Les manifestations autour du 11 novembre occulteront la base du conflit franco-allemand qui fut l’affrontement des deux nations en 1870. Adolphe Thiers qui est vilipendé par la gauche pour avoir brisé la Commune de Paris dont l’ acte le plus exécrable fut de fusiller, le 24 mai 1871, Monseigneur Georges Darboy (né en 1813) archevêque de Paris et natif de la Haute-Marne -ce qui donne le ton à ce qui aurait pu devenir un bolchevisme national, un Daeschisme à la française-, devrait être célébré pour sa clairvoyance qui mit en garde la France contre une répétition de la campagne napoléonienne de 1807.
Qui applaudit à la guerre franco-allemande? Quelle famille avait intérêt à dresser l’un contre l’autre deux foyers de la culture européenne? Nous l’apprend une célèbre et jolie aristocrate viennoise, petite fille du Chancelier Clément prince de Metternich, Pauline Metternich-Sandor (1836-1923) -fille du comte hongrois Maurice Sandor et femme de l’ambassadeur d’Autriche-Hongrie-, laquelle tint un salon influent à Paris et était une intime du couple impérial français :
« L’historique de cette malheureuse guerre a été fait et refait cent fois, et je me garderai bien d’en ennuyer mes lecteurs, d’autant plus« , écrit la princesse, « que je ne veux pas dévier de la ligne de conduite que je me suis tracée en n’écrivant que mes souvenirs à ceux qui voudront bien me lire, que mes impressions personnelles et que ce que j’ai vu ou entendu de mes propres yeux et de mes propres oreilles. »
« Les bruits de guerre prenaient consistance, la France entière se soulevait et ne rêvait que d’aller se battre contre les Prussiens. Les personnes qui venaient nous voir…étaient unanimes dans la ferme conviction qu’on n’en ferait qu’une bouchée, et quoique nous ne fussions pas de leur avis, nous n’osions les contredire. Cependant notre attaché militaire le baron Uexküll, officier très intelligent, nous avait confié que les armements français lui semblaient incomplets et que l’armée était loin d’être prête à entrer en campagne. Il ajoutait que la guerre du Slesvig-Holstein (entre le Danemark et l’Allemagne) avait fait pressentir à ceux qui y participaient la force colossale dont l’armée allemande disposait, et que les Français se berçaient d’illusions, qui leur deviendraient fatales, en croyant avoir si facilement raison de leurs adversaires… Je me souviens d’avoir reçu la visite de la vieille baronne James de Rothschild, laquelle, dans son patriotisme ardent, ne rêvait que de victoires. M’étant permis de lui glisser qu’il fallait s’attendre aussi à quelques défaites, elle s’écria indignée: « Je n’admets pas que la France ne batte pas la Prusse sur toute la ligne! »
« L’empereur et l’impératrice, qui habitaient Saint-Cloud, avaient eu la gracieuse pensée de venir me faire visite… La conversation s’engagea, et l’empereur me parla de ses préoccupations au sujet de la guerre qui menaçait d’éclater ! L’impératrice s’en montrait tout aussi affectée, et l’on a menti impudemment en prétendant qu’elle y poussait avec acharnement. Je puis affirmer que tous les deux en étaient également effrayés, et qu’ils éprouvaient le plus grand et le plus ardent désir de voir ce fléau évité à leur pays. « On fera tout au monde, disait l’empereur, pour empêcher que la guerre n’éclate, je crains seulement que les esprits en France ne s’échauffent, et qu’on ne puisse pas endiguer le torrent d’un enthousiasme dangereux qui, s’il se répand, forcera la main au gouvernement. L’opinion publique ne se laisse guère maîtriser par le temps qui court. »
« Je demandais à l’empereur , qui était là, assis devant moi, tout pensif, appuyé sur une canne qu’il portait toujours et qui portait une tête d’aigle en or, rien que la tête sur un jonc en corne de rhinocéros (je la vois encore): »Eh bien, sire, et si, comme il faut l’espérer , la France est victorieuse , que ferez-vous, prendrez-vous le Rhin? ».Il me répondit : « Je ne le voudrais pas. Mon idée serait de donner la Westphalie et les provinces rhénanes jusqu’au Nassau au duc Adolphe de Nassau dépossédé. Il faudrait mettre à la porte le grand-duc de Bade qui tient trop avec la Prusse et refaire un royaume de Hanovre agrandi, avec le roi Georges, dépossédé lui aussi par les Prussiens. Evidemment il faudrait remanier la carte de l’Europe centrale .Mais tout cela, c’est des châteaux en Espagne! Nous allons à l’encontre d’événements d’une gravité extrême, et le meilleur serait encore d’éviter toute collision! » L’impératrice abonda (le mot est souligné par la princesse Metternich) dans son sens et s’écria: « Ah que Dieu fasse qu’il n’y ait pas de guerre, mais la paix achetée au prix du déshonneur serait un malheur égal, et la France ne s’en accommoderait pas! » Voilà comment l’impératrice Eugénie voulait la guerre.
