Aucun aspect de la Guerre Civile américaine n’aura laissé dans les mémoires un tel sillage de rancœur et d’amertume que le sort qu’ont connu les soldats fait prisonniers. Le nom d’Andersonville fait encore aujourd’hui remonter un abominable cortège d’images dont l’horreur reste inégalée dans l’histoire américaine.
Même si les partisans du Nord se permettent d’agiter ce sinistre spectre à l’encontre des Sudistes, l’Union n’était pas en reste avec ses propres camps. Des deux côtés, les mêmes scènes de prisonniers dans un état pitoyable, faméliques et rongés par la maladie, des scènes à faire frémir qu’on retrouvera tout aussi affligeantes au cours de la Seconde Guerre mondiale.
Des deux côtés aussi, des rumeurs circuleront, des souvenirs de prisonniers grossièrement exagérés seront publiés, des articles de journaux et même des rapports officiels paraîtront qui viendront accuser l’ennemi d’avoir entretenu une politique délibérément criminelle. Il aura fallu des dizaines d’années aux historiens révisionnistes pour démêler les faits de la propagande, les malentendus des récits fantaisistes, mais leur travail peine à s’imposer à la sinistre légende qui entoure ce chapitre tragique de l’histoire américaine.
La vérité, c’est que ni le Sud ni le Nord n’avaient spécialement prévu de rendre la vie impossible à leurs prisonniers. Des installations étaient improvisées à la hâte pour faire face à une marée humaine. Comme personne ne s’était attendu à ce que la guerre se prolonge, il s’agissait de camps de fortune érigés pour un coût minimal. Leur gestion était mauvaise des deux côtés, mais le Sud, plus pauvre en ressources et à l’organisation moins centralisée connaissait une situation calamiteuse tandis que les prisonniers de l’Union étaient relativement mieux lotis.
Durant la première phase de la guerre, de 1861 à 1862, les prisonniers encore peu nombreux pouvaient être traités correctement. De plus, les parties étaient convenues d’un accord d’échange qui a bien fonctionné tout au long de la seconde moitié de l’année 1862. Dans le cadre de l’accord, les captifs restants après les échanges étaient libérés sur parole. Mais l’accord n’a pas tenu, d’une part en raison de l’attitude du Nord qui se refusait à considérer les autorités confédérées comme autre chose que des «rebelles», d’autre par à cause de la question des Noirs.
«Dans une guerre de ce genre, les mots ont leur importance. On ne peut pas à la fois faire la guerre aux sécessionnistes et reconnaître Davis comme leur président, les prisonniers doivent le comprendre», estimait ainsi l’influent Harper’s Weekly dans ses colonnes.
À peine la Proclamation d’émancipation faite, le jour de l’an 1863, le Nord commençait à enrôler d’anciens esclaves, provocant aussitôt une déclaration du président confédéré Jefferson Davis selon laquelle «tous les esclaves capturés en armes» et leurs officiers blancs devaient être remis au Sud pour être traités conformément à la loi. Cela pouvait signifier des poursuites sévères en vertu de lois relatives aux insurrections nègres.
Il y aura encore des échanges au cas par cas, mais désormais la masse des prisonniers ira en s’amplifiant.
Le 17 avril 1864, le général Grant ordonnait que plus aucun prisonnier confédéré ne soit libéré sur parole ou échangé sans qu’un nombre équivalent d’officiers et d’hommes de l’Union ne sortent de Vicksburg et de Port Hudson et tant que les autorités confédérées n’auront pas renoncé à faire une distinction entre prisonniers blancs et prisonniers noirs.
Le 10 août, le gouvernement confédéré propose un échange officier pour officier et homme pour homme, en accompagnant sa proposition d’une déclaration sur les conditions de détention à Andersonville. Cette offre pousse le général Grant à révéler la véritable raison pour laquelle il refuse tout nouvel échange. «Chaque homme que nous détenons, qu’il soit libéré sur parole ou non, déclare Grant à Washington, redevient immédiatement un soldat actif contre nous, directement ou indirectement. Si nous mettons en place un système d’échanges qui libère tous les prisonniers, nous devrons nous battre jusqu’à ce que tout le Sud soit exterminé. Tandis que si nous retenons ceux qui ont été capturés, c’est comme s’ils étaient morts. Libérer tous les prisonniers rebelles maintenant assurerait la défaite de Sherman [généralissime du Nord, successeur de Grant] et compromettrait notre sécurité ici». (Rhodes, pp. 499-500)
En octobre, Lee propose à Grant un autre échange homme pour homme. Ce dernier lui demande si Lee lui remettrait les troupes noires «de la même manière que les soldats blancs». Lorsque Lee déclare que «les Noirs appartenant à nos citoyens ne sont pas considérés comme échangeables», les négociations sont irrévocablement rompues.
