Au moins 6 personnes ont trouvé la mort et plus de 80 d’autres ont été blessées dimanche après-midi dans un attentat à Istanbul, en Turquie. La déflagration s’est produite peu après 14 heures, alors que la foule est traditionnellement dense à ce moment-là dans la rue Istiqlal, lieu de promenade prisé le dimanche des Stambouliotes et des touristes. L’artère se situe près de la place Taksim, dans le centre, qui avait déjà été touchée lors d’une campagne d’attentats en 2015 et 2016 visant Istanbul (revendiquée par le groupe Etat islamique, elle avait fait près de 500 morts et plus de 2000 blessés).
En direct à la télévision, le président turc Recep Tayyip Erdogan a parlé d’un « vil attentat » dont les auteurs « seront démasqués et punis ». Peu après, la Turquie a accusé le PKK et sa branche syrienne YPG d’avoir organisé et perpétré l’attaque meurtrière
Une femme syrienne soupçonnée d’avoir posé la bombe a été arrêtée ainsi que 21 autres personnes. Les suspects, selon le ministre de l’Intérieur turc, sont liés au PKK/YPG, la branche du PKK dans le nord de la Syrie, frontalier de la Turquie. Le ministre a déclaré que « l’instruction de l’attaque venait de Kobani » et que la femme qui aurait déclenché l’explosion à distance était « passé par Afrin dans le nord de la Syrie ».
Alors que les États-Unis figurait parmi les premiers pays à envoyer leurs condoléances, le ministre de l’Intérieur Soylu les a commenté déclarant que « ce message de condoléances doit être interprété comme « les tueurs arrivent toujours sur les lieux en premier » »…
Il est allé plus loin parlant des États-Unis comme de « nos soi-disant alliés » :
« Je crois que le soutien de nos soi-disant alliés aux terroristes, en les cachant dans leurs pays ou en leur donnant une bouée de sauvetage dans les zones qu’ils occupaient, en les finançant est évidente, ce qui est une insincérité flagrante ! »
Et des sources policières turques affirment que Ahlam Albashir, la suspecte arrêtée, a été formée sous la supervision d’instructeurs américains à Ain al Arab en Syrie.
Ankara a déjà accusé à plusieurs reprises les États-Unis de fournir des armes et d’entraîner le PKK et les YPG dans le nord syrien, alors que les forces antiterroristes turques affirment avoir empêché de nombreux attentats terroristes depuis son implication dans la guerre en Syrie. La Turquie qui a envahi illégalement une partie du territoire syrien, s’y affronte régulièrement et alternativement avec certains groupes jihadistes ou kurdes, qui eux reçoivent armes et financements des États-Unis et des Occidentaux.
Le PKK, considéré comme une organisation terroriste par Ankara mais aussi par ses alliés occidentaux dont les Etats-Unis et l’Union européenne, est en lutte armée contre le gouvernement turc depuis le milieu des années 1980. Il a souvent été rendu responsable par le passé d’attentats sanglants sur le sol turc. Il est par ailleurs au cœur d’un bras de fer entre la Suède et la Turquie qui bloque depuis mai l’entrée de Stockholm dans l’Otan. Ankara a réclamé l’extradition de plusieurs de ses membres dans un memorandum d’accord signé en juin avec la Suède et la Finlande, autre pays nordique désireux de rejoindre l’Alliance atlantique. Néanmoins le PKK a démenti son implication : « Il est bien connu que nous n’avons aucun lien avec cet événement, que nous ne visons pas les civils et rejetons les opérations qui le font ».
Concernant les bandes armées kurdes de Syrie, elles participent au pillage du pétrole syrien, extrait dans l’Est Euphrate par les États-Unis, puis transporté par ces mêmes Kurdes jusqu’en Irak à l’Est ou en Turquie au nord et au nord-ouest. Les Kurdes syriens soutenus par Washington, ont également démenti tout lien avec l’attentat : « Nous assurons que nos forces n’ont aucun lien avec l’explosion d’Istanbul et nous rejetons les accusations contre elles ».
La Turquie s’est aussi immiscée dans le jeu des Occidentaux par son activité d’entremise plutôt dirigée vers l’apaisement des belligérants dans le conflit russo-ukrainien, avec la tenue des négociations sur son sol, le frein à l’intégration de la Suède et la Finlande à l’OTAN, les échanges de prisonniers, la reprise des exportations de céréales.
Ainsi, en menant des opérations contre leurs alliés kurdes en Syrie et en Irak, en participant à une géopolitique alternative avec la Russie, en entravant l’expansion de l’Otan, la Turquie est entré en collision avec les projets de l’empire américain…