À Rodolphe Ratte*
La mission de la Gendarmerie Nationale est définie par un cadre institutionnel, des textes de loi et des modes de fonctionnement stables dans la durée. Elle s’ancre dans des symboles forts, qui l’illustrent et la confortent dans l’esprit des gendarmes comme dans celui de la population. Changer ou altérer ces symboles peut être un moyen discret d’accompagner une évolution de la mission de la Gendarmerie. Le présent texte a pour objet d’attirer l’attention sur de probables changements symboliques en préparation, qui nécessitent vigilance et implication de la part des gendarmes et des citoyens.
« On gouverne toujours par de l’efficacité et des symboles »
(Emmanuel Macron 18 janvier 2024 à Clichy-sous-Bois)
S’il faut retenir une seule image symbolique de la gendarmerie, c’est selon moi celle d’une cérémonie rassemblant des gendarmes en uniforme au garde-à-vous devant le drapeau français, symbole de la Nation. La mission de la Gendarmerie peut se résumer en ces mots : protection et service de la Nation. La Gendarmerie obéit aux autorités parce qu’elles sont réputées être les représentantes légitimes de la Nation. Elle n’est pas au service exclusif de l’État, et ne saurait servir non plus des intérêts particuliers ou des groupes partisans. La référence à la Nation est précisément ce qui sacralise la mission de la Gendarmerie, en l’absence de référence supérieure autorisée dans un régime strictement laïc tel que le régime républicain français.
Dès lors que l’on qualifie une mission de sacrée, le divin apparaît cependant en toile de fond, en particulier au sein d’un corps militaire qui a traditionnellement attiré vers lui les jeunes issus des milieux catholiques. C’est ainsi que la commémoration de Sainte Geneviève a pris une importance symbolique considérable pour la Gendarmerie Nationale de la France républicaine et laïque. C’est à une date relativement récente, le 18 mai 1962, que le pape Jean XXIII a établi par décret Sainte-Geneviève comme patronne « des gendarmes français, gardiens de l’ordre public ». Depuis cette date, Sainte Geneviève est fêtée et honorée chaque année par les gendarmes français, au cours de cérémonies locales très suivies, comprenant une messe et des allocutions, et auxquelles participent les autorités civiles.
L’histoire de Sainte Geneviève, Sainte du cinquième siècle, est résumée par le commandant Gildas Lepetit sur une page officielle de la Gendarmerie.
Il explique notamment l’origine des deux dates de célébration de la Sainte, le 26 novembre, date de principe retenue par la gendarmerie comme référence pour les cérémonies, et le 3 janvier. Il conclut par cette devise fameuse, qui illustre sur le plan symbolique l’idéal du gendarme et de la gendarmerie :
« Et par Sainte-Geneviève, Vive la gendarmerie ! »
Dans les moments critiques, Sainte Geneviève a en effet su non seulement organiser la résistance à l’ennemi qui menaçait la ville de Paris, mais aussi insuffler son courage à la population. Action et exemplarité donc, des qualités attendues du gendarme, qui aspire toujours à relever ce défi.
La symbolique de Sainte Geneviève va cependant plus loin, et ne peut manquer de titiller les autorités de la République. Geneviève n’est pas considérée comme sainte pour ses seules qualités humaines, mais aussi pour sa piété et sa ferveur envers Dieu. En plus de son action concrète sur le terrain face à la menace d’invasion, elle a prié, et exhorté la population à la prière. Le fait est que ses prières ont été exaucées, même si certains penseront toujours que la prière ne peut rationnellement avoir aucune portée. Longtemps après la mort de la Sainte, un autre miracle lui a été attribué, celui de la guérison de la maladie des Ardents le 26 novembre de l’an 1130. De nos jours les autorités font appel à Albert Bourla et à Bill Gates pour tenter de juguler une épidémie, au nom d’une science profane et vénale. Plus de dépenses, plus de souffrances, moins de réussite. Le bilan n’est pas meilleur pour la protection de Paris.
Les honneurs rendus par les gendarmes et leur institution à Sainte Geneviève constituent donc les reliques d’un spectre que la Révolution croyait avoir calciné et dispersé aux vents de l’histoire, celui d’une force spirituelle qui pourrait un jour affirmer sa présence, voire sa primauté, dans le destin d’une collectivité humaine. Ils sont le symbole d’un défi implicite et poli, mais néanmoins tangible, au dogme républicain. Si l’on gouverne toujours par l’efficacité et les symboles, comme vient de l’affirmer le président de la République, un symbole hérétique, selon l’orthodoxie républicaine, se doit d’être renversé.