Après l’arrêt des échanges, les camps du Sud sont rapidement submergés et la pauvreté croissante de la Confédération [due à la guerre de terre brûlée menée par Sherman, à l’image de ce qui se passera dans la guerre des Boers, puis, plus tard, avec les bombardements Alliés] entraîne souffrances, pénuries et épidémie. Les reportages dans la presse du Nord laissent entendre que cela faisait partie d’une politique délibérée, ce que les esprits surchauffés du public en temps de guerre n’étaient que trop disposés à croire.
Après la guerre, les confédérés rejetèrent la responsabilité des conditions de détention dans les camps (des deux côtés) sur les autorités fédérales. Ils soulignèrent l’annulation par le Nord du protocole d’échange qui a lourdement pesé, et de manière inattendue, sur le régime des prisonniers au sud. Ils condamnèrent également le Nord pour avoir délibérément réduit les rations des prisonniers confédérés en réaction aux rapports faisant état des mauvaises conditions dans les camps sudistes.
Le plus connu de tous les camps de la guerre de Sécession est aujourd’hui Andersonville. Officiellement désigné sous le nom de Camp Sumter, il était située dans le centre-sud de la Géorgie, à une vingtaine de kilomètres de Plains. Plus de 45 000 soldats de l’Union y ont été enfermés entre février 1864, date de l’arrivée des premiers prisonniers, et avril 1865, date de la prise du camp. Parmi eux, 12 912 sont morts, soit environ 28 %, ils sont enterrés sur le site du camp, aujourd’hui devenu un cimetière national. (Baker, p. 10)
Andersonville était une prison pour les hommes du rang. Après les premiers mois, les officiers étaient détenus à part, à Macon. Le camp avait été conçu à l’origine pour accueillir 10 000 hommes, mais à la fin du mois de juin, ce nombre était passé à 26 000. En août, le camp de 10 hectares accueillait plus de 32 000 soldats. La surpopulation était un problème permanent. Les gardes avaient pour consigne d’abattre, depuis leurs guérites, tout prisonnier qui tentait de franchir une palissade appelée «deadline». La bande de terrain entre la «deadline» et les palissades était appelée «deadrun».
Les Confédérés ne disposaient pas de quoi ériger les baraquements. Certains des premiers prisonniers étaient parvenus à se construire des huttes rudimentaires avec des bouts de bois. La plupart se contentèrent de toiles de tentes. Il y en eut qui creusèrent des trous dans le sol pour se protéger, mais il en restait encore des centaines qui ne disposaient tout simplement d’aucun abri pour faire face aux intempéries.
Aucun vêtement n’était fourni et nombre de prisonniers transférés à Andersonville depuis d’autres camps n’étaient vêtus que de haillons. Même les vêtements corrects se détérioraient rapidement, et certains prisonniers n’avaient pour ainsi dire rien à se mettre.
Les prisonniers recevaient la même ration quotidienne que les gardes : une livre et quart de farine de maïs et une livre de bœuf ou un tiers de livre de bacon. Ce maigre régime n’était qu’occasionnellement complété par des haricots, du riz, des pois ou de la mélasse. Les soldats du nord n’étaient pas habitués à cette ration., mais c’était le régime «hog and hominy» (porc et maïs) des soldats Sudistes au combat.
Un ruisseau traversait l’enceinte dépourvue d’arbres, la divisant à peu près en deux. Il fut rapidement pollué, créant une puanteur excrémentielle dans tout le camp.
Près de 30 % des prisonniers enfermés à Andersonville pendant ses 13 mois d’existence y sont morts. La plupart succombèrent à la dysenterie, à la gangrène, à la diarrhée et au scorbut. Les Confédérés ne disposaient pas des installations, du personnel et des fournitures médicales nécessaires pour enrayer ces maladies. En moyenne, plus de 900 prisonniers mouraient chaque mois. L’hôpital du camp, mal équipé et mal doté en personnel, n’était pas en mesure de faire face. Le chirurgien confédéré Joseph Jones qualifiait Andersonville de «gigantesque amas de misère humaine».
Parmi les prisonniers, des prédateurs s’accaparaient la nourriture et les vêtements à leurs camarades d’infortune. Les plus connus faisaient partie d’un puissant groupe organisé, les «Andersonville Raiders», qui ont tenu le haut du pavé pendant près de quatre mois. Les vols et les meurtres étaient quotidiens jusqu’à ce que six des meneurs soient arrêtés et pendus. Les autres Raiders durent faire face à des prisonniers armés de gourdins.
La garde du camp était confiée à quatre régiments de la milice de Géorgie, généralement composés de vétérans indisciplinés et de jeunes inexpérimentés. Les efforts du commandant du camp pour les remplacer par des soldats plus aguerris sont restés vains étant donné que les hommes valides étaient tous requis pour faire face aux troupes du général Sherman qui marchaient sur Atlanta.
