Quoiqu’on s’en doutait, on ne peut pas ne pas revenir sur le jeu de dupe qu’ont constitué les « accords de Minsk » après les dernières révélations d’Angela Merkel qui a participé aux négociations de A à Z avec les Ukrainiens, les Russes et les Républiques de Donetsk et Lougansk. C’est aussi l’occasion d’un retour en arrière pour se souvenir des origines du conflit qui n’a pas démarré le 22 février 2022, mais le 22 février 2014 avec le coup d’État de la Rada Suprême à Kiev.
Coup d’État et provocations de la Rada
À la suite des manifestations émeutières sur la place Maïdan à Kiev qui durent depuis le 21 novembre 2013, et aux affrontements consécutifs à l’ordre présidentiel d’évacuer les manifestants (on relève des morts des deux côtés), le président ukrainien en titre, Viktor Ianoukovitch, et les principaux leaders de l’opposition, avec l’intermédiation des ministres des Affaires étrangères allemand, polonais et français, avaient conclu un accord le 21 février 2014 : retour au régime parlementaire, formation d’un gouvernement d’union nationale et tenue d’une élection présidentielle anticipée.
Mais, le 22 février, sans attendre que le président signe le document sur le retour à la constitution de 2004 amendée, la Rada Suprême destitue Ianoukovytch, modifie la constitution et désigne un nouveau président du Parlement et un nouveau ministre de l’Intérieur… Cela ne s’appelle pas autrement qu’un coup d’État !
L’article 111 de la Constitution de l’Ukraine nécessitait pourtant, pour une destitution, le vote après enquête officielle de 75 % des députés (soit 338 députés) ainsi que l’avis du conseil constitutionnel (dont 5 membres y compris le président furent renvoyés le lendemain par la même Rada insurgée). Le Parlement justifie cette décision par le fait que Viktor Ianoukovytch aurait « abandonné ses fonctions » et en l’accusant de « violation massive des droits de l’homme ». Toujours le même couplet à tout faire, utilisé par les « démocrates » et « libéraux » pour justifier les violations des règles quand elles ne leurs conviennent plus…
Le lendemain 23 février, la Rada Suprême votait l’abrogation de la loi sur les langues régionales, qui prévoyait de retirer à la langue russe (comme aux langues roumaine, hongroise et tatar), le statut de langue officielle dans 13 des 27 régions essentiellement au Sud et à l’Est. Cette loi impliquait non seulement que tous les documents officiels seraient désormais rédigés uniquement en ukrainien, mais aussi que les cours dans les écoles ne seraient dispensés qu’en ukrainien, que tous les noms de ville et autres noms propres devraient utiliser l’orthographe et la prononciation ukrainienne. Cela ne s’appelle pas autrement qu’une provocation caractérisée à l’égard des populations russophones.
Même si la loi ne pourra pas finalement être appliquée (le 28 février 2014 le président « par intérim » Tourtchynov y opposait un véto), le feu était déjà mis aux poudres et avant même ce 28 février, les rébellions violentes des uns répondaient aux exactions vengeresses des autres.
Le 23 février 2014, des « anti-Maïdan » s’affrontaient aux « pro-Maïdan » sur la place de la Liberté à Kharkiv. Quelques jours plus tard, le 1er mars, des manifestations massives d’opposants au coup d’État de la Rada et au nouveau pouvoir ont lieu dans les régions russophones du pays, à Kharkiv encore, mais aussi à Donetsk ou Odessa. Le 16 mars, idem, des manifestations ont lieu dans les villes industrielles de l’Est de l’Ukraine alors que la Crimée vote le même jour son rattachement à la Russie. Au passage, le 25 mars, la diffusion de quatre grandes chaînes de télévision russes est interdite par le pouvoir à Kiev en raison de « mauvaise représentation des faits »…
À ce moment, les pro-Maïdan étaient minoritaires dans le Sud-Est notamment à Odessa, Donetsk, dans le Donbass, ou encore à Kharkiv. Une partie de l’Est ne voulait pas reconnaître les nouvelles institutions, dont même certains députés du Parti des régions qui avaient alors lâché Ianoukovytch.
Après ce coup d’État, sponsorisé par les États-Unis (concluant ainsi leur « Révolution orange » de novembre 2004 restée inaboutie), ce ne sont pas les habitants du Sud et de l’Est de l’Ukraine qui se sont soulevés pour donner l’assaut sur le nouveau pouvoir « démocratique » et « libéral » à Kiev. Mais c’est bel et bien le nouveau pouvoir issu du coup d’État à Kiev qui a jeté l’armée ukrainienne et les bataillons punitifs auxiliaires sur les populations de l’Est et du Sud révoltées par les provocations et le putsch.
A partir de là, les affrontements dégénèrent en « guerre civile » avec le soutien non-officiel russe à ceux qui seront alors nommés « séparatistes du Donbass » qui répond au soutien non-officiel américain aux putschistes.
