Dans son livre de Souvenirs, Maurice Bardèche, qui a lui-même perdu durant la guerre un homme de bien, son ami et beau-frère Robert Brasillach, revient sur quelques moments d’humanité survenus durant la guerre. Il évoque l’action de la franc-garde de Savoie et la mémoire des 76 miliciens assassinés par les communistes au Grand-Bornand, le 24 août 1944.
« Je cite ces intermittences de la haine parce que je les ai connues. D’autres, mieux renseignés que moi par leurs fonctions en savent probablement beaucoup d’autres exemples. En lisant l’histoire de l’Occupation, j’en ai rencontré d’autres sans trop de surprises.
Dans ma vie itinérante des derniers mois, je n’avais pas entendu parler des combats du plateau des Glières qu’on cite aujourd’hui comme un épisode glorieux de l’histoire de la Résistance. Je ne demande pas mieux que d’éprouver de l’admiration pour le courage et l’entêtement des jeunes officiers qui firent la folie de constituer en Savoie ce réduit inutile qui n’avait aucune chance d’échapper à une destruction tragique qui eut lieu en effet. Mais les circonstances furent étranges.
Le réduit des Glières était assiégé. Pour éviter un massacre, on avait obtenu des Allemands que le siège serait confié à un détachement de la Milice. Le maquis des Glières constitué au départ par une centaine d’hommes avait fini par être à la fin le refuge de plus de quatre cents réfractaires. Le ravitaillement était un problème : à la solution duquel le commandement de la Milice collabora à sa manière en fermant les yeux sur des promenades imprudentes de bovidés dans la direction du plateau. Lorsque la situation s’aggrava en février 1944, en raison de la pression des Allemands qui menaçaient d’intervenir, des pourparlers eurent lieu. Les responsables de la Milice étaient disposés à accorder des sauf-conduits aux combattants de « l’armée secrète » qui se déclaraient formation militaire. Mais il y avait parmi les arrivants les plus récents des pillards, des assassins, des truands auxquels la Milice refusait la protection que les lois de la guerre accordent aux combattants. L’officier qui commandait sur le plateau refusait d’abandonner au bras séculier les irréguliers qui s’étaient mis sous sa protection. Le responsable de la Milice refusait d’ouvrir un canton sans défense à l’invasion de colonnes infernales incontrôlées. Les pourparlers ne purent aboutir. Une unité alpine allemande mit tout le monde d’accord en prenant l’affaire en main. Le plateau fut nettoyé en quarante-huit heures par des professionnels. Quelques rescapés purent être recueillis par la Milice qui les fit prisonniers. Ce ne fut pas fini pour tout le monde. Car, parmi ces prisonniers, une douzaine servirent d’otages et furent fusillés à la suite de l’exécution ordonnée par de Gaulle, du colonel Christofini et des officiers qui commandaient la Légion tunisienne lorsqu’elle refusa de se rallier à la dissidence. Ces intermittences de la haine, presque toutes ignorées au moment où elles se produisirent, ne sont plus aujourd’hui que de rares oasis dans le désert du fanatisme. Je ne les rappelle que pour avoir la consolation de dire que les hommes ne sont pas toujours comme des épis qu’un vent mauvais courbe tous dans le même sens. Les responsables de la Milice qui participaient au siège du plateau de Glières furent plus tard condamnés et calomniés. Les francs-gardes de la Milice, incorporés sur l’ordre de Darnand, et portant la tenue militaire qui correspondait à leurs fonctions se rendirent sur parole aux chefs départementaux de ce qu’on appelait « la résistance » après l’entrée des Alliés à Paris le 19 août 1944. C’étaient des garçons de dix-sept à vingt ans. Ils étaient une centaine. On les enchaîna par groupes de dix et on les fit passer devant une cour martiale improvisée.
