 circonscriptions, ce qui ne s’était jamais vu jusque-là. Naguère plusieurs dizaines de députés, de différentes tendances, étaient élus ou réélus dès le premier tour. Ce n’est plus le cas désormais. Et cet élément, à lui seul, témoigne de la désaffection d’une partie croissante du corps électoral à l’égard des élus de la République.
Mais comment pourrait-il en être autrement alors même que les conditions de vie et de travail sont souvent de plus en plus difficiles, que la vie au quotidien est de plus en plus chère et que les impôts et taxes de toutes sortes, eux, ne cessent de croître ? Beaucoup de politiciens, surtout à gauche, mais pas seulement, parlent sans cesse de fin du monde à cause du « dérèglement climatique », tiennent sur ce point un discours catastrophiste, apocalyptique sans jamais apporter d’ailleurs la moindre preuve convaincante et concrète de ce qu’ils assènent péremptoirement mais ils ne se gardent bien d’aider nos compatriotes à finir leur fin de mois, à vivre décemment, ils ne s’intéressent ni au Grand Remplacement ni au Grand Déclassement ni au Grand Effacement de notre peuple. Ils nous menacent de périls imaginaires ou, à tout le moins, fort hypothétiques, mais ils ne se préoccupent nullement des enfants avortés, des vieillards euthanasiés, des jeunes mutilés du fait de la criminelle propagande LGBT et de la prétendue dysphorie de genre.
LES MEDIA, au soir du 12 juin, nous ont tympanisé sur la victoire, selon, eux, éclatante de la NUPES de Mélenchon. S’il est vrai que le chef de la France insoumise a su être habile sur le plan de la communication en appelant dès l’entre-deux-tours de la présidentielle les électeurs à le nommer Premier ministre et en réunissant autour de lui les autres formations de gauche, les socialistes, les communistes et les Verts, ce qui n’est ni plus ni moins qu’une énième resucée de l’union de la gauche, puis de la gauche plurielle rose-rouge-verte, le score final de 25,66 % des voix est honorable mais il est très loin d’être un triomphe. Aux législatives de 2017, ces quatre formations de gauche, certes alors en ordre dispersé, réalisaient déjà le même score. Et ce résultat est même sensiblement inférieur en pourcentage au total obtenu par Mélenchon, Roussel, Jadot et Hidalgo au premier tour de la présidentielle. C’est cinq points de moins : 25,66 % contre 30,61 %. On ne peut donc pas parler d’une dynamique triomphale, tant s’en faut, mais l’union que Mélenchon a imposée au forceps le fait apparaître, de manière assez largement artificielle, comme le grand gagnant de la soirée. Même s’il ne fait aucun doute que le groupe des Insoumis, du fait de ses alliances, augmentera très fortement ses effectifs à l’issue du second tour. Ils étaient 17 députés en 2017, ils seront probablement plus d’une centaine dans l’hémicycle cette fois-ci.
La nouvelle Assemblée nationale sera donc beaucoup plus à gauche encore que ce qu’elle était jusque-là. Ce qui présage du pire, notamment quant aux politiques d’immigration et quant aux questions dites sociétales : dépénalisation de l’usage des drogues, légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, feu vert donné à la gestation pour autrui, accélération et aggravation de la tyrannie homosexualiste et transexualiste dans les écoles, dès le plus jeune âge, et dans les media.
LES RÉSULTATS du premier tour sont une douche froide pour la majorité présidentielle qui obtient 25,75 %, soit sept points de moins qu’aux législatives de 2017. Et alors que la quasi-totalité des instituts de sondage prédisait à la Macronie une majorité absolue, la plupart des enquêtes s’orientent désormais vers une majorité relative au soir du 19 juin. Ce qui rendra la tâche du gouvernement plus compliquée, même si, comme le montre l’exemple de Michel Rocard entre 1988 et 1991, puis d’Edith Cresson de 1991 à 1992 et enfin de Pierre Bérégovoy de 1992 à 1993, il est parfaitement possible de gouverner avec une simple majorité relative et de faire voter les textes que l’on souhaite voir adoptés. Il faut pour cela réunir des majorités d’idées sur tel ou tel projet de loi en cherchant le soutien, tantôt de sa gauche, tantôt de sa droite. Il n’est pas rare non plus d’“acheter” tel ou tel député en lui accordant tel ou tel hochet auquel il n’est généralement pas insensible.