L’ancien vice-chancelier d’Autriche, Heinz-Christian Strache :
« La conséquence de la soi-disant révolution de 2014, que j’appellerais plutôt un putsch, a été la guerre civile en Ukraine. Il y a eu une prise de pouvoir, qui ne peut en aucun cas être justifiée du point de vue démocratique. À la suite de cette guerre, même avant cette année, plus de 10 000 personnes ont été tuées, principalement des habitants de l’est de l’Ukraine, de Donetsk et de Lougansk. Et pendant toutes ces longues années, l’Europe s’est détournée de ce conflit, elle n’a jamais agi comme médiateur pour résoudre cette situation »
Les accords de Minsk I et II
Le protocole de Minsk (ou Minsk I) est un accord signé le 5 septembre 2014 par les représentants de l’Ukraine, de la Russie et des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, dont l’objectif est de mettre fin à la guerre du Donbass, qui a donc éclaté en avril 2014. L’accord a été formulé par le groupe de contact trilatéral sur l’Ukraine, composé des représentants de l’Ukraine, de la Russie et de l’OSCE.
Le texte du protocole comprend douze points :
- Assurer un cessez-le-feu bilatéral immédiat ;
- Assurer la surveillance et la vérification du cessez-le-feu par l’OSCE ;
- Organiser une décentralisation des pouvoirs, par la mise en application d’une loi ukrainienne (loi sur le statut particulier), accordant de manière temporaire l’autonomie locale dans les oblasts de Donetsk et de Lougansk ;
- Assurer une surveillance permanente de la frontière russo-ukrainienne par l’OSCE et instaurer une zone de sécurité à cette même frontière ;
- Libérer immédiatement tous les otages et les personnes retenues illégalement ;
- Adopter une loi ukrainienne visant à interdire les poursuites et les sanctions contre toutes les personnes impliquées dans la guerre du Donbass ;
- Poursuivre un dialogue national entre les parties ;
- Mettre en œuvre des mesures afin d’améliorer la situation humanitaire dans le Donbass ;
- Procéder à des élections anticipées dans les oblasts de Donetsk et de Lougansk ;
- Procéder au retrait du territoire ukrainien des formations armées et du matériel militaire illicites, ainsi que des combattants irréguliers et des mercenaires ;
- Mettre en place un programme économique pour favoriser la reprise des activités et de l’économie locale dans le Donbass ;
- Assurer la protection personnelle des participants aux consultations.
Un suivi du protocole de Minsk est convenu le 19 septembre 2014. Le mémo en résultant clarifie l’application du protocole. Parmi les mesures convenues à la paix, figurent notamment :
- suppression de toutes les armes lourdes dans une zone de quinze kilomètres derrière la ligne de contact, par chaque partie du conflit, afin de créer une zone démilitarisée de trente kilomètres de large en tout ;
- interdiction d’opérations offensives ;
- interdiction des vols d’avions de combat au-dessus de la zone de sécurité ;
- retrait de tous les mercenaires étrangers de la zone de conflit ;
- mise en place d’une mission de l’OSCE pour surveiller la mise en œuvre du protocole de Minsk.
À la suite de l’échec manifeste du protocole de Minsk après des regains de tensions et des combats qui reprennent dès décembre 2014, de nouveaux accords sont prévus. Les accords de Minsk II, du 12 février 2015, sont signés selon le « format Normandie » par François Hollande, Angela Merkel, Petro Porochenko, Vladimir Poutine, et des représentants des Républiques populaires séparées de Donetsk et de Lougansk, mettant en place un nouveau cessez-le-feu.
Ces accords n’avaient rien d’inadmissibles ou inapplicables pour l’une ou l’autre partie au conflit. Mais encore fallait-il qu’il y est une volonté ukrainienne sincère de sortir du bourbier de cette guerre, et que l’Ukraine y soit autant incité par la « communauté internationale » à les appliquer que la Russie l’a été dans ces années…
Minsk est une tromperie avouée aujourd’hui
Alors qu’il était élu en 2019 sur le projet de désescalade du conflit au Donbass, Zelensky signait le 26 février 2021 un décret sur les mesures pour « la désoccupation et la réintégration de la Crimée occupée par la Russie ». Une drôle de façon de désescalader et d’appliquer les accords de Minsk qui laissait bien transparaître soit sa duperie envers le peuple ukrainien, soit son retournement de veste (à l’initiative de qui ?).
Oleksiy Arestovytch, conseiller de Zelinsky, en 2019 disait dans une entrevue à un médiat ukrainien :
« Avec une probabilité de 99,9%, notre prix à payer pour rejoindre l’OTAN est une grande guerre avec la Russie. Les Russes doivent nous envahir avant que l’on entre dans l’OTAN » (Apostrophe.ua)
Aussi, bien informé, Arestovytch n’avait pas besoin de boule de cristal. L’OTAN a préparé et poussé Kiev à une guerre contre la Russie, dès le coup d’Etat du Maïdan.
