Turquie : coup d’État ou coup fourré ?
Dans la nuit de vendredi 15 à samedi 16 juillet, en Turquie, des éléments appartenant aux forces armées turques et se présentant comme « Conseil de la paix dans le pays » ont annoncé la proclamation de la loi martiale et d’un couvre-feu. Dans le même temps, après la fermeture de ponts sur le Bosphore, des unités d’infanterie et des chars ont pris position dans Istanbul et Ankara alors que des avions de chasse et des hélicoptères de combat effectuaient des tirs contre le Parlement turc et le palais présidentiel. Depuis Marmaris où il était en vacances, le président Erdogan a appelé la population à s’opposer au « putsch », en direct à la télévision depuis un téléphone portable et des dizaines de milliers de ses partisans et de Turcs, brandissant des drapeaux, ont envahi les rues et les places, bravant les unités militaires déployées. Des combats peu intenses ont opposé les rebelles aux forces loyales et à la population et on dénombrait au petit matin, environ 160 personnes tuées et 1400 blessées.
Mais après l’arrivée d’Erdogan à l’aéroport Ataturk d’Istanbul, des milliers de soldats se sont rendus aux forces de police et vers 10 heures le chef de l’armée par intérim, le général Ümit Dündar, a annoncé que la tentative de putsch avait été mise en échec. La reddition a été l’occasion pour des foules galvanisées et fanatisées de commettre de nombreuses exactions, lynchages et tueries sur les soldats rebelles désarmés. Certains ont même été décapités… Et la répression n’a pas traînée : 2800 militaires ont été arrêtés ainsi que plus de 2700 juges (pour des motifs inconnus).
L’administration Erdogan a accusé l’opposant islamiste, exilé aux États-Unis, Fethullah Gulen et ses partisans de chercher à mettre en place des structures parallèles dans le but de faire tomber le gouvernement et d’être à l’origine du soulèvement. De son côté le prédicateur a condamné la tentative de coup d’État et a suggéré qu’Erdogan pourrait en être l’instigateur dans le but de créer de la confusion et de permettre l’arrestation de tous ses opposants.
Quoi qu’il en soit, coup d’État ou coup fourré, même si l’autocrate islamiste Erdogan sort temporairement renforcé de ces événements, il a malgré tout senti le vent du boulet. Et la preuve est faite que jusqu’au plus profond de l’État turc des éléments radicaux sont prêts à se soulever violemment contre lui et ses partisans…