Le score de la Macronie, tout comme celui de la NUPES, est même en retrait des résultats de la dernière présidentielle : tout seul le président sortant avait obtenu 27,85 % des voix. La coalition composée de Renaissance (ex-République en marche), du Modem de François Bayrou et d’Horizons d’Edouard Philippe fait moins bien (-2,10 points) que son chef. Ce n’est pas de bonne augure pour la suite et cela promet un quinquennat délicat au chef de l’Etat car sa base électorale est de plus en plus faible et fragile. Mais du fait du caractère laminoir du scrutin majoritaire à deux tours pour les partis et candidats traités d’extrémistes et de dangers pour la République (et la garde rapprochée de Macron n’a pas hésité à diaboliser Mélenchon, comme elle l’a fait hier à la présidentielle pour Marine Le Pen afin de mobiliser ses troupes en jouant sur les peurs, une technique très éprouvée et souvent efficace), la Macronie, sauf énorme surprise toujours possible, devrait obtenir au moins une majorité relative. De toute façon, que ce soit Ensemble ! ou la Nupes qui obtienne la majorité relative, ou, de manière plus improbable, la majorité absolue, c’est dans tous les cas une catastrophe pour notre pays tant les politiques que ces coalitions conduiront mèneront notre peuple et notre nation au tombeau. Et en cinq ans elles ont hélas largement le temps de faire des dégâts dans tous les domaines !
A commencer par celui de nos libertés de plus en plus réduites en lambeaux. A moins que ne se lèvent des mouvements comparables à celui des gilets jaunes et que cette fois-ci le soulèvement aboutisse. Ce n’est pas impossible mais nous en sommes encore très loin pour le moment.
Il sera intéressant de voir au second tour le nombre de ministres battus sur la quinzaine qui se présentaient, généralement dans des circonscriptions très favorables, au moins sur le papier. Il faut souhaiter qu’un maximum soit éliminé, Macron s’étant engagé à ce que tout ministre battu au suffrage universel quitte immédiatement le gouvernement. Le rêve serait que l’affreuse Elisabeth Borne, née Bornstein, qui a tenu dimanche soir un discours robotique et glaçant, c’était effrayant, soit étrillée mais ce sera difficile car celle qui tient lieu de Premier ministre a choisi une circonscription a priori imprenable dans le Calvados. On notera déjà avec satisfaction la défaite dès le premier tour à Montargis du ci-devant ministre de l’Education nationale, le très hautain Jean-Michel Blanquer dont il faut rappeler qu’il a signé des circulaires favorisant l’accueil des « enfants transgenres » à l’école et la promotion par tous les moyens en milieu scolaire de l’idéologie LGBTiste, ce qui est une parfaite ignominie. Et dire qu’il est encore des gens dits de droite pour avoir les yeux de Chimène pour le sinistre et cynique Blanquer !
LE RASSEMBLEMENT national de Marine Le Pen et de Jordan Bardella décroche, quant à lui, la troisième position avec 18,68 % des suffrages exprimés. C’est sept points de moins que la Nupes et la Macronie. Toutefois, si l’on additionne au score national du RN celui de Reconquête (4,24 %), de Debout la France, des Patriotes, de Génération Frexit (1,10 %) et de quelques candidats isolés de droite nationale (0,03 %), le camp dit national et identitaire fait plus de 24 % des voix (24,05 %). C’est-à-dire que si l’union avait été réalisée dès le premier tour entre ses différentes composantes, comme l’ont fait les macroniens et la gauche autour de Mélenchon, se seraient fait face trois blocs d’importance égale et il est même possible qu’avec l’effet de dynamique et d’entraînement provoqué par l’union, ce camp dit national eût pu d’un cheveu arriver en tête du scrutin. Les media n’auraient donc pas pu parler ad nauseam d’un duel entre Macron et Mélenchon, qui se substitue à celui entre le président sortant et Marine Le Pen, mais d’un trio de forces égales.