En janvier 2022, avant même le début de l’opération russe, Oleksiy Danilov, secrétaire du Conseil de sécurité nationale et de défense de l’Ukraine, affirmait :
« le respect des accords de Minsk signifie la destruction du pays. Lorsqu’ils ont été signés sous la menace armée des Russes — et sous le regard des Allemands et des Français — il était déjà clair pour toutes les personnes rationnelles qu’il était impossible de mettre en application ces documents » (apnews.com, 31 janvier 2022)
Le même quelques mois avant déclarait le 10 septembre 2021, que l’armée ukrainienne pourrait « libérer les régions occupées » de Donetsk et de Louhansk si elle en recevait l’ordre.
Le 17 juin 2022 Petro Porochenko déclarait que l’Ukraine ne prévoyait pas d’appliquer les accords de Minsk dès leur signature :
« Nous avons obtenu ce que nous voulions. Nous ne croyions pas Poutine, comme nous ne le croyons pas maintenant. Notre tâche était, tout d’abord, de liquider la menace ou au moins de retarder la guerre. Nous avons eu huit ans pour pouvoir rétablir la croissance économique et renforcer les forces de l’armée ukrainienne. C’était la première tâche – et elle a été accomplie. Les accords de Minsk ont rempli leur mission ».
Finalement, les déclarations d’Angela Merkel il a quelques jours le 7 décembre, au médiat allemand Zeit, scelle l’aveu définitif et complet :
« L’accord de Minsk de 2014 était une tentative de donner du temps à l’Ukraine. Elle a également utilisé ce temps pour se renforcer, comme on peut le voir aujourd’hui. L’Ukraine de 2014-2015 n’est pas l’Ukraine moderne. Comme on l’a vu début 2015, Poutine aurait pu facilement l’écraser à l’époque »
L’ancienne dirigeante a également admis que l’OTAN n’aurait pas eu les ressources nécessaires à l’époque pour soutenir l’Ukraine à la hauteur de ce qu’ils font aujourd’hui.
Aucune ambiguïté aujourd’hui dans son propos ! Les accords de Minsk n’avaient pas d’autres buts que de donner du temps aux Ukrainiens et aux forces atlantistes agissant en coulisse, pour préparer le pays à… reprendre les hostilités à grand échelle contre le Donbass, la Crimée et la Russie.
Ces aveux signifient que cette guerre était bel et bien préparée et planifiée d’avance, et que les occidentaux ont tout fait pour pousser le président russe à la déclencher. Les États-Unis et leurs alliés ont simulé leur soutien à la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. En même temps, ils ont injecté des armes en Ukraine et ont ignoré tous les crimes commis par le régime de Kiev.
L’ancien vice-chancelier d’Autriche, Heinz-Christian Strache :
« C’est effrayant avec quelle franchise Mme Merkel parle des véritables objectifs des accords de Minsk. Ainsi, nous détruisons toute base de confiance, nous sapons la confiance dans le pouvoir de la parole des hommes politiques européens »
Pendant ces 8 années, d’abord Hollande puis Macron ont dit à Poutine que l’Ukraine était prête à appliquer les accords de Minsk. Mais en dehors des mots, il n’y a rien eu, aucun progrès vers la mise en œuvre des accords. L’intervention militaire de 2022 n’est donc qu’une réponse pour mettre fin à cette guerre préparée et entretenue par l’OTAN contre la Russie.
Vladimir Poutine s’est dit « déçu » par ces propos :
« Cela soulève évidemment la question de la confiance. Et la confiance est quasiment à zéro et après de telles déclarations, la question est bien sûr la suivante : Comment trouver un accord ? Et peut-on s’entendre avec quelqu’un ? Et avec quelles garanties ? Il s’avère que personne n’allait mettre en œuvre tous ces accords de Minsk. J’espérais encore que les autres parties prenantes à ce processus étaient sincères avec nous. Il s’avère qu’ils nous trompaient aussi. Il s’agissait uniquement de renforcer l’Ukraine avec des armes, en la préparant aux hostilités. Ce qu’on a dit maintenant prouve seulement que nous avons pris la bonne décision en lançant une opération militaire spéciale »
Que Poutine ait été trompé pendant 8 ans est une chose. Mais le plus grave est que les dirigeants européens ayant participé à ce jeu de dupe ont mené subrepticement et dans le dos des peuples, pendant tout ce temps, une politique de trahison contre la paix sur le continent, pour servir l’impérialisme de Yankeeland.
L’UE-OTAN, c’est la guerre non pas contre les ennemis ou les envahisseurs de l’Europe qui assaillent nos frontières, mais entre Européens !
de toutes ces tromperies, aucun média européen n’en parlait – nos politiques européens de l’UE
sont tous des lâches – l’Ukraine ce n’est pas la Russie – tous les territoires volés à l’Ukraine doivent lui revenir – POUTINE ne cherchait qu’à reconstituer une nouvelle Union Soviétique !