« …Les prévisions de l’empereur avaient été justes. Le flot était devenu un torrent impétueux….L’impératrice fut nommée régente et son martyre commença. Un jour mon mari , en rentrant à la ville, se présenta devant moi avec une figure tellement consternée que je devinais des choses terribles et que je lui demandai : « que se passe-t-il? ». Il me répondit : »Je reviens des Tuileries où j’ai vu l’impératrice. Elle m’a montré une dépêche que l’empereur lui a adressée de Forbach, dans laquelle il dit ceci: « Rien n’est prêt. Nous n’avons pas suffisamment de troupes. Je nous considère d’avance comme perdus! » Je restai littéralement foudroyée par cette nouvelle. L’impératrice avait dit à mon mari, avant de lui remettre la dépêche en question : « Je viens de recevoir ceci de l’empereur. Je vous sais de nos amis, et de nos amis les plus dévoués. C’est à l’ami que je confie ce qui se trouve dans ce papier, et non à l’ambassadeur d’Autriche. Lisez, et jurez-moi sue l’honneur que vous ne le répéterez à personne, excepté à la princesse ! » Nous avons fidèlement gardé le terrible secret, et nul ne saura les terribles tortures qu’il nous a fait endurer quand les personnes qui venaient nous voir parlaient avec un enthousiasme confiant des grands succès futurs des troupes françaises ! «
« En attendant, l’enthousiasme s’en donnait à cœur joie à Paris et les cris de « A Berlin ! à Berlin ! » retentissaient de tous côtés. Les gens étaient enivrés et il ne faut pas qu’on vienne me dire aujourd’hui, comme on aime à le faire, que personne en France ne voulait la guerre. Tout le monde la voulait, je parle du moins de Paris, où jeunes et vieux étaient littéralement enragés. Le vieux duc de Caumont quittait le Sénat et criait à tue-tête « A Berlin! » non seulement en entrant en voiture, mais durant tout le trajet qu’il fit du Luxembourg au Jockey -Club. Il agitait son chapeau et se comportait comme un fou ! Au lieu de rire de lui, on admirait son ardent patriotisme !…Tout le monde avait perdu la tête. »
« Les régiments partaient pour la frontière, mais le spectacle de ces départs était navrant. C’était une débandade générale, et l’indiscipline dépassait tout ce qu’on pouvait imaginer. Les malheureux officiers n’arrivaient pas à amener leurs compagnies de la caserne à la gare ! Les soldats restaient en chemin et s’attablaient devant les cafés ou entraient chez les marchands de vin où on leur servait à boire à l’œil. Impossible de rassembler ces traînards et mon mari a vu, de ses yeux vu, des officiers arriver à la gare de l’Est suivis seulement d’une cinquantaine de soldats .Ils avaient semé le reste en route…. »
Ce dernier extrait fait songer à Céline ! Quelle inconséquence a poussé le pays à plonger ainsi dans une guerre désastreuse dont la suite ne fut pas le triomphe du parti de l’ordre, mais l’esprit de revanche dont les bénéficiaires furent des puissances extra-européennes, dont l’Américaine, ou anti-européennes comme cette prétendue Russie qui répandra, selon la formule de la « dame » de Fatima en 1917, ses erreurs dans le monde.
Pauline Metternich, dans ses Souvenirs parus chez Plon, en 1922, (248pp.) rapporte avoir emporté en Angleterre « pour le remettre en temps et lieu propre à l’impératrice, le livre d’heures de la reine Marie-Antoinette » que son mari « avait pris sur la table de Sa Majesté afin qu’il ne fut pas égaré dans l’affolement du départ. Je le tenais serré contre moi, et je réfléchissais à l’étrange destinée des hommes et des choses » (p.216).