Renverser un symbole établi est plus complexe que de desceller et abattre une statue, ou de brûler une icône. Il ne suffit pas en l’espèce de briser le vitrail de l’église Saint-Etienne-du-Mont à Paris, représentant Sainte Geneviève donnant du pain aux Parisiens. Il s’agit d’une affaire de haute politique, dans laquelle les membres de l’institution visée devront être persuadés d’accéder à un statut encore plus élevé sur l’échelle de l’honneur national et de la reconnaissance publique. Le gendarme n’est pas d’un naturel orgueilleux, mais il ne sait pas mieux s’opposer qu’un chat propre et poli à être caressé dans le sens du poil. C’est ce qui est advenu dans un passé récent, et le chat ne s’est pas rebiffé.
Premier indice : la gendarmerie avait un hymne qui mettait en valeur le métier de gendarme, avec une pointe de candeur, mais qui suscitait respect et adhésion. Une interprétation complète peut être écoutée ici. Les paroles du dernier couplet sont en harmonie avec ce que j’ai détaillé de la mission sacrée de la gendarmerie :
Étrangers à toutes les passions
Nous protégeons la population
Qui couronne les plus nobles actions
Du corps le plus utile à la nation
Par une initiative prise en 2020, un nouveau chant a été écrit, dont les paroles sont reproduites ici en lien. L’interprétation officielle peut être écoutée ici.
Ce chant revêt un caractère officiel et réglementaire, et doit donc être appris par l’ensemble des élèves gendarmes. Comme tout chant militaire, il fait vibrer, en première écoute, ceux qui sont attachés aux notions de patrie et d’honneur. Des couplets 1, 2 et 8, qui ont vocation à être prioritairement interprétés car ils évoquent toute la gendarmerie, les passages suivants méritent cependant une attention particulière :
Héros discret du quotidien,
Et fort de nos siècles d’Histoire,
Notre honneur et notre gloire,
Donner notre vie si besoin.
Moncey, Fontan, Cazals, Beltrame,
Voici vos fiers descendants.
Que l’honneur conduise les âmes,
Des gendarmes du temps présent.
Car de Trèbes à Marignane,
Unis, solides face aux tourments,
Nous reprenons leur oriflamme,
A nous de répondre présent !
Un message subliminal destructeur est contenu dans les quelques mots soulignés en gras. Il sape les fondements opérationnels de la mission du gendarme. L’interprétation de ce chant par les élèves gendarmes les prépare en outre inconsciemment au déclin de la référence symbolique de la Gendarmerie à Sainte Geneviève, et à son remplacement par une référence propre à accroître la sujétion de l’institution au pouvoir exécutif.
Pour comprendre ces assertions, il faut revenir à la douloureuse affaire des attaques terroristes de Carcassonne et Trèbes, le 23 mars 2018, qui ont notamment conduit au décès du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, nommé colonel à titre posthume. Il faut aussi se rappeler l’interprétation qui a été faite de l’action du lieutenant-colonel Beltrame par les autorités. J’y ai consacré deux articles, publiés sur Profession Gendarme, respectivement le 16 février 2023 et le 3 janvier 2024, jour de commémoration de Sainte Geneviève :
- RAPPORT D’ÉTUDE sur les attentats de Carcassonne et Trèbes de mars 2018
- Pour l’honneur du colonel Beltrame
« Donner notre vie si besoin »
Cette formule figurant dans le chant se réfère directement à l’interprétation du geste du lieutenant-colonel Beltrame, telle qu’elle a été propagée par les autorités, avec à leur tête le président de la République Emmanuel Macron. Le maître-mot des discours officiels a en effet été celui de « sacrifice ». J’ai récusé ce mot utilisé à l’égard du lieutenant-colonel Beltrame, et je récuse la formule employée ici dans le nouveau chant de la gendarmerie. La légèreté impliquée par le complément « si besoin » est regrettable. Mais quand on dit d’un soldat mort au combat qu’il a donné sa vie, l’expression est figurative. Un soldat risque sa vie, il n’en fait pas don dans le sens d’un sacrifice qui confinerait au suicide. Je rappelle les mots d’un vrai soldat, le commandant Hélie Denoix de Saint Marc :
« Le dépassement suprême, c’est de risquer sa vie pour quelque chose que l’on croit supérieur à soi-même »
Le gendarme peut être amené à risquer sa vie. Il le fait pour accomplir sa mission sacrée, servir et protéger la Nation. Il ne la donne pas « si besoin », comme on rendrait un service anodin.
