Au début des années 1990, l’armée russe a hérité de l’armée soviétique environ 15 millions de tonnes de missiles et de munitions stockées dans 180 arsenaux, bases et entrepôts. Au 1er janvier 2013, les stocks des forces armées russes s’étaient effondrés à 3,7 millions de tonnes, dont 1,1 million de tonnes étaient inutilisables. C’est-à-dire qu’il ne restait plus que 2,6 millions de tonnes de munitions sur les 15 millions d’origine. 11,3 millions de tonnes de munitions avaient été détruites ou vendues sans être renouvelées et 1,1 million de tonnes devaient être détruites ou remises en état. En 2020, environ 300 000 munitions de divers types et 20 000 roquettes pour lanceurs multiples, qui avaient été jugées inutilisables, ont été remises en service.
Consommation de munitions par la Russie
Aujourd’hui, l’armée russe a besoin de plusieurs millions de tonnes de munitions par an pour ne pas revivre la pénurie d’obus des années 1914-1916. Pour comprendre l’échelle, 1 million de tonnes de munitions en termes d’obus de 152 mm (projectile + charge de poudre) équivaut à environ 16 millions d’obus. C’est environ la même chose pour les roquettes des lanceurs multiples Grad de 122 mm.
La consommation maximale l’été 2022 a atteint 60 000 tirs par jour. En moyenne l’armée russe pratique 20 000 tirs par jour. La consommation pendant la guerre, selon les estimations occidentales, a atteint 7 millions d’obus de 100 mm, ou de diamètre plus élevé, au cours des 10 derniers mois.
La production annuelle est approximativement estimées pour 2021 à 300 000 obus de 152 mm, et c’est environ 10 fois plus que la production annuelle d’obus de 155 mm aux États-Unis avant le début de la guerre.
Évolution des stocks russes de munitions
Pour un besoin de l’ordre de millions d’obus, seulement des dizaines ou centaines de milliers sont fabriqués, d’autres, périmés, ont été remis en service.
Les raisons sont non seulement la destruction d’entreprises militaro-industrielles russes, mais également tout simplement l’absence d’une commande d’une grande quantité de munitions par l’armée russe, en raison de l’absence d’une telle dépense énorme dans les conflits précédents, dans le Caucase du Nord, en Syrie et dans le Donbass depuis 2014. Les stocks pour les opérations de ce niveau étaient plus que suffisants, les entrepôts n’étant pas vides.
Les arsenaux ont été réduits en 2010-2011 sous la direction du gouvernement de l’époque. Personne n’a vraiment effectué d’audit, par conséquent, les munitions qui auraient pu être livrées à la SAA (l’armée syrienne) en 2015 n’existaient plus, elles avaient été liquidées !
Et puis voici la guerre en Ukraine avec une consommation effrénée de munitions : tirer 100 mille obus en quelques jours est monnaie courante. Les entrepôts ont commencé à se vider et la production du niveau d’avant-guerre ne pouvait pas compenser. La décision d’augmenter la production a été prise beaucoup plus tard que nécessaire. Aujourd’hui, les industriels russes promettent de restaurer entièrement les réserves manquantes en six mois. Certes, quelques usines travaillent en équipes de « 3×8 » et cela donne un résultat.
Une augmentation de plusieurs fois, est-elle possible, compte tenu du transfert de l’industrie de la défense vers un régime de production renforcé ? Est-il possible de l’augmenter jusqu’à un ordre de grandeur ou plus, afin d’assurer la consommation de 300 000 obus en moins de deux semaines ? Cela nécessite pour la Russie une mobilisation générale de l’économie et plus d’un an de travail préparatoire avec une restructuration fondamentale du système politique et économique du pays.
Néanmoins, sans forcer la conversion des capacités de production pour les besoins militaires, les chiffres nécessaires ont peu de chances d’être atteints. Trop d’ateliers sont utilisés à d’autres fins. Trop d’entreprises ont été fermées en une décennie et demie. Et une autre question est de savoir où trouver des spécialistes pour développer la production…
Production de munitions des pays de l’OTAN
Il y a exactement le même problème en Occident, et dans une plus grande mesure, étant donné qu’aujourd’hui aucune production de munitions à plein régime n’est en place, dans aucun des pays de l’OTAN, et qu’un tel déploiement d’efforts n’est même pas planifié aux États-Unis ! Les États-Unis ont depuis longtemps perdu l’habitude d’une telle consommation de munitions. Cependant, la production potentielle de l’Occident est susceptible d’être beaucoup plus élevée, compte tenu des capacités des pays partenaires de l’OTAN, qui ne font pas partie de cette organisation.
Dans le même temps, la pleine utilisation de toutes les munitions produites par l’Occident et ses amis n’est possible que dans un conflit direct entre la Russie et l’OTAN. Aujourd’hui, le conflit est limité au territoire ukrainien, il est limité par les capacités de la machine militaire ukrainienne et de l’infrastructure ukrainienne, avec sa démographie naturelle et ses limites géographiques.
En France
Tous les pays qui veulent être dans le monde à la hauteur de leur rang passé – et la France au premier chef qui dispose de l’arme atomique et d’un siège au Conseil de sécurité des Nations Unies – doivent tenir compte de l’expérience russe, de ses erreurs : fabriquer des dizaines de millions de tonnes de munitions, puis renouvelez les stocks avant qu’ils ne soient périmés. Ainsi, des emplois, on peut en susciter relativement facilement quand on est dirigé par des politiciens qui œuvrent pour la sauvegarde et le développement de la patrie.
Mais la France est gouvernée depuis des décennies par des coteries idéologiques qui n’ont cure de la permanence de la nation et de son rang dans le monde, préférant orienter l’effort national vers des projets diversifs, voire subversifs, comme l’inclusivité ou la transition écologique (mais qui rapportent sans doute à certains).
Au début du précédent quinquennat, le premier de « notre cher président », un général français – chef d’État-Major des armées – qui tirait la sonnette d’alarme sur le budget des armées françaises, était limogés…
Librement inspiré de Actualités mondiales & françaises
Superbe article sur les stocks de l’armée Russe, rien à voir avec les médias français vendus, bravo à l’auteur de cet article.