Marcel Lefebvre est né le 29 novembre 1905 à Tourcoing. Issu d’une famille d’industriels catholiques du Nord, cinq des huit enfants deviennent prêtres ou religieux. Élève de l’Institution libre du Sacré-Cœur, entré au séminaire français de Rome en 1923, il est ordonné prêtre en 1929 par l’archevêque de Lille Mgr Liénart.
Déjà docteur en philosophie, il devint docteur en théologie en 1930. Disciple et admirateur de P. Henri Le Floch, son professeur, il lui reste fidèle bien que celui-ci ait été contraint de quitter son poste de recteur au séminaire français pour ses sympathies maurrassiennes. L’Action française est condamnée par Pie XI en 1926.
Il devient missionnaire au Gabon. Il s’y implique dans des postes de brousse et dirige le séminaire. À la Seconde Guerre mondiale, il est encore mobilisable et est affecté à la colonie. Rappelé en France, en 1945 et est nommé supérieur du scolasticat des spiritains à Mortain.
En 1947, il retourne en Afrique comme évêque et vicaire apostolique de Dakar, où il fonde l’année suivante le Cours Sainte-Marie de Hann, un établissement privé, destiné à accueillir des élèves venus de toute l’AOF.
Pie XII lui donne la charge de délégué apostolique pour l’Afrique francophone -plus de 40 diocèses !, avec la mission d’africaniser l’Église en Afrique. En 1955, il est le premier archevêque de Dakar. À la demande du président sénégalais, Léopold Senghor, Jean XXIII le retire de Dakar en 1962.
De retour en France, il est alors nommé évêque de Tulle, tout en restant archevêque à titre personnel. Il est élu supérieur général des missionnaires spiritains. Il renonce alors au diocèse de Tulle et est nommé par Rome en août 1962, archevêque In partibus de Synnada en Phrygie.
C’est à titre d’évêque-archevêque emeritus, et supérieur général religieux que Mgr Lefebvre participe au concile Vatican II. Au sein de la commission préparatoire il fait de sérieuses critiques contre le schéma sur la liturgie.
Il tente, en vain, d’introduire la condamnation expresse du communisme dans la constitution Gaudium et Spes sur l’activité pastorale de l’Église. Mais c’est surtout lors des débats sur la liberté religieuse qu’il se fait remarquer. Il rejoint le groupe informel Coetus Internationalis Patrum. Ce groupe de travail critique notamment les textes proposés à l’assemblée des évêques sur la liberté religieuse, les jugeant non conformes à la Tradition de l’Église. Après de longs débats, le texte de Dignitatis Humanae est cependant adopté.
En 1968, à la suite de la modification de la règle des spiritains, établie par leur fondateur, à laquelle il se refuse, il se démet de sa charge de supérieur général.
Peu à peu, d’abord en privé puis ouvertement après la publication du nouveau Missel romain en 1969, il s’associe à la critique des « traditionalistes » à l’encontre du concile Vatican II et des réformes issues de l’« esprit du concile ».
Il est un critique de la nouvelle liberté religieuse (pour toutes les religions), du nouvel œcuménisme (sans conversion), de la subsidiarité (consultation constante du pape avec les évêques), de la nouvelle conception de la collégialité et de la réforme générale de la liturgie, et tout particulièrement du rite de la messe promulgué par Paul VI – le nouvel Ordo Missae – qui vient se substituer au rite dit tridentin, codifié par le Pape saint Pie V. De manière générale, il dénonce la dérive de l’Église vers le modernisme qui privilégie l’Homme tel qu’il fut dénoncé auparavant par les Papes Léon XIII, Pie IX (Syllabus) et Saint Pie X.
En 1970, à la demande de plusieurs séminaristes français, il fonde à Écône en Suisse la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X. L’institution est érigée canoniquement par Mgr Charrière, évêque du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg en tant que « pieuse union » pour une durée de 3 ans ad experimentum renouvelables. De son côté, l’évêque de Sion l’autorise à fonder un séminaire à Écône.