J’ai expliqué, dans mon dernier article, pourquoi je ne pouvais pas croire un seul instant que le lieutenant-colonel Beltrame se soit sacrifié, qu’il ait donné sa vie parce qu’il en aurait ressenti le besoin. J’ai donné une explication rationnelle à son geste, basée sur l’étude globale des attaques de Carcassonne et Trèbes, et non sur les apparences à un moment précis, séparément de leur contexte. J’ai montré que le lieutenant-colonel était manifestement tombé dans un piège, et que les mots du président Macron relevaient d’une interprétation fantaisiste et merveilleuse :
« …Mais cette vie comptait pour Arnaud Beltrame. Elle comptait même plus que tout, car elle était comme toute vie la source de sa vocation de servir. Accepter de mourir pour que vivent des innocents, tel est le cœur de l’engagement du soldat. Être prêt à donner sa vie parce que rien n’est plus important que la vie d’un concitoyen, tel est le ressort intime de cette transcendance qui le portait. Là était cette grandeur qui a sidéré la France. »
Si la prose du président reflétait la réalité, le geste du lieutenant-colonel Beltrame relèverait sur le plan professionnel de la faute lourde et à certains égards criminelle. Hors de toute intervention politique, et si le lieutenant-colonel était sorti vivant de l’opération, la présentation pour sa défense des arguments du président lui aurait selon toute évidence valu une radiation définitive des rangs de la gendarmerie.
Mes articles précédents explicitent ces affirmations. Comment un élève gendarme peut-il alors intégrer les paroles du nouveau chant de la gendarmerie dans son champ cognitif ? Il subit soit une dissonance sourde qu’il ne sait pas verbaliser, soit un court-circuit qui annihile chez lui toute réflexion possible sur le sujet. S’il est un tant soi peu cynique, il peut conclure que le respect des règles et des principes compte infiniment moins pour sa carrière que le jugement arbitraire que porteront sur lui les plus hautes autorités.
Pour reprendre les mots du commandant Denoix de Saint Marc, le dépassement suprême du gendarme, quand il risque sa vie, doit être envisagé sous le seul angle de ce qu’il croit supérieur à lui- même, celui de l’idéal qui a motivé son engagement, celui du service sacré du pays et de la Nation.
Saint Arnaud Beltrame face à Sainte Geneviève
Cette mise en opposition ne surprendra pas ceux qui ont pris connaissance du contenu de mon rapport sur les attentats de Carcassonne et Trèbes. Le père Golfier, de l’abbaye de Lagrasse dans l’Aude, travaille activement à la reconnaissance officielle par l’Église catholique du statut de Saint à celui qu’il nomme simplement Arnaud Beltrame. L’omission du grade lors de la mention publique d’un gendarme est une familiarité qui confine au manque de respect, et qui en l’espèce a été initiée par le président Macron, puis s’est généralisée.
L’initiative du père Golfier peut-elle raisonnablement aboutir ? Elle en prend le chemin. Son succès serait tragique à la fois pour le colonel Beltrame et pour la Gendarmerie Nationale. Pour le colonel Beltrame, cela graverait à jamais dans les esprits une interprétation de ses motivations qui constitue, selon mes analyses, une forgerie et un outrage à sa qualité de gendarme.
Pour la Gendarmerie Nationale, il deviendrait inévitable qu’un décret papal vienne un jour substituer Saint Arnaud Beltrame à Sainte Geneviève comme nouveau Saint patron de la Gendarmerie, substituant une image de héros de bande dessinée, forgée par les hommes politiques et les médias, à celle d’une Sainte incarnant à la perfection la mission sacrée de la Gendarmerie.
Avant l’été 2017, il n’existait aucune voie qui aurait permis, dans le contexte des futurs attentats auxquels il serait confronté, d’octroyer au lieutenant-colonel Beltrame le statut de Saint de l’Église catholique. Le 11 juillet 2017, au moment même où le lieutenant-colonel Beltrame s’apprêtait à rejoindre sa nouvelle affectation à Carcassonne, le pape François a décidé de créer une nouvelle voie d’accès à la sainteté, qui paraît taillée sur mesure pour le destin du lieutenant-colonel Beltrame. Il en est le seul candidat possible, selon une déclaration du père Golfier. Le pape François a pris cette décision « de son propre chef », soit en latin par « Motu Proprio ».