Soixante-seize furent condamnés à mort et fusillés sur-le-champ au lieu-dit Le Grand-Bornand. Il y avait parmi eux des familles entières, des frères, des parents. Le plus âgé avait combattu à Verdun. Le plus jeune venait d’avoir seize ans. Si les Souvenirs que j’écris servent à transmettre ce souvenir, ils n’auront pas été tout à fait inutiles ».
Le 19 août 1944, la centaine de francs-gardes permanents de la Milice française s’étaient en effet rendus à la « résistance ». Ils avaient négocié leur reddition la nuit précédente, contre la promesse d’être traités en prisonniers de guerre et que la vie sauve serait accordée à leurs familles ainsi qu’à eux-mêmes.
Emprisonnés et soumis à diverses tortures, les miliciens sont pourtant l’objet d’une parodie de procès organisée par des partisans communistes avec la participation des représentants des autres “tendances” de la “résistance”. Le “procès” débute alors que l’homme qui fait office de greffier, qui a rejoint la “résistance” quelques jours plus tôt, a déjà commandé 75 cercueils. Dans la nuit du 21 août, 75 miliciens sont condamnés à mort. Parmi les miliciens qui se sont rendus le 19, deux ont été abattus par les geôliers et un troisième s’est donné la mort. L’un des miliciens demande à être fusillé avec ses camarades. Les 21 autres sont relâchés mais n’échapperont pour la plupart pas à de nouvelles arrestations, tortures et condamnations, parfois à mort.
Deux jours après le procès, les miliciens sont conduits dans le bois de La Pèzerettaz, à quelques kilomètres du village du Grand-Bornand, où ils sont fusillés et où la plupart reposent aujourd’hui.
Tou s affrontèrent bravement la mort. Comme le rappelait Maurice Bardèche, « le plus âgé avait combattu à Verdun. Le plus jeune venait d’avoir seize ans ». En réalité, ce dernier, âgé de 16 ans et un mois, n’avait jamais été ni milicien ni élève-milicien ; il était venu trouver refuge avec sa famille, menacée par les rouges, auprès de la milice. Il est mort fusillé avec ses deux frères, âgés de 17 et 19 ans.
Lettre écrite par Aristide Challamel à sa mère et datée du « 24 août 1944, an II de la Révolution nationale ». Ce héros nationaliste avait 23 ans.
Cette lettre est la dernière que je vous envoie car vous avez su ce qui s’est passé. La Milice s’est rendue honorablement et les conditions de notre reddition n’ont pas été respectées par le vainqueur.
Je viens de passer devant la cour martiale et je suis condamné à la peine capitale. La sentence est exécutable dans quelques jours. Je ne regrette rien car j’ai juré de donner ma vie pour mon pays que j’aime et pour lequel j’ai tout fait…
Je suis heureux de mourir car je ne pourrai pas vivre dans le monde qui s’instaure. Pendant ces cinq jours, j’ai subi toutes les vexations qu’il est possible d’imaginer.
J’ai senti cette haine qui nous entoure tous nous miliciens et il m’est impossible de concevoir mon pays dans un semblable état d’esprit.
L’avenir vous dira si j’ai eu raison…Sachez que je meurs pour la France et pour elle seule, avec le sourire.
Lettre écrite par Jacques de Holstein à son fils Jean-Pierre le 23 août 1944. Jean-Pierre de Holstein s’est éteint en 2013, toujours fidèle à la mémoire de son père :
Mon petit Jean-Pierre,
Nous passons tout à l’heure en Cour martiale.
Nous avons été faits prisonniers le 18, après que l’assurance formelle nous ait été donnée que nous serions traités honorablement, que nous et nos familles aurions la vie sauve. Or aucun de ces engagements n’a été respecté. Quand tu seras grand, tu rechercheras MICHAL1 qui a pu se tirer d’affaire… Il te racontera les jours que nous venons de passer.