Pierre Dortiguier
Merci pour votre beau texte relatif aux mémoires de Pauline de Metternich qu’il m’a été donné de découvrir aux bons soins de « Jeune Nation ». On perçoit en filigrane qui se profile à la base de toutes les guerres “modernes” et de pas mal de conflits antiques également.
Sur la Commune et sur le personnage controversé du piriforme Thiers – qui n’invitait pas précisément à l’enthousiasme politique – votre texte m’a fait remonter en mémoire ces quelques vers sur Gallifet:
La fin de Gallifet sera douce et très belle,
Si la mort fait pour lui ce qu’il a fait pour elle.
[…] L’amusant, pour la petite histoire, est [que l’architecte] Auguste Perret […] que j’ai eu la chance de connaître encore était né d’une mère communarde. Fraichement rendue veuve par les versaillais, elle avait dû rallier à pied le sanctuaire (!) de la Belgique. En chemin elle ne manquait pas de s’arrêter pour cracher sur chaque crucifix rencontré sur la route. Tout cela vous construit des haines tenaces. Quelques amertumes solides aussi: [l’architecte Denis Honegger, élève du précédent] ne pardonnait pas à Courbet d’avoir tiré bas la colonne Vendôme ni aux communards, en général, d’avoir incendié les Tuileries.
Vos lignes feront le bonheur de ceux qui s’y retrouveraient encore dans l’imbrication entre la Maison des habsbourgs et les bonapartes en passant nécessairement par la cuisine géopolitique européenne mise au point par Talleyrand et Metternich, puis par le lâchage de Maximilien au Mexique. Combien sont-ils, désormais, à n’avoir ne serait-ce que des rudiments d’histoire?
Il est significatif d’observer à quelle cadence désormais “ON” – toujours les mêmes – travaille à supprimer tout ce qui serait encore susceptible d’assurer un minimum de cohésion et de tenue à nos peuples.
C’est évidemment dans la logique du koudenhove-calergisme débridé du moment et contre toutes les lois naturelles… mais bien dans la logique imbécile d’un profit à court-terme.
Je vous rejoins absolument et, après avoir salué Jeune Nation pour ce nouvel article bien charpenté, j’attirerai votre attention sur le fait que le génie du mal ainsi manifesté ne peut voir, comme vous le relevez, qu’un intérêt à court-terme, qui signe sa débâcle. Il y a comme une mathématique de la ruine, qui ne voit pas les perspectives ne voit pas le précipice vers lequel il se jette. C’est le propre du nomade apatride que de s’élancer vers le vide.
Ce qui me rassure, Mr Hawthorne, c’est que nous sommes sans doute plusieurs centaines de millions sur cette Planète à nous douter que les tordus n’ont aucune chance parce qu’en parfaits psychopathes ils sont incapables de s’intégrer dans la hiérarchie fondamentale des lois naturelles qui sont la seule réalité indiscutable.
Ce qui me préoccupe, c’est que cette insignifiante minorité de psychopathes rusés – j’ai bien dit « rusés » et non pas particulièrement intelligents – a choisi de compenser son énorme infériorité numérique en basant son fond de commerce et son fond de manœuvre (souvent confondus) sur la connerie humaine et de cela, il y a pléthore.
Nous avons donc – une fois de plus – beaucoup de travail à abattre pour mériter l’intérêt de la nature; sa bienveillance à notre égard, et qu’elle veuille bien nous assister.
Ces évidences, les tribus germaniques et certaines autres structures claniques sous nos latitudes l’avaient parfaitement compris. D’instinct.
Hélas, il advint Charlemagne; puis l’allumé « japotrichien » Richard Koudenhove-Callergi (« distingué » au demeurant… par le « Prix » « Charlemagne »).
En termes cosmiques ces péripéties n’ont évidemment d’importance que pour entretenir les émois des benêts.
La simple réalité demeure: la Nature n’ « élit » nullement; elle sélectionne.
Nous gagnerons; c’est inévitable.
Mais au prix de quels efforts et de quels sacrifices! C’est particulièrement coûteux en termes de régression (actuellement) et de perte de temps (au fil de ces années inconfortables vers lesquelles nous voilà emballés).
Quel dommage!
Il y aurait eu tant de choses plus intelligentes à mener à bien.