Cette nouvelle voie est « l’offrande de vie ». Elle n’exige plus le martyre, mais « l’acceptation d’une mort certaine et à court terme », « propter caritatem », par charité pour les autres. Or les éléments de langage utilisés dès la fin de l’attaque du supermarché de Trèbes à propos du lieutenant-colonel Beltrame, par la classe politique comme par les médias, sont précisément ceux qui étaient nécessaires à sa canonisation ultérieure par l’Église catholique. Ce sont aussi ceux qui ont été repris dans le nouvel hymne de la Gendarmerie, appris et interprété obligatoirement par tous les élèves gendarmes, dans l’expression « Donner sa vie si besoin », associée à « Beltrame » et à « Trèbes ».
Le chat propre et poli que j’ai mentionné plus avant ne s’est pas rebiffé, et est entré dans un jeu de séduction réciproque avec celui qui se prend pour son maître. La Gendarmerie a accepté les honneurs officiels rendus au colonel Arnaud Beltrame, son élévation au rang de héros de l’institution, dans une interprétation de son geste qui était pourtant contraire à l’éthique professionnelle. C’est là une première faute morale, même si des voix, au sein de la Gendarmerie, ont émis des réserves sur le geste du lieutenant-colonel.
Une deuxième faute de la Gendarmerie est paradoxalement l’absence de réelle défense du lieutenant- colonel Beltrame. Comment un gendarme peut-il croire de façon durable qu’un autre gendarme ait fait ce que lui-même ne pourrait pas même envisager de faire, c’est-à-dire de rendre hyper-critique une situation gérable, en bafouant ouvertement les règles les plus basiques et les mieux établies de la profession ? Il y avait forcément une autre explication, et des moyens en interne de connaître la vérité, malgré les obligations de réserve et de confidentialité. En attestent les confidences recueillies du GIGN par le père Golfier, et imprudemment dévoilées par lui lors de conférences, dont l’une a été purement et simplement retirée de la plateforme Youtube après la parution de mon premier rapport. Afin de défendre l’honneur du colonel Beltrame, j’ai utilisé ces confidences pour proposer cette nécessaire autre explication.
Si elles ne sont pas corrigées, les fautes se paient tôt ou tard. Dans le cas présent, elles pourraient l’être de façon symbolique mais terrible. Le héros construit sur une base illégitime par les politiques est déjà célébré par la Gendarmerie et proposé comme modèle à ses élèves. Il pourrait devenir le Saint Patron de l’institution, dont le socle sacré serait ainsi dynamité et remplacé par un mythe fallacieux.
Il n’est pas question pour moi de dénoncer un complot dont je ne pourrais dessiner avec certitude les contours exacts. J’ai montré dans mon rapport que le terroriste qui a mené l’attaque du supermarché Super U de Trèbes disposait manifestement d’informations internes au magasin, et répondait à une logique de planification qui n’était pas celle d’une terreur aveugle. J’ai montré que le lieutenant-colonel Beltrame était vraisemblablement la cible principale visée par l’attaque. J’ai montré que le discours politique avait été dès le départ cohérent et axé sur la notion de sacrifice, terme propre à permettre la canonisation ultérieure du lieutenant-colonel. Je m’en tiens à cet énoncé factuel sans aller plus loin dans l’interprétation.
Que les conséquences de l’attaque terroriste résultent du hasard, de l’accomplissement des desseins impénétrables de Dieu, hors de tout complot humain, ou de la maestria d’un Maître des Symboles qui gouverne avec efficacité, seuls m’importent l’honneur du colonel Beltrame, par souci de vérité et de justice, et la préservation de l’intégrité d’une institution qui porte une mission sacrée envers le pays. J’espère être entendu et compris. J’espère que ceux qui peuvent agir au sein de l’institution agiront.
Dans une homélie prononcée à l’église Saint-Étienne-du-Mont, sur la montagne Sainte-Geneviève à Paris, à l’occasion d’une célébration par la Gendarmerie de Sainte Geneviève, Mgr de Romanet, évêque aux Armées françaises, commentait un passage de l’Évangile sur Marthe et Marie. Il disait que ces figures illustraient pour le gendarme :
« Le service et le sens ultime du service »
Il ajoutait à propos du service :
« … nous sentons qu’il a besoin d’un ressourcement, d’une perspective, d’une finalité. »
Le sens ultime du service, c’est de comprendre, approfondir et préserver la mission sacrée de la Gendarmerie, celle qui a animé ses héros, celle qui a animé et anime toujours une multitude d’hommes et de femmes en bleu. Qu’ils méditent l’homélie que j’ai citée, quelle que soit leur croyance. Qu’ils soient vigilants, car les loups rôdent, parfois déguisés en agneaux. Qu’ils soient compris et soutenus par la population quand ils agissent exclusivement pour le bien et l’intégrité du pays.
