Du divorce, par Louis de Bonald, Entre polygamie républicaine et prostitution légale : Un fléau social, Éditions Saint Agobard, 2019, 187 pages, 12 €
Pour de nombreuses personnes suivant la maxime due l’ancien premier ministre canadien Pierre Eliot Trudeau voulant que ce qui se passe dans les chambres à coucher ne soit pas du ressors de l’État, le mariage est une affaire privée. Seulement, voilà, le mariage, parce qu’il est la base de la famille relève de la société et n’est pas qu’un sujet domestique. L’actualité des dernières années nous le prouve avec des débats politiques portant sur le mariage gay, l’homoparentalité, la triparentalité, la polygamie, de même que des débats religieux sur la communion des divorcés. Jamais, le mariage et la famille n’ont été autant discutés dans l’espace public.
L’abbé Olivier Rioult vient tout juste de publier aux Éditions Saint Agobard un précis du mariage. Plutôt que de chercher à réinventer la roue, il nous fait redécouvrir l’œuvre du marquis Louis de Bonald davantage connu pour ses écrits contrerévolutionnaires sur l’État et la société. Pendant ses deux années passées en clandestinité à Paris suite à son exil, le célèbre penseur royaliste a fourni d’importants textes sur le divorce, mesure à laquelle il s’opposait avec véhémence. Ses écrits, notamment Du divorce considéré au dix-neuvième siècle relativement à l’état domestique et à l’état public de la société qui est abondamment cité, abordent le divorce comme le titre l’indique, mais plus généralement le mariage et son importance pour toute société qui se respecte. Non, le divorce et le mariage ne sont pas des sujets limités à la sphère privée puisqu’ils touchent la famille, base de la société chrétienne.
Pendant plus d’un millénaire, l’institution du mariage resta inchangée, la vision catholique ayant eu préséance et n’ayant jamais été remise en question. Avec la Réforme, on décréta que le divorce était acceptable. La notion voulant que ce Dieu unit, nul homme ne pouvait le défaire, perdit toute valeur pour les adeptes de Luther. Seulement, le divorce se répandit avec la Révolution qui voulait démocratiser la famille de la même façon qu’elle avait démocratisé la société. On remettait en cause la monogamie patriarcale, affaiblissant ainsi la cellule de base de la société en y inculquant les idées politiques subversives qu’on avait imposé à la nation.
La question du mariage est primordiale, en fait, elle « remue à elle seule toutes les questions fondamentales de la société sur le pouvoir et sur les devoirs ». Un état au sein duquel les familles sont instables ne pourra qu’être lui-même instable. Ainsi en luttant contre le divorce, pour l’indissolubilité du mariage, il souhaite « sauver l’État, défendre la constitution domestique contre le divorce; faculté cruelle qui ôte toute autorité au père, toute dignité à la mère, toute protection à l’enfant. »
Louis de Bonald nous rappelle que le mariage n’est pas qu’une simple union charnelle. « Le mariage est civil sous le rapport des intérêts, il est religieux sous le rapport des âmes; il est animal ou physique sous le rapport des corps; et comme la famille n’a pu, dans aucun temps, subsister sans propriétés, et que l’homme est toujours entré dans le mariage avec toutes ses facultés morales et physiques, il est vrai de dire que le mariage, en soi et au fond, a toujours été un acte civil, religieux et physique à la fois. »
Toujours est-il que le mariage est d’abord un engagement, avec des devoirs, et un « acte de fondation d’une société » : la famille. Pour l’abbé Rioult, qui commente les écrits de Bonald, le but du mariage est la « reproduction et la conservation ».
Même au niveau privé, il est faux d’affirmer qu’il s’agit d’une décision n’engageant que deux adultes consentants, ou pas. Le divorce a un impact majeur sur l’enfant. Celui-ci n’est pas consentant et c’est, comme on le voit trop souvent aujourd’hui, le premier perdant de la désunion des parents. Alternant entre la mère et le père, il perd ses repères. Lui, qui doit être protégé par le foyer, il devient la victime du divorce de ses parents, puis des familles recomposées qui se reforment artificiellement et superficiellement. L’abbé Rioult note que chaque année en France 130 000 divorces sont officialisés, et que 45% des mariages se terminent de cette façon. On préfère jeter, plutôt que de faire l’effort de réparer et de ressouder les liens. L’idée de polygamie en série, soit d’alterner son partenaire et de ne jamais réellement fermer la porte à un changement, est devenue socialement acceptée et rares sont ceux qui la remettent en cause.
On le comprend, il faut sauver la famille de la subversion. Si l’on n’y parvient pas, il n’y aura que très peu de choses à sauver. L’État et surtout l’Église ne doivent pas s’abaisser à l’air du temps et suivre les vogues éphémères, mais au contraire chercher à élever l’homme vers la perfection, la plénitude. Dans un autre contexte, le philosophe Gomez Davila nous avait mis en garde : « Qui ne tourne pas dos au monde actuel se déshonore. »
Alors, rejetez le monde moderne et mariez-vous !
Disponible sur : Éditions Saint Agobard