Le refus catégorique et opiniâtre de la benjamine de Jean-Marie Le Pen de toute alliance, de tout rapprochement, de tout dialogue, de toute esquisse de discussion avec Philippot, Dupont-Aignan et Zemmour, s’il avait pour but évident de tuer la concurrence et de conserver le monopole électoral et financier pour sa boutique, ce qui est certes largement réussi, a eu comme conséquence de marginaliser politiquement et médiatiquement ce qu’il est convenu d’appeler « le camp national » fracturé en trois parties et de l’empêcher d’être massivement présent au second tour, la concurrence entre trois candidatures parallèles faisant manquer, parfois d’un rien, la qualification dans plusieurs dizaines de circonscriptions métropolitaines. D’où le paradoxe suivant : Marine Le Pen a devancé Mélenchon, certes de peu, au premier tour de la présidentielle, obtenant plus de 41 % au second, mais c’est aujourd’hui le chef de la France insoumise qui apparaît comme le principal adversaire de Macron. Ce qui est un comble, d’autant que l’ex-sénateur socialiste a favorisé la réélection du président sortant en appelant à ne pas donner une seule voix à l’autre finaliste. Mais, on le sait, l’expérience l’atteste, l’histoire le prouve, la politique électorale n’est en réalité qu’un jeu de rôles, une vaste fumisterie où les oppositions sont artificielles et contrôlées, où les contestations sont verbales et fugaces et où les opposants, malgré les apparences, sont généralement des alliés objectifs, des auxiliaires et des adjuvants du pouvoir en place.
LE SCORE du Rassemblement national (18,68 %) n’est pas spécialement flamboyant puisque le mouvement fait près de cinq points de moins que Marine Le Pen à la présidentielle (23,15 %), ce qui est certes habituel lorsque les élections législatives suivent de quelques semaines l’élection-reine de la Ve République (ce fut déjà le cas en 1988, 2002, 2007, 2012 et 2017 : le FN avait alors perdu à chaque fois entre 4 et 8 points entre le premier tour de la présidentielle et le premier tour des législatives subséquentes). Si le résultat n’est pas exceptionnel, il est toutefois loin d’être médiocre ou négligeable. C’est même le meilleur résultat du parti pour un scrutin législatif, tant en voix qu’en pourcentage. Le meilleur score obtenu jusque-là par le FN aux législatives datait de 1997 lorsque le Front avait obtenu 14,94 % des suffrages et avait pu se maintenir dans 132 circonscriptions, dont 76 en triangulaire. Cette fois le RN sera présent au second tour dans 208 circonscriptions et il est arrivé en tête au premier tour dans 110 d’entre elles contre 20 seulement il y a cinq ans.
Ses zones de force sont toujours globalement les mêmes : il s’agit pour l’essentiel du pourtour méditerranéen, du Nord et de l’Est de la France. Seules les grandes villes (et leurs banlieues allogènes) et la façade Atlantique lui résistent fortement. En revanche, les zones rurales et la France périphérique lui accordent des scores importants, et parfois même impressionnants. Bien que Marine Le Pen n’ait quasiment pas fait campagne, prenant près de trois semaines de vacances après la présidentielle quand Mélenchon était sur le pont, travaillant à une alliance avec les autres partis de gauche, et que la campagne tardive du RN fut poussive et minimaliste, Marine Le Pen et ses lieutenants allant jusqu’à répéter que Macron aurait forcément une majorité car telle est la logique des institutions, ce qui était bien peu mobilisateur pour leur électorat, eh bien force est de constater que ses bastions lui sont restés fidèles, que ses huit députés sortants devraient normalement être réélus sans difficulté dimanche prochain (Marine Le Pen, quant à elle, manque de peu la réélection dès le premier tour dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais, comprenant Hénin-Beaumont, avec près de 54 % des voix, l’abstention massive l’empêchant seule d’être réélue puisque, rappelons-le, il faut obtenir le soutien d’au moins 50 % des exprimés mais aussi de 25 % des inscrits pour décrocher la timbale dès le premier tour).
Mieux, tout indique que le Rassemblement national disposera cette fois d’un groupe parlementaire, ce qui ne lui était plus arrivé depuis près de 35 ans. Les actuelles projections lui accordent entre 20 et 45 députés. Il en faut 15 pour pouvoir constituer un groupe au Palais-Bourbon (il faut 10 sénateurs au Palais du Luxembourg). Le FN n’avait plus de groupe parlementaire depuis 1988 à cause de l’abandon de la proportionnelle qui lui avait permis d’élire en mars 1986 35 députés. Le RN en aura-t-il autant ou davantage dimanche prochain ? C’est possible. Mais, en toutes hypothèses, son groupe parlementaire sera moindre que celui des Républicains qui sauvent les meubles avec plus de 10 % des voix (et même plus de 13 % avec leurs alliés divers droite et les centristes de l’UDI) et qui pourraient obtenir entre 50 et 80 députés (contre une centaine dans l’assemblée sortante). Le score reste certes modeste pour ce parti si longtemps puissant et dominant mais il est nettement en progrès par rapport au résultat calamiteux de Valérie Pécresse (4,78 %). Bien qu’affaiblis, les LR ne sont pas morts. L’entreprise de débauchage de la Macronie, publiquement encouragée par l’ex-chef de l’Etat Nicolas Sarkozy, a échoué : seuls cinq députés LR sortants sur 100 ont rejoint la majorité présidentielle. Les droites sont donc plus que jamais divisées et minoritaires. Le contingent d’élus LR pourrait toutefois être utile à Macron en cas de majorité relative : pour faire voter certains projets de loi comme la réforme des retraites avec le report de l’âge légal à 65 ans et l’augmentation des annuités ou le refus de l’augmentation des bas salaires et des minima sociaux ou le rejet de la titularisation des vacataires dans la fonction publique, l’apport de quelques dizaines de députés LR pourrait s’avérer décisif.
