Mise au point de Julien Langella dans le journal Présent du 4 juin 2021 à propos du courageux geste antifasciste de Robert Ménard, 97 ans après l’enlèvement de Matteoti.
Le 27 mai, le maire de Béziers a inauguré le buste de Giacomo Matteotti, député socialiste assassiné en 1924. Et on peut dire que Robert Ménard, repoussoir « fasciste » pour la gauche, n’y est pas allé de main morte avec ce qu’il appelle « les racailles fascistes ».
« Du temps de Matteotti, affirme l’édile, le fascisme existe pour de bon. On sent son haleine fétide […] dans toute l’Europe. On entend ses bruits de bottes [et] on voit son visage dur, arrogant, bestial, méchant. » Était-il nécessaire de mettre autant d’emphase, tel un élève de première L achevant sa dissertation sur Guernica, contre l’ambulance la plus fusillée de l’histoire ? On n’est pas loin des « geôles fascistes » d’Abel Chemoul dans le sketch des Inconnus… « Parce que le fascisme, insiste-t-il, c’est ça : humilier l’opposant en public, faire taire les opinions dissidentes, réduire au silence ceux qui ne pensent pas correctement. »
Pour d’autres, oublie Ménard, le fascisme fut un rempart contre le communisme, l’origine du décollage industriel italien, le garant de l’autorité de l’Etat face à l’anarchie dans les rues, le premier constructeur d’autoroutes en Europe, le restaurateur de l’État pontifical et le protecteur de l’Église, l’ennemi juré de la pègre, le premier droit social de la péninsule, l’assèchement des marais pontins d’où surgirent villages et champs cultivés, l’abolition de l’impôt sur les successions, la hausse très nette de la natalité (de 38 à 45 millions d’habitants)…
D’autre part, l’analyse historique de Ménard reprend le catéchisme social-démocrate sans discernement : la mort de Matteotti ne fut pas la profession de foi du fascisme mais son drame à une époque où il jouissait d’une grande popularité – dont Churchill se faisait l’écho – et alors que le Duce, comme l’a rappelé Dominique Venner dans Le Siècle de 1914 (2006), recherchait la collaboration de l’opposition socialiste.
On m’objectera que tout cela est secondaire et que cette inauguration est d’abord un pied de nez au politiquement correct. Le combat contre l’étouffant magistère moral de la gauche dépend-il de notre capacité à mentir sur notre histoire européenne ? L’antifascisme est-il récupérable à droite ? L’antifascisme est une stratégie consubstantielle au communisme, mise en œuvre par Staline dans les années trente pour diviser ses ennemis en détournant les conservateurs de la tentation nationaliste, les acculer à lutter avec lui contre le IIIe Reich et donner une virginité à ses agents occidentaux, rhabillés en héroïques résistants antinazis.
L’antifascisme est la première cause de l’hégémonie culturelle marxiste en Occident, la matrice du « Plus jamais ça ! » qui nous paralyse depuis un demi-siècle. Le chantage à « l’extrême droite » demeure la principale intimidation médiatique et le meilleur moyen d’ostraciser un individu. A chaque fois que l’on crie au « fascisme », on remet une pièce dans le jukebox de la pensée unique. Un buste dédié à un député socialiste antifasciste : voilà la politique culturelle de la droite « décomplexée » ? Nourrir l’antifascisme, c’est creuser le tombeau de la droite et, au passage, celui de l’intelligence. Pour cela, Monsieur Ménard, nous n’avions pas besoin de vous.
Julien Langella
Source : L’antifascisme peut-il être de droite ?, Chronique de Julien Langella, Présent, 4 juin 2021
Appendice :
Giacomo Matteotti était un député socialiste italien, mais qui aimait se définir « réformiste, parce que révolutionnaire » et fervent « antifasciste ».