Le 11 novembre 1974, la Congrégation des séminaires envoie à Ecône un groupe de trois « visiteurs apostoliques » pour examiner le fonctionnement du séminaire, dont Mgr Albert Descamps. À la suite du rapport critique des visiteurs apostoliques, une Commission composée de trois cardinaux est constituée et convoque Mgr Lefebvre, le 13 février 1975, pour clarifier la situation. Face aux préfets des Études, du Clergé et des Religieux, il maintient ses critiques de l’« Église conciliaire ».
En conséquence, le 6 mai 1975, l’évêque de Fribourg, Mgr Mamie, retire son autorisation à la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X. Malgré cela, Mgr Lefebvre décide de continuer son action de formation de prêtres, et, en juin 1976, il ordonne treize prêtres sans lettres dimissoires. Le 22 juillet 1976, Paul VI frappe Marcel Lefebvre d’une suspense a divinis, pour ordinations sans lettres dimissoriale et la Fraternité est dissoute.
En réponse, dans une interview au Figaro, Mgr Lefebvre décrit Vatican II comme « un concile schismatique » et s’interroge publiquement sur la légitimité de Paul VI. Le 29 août 1976, Mgr Lefebvre célèbre la « messe de Lille » au cours de laquelle il déclarera qu’« on ne peut dialoguer ni avec les francs-maçons, ni avec les communistes, car on ne dialogue pas avec le diable ! »
Le 27 février 1977, des fidèles traditionalistes, menés par Mgr François Ducaud-Bourget, soutenant le rite Tridentin, occupent par la force l’église parisienne Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
Sur le plan politique, Mgr Lefebvre soutient des mouvements conservateurs ainsi que certains régimes taxé de « dictatures » mais se revendiquant du catholicisme. Ainsi en 1976, il exprime un soutien indirect au régime du général Videla, en Argentine. De même, en 1985, il déclare admirer les régimes qu’ont mis en place Franco et Salazar, saluant notamment le fait que ces deux pays avaient su rester neutres pendant la Seconde Guerre mondiale, épargnant non seulement leur population, mais aussi les Juifs qui y résidaient.
La même année, il accorde son soutien, dans le quotidien Présent, à Jean-Marie Le Pen, président du Front national, en tant que seul homme politique clairement opposé à l’avortement.
En 1986, le Pape Jean-Paul II organise à Assise, une rencontre inter-religieuse où les représentants de toutes les religions sont invités à une journée de prière pour la paix. Mgr Lefebvre juge ces pratiques incompatibles avec la tradition de l’Église et contraires au premier commandement de Dieu : « un seul Dieu tu adoreras ! … Je suis un Dieu jaloux ». En 1987, le pape nomme le cardinal Gagnon médiateur. Celui-ci rend visite à de nombreuses maisons de la Fraternité Saint Pie X ; il conclut sa tournée sur des propos très louangeurs et remet au pape Jean-Paul II un rapport sur ces visites. Un accord est signé le 5 mai 1988 par le cardinal Ratzinger et Mgr Lefebvre, approuvant notamment le principe de la nomination d’un évêque pour que l’œuvre de la Fraternité se maintienne. Mais la tentative de réconciliation échoue et le lendemain, Mgr Lefebvre rétracte sa signature.
Le 30 juin 1988, Mgr Lefebvre, assisté de Mgr Antonio de Castro-Mayer, sacre évêques Bernard Fellay, Bernard Tissier de Mallerais, Richard Williamson et Alfonso de Galarreta, Le lendemain, le cardinal Gantin, préfet de la Congrégation des évêques, déclare les quatre nouveaux évêques, ainsi que Mgr Lefebvre et son co-célébrant, excommuniés latæ sententiæ au titre des canons 1364-1 et 1382 du Code de droit canonique.
Mgr Lefebvre meurt le 25 mars 1991, fête de l’Annonciation. Son corps repose au séminaire international d’Écône.
L’excommunication portant sur les quatre évêques sacrés est finalement levée le 21 janvier 2009 par décret de la Congrégation des évêques à la demande de SS Benoit XVI.