MARINE LE PEN peut avoir le sourire. Non seulement elle pourra présider pendant cinq ans comme elle le souhaitait un groupe RN, ce que ne pourra faire Mélenchon pour la France insoumise puisque, fort curieusement, ce dernier ne s’est pas représenté aux législatives où il aurait pourtant été triomphalement réélu dans sa circonscription en or à Marseille qu’il a confiée à son lieutenant Manuel Bompard (il est difficile de ne pas voir là une faute politique et stratégique de sa part, ce qui est étonnant vu son expérience), mais, de plus, elle a tué la concurrence. Les 550 candidats présentés par Reconquête échouent tous en effet dès le premier tour, y compris son chef Eric Zemmour dans le Var, devancé, humiliation suprême, par un candidat RN totalement inconnu, y compris l’ex-LR Guillaume Peltier qui arrive avec moins de 14 % en 5e position dans la 2e circonscription du Loir-et-Cher dont il était le député sortant (ce fieffé arriviste doit amèrement regretter en privé d’avoir quitté LR), le candidat du RN caracolant en tête. Quant au juvénile Stanislas Rigault, dont la suppléante n’était autre que la sémillante et future parturiente Marion Maréchal, il arrive en 4e position, plafonnant à 10,54 %, très loin de la candidate RN, une inconnue là aussi qui est en tête. On ne dira jamais assez combien le poids de l’étiquette est important en politique, combien il écrase tout de manière stupéfiante, tel un rouleau-compresseur, tel un char israélien dans les territoires occupés. Depuis quarante ans, jamais aucun concurrent du FN (du RN aujourd’hui) n’a réussi à supplanter sur le plan électoral le mouvement des Le Pen au sein du camp dit national. Toutes les dissidences, toutes les concurrences ont invariablement échoué. C’est impressionnant, et cela témoigne de la force d’un nom, d’une étiquette et aussi d’une visibilité médiatique ininterrompue depuis quatre décennies.
Au niveau national, Reconquête obtient 4,24 % des suffrages exprimés, soit un net recul par rapport aux 7,07 % obtenus par Eric Zemmour au premier tour de la présidentielle. Il faut se rendre à l’évidence : comme nous l’avions écrit dans notre numéro sur le premier tour de la présidentielle, qu’on le déplore, qu’on s’en réjouisse ou qu’on y soit indifférent, la Reconquête finit en historiette. L’aventure s’achève avant même d’avoir commencé. Zemmour apparaît objectivement comme un Mégret bis dont le destin électoral est identique. On en a connu de ses météorites qui n’ont laissé aucune trace. Le “Z” rebondira peut-être, mais de plus en plus bas, de scrutin en scrutin, jusqu’à la chute finale. Il vise désormais les européennes de 2024, avant de retenter sa chance à la présidentielle de 2027. Mais avec quelle dynamique ? Quelle crédibilité ? Quelle équipe ? L’échec, surtout lorsqu’il est répété, redoublé, et d’autant plus cruel que Zemmour se disait sûr d’être au second tour de la présidentielle, voire de gagner le scrutin, entraîne immanquablement une démobilisation, une désillusion, des départs et des divisions, des rancœurs et des déceptions. Reconquête n’a été qu’un feu de paille, un fétu que le vent emporte. La candidature présidentielle de Zemmour était un fusil à un coup. Soit le pari était gagnant et il renversait la table. Soit il était perdant et alors l’échec était irrémissible. Or, c’est la deuxième hypothèse qui malheureusement pour lui et heureusement pour Marine Le Pen s’est réalisée.
