La traversée du désert de Thomas Thévenoud n’aura duré quelques semaines. Le 4 septembre, il quittait le gouvernement quelques jours après sa nomination, après les premières révélations sur ses pratiques délictueuses. L’éphémère ministre n’avait pas, durant plusieurs années, payé ses impôts, sans encourir la moindre rétorsion de l’administration fiscale si prompte à traquer les honnêtes citoyens français au moindre retard. La réprobation était alors unanime.
De nombreuses autres escroqueries furent révélées dans les jours suivants : Thomas Thévenoud ne payait pas l’électricité de l’une de ses permanences, ne payait pas le kinésithérapeute de ses enfants, etc. Il apparaissait tellement corrompu que même le Parti socialiste (PS), dirigé par le condamné Jean-Christophe Cambadélis, ne voulait plus de lui. Il était alors devenu un paria à l’égal de Jérôme Lavrilleux.
Malgré cela, quelques jours plus tard, il faisait sa réapparition à l’Assemblée “nationale”, sous l’œil amusé ou doucement énervé de ses collègues. Pas un seul ne s’était opposé à sa venue autrement que par quelques mots. Et petit à petit, il est revenu siéger en commission, puis ce fut la grande rentrée, au sein de l’hémicycle, en séance publique ; désormais il y prend la parole. Dans les couloirs du parlement, il est interrogé par les journalistes comme tout autre député exemplaire, salué chaleureusement devant les caméras par ses complices.
Profitant de la sidération post-Charlie hebdo, il vient de lancer une nouvelle phase de sa réhabilitation lors d’une tournée dans sa circonscription. Alors qu’il rencontrait les élus de Mazille – pour lesquels, visiblement, apparaître avec un escroc refusant de payer ses impôts n’est pas choquant – il s’est plaint, lui qui vit avec plusieurs milliers d’euros par mois payés par les contribuables, se lamentant sur le sol qu’auraient subi sa famille et lui, non par la faute des agissements de Thomas Thévenoud et de sa femme, Sandra Elouarghi, mais de l’irrationalité – sous-entendue : des citoyens – :
« Je n’ai pas menti, ni trompé l’administration fiscale […]. Aujourd’hui, je paie le prix de tout ça avec ma famille. On est en pleine irrationalité, et quel immense gâchis »
Car en réalité, ce républicain exemplaire n’a jamais voulu frauder. Il a simplement été « débordé par son engagement public ». C’est parce qu’il était trop préoccupé à sauver la France et les Français qu’il a oublié de payer ses impôts. Et son kiné. Et l’EDF. Désormais il « voit les choses autrement » et affirme s’être rapproché de Dieu. C’est donc en toute conformité avec les principes de la République exemplaire de François Hollande qu’il peut siéger dans les parlements avec Jérôme Lavrilleux, Serge Bloch “Dassault”, Patrick Balkany-Smadja, et quelques autres, bénéficier de bureaux, de chauffeurs, de soins dentaires remboursés à 100 % et d’une retraite dorée.
Avec peut-être encore un espoir gouvernemental. Pourquoi pas ministre des Finances aux côtés d’un Dominique Strauss-Kahn réhabilité en président au sein d’une République encore plus exemplaire ?