Les prisonniers des deux camps furent détenus dans quelque 150 camps de prisonniers. Si Andersonville est le plus connu, plusieurs autres l’ont égalé, voire dépassé, dans le sordide et par leur mortalité.
Quelque 12 000 soldats de l’Union furent confinés à Richmond dans plusieurs centres, dont le pire était Belle Isle, une île plate de la James River. Moins de la moitié des 6 000 prisonniers pouvaient s’abriter dans des tentes; la plupart dormaient à même le sol, sans vêtements ni couvertures. Beaucoup n’avaient ni pantalon, ni chemise, ni chaussures, et n’avaient rien pour se laver. Au moins dix hommes mouraient par jour dans des conditions d’insalubrité indescriptibles, envahies par la vermine. L’île était saturée de déchets en état de décomposition. Les hôpitaux pour prisonniers de Richmond furent rapidement engorgés et beaucoup moururent à Belle Isle sans avoir jamais vu un médecin.
C’est que les rations étaient vraiment maigres. C’est bien simple, le jour de Noël 1863, les prisonniers n’ont rien eu du tout. La ration quotidienne d’une livre de pain et d’une demi-livre de bœuf était régulièrement réduite. Le pain était remplacé par du pain de maïs fait de farine non tamisée. Une petite patate douce remplaçait la viande. Pendant les deux dernières semaines de captivité, la totalité de la ration quotidienne consistait en trois quarts de livre de pain de maïs.
Le régime alimentaire des Confédérés n’était guère meilleur. Un officiel confédéré déclara que les prisonniers de Richmond recevaient les mêmes rations que les troupes sudistes et que si la nourriture était insuffisante, c’était en raison de la guerre destructrice menée par le Nord. En janvier 1864, les soldats confédérés à Richmond n’avaient plus de viande. Les graves pénuries qui frappaient la capitale sudiste entraînaient une flambée des prix des denrées et des émeutes du pain.
Les camps de Salisbury, en Caroline du Nord, et d’ailleurs, reproduisaient les pires caractéristiques d’Andersonville à plus petite échelle. Le manque d’eau à Salisbury engendrait un état de saleté et de puanteur insupportables. La ration quotidienne des prisonniers et des gardiens tenait en une soupe de 600g de pain sans viande ni sorgho. De nombreux internés manquaient de vêtements ou d’abris et les prédateurs s’en donnaient à cœur-joie. Le taux de maladie montait en flèche. D’octobre 1864 à février 1865, 3 479 prisonniers moururent sur les 10 321 détenus, soit plus d’un tiers du total. (Hesseltine, 1964, p. 170)
Les conditions dans le Nord n’étaient guère meilleures. L’un des pires camps de l’Union était celui de Fort Delaware, situé sur une île à environ 14 miles au sud de Wilmington. La saleté et la vermine qui régnaient dans cette prison forteresse humide favorisaient un taux de mortalité élevé. La plupart des 2 436 prisonniers confédérés qui moururent dans ce que certains appelèrent «l’Andersonville du Nord» succombèrent au scorbut et à la dysenterie.
Un autre camp de l’Union tristement célèbre était celui de Rock Island, situé sur une île du fleuve Mississippi entre Davenport (Iowa) et Rock Island (Illinois). Un rapport du New York Daily News du 3 janvier 1865 indique que les prisonniers en étaient réduits à manger des chiens et des rats, et que beaucoup d’entre eux étaient pratiquement nus et livrés au froid glacial de l’hiver. Les récalcitrants étaient soumis aux punitions les plus imaginatives, dont la pendaison par les pouces.
Au total, 12 409 hommes furent internés à Rock Island pendant ses 20 mois d’existence. Parmi eux, 730 furent transférés sur d’autres sites, 3 876 furent échangés, 41 réussirent à s’évader, 5 581 furent libérés sur parole, quelque 4 000 s’enrôlèrent dans des unités fédérales destinées à servir dans l’Ouest et 1 960 moururent en captivité. (Hesseltine, 1972, p. 58)
Le camp nordiste le plus terrible était de loin celui d’Elmira, situé dans l’État de New York, à quelques kilomètres de la frontière avec la Pennsylvanie. Quelque 9 000 prisonniers ont été entassés dans un camp prévu pour 5 000.
Deux tours de guet étaient disposées à l’extérieur des murs de la prison. Pour 15 cents, les touristes pouvaient jouir du spectacle des prisonniers à l’intérieur de l’enceinte. Lorsque l’hiver frappe Elmira à la fin de l’année 1864, les prisonniers dépourvus de couvertures et vêtus de haillons tombèrent comme des mouches. Début décembre, des hommes à moitié nus se tenaient debout, de la neige jusqu’aux chevilles, pour répondre à l’appel du matin.