Le sens ultime du service aujourd’hui, alors que s’est ouvert le procès des attentats de Carcassonne et Trèbes, c’est de faire éclater l’entière vérité, au nom de la mission sacrée de la Gendarmerie, et pour la préserver.
Et par le meilleur de ce qui unit notre pays, Vive la Gendarmerie !
Patrick Charpentier, le 23 janvier 2024.
Références :
Sainte Geneviève et la gendarmerie
RAPPORT D’ÉTUDE sur les attentats de Carcassonne et Trèbes de mars 2018
Pour l’honneur du colonel Beltrame
Homélie de Mgr de Romanet, le 1er décembre 2023, en la messe en l’église Saint-Etienne du Mont
Rodolphe Ratte, 51 ans, adjudant au GIGN de 2000 à 2010, a trouvé la mort dans un accident de moto. Marié et père de sept enfants, il travaillait depuis avril 2018 dans l’équipe de sûreté du Puy du Fou en Vendée. Il était adjudant de réserve. Brevet 214 du GIGN, Rodolphe Ratte venait du commando marine Jaubert . Il était plongeur d’intervention opérationnelle au GIGN et avait appartenu à la cellule de tir longue distance.
On ne peut pas à la fois se référer à Sainte-Géneviève et adorer la « déesse Raison », c’est-à-dire les francs-macs et leur République.
La question de savoir si la mission de la gendarmerie doit rester sacrée ne se pose plus. Elle ne l’est plus.
« Et par le meilleur de ce qui unit notre pays, Vive la Gendarmerie ! »
Oui, que le meilleur unisse enfin ce pays… et où que le meilleur se trouve. Merci pour cet article très intéressant, qui invite également à considérer l’aspect spirituel de la vie, et en particulier l’aspect spirituel de la mission des gens d’armes dans ce pays. La prière du gendarme, que je ne connaissais pas, est une belle découverte.
En ces temps particulièrement difficile, la population française a un besoin crucial du meilleur de ses soldats à ses côtés. Puisse-t-elle ne pas être déçue, les attentes sont grandes.
Que Dieu protège la France et les Français.
Personne ne sait exactement ce qui s’est passé. Je vous soumets donc mon hypothèse. Le colonel BELTRAME, il a sous-estimé le preneur d’otages. Il a pensé qu’une action d’éclat aurait une incidence favorable sur sa carrière. C’est vrai que normalement, en cas de prise d’otages, la police ou la gendarmerie laisse pourrir la situation, escomptant sur la fatigue du preneur d’otage, au besoin accélérée (eau ou nourriture additionnée de tranquillisants), avant de donner l’assaut.
PS : ne comptez ni sur l’armée, ni sur la gendarmerie ou la police pour nous sortir de là où nous sommes. La nourriture du mess est très bonne et les généraux et commissaires sont presque tous FM.
Le colonel Beltrame a certainement sous-estimé le terroriste, mais il ne pouvait espérer aucune incidence favorable de son action sur sa carrière, bien au contraire. Hors intervention politique, sa carrière se serait arrêtée net s’il avait réchappé de l’attaque sans fournir de motif très sérieux à son action totalement hors règles, et dangereuse pour lui comme pour ses camarades.
C’est pourquoi j’ai expliqué dans un article précédent, cité en référence, que le contexte global de l’attaque est plus complexe que ce qu’il en apparaît au premier abord. Un nouvel exercice de simulation d’attaque terroriste dans un lieu public du département de l’Aude était prévu début avril 2018, sous la responsabilité du lieutenant-colonel Beltrame. J’ai montré qu’il était extrêmement probable que le lieu choisi était le supermarché Super U de Trèbes, et que le lieutenant-colonel connaissait en particulier l’hôtesse d’accueil surnommée Julie, appelée à jouer un rôle dans l’exercice de simulation. Quant au terroriste, il a été utilisé par des commanditaires non identifiés pour lancer l’attaque juste avant l’exercice, et ainsi pousser le lieutenant-colonel à l’action, non pas pour sauver une inconnue, mais pour assumer la responsabilité de ce qui lui est apparu comme une faille de la gendarmerie, par fuite d’informations.