Benito Mussolini, dans un discours à la Chambre des députés le 3 janvier 1925, déclara qu’il assume « personnellement la responsabilité politique, morale et historique » des excès de ses escadrons lors des années passées, sans faire mention de l’assassinat de Matteotti :
« Je vous déclare ici devant tout le peuple italien, que j’assume à moi tout seul la responsabilité politique, morale et historique de tout ce qui est arrivé. Si le fascisme n’a été qu’une affaire d’huile de ricin et de matraques et non pas, au contraire, la superbe passion de l’élite de la jeunesse italienne, c’est à moi qu’en revient la faute ! Si le fascisme a été une association de délinquants. Si toutes les violences ont été le résultat d’une certaine atmosphère, à moi la responsabilité de tout cela, parce que cette atmosphère, je l’ai créée par une propagande qui va de l’intervention dans la guerre jusqu’à aujourd’hui.
Un peuple ne respecte pas un gouvernement qui se laisse vilipender. Le peuple même avant moi a dit : assez ! La mesure est comble ! Lorsque deux éléments sont en lutte et lorsqu’ils sont irréductibles, la solution est dans l’emploi de la force.
L’Italie, oui, messieurs, veut la paix, elle veut la tranquillité, elle veut le calme dans le travail. Nous, ce calme, cette tranquillité dans le travail, nous les lui donnerons, si c’est possible par l’amour, et si c’est nécessaire par la force… »
En 1926 eut lieu le procès de Chieti de certains assassins de Matteotti, des militants fascistes. Trois d’entre eux, Albino Volpi, Amerigo Dumini et Amleto Poveromo furent condamnés à six ans de prison.
En avril 1947, les vainqueurs, prétendus « libérateurs-épurateurs », s’amusèrent à rejouer le match. Les principaux accusés, Amerigo Dumini, Amleto Poveromo et Albino Volpi, seront condamnés à la détention perpétuelle et sans que ne fut jamais établie la responsabilité personnelle et directe de Mussolini.
L’attitude de Ménard, qui « tire sur l’ambulance la plus fusillée de l’Histoire » (bien vu), évoque celle des gens qui prétendent s’opposer à l’actuelle tyrannie à prétexte sanitaire en évoquant les fameuses « heures les plus sombres… » Tant que l’on utilise le références de l’ennemi, et donc sa définition du Bien et du Mal, on ne peut pas le combattre…!
G. Masselin
Quel cuistre ce Menard! Que de gages se sent il obligé d’offrir à l’air du temps et aux merdias .
Ô courage si feint, ô resistance anachronique, ô gesticulations désordonnées… Sacrifions sur l’autel du camp républicain, dans l’église du grand horloger détraqué, les vérités, et confondons le fascisme avec tout et n’importe quoi, pour mieux se justifier auprès de ses juges, et finalement de ses maîtres. Que de pathétiques révérences et références.
Quel cuistre ce Menard! Que de gages se sent il obligé d’offrir à l’air du temps.
C’est aux martyrs de la Révolution (anti) françaiss, matrice de tous les totalitarismes (dont le fascisme, strictement italien, n’est pas justement) qu’il aurait dû édifier un colossale monument. Mais là, l’audace est stoppée avant même l’idée.
Mussolini, Annunzio, les deux pères fondateurs de ce mouvement empirique, expérimental, progressiste, futuriste, sont les fondateurs d’un mouvement qui se voulait, se définissait, dès le départ, comme « une réaction italienne anti communiste qui ne s’exporte pas » (cf le fascicule « Qu’est-ce que le fascisme » de ses fondateurs anarcho-socialistes ou l’article d’une page sur la chose par le fondateur des Encyclopédies Italiennes, le Ducce lui-même). Alors confondre les rares victimes politiques du fascisme avec celles, si innombrables, des marxismes, fussent-ils trotskistes, staliniens, maoïstes, polpotistes,…. C’est bien dévoiler toute sa couardise.
Ô rage anachronique ! Obséquisité ! ô courage ennemi !
N’ais je donc pas tant survécu que pour cette infamie.
Et me suis-je blanchi dans cette inauguration pathétique pour en jour me racheter médiatique.
Mon bronze qu’avec respect j’admire,
Cette idole qui tant de fois à fait rire,
Tant de fois affermi le trône de ses maîtres,
Trahi ma querelle et ne fait rien pour mn scèptre ?
Ô cruel souvenir de ma gloire passée,
Oeuve de tant de jours en un jour effacée !
Nouvelle dignité, fatale à mon honneur,
Marche pied grotesque, d’où je m’étale avec déshonneur….