Je ne sais pas encore le sort qui m’est réservé, mais je préfère être fusillé que d’être conservé à la disposition de la folie de la foule… Quant à moi je suis en règle avec ma conscience, je n’ai rien à me reprocher sinon de vous avoir entraîné, ta maman et toi dans cette terrible aventure. Je te demande de conserver mon souvenir au fond de ton cœur. Je te demande de ne pas oublier que j’avais envisagé toutes les conséquences que le fait d’être Milicien pouvait entraîner.
Dis-toi que ma conviction politique était puissamment étayée et rappelle-toi que ton père a sacrifié sa vie à maintenir publiquement son idéal nationaliste. Ce sera mon pauvre Jean-Pierre le seul héritage que tu tiendras de moi…
Je t’embrasse mon pauvre chéri, travaille, grandis et plus tard ne m’oublie pas.
(1) Le chef de trentaine de la Milice Jacques Michal eut l’occasion « de se tirer d’affaire », mais il refusa d’abandonner ses hommes et se présenta devant la cour martiale.
Ce récit est profondément tragique. Il raconte une page sombre de notre histoire, où des vies humaines, jeunes et âgées, se sont éteintes dans la violence et la douleur. Le 19 août 1944, ces hommes, ces miliciens, ont fait le choix de se rendre, espérant une lueur de clémence, un espoir de vie pour eux-mêmes et pour leurs familles. Mais ce n’était qu’une illusion cruelle, brisée par des promesses non tenues et un destin impitoyable.
Le « procès » qui a suivi n’était qu’une mascarade, une parodie de justice, menée par ceux qui, en ce moment, avaient la force du pouvoir entre leurs mains. Le sort de ces hommes était scellé avant même qu’ils ne prennent la parole. 75 cercueils avaient déjà été commandés, comme si leur vie ne comptait plus, comme si elle n’était qu’un détail administratif, une simple formalité à régler.
La fin de cette histoire est déchirante. Ces hommes, parfois à peine plus que des enfants, ont affronté la mort avec courage. Le plus jeune d’entre eux, un garçon de 16 ans, n’était même pas un milicien, mais simplement un jeune qui cherchait protection pour sa famille. Il est mort aux côtés de ses frères, emporté par une tempête de violence qu’il n’avait pas demandée.
C’est une histoire où l’humanité semble s’être perdue, où la vengeance a pris le pas sur la justice. Le bois de La Pèzerettaz, où reposent ces hommes, témoigne silencieusement de cette tragédie. On ne peut s’empêcher de ressentir une profonde tristesse face à cette absurdité de la guerre, où même l’innocence ne trouve pas refuge.
Henriot dans une de ses allocutions à Radio-Paris qualifiait les résistants de pillards de fermes, de ravisseurs de femme, d’assassins d’enfants et d’assassins à 20 contre un. Comment faire confiance à des hommes dont l’honneur n’avait aucun sens? L’ignominie décrite ici témoigne combien ils pouvaient forfaire sans aucun scrupule à leur parole.
Très bon papier qui associe le texte de Bardèche, une courte notice historique, et deux lettres de Miliciens : une bonne idée et une bonne exécution. Vous devriez l’envoyer à mon ami Jacques CHambaz, dont le père commandait le détachement de miliciens, et dont j’ai perdu l’adresse électronique.
Merci decet utile rappel de ce crime.
N’oublions jamais ce massacre des miliciens !
C’est vraiment une erreur de débutant de se rendre à des francs-tireurs. Ils ne sont pas protégés par la convention de Genève, alors forcément, ils ne l’appliquent pas non plus. La même erreur a été faite par les troupes allemandes à Tulle (mais en plus ceux là c’étaient de mauvais citoyens, car quand on fait partie d’une race supérieure, on se bat jusqu’à la mort).
On ne compte plus les reniements de sa parole par le régime d’ Usurpation revenu dans les fourgons de l’ Étranger. Grâce auquel, dans le XIXème arrondissement, les indésirables ne parlent plus Allemand, mais Arabe.