Le terroriste, malgré sa petite taille et sa carrure malingre, était un redoutable combattant, pratiquant de MMA. Il avait d’ailleurs postulé pour entrer dans l’armée quelques années plus tôt, et s’était particulièrement entraîné physiquement. Le lieutenant-colonel Beltrame a commis une erreur en tentant de le maîtriser juste au moment de l’intervention du GIGN, au lieu de s’en tenir éloigné. C’est ainsi qu’il a reçu un coup de couteau au cou, tranchant net sa carotide.
« Si elles ne sont pas corrigées, les fautes se paient tôt ou tard. »
Tout est dit. L’initiative personnelle, subite et non annoncée, qui modifie un plan ou un modus operandi rodé et accepté par tous (au sein d’une équipe d’intervention du Groupe, les échanges et les arguments sont constructifs et sans concessions) se paye cash: l’intervention échoue ou bien ne réussit qu’au prix de pertes inutiles.
Merci d’avoir honoré la mémoire de Rodolphe Ratte, Gendarme exemplaire qui alliait courage, volonté et piété entre autres qualités remarquables. Rappelons qu’il était -aussi- un ancien du 13ème RDP et qu’il s’était distingué en Bosnie au sein de cette unité.
Vous avez visé le cœur de l’affaire. Le lieutenant-colonel Beltrame a commis une faute lourde en prenant une initiative personnelle subite et non annoncée. Il l’a payée de sa vie.
Deux hypothèses se présentent :
soit l’attaque du supermarché avait été préparée par le terroriste seul, ou avec la complicité d’autres personnes de son cercle habituel de relations. Dans ce cas, la faute lourde n’a aucune excuse sur le plan professionnel, et la Gendarmerie ne peut pas présenter le lieutenant-colonel Beltrame comme un exemple pour l’ensemble des élèves gendarmes et des gendarmes,
soit l’attaque du supermarché relève d’une machination, ce qui signifie que le jeune Radouane Lakdim a été manipulé, et qu’il a obéi à des instructions définies au préalable. Dans ce cas, le manipulateur disposait d’informations sur le supermarché et sur le lieutenant-colonel Beltrame, qui ne peuvent pas provenir du cercle de relations ordinaire d’un jeune de cité.
J’ai montré, dans les deux articles référencés dans le présent texte, que la deuxième hypothèse est de loin la plus plausible. L’attaque terroriste du supermarché peut alors être interprétée comme un piège visant le lieutenant-colonel. Cela n’enlève pas le caractère fautif de son action, mais permet de la comprendre.
Sur les mobiles d’un tel piège, seules deux possibilités ressortent de l’analyse :
un lien avec la mort du père du lieutenant-colonel, qui ressemble à un assassinat mafieux,
ou une volonté de corrompre la symbolique de la l’action de la Gendarmerie, comme expliqué dans le présent texte.
Sur Rodolphe Ratte, décédé le 2 juillet 2019, vous avez tout dit en quelques mots :
Exemplarité, courage, volonté, piété.
Sa mémoire mérite d’être honorée. Que Dieu lui accorde la paix éternelle.
Est-il vrai que le lieutenant-colonel Beltrame était affilié à une loge maçonnique?
Comment pouvait il concilier le relativisme moral des frères de la truelle et la rectitude indispensable à tout officier se disant chrétien?
Rien n’est clair dans cette histoire et si l’article est vraiment très instructif, il ne peut soulever tous les voiles sur le mystère de la tragédie de Trébes.
Le DGGN a-t-il donné un avis définitif sur cette étrange affaire?
Sur l’appartenance du lieutenant-colonel Beltrame à une loge maçonnique : oui, c’est exact et documenté. Deux points de vue différents ont été rendus publics. Celui d’un ex Vénérable Maître, Serge Abad-Gallardo, qui a déclaré :
« Arnaud Beltrame était un franc-maçon qui était sur le départ »
et celui du père Golfier, qui a déclaré :
« Je sais que personne ne lui avait expliqué l’incompatibilité avec la foi catholique ».
Quant à l’avis officiel de la Gendarmerie et de sa direction, le contexte politique ne peut lui permettre de s’exprimer de façon indépendante. Il ressort de l’ensemble de mes trois articles (celui-ci et les deux cités en référence dans le texte), que le pouvoir pourrait être impliqué jusqu’à sa tête dans cette affaire.