Certes, avec 4,24 %, Reconquête bénéficiera pendant cinq ans d’un financement public qui lui permettra de vivoter. Mais sans aucune dynamique ni perspective. Le mouvement devra d’abord rembourser les centaines de candidats qui n’ont pas obtenu 5 % et dont la campagne ne sera donc pas payée par l’Etat, ce qui représente une coquette somme, à moins que les différents candidats ne prennent l’ardoise à leur charge, ce qui est douteux. Et il sera bien difficile de faire élire des eurodéputés au Parlement européen dans deux ans. Il faut pour ce faire réaliser au moins 5 % au niveau national. Ce n’est pas gagné face au juvénile Jordan Bardella, un très bon client télé, qui conduira à nouveau la liste du RN en mai 2024 et alors même qu’il y aura probablement en sus une liste LR, une autre de Dupont-Aignan voire de Philippot.
Quant à Marion Maréchal, elle poursuit sa descente aux enfers : en 2012, elle avait été un des deux seuls députés FN élus en France au scrutin majoritaire à deux tours. Elle s’était déjà présentée dans une circonscription du Vaucluse, à Carpentras. Cette fois-ci, suppléante de Stanislas Rigault, jeune homme imbu de sa personne que certains surnomment « tête à claques » et qui avait élégamment traité RIVAROL de “torchon”, elle plafonne à 10 % des voix. Le naufrage est donc total. Marine Le Pen, toujours très contente d’elle, peut afficher son sourire carnassier. D’autant plus que son ancien numéro deux, Florian Philippot, mord lui aussi la poussière dans la sixième circonscription de la Moselle avec 4,62 % des voix. Quant à Nicolas Dupont-Aignan, que Marine Le Pen avait brièvement désigné en avril 2017 comme futur Premier ministre avant de se fâcher avec (c’est une habitude chez elle !), il est en ballottage dans l’Essonne dans un duel à l’issue très incertaine. Par conséquent, l’ex-présidente du RN peut espérer être durablement débarrassée de tous ses concurrents dimanche prochain. Elle a tué le match, comme naguère elle a “tué” son père, “tué” Gollnisch et “tué” Lang. Elle devrait jouer dans un thriller ! C’est la nettoyeuse de Montretout !
A la tête de son groupe de députés, elle bénéficiera de moyens matériels beaucoup plus importants et d’une présence médiatique sensiblement plus forte, les débats à l’Assemblée étant assez largement couverts par la presse audiovisuelle. Le financement public annuel du RN sera lui aussi fortement augmenté puisque son parti a réuni 1,3 million de suffrages de plus qu’en 2017, chaque voix rapportant 1,64 euro par an pendant cinq ans. Ce qui lui permettra non seulement d’éviter la faillite mais aussi de rééchelonner et de rembourser graduellement ses dettes (plus de vingt millions d’euros en tout). Elle pourra à loisir avec les gays de la Marine s’abreuver avec ses lèvres à des fontaines à champagne (elle adore ça !), consommer sans modération des petits fours et du caviar, multiplier les voyages luxueux à l’étranger, faire la fête, s’éclater sur du Jean-Jacques Goldman (elle n’est pas belle, la vie !), tripler ou quadrupler le traitement mensuel que lui accorde le RN (et qui est aujourd’hui de 5000 euros net, en plus de ses mandats de député et de conseillère départementale, et sans même parler de son confortable patrimoine immobilier). C’est formidable !
ENFIN ce scrutin marque la quasi-disparition des droites sur le plan parlementaire. A la vérité, il n’y a plus aujourd’hui de vraie droite en France puisqu’aucun mouvement jouant la carte électorale ne défend la famille naturelle, la morale traditionnelle, la France historique, ne s’oppose à la drogue, à l’avortement, à la pornographie de masse non plus qu’aux coteries LGBT et judéo-sionistes. Mais même ce que les grands media appellent de manière très abusive « la droite » et « l’extrême droite » n’auront probablement dimanche soir que quelques dizaines de députés, une centaine tout au plus sur 577, moins d’un cinquième des effectifs. Ce qui ne s’était jamais vu jusque-là dans toute l’histoire de la République.
Et c’est peut-être cela qui est le plus terrifiant : plus le mal est profond, plus le pays agonise, plus tout s’effondre, plus le chaos est là et plus les forces de destruction et de subversion actives et virulentes dominent le paysage politico-médiatique et imposent dans tous les domaines une course effrénée vers l’abîme. Loin des illusions électorales, à notre humble niveau, nous n’avons d’autre choix que de résister mentalement, spirituellement, de toutes nos forces, contre cette gigantesque entreprise de pollution des esprits, de lobotomisation des cerveaux, de viol des consciences et d’asservissement des âmes.
Rivarol
Source : Éditorial de Rivarol
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