Une mare d’un hectare d’eau stagnante à l’intérieur des 12 hectares du camp s’était formée et servait de latrines et de dépotoirs, un véritable foyer d’infection. Le scorbut et la diarrhée faisaient des ravages. En novembre 1864, la pneumonie se propageait à la vitesse d’une peste. Une épidémie de variole prenait le relais un mois plus tard allongeant la liste des victimes.
Les demandes réitérées des médicaments de base ont été ignorées des fonctionnaires de Washington. L’hôpital manquait de lits, son équipement et son personnel étaient dérisoires. Fin décembre 1864, on ne comptait pas moins de 70 hommes allongés à même le sol de l’hôpital, tandis que 200 autres, malades ou mourants, étaient restés dans leurs quartiers d’origine à la prison, contaminant leurs camarades encore sains.
Les prisonniers qui regimbaient étaient punis de diverses manières. Certains étaient enfermés dans la «boîte à sueur» dans laquelle l’occupant restait immobile et ne recevait ni aération, ni nourriture, ni eau pendant toute la durée de la punition. D’autres étaient bâillonnés ou pendus par les pouces. Comme aucun prisonnier ne recevait ses rations habituelles pendant la durée des sévices, ils souffraient en plus de la faim .
Un commandant de prison se rendait souvent au camp à minuit, par temps glacial, juste pour faire l’appel.
En février 1865, le camp comptait 8 996 prisonniers, dont 1 398 malades et 426 morts. En mars, 16 prisonniers en moyenne mouraient chaque jour. Sur un total de 12 123 soldats emprisonnés à Elmira au cours de son année d’existence, 2 963 sont morts, soit environ 25 %. Le taux de mortalité mensuel était cependant supérieur à celui d’Andersonville. (Hesseltine, 1972, p96)
Outre les camps pour les militaires, le Nord avait également créé des camps de concentration pour les populations civiles considérées comme hostiles au gouvernement fédéral. En août 1863, le général Thomas Ewing édictait son tristement célèbre ordre numéro 11, en vertu duquel un grand nombre de civils du Missouri étaient internés dans ce que l’on appelait des «poste».
Dans Plain Speaking, an Oral Biography of Harry S. Truman, l’ancien président raconte ce qui s’est passé:
Les comtés de Jackson, Vernon, Cass et Bates, ont été quasiment vidés de leur population et les gens ont dû rester cantonnés dans ces postes.
On les appelait des postes, mais il s’agissait en fait de camps de concentration. La plupart des gens ont été déplacés si rapidement qu’ils ont dû laisser tous leurs biens dans leurs maisons. Les soldats fédéraux sont alors arrivés, ont pris tout ce qui restait et ont mis le feu aux maisons.
Cela n’a pas été très bien perçu par les habitants de la région, en particulier le fait de placer les gens dans des camps de concentration. (pp 78-79)
La grand-mère du président Truman a chargé ce qu’elle pouvait dans une charrette à bœufs et, avec six de ses enfants, dont la mère du président, a fait le voyage jusqu’à un «poste» à Kansas City. Martha Ellen Truman s’en souviendra jusqu’à sa mort, à 94 ans.
Peut-être l’aspect le plus édifiant de toute cette période pour notre génération n’est-il pas l’existence même des camps, ni même les conditions exécrables qui y régnaient, mais plutôt l’énorme campagne de propagande menée à leur sujet, avec la sourde accusation que les camps étaient en réalité des centres d’extermination. Cette campagne de psychose menée pendant et après la guerre de Sécession rappelle de manière frappante celle qui a suivi la Seconde Guerre mondiale.
Les journalistes, les prédicateurs et les politiciens des deux camps faisaient de l’ennemi une caricature de monstre se rassasiant des pires atrocités. Les prisonniers affabulateurs, dans leurs témoignages de ce qui s’était passé autour d’eux, laissaient libre cours à leur imagination, sans aucun souci d’objectivité aucun. Ils ont souvent exagéré les conditions de vie et affirmé que leurs souffrances faisaient partie d’une monstrueuse conspiration.
Les prisonniers les plus malades de Belle Isle qui pouvaient encore voyager furent envoyés au Nord. L’état de maigreur effroyable de ces survivants confirmait l’impression déjà répandue que les prisonniers détenus par le Sud étaient en train de mourir à petit feu.
Des polémiques éclataient, certains estimant que l’Union s’était montrée trop tiède face à ces barbaries et les demandes de représailles se multipliaient.
En guise de rétorsion, un général nordiste ordonnait pour un général confédéré fait prisonnier «un traitement spécial similaire à celui que les rebelles réservaient aux prisonniers de l’Union dans les prisons de Richmond». (Hesseltine, 1964, p186). Cette version de la Sonderbehandlung de la guerre de Sécession n’a jamais atteint la sinistre notoriété de son homologue de la Seconde Guerre mondiale.
«Les représailles, déclarait le New York Times, c’est terrible, mais les souffrances de ce lent dépérissement de nos frères et amis dans ces prisons inhumaines sont pires encore». (Hesseltine, 1964, pl94). Le résultat de cette campagne a été que les prisonniers du Nord ont été contraints de souffrir inutilement en représailles à la prétendue cruauté du Sud.
Le lieutenant-colonel William H. Hoffman, commissaire général fédéral des prisons, ordonnait ainsi une réduction à titre préliminaire de 20 % des rations dans les camps de l’Union. Il ordonnait ensuite le renforcement de la garde en prévision d’une nouvelle réduction des rations. Le secrétaire à la Guerre, Edwin M. Stanton, approuvait un autre ordre de Hoffman visant à réduire encore plus fortement la nourriture, le chauffage, le logement et l’habillement des prisonniers jusqu’à des niveaux qui, selon les propagandistes de l’Union, seraient équivalents à ceux qui prévalaient dans le Sud. Une grande partie des morts et des souffrances dans les prisons du Nord était le résultat direct de cette action.
Seule une garde fortement renforcée a permis de circonvenir un grave danger d’émeute à Camp Morton, au moment où les nouvelles rations sont entrées en vigueur.
Suivant la politique de représailles en vogue, certains commandants de camps ont pris sur eux d’aggraver encore les souffrances des prisonniers dont ils avaient la charge.
Le Congrès avalisait officiellement la campagne de propagande. La commission de la Chambre des représentants sur la conduite de la guerre diligentait une enquête sur la condition des prisonniers dans les camps confédérés. Le secrétaire à la Guerre, Stanton, déclarait à la commission que «l’énormité du crime commis par les rebelles à l’égard de nos prisonniers ne se savait pas encore dans le public, et qu’il ne pourrait que remplir d’effroi le monde civilisé lorsque les faits seraient entièrement révélés. Il semble bien qu’il y ait eu un système délibéré de traitement barbare qui aura pour résultat que peu, voire aucun, des prisonniers qui ont été entre leurs mains au cours de l’hiver dernier ne sera plus jamais en état de rendre un quelconque service ou même de jouir de la vie». (Hesseltine, 1964, p196)
La commission de la Chambre des représentants publia dans son rapport n° 67, huit photos de prisonniers nus ou partiellement nus libérés de Belle Isle dans le pire état d’émaciation et d’abattement qui soit. Le rapport final déclare que ces preuves attestent de la détermination des Confédérés à tuer les soldats de l’Union qui tombaient entre leurs mains.
Quelques mois plus tard, la Commission sanitaire des États-Unis (un précurseur de la Croix-Rouge américaine) publiait son propre compte-rendu des privations et des souffrances des officiers et des soldats des États-Unis lorsqu’ils étaient prisonniers des autorités rebelles. Complété par des photos colorisées de prisonniers malades libérés, ce récit contenait toutes les histoires d’atrocités racontées jusqu’alors, et même plus. Il prétendait que les prisonniers étaient dépouillés de leurs vêtements et de leur argent dès leur capture, et que les corps nus étaient entassés en attendant d’être enterrés pour être dévorés par les porcs, les chiens et les rats. Il n’est pas surprenant que le récit officiel ait conclu que les souffrances et les morts étaient le résultat d’un «plan préétabli, émanant de quelque part au sein des conseils des rebelles, pour mettre hors d’état de nuire les soldats de leur ennemi, qui s’étaient honorablement rendus sur le terrain». (Hesseltine, 1964, pl99). En revanche, les conditions de vie des prisonniers dans les camps de l’Union étaient présentées en termes élogieux de confort et d’abondance.
L’Union salua le rapport comme un portrait fidèle de la situation. Le Harper’s Weekly estimait qu’il contribuerait à soutenir la cause fédérale non seulement dans le pays, mais aussi en Europe.
À eux deux, ces rapports officiels conféraient une aura d’authenticité à la campagne de propagande qui déferlait sur le Nord. Ils ont contribué à légitimer les mesures fédérales qui ont entraîné des souffrances et des morts évitables dans les camps du Nord. Ils ont également contribué à justifier la politique d’occupation dure et vindicative de «reconstruction» imposée par le Nord à la fin de la guerre.
Les journaux fédéraux accusèrent le système socio-politique de la Confédération d’être à l’origine des horreurs commises dans les camps du Sud. Les rapports sur les conditions de vie calamiteuses des camps ne faisaient que confirmer l’idée que le système confédéré était irrémédiablement mauvais et qu’il devait être détruit sur-le-champ.
«Nous n’aurons jamais autant entendu parler des mauvais traitements infligés aux prisonniers de Richmond», écrivait le New York Times, «mais les Sudistes ont toujours été égaux à eux-mêmes. L’esclavagiste est né pour la tyrannie et élevé pour la cruauté» (Hesseltine, 1964, p. l95). Un autre article déclarait que «seul l’esclavage pouvait endurcir un homme à ce point», ignorant le fait que la possession d’esclaves était encore légale dans certains États de l’Union, et que Washington et Jefferson avaient été esclavagistes!
Le New York Times est allé plus loin en dénigrant même le caractère personnel du Sudiste: «Le caractère sudiste est infiniment vantard, vaniteux, plein d’audace, sans endurance, traître, rusé, timide et revanchard».
La campagne de propagande ne s’éteignait pas du tout avec la fin de la guerre, au contraire. En fait, les récits sur les conditions de vie dans les camps du Sud se faisaient encore plus outranciers. En 1869, la Chambre des représentants publiait un nouveau document sur le traitement des prisonniers par les autorités rebelles. Le rapport n° 85 de la Chambre des représentants amplifiait les exagérations contenues dans le rapport de la Chambre des représentants de 1864 et dans le compte-rendu de la commission sanitaire.
Le nouveau rapport stipulait que :
L’opinion du comité, soigneusement pesée et réfléchie, est que les négligences et le refus des autorités rebelles de fournir des rations suffisantes étaient le résultat d’un système et d’un plan prémédités des autorités confédérées pour réduire nos rangs par la famine, et qu’ils n’ont pas été contraints à ces privations par accident ou par nécessité. (Rhodes, pp 503-504)
Les anciens prisonniers n’ont eu de cesse de publier des témoignages personnels propres à enflammer les esprits d’un public avide de sensationnel. Beaucoup de ceux qui publièrent leurs «mémoires» les réécrivirent en puisant copieusement dans les rapports «documentaires» officiels du gouvernement fédéral. Mais de nombreux lecteurs sont restés sceptiques, défavorablement impressionnés par le volume invraisemblable de la littérature sur les camps. Entre 1862 et 1866, 54 livres et articles décrivant les expériences des prisonniers dans le Sud ont été publiés. Vingt-huit d’entre eux sont parus en 1865 et 1866. Vingt autres paraissent entre 1867 et 1870. (Hesseltine, 1964, pp. 247, 252)
L’auteur de Prisonnier de guerre, un exemple typique du genre, écrit: «Je diffuse ce livre en espérant que l’influence qu’il pourra exercer contribuera à ce que les dirigeants coupables de trahison soient punis comme ils le méritent pour leurs crimes monstrueux contre l’humanité».
Les polémiqueurs de l’après-guerre se sont rapidement heurtés à un problème de chiffres quand ils ont voulu démontrer que le Sud avait tué des prisonniers dans le cadre d’une politique d’extermination délibérée. Le nombre de prisonniers de l’Union décédés n’était pas suffisamment important pour étayer cette affirmation. Les auteurs du mythe ont donc soit ignoré complètement les chiffres, soit inventé de nouveaux chiffres. Un auteur a par exemple affirmé qu’il ne restait aucune trace des nombreux prisonniers qui «turent poursuivis à travers les marais et les forêts par des limiers et des démons et dont les corps mutilés furent abandonnés aux charognards».
Les politiciens du Parti Républicain ont agité la «chemise ensanglantée» des histoires d’atrocités sudistes pour se maintenir au pouvoir. Mais l’effet le plus désolant de la propagande d’après-guerre aura été d’exacerber les horreurs de la Reconstruction dans le Sud occupé.
Le point culminant de cette campagne fut le procès grotesque et l’exécution d’Henry Wirz, le commandant d’Andersonville. Hormis l’assassinat du président Lincoln, l’histoire d’Andersonville a été l’arme de propagande la plus efficace dans l’arsenal de ceux qui voulaient traiter durement le Sud vaincu.
Pendant la guerre, la presse du Nord qualifiait Wirz de «monstre» et de «bête humaine», le dépeignant en sadique vicieux. Il n’en était rien, mais comme il parlait avec un accent étranger et qu’il était l’officier avec qui les prisonniers avaient le plus de contacts, c’est lui qui a été le plus blâmé pour les conditions de vie dans le camp.
Henry Wirz est né à Zurich, en Suisse, et a émigré aux États-Unis en 1849. Il travaille comme tisserand dans le Massachusetts et comme assistant d’un médecin dans le Kentucky avant de s’installer dans une plantation en Louisiane. Il s’est engagé dans l’armée confédérée lorsque la guerre a éclaté et a été gravement blessé lors de la bataille de Seven Pines. Après s’être rétabli, il est promu capitaine et nommé commandant d’Andersonville en mars 1864.
De folles rumeurs au sujet de Wirz circulaient à l’intérieur de l’enceinte. Ce qu’un prisonnier suspectait était raconté au suivant comme un fait. Dans l’imagination des détenus, Wirz devint l’auteur inhumain de toutes leurs souffrances.
Après son arrestation, Wirz était emmené à Washington où une commission militaire l’accusait d’avoir «conspiré» avec le président confédéré Davis, le général Robert E. Lee et d’autres pour avoir «affecté la santé au point de détruire la vie d’un grand nombre de prisonniers fédéraux». Tout cela aurait été fait «dans le cadre d’un dessein diabolique». La commission a en outre spécifiquement accusé Wirz de plusieurs actes de meurtre «en violation des lois et coutumes de la guerre».
Si Wirz était parfois bourru et mal luné, le procureur n’a pas pu prouver qu’il avait assassiné quiconque. Ni le juge-avocat qui a rédigé les treize cahiers des charges, ni aucun des témoins cités par le gouvernement n’ont été en mesure de nommer l’une ou l’autre des victimes présumées. Pour étayer l’accusation de conspiration, l’accusation a cité un ordre du général confédéré Winder qui commandait à une batterie d’artillerie d’ouvrir le feu sur le camp d’Andersonville. Cet ordre était un faux. Les autres «documents» cités pour prouver l’existence d’une conspiration étaient tout aussi infondés.
La presse du Nord ne trouvait pas de mots assez durs pour qualifier l’accusé : «le malade d’Andersonville», «le misérable», «l’infâme», «le barbare», «le monstre le plus sanguinaire de tous les temps».
En réalité, Wirz n’était qu’une malheureuse victime des circonstances, la cible d’une hystérie débridée. Les officiers confédérés envoyés pour inspecter le camp pendant la guerre étaient unanimes à louer son énergie et sa diligence. Son général commandant louait ses performances. Un inspecteur de Richmond déclara qu’il était ferme et rigide dans la discipline mais gentil avec les prisonniers. Wirz tenta à plusieurs reprises de fournir des abris, de la nourriture et des fournitures médicales, mais la bureaucratie, l’opposition locale et la détérioration rapide de l’économie du Sud aux abois contrarièrent ses efforts.
Tenu dans le climat de vengeance qui suivait l’assassinat de Lincoln, le procès a été utilisé pour dramatiser la campagne électorale d’après-guerre en l’amenant à un paroxysme d’hystérie. Le New York Times a commenté l’affaire Wirz dans une prose émotionnelle vindicative qui aurait presque pu être écrite à la fin des années 1940:
Une fois qu’il en aura terminé avec les assassins du président, le gouvernement s’attaquera aux ruffians qui ont torturé à mort des milliers de prisonniers de l’Union. Les lois de la guerre civilisée doivent être respectées et une expiation doit être exigée pour le crime le plus infernal du siècle. En ce qui concerne le capitaine Werz (sic), par exemple, il peut être démontré qu’il s’est lancé dans le meurtre de masse sur instruction expresse d’une autorité supérieure. Il est évident que ces mauvais traitements ont dû découler d’un dessein général de la part du gouvernement rebelle. Les personnes désignées pour s’occuper des prisons militaires de la «Confédération» étaient des hommes dont les dispositions naturelles les rendaient particulièrement aptes à exercer un métier brutal et vil.
Le journal phare de la presse américaine exigeait une punition complète pour «tout fonctionnaire rebelle qui aurait été impliqué, directement ou indirectement, dans la torture et le meurtre de nos prisonniers. De tous les crimes des rebelles, c’était le plus diabolique, le moins susceptible d’être atténué ou pardonné». (Hesseltine, 1964, pp. 237-38)
Un fonctionnaire fédéral envoyé à Andersonville recommandait que le camp soit pris en charge par le gouvernement et conservé comme un rappel permanent de l’horreur confédérée (un peu comme à Dachau !). (Le New York Times abondait en ce sens : «La chose la plus nécessaire depuis le matage de la rébellion est de faire connaître au grand jour son horreur (d’Andersonville)». Un autre grand journal de l’Union déclarait que le Sud devait être amené à faire face aux horreurs d’Andersonville. Il conseillait au gouvernement fédéral de publier les documents les plus compromettants des archives confédérées et déclarait que «les hommes justes doivent s’efforcer de maintenir vivante l’infamie de la rébellion». (Pour renforcer la justification et l’effet de propagande, le gouvernement fédéral publia un long document, The Trial of Henry Wirz, qui conférait un vernis de légitimité au procès et à l’exécution).
Les commissaires ont fait preuve d’une partialité flagrante dans la conduite du procès. Les avocats de la défense de Wirz, désespérés d’obtenir un traitement équitable pour leur client démissionnaient en signe de protestation. Ils ne sont revenus représenter Wirz qu’après que l’accusé, sans amis, les ait suppliés de l’aider en désespoir de cause. Malgré l’absence flagrante de preuves, la commission déclarait Wirz coupable et le condamnait à mort. Il sera pendu à Washington le 10 novembre 1865.
Dans le sillage du procès retentissant, d’anciens prisonniers fondaient l’Andersonville Survivors Association et la National Ex-Prisoners of War Association afin d’obtenir du Congrès qu’il adopte une législation sur les pensions d’invalidité. Les «Survivants» soutenaient que le simple fait d’avoir passé l’été 1864 à Andersonville un motif suffisant devant permettre la reconnaissance d’une invalidité permanente.
Par de nombreux aspects, le procès Wirz présente des similitudes frappantes avec les procès pour «crimes de guerre» qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. Dans les deux cas on retrouve une intense campagne de propagande auxquelles le gouvernement a contribué en apportant une «documentation officielle» mais fallacieuse. À chaque fois, on s’est exclusivement intéressé aux «crimes» de la puissance vaincue. Toujours on a utilisé les procès pour mettre en accusation le système socio-politique du camp perdant. Les deux procès ont fait appel à des témoins qui étaient partie prenante et avaient des raisons personnelles de témoigner. Les deux procès ont fait état d’une «conspiration» élaborée dans un but meurtrier. Les deux procès ont utilisé des «documents» bidons pour étayer leur argumentation.
Il a fallu plusieurs décennies pour que la vindicte intense cède la place à un minimum de réconciliation. Des récits historiques fiables ont lentement remplacé les diatribes partisanes. Les historiens révisionnistes sont finalement parvenus à discréditer les nombreux «documents», «mémoires» et «récits véridiques» trafiqués concernant les camps de prisonniers de la guerre de Sécession.
Il ne fait aucun doute que les prisonniers des deux camps ont souffert et sont morts, souvent dans des conditions regrettables. Mais aucun des deux camps n’a délibérément tué de prisonniers. Au front, les prisonniers des deux camps ont toujours été bien traités. C’est à l’arrière des lignes que la mauvaise gestion, en particulier dans le Sud, a entraîné tant de morts et de souffrances.
Les mêmes facteurs qui ont contribué à la défaite militaire ont également rendu pratiquement impossible pour la Confédération la mise en place d’un système efficace de gestion des prisonniers de guerre. La production industrielle du Sud était insuffisante pour assurer le soutien logistique des forces armées, de sorte que les camps de prisonniers étaient extrêmement rudimentaires en termes de construction et d’entretien. Pour diverses raisons, les dirigeants militaires n’ont jamais été en mesure d’habiller et de nourrir correctement les soldats confédérés, encore moins les prisonniers de guerre. Enfin, le système de transport ferroviaire et fluvial sudiste fut tellement paralysé durant les deux dernières années de la guerre que l’acheminement du ravitaillement, en particulier vers des points périphériques tels qu’Andersonville, était souvent devenu impossible.
Il est impossible d’obtenir des chiffres exacts sur le nombre de prisonniers détenus par les deux camps et de comparer précisément les taux de mortalité de chaque côté. Après la guerre, les partisans confédérés et fédéraux ont chacun cité des statistiques pour prouver que morts et souffrances avaient été plus importantes dans les camps ennemis. L’ancien président confédéré Davis et l’ancien vice-président Alexander Stephens ont fait part d’estimations selon lesquelles le taux de mortalité dans les prisons du Nord était de douze pour cent, contre moins de neuf pour cent pour le Sud.
La meilleure estimation disponible, et la plus fiable, semble être celle fournie par l’adjudant général F.C. Ainsworth en 1903 à l’éminent historien James F. Rhodes. Le chef du bureau des archives et des pensions déclarait que les meilleures informations disponibles dans les archives de l’Union et des Confédérés montraient que le Nord avait détenu 214 865 soldats sudistes, dont 25 976 étaient morts en captivité, tandis que le Sud avait détenu 193 743 hommes de l’Union, dont 30 218 sont morts en captivité. Rhodes en conclut qu’un peu plus de 12 % des prisonniers détenus par l’Union ont péri, tandis que 15,5 % sont morts dans les camps du Sud. Mais Rhodes estimait que, compte tenu de la supériorité des hôpitaux, des médicaments et de l’abondance de la nourriture, la mortalité dans les prisons du Nord aurait dû être plus faible.
«Tout bien considéré, concluait Rhodes, les statistiques ne montrent aucune raison pour laquelle le Nord devrait faire des reproches au Sud. Si nous ajoutons d’un côté le refus d’échanger les prisonniers et les ressources plus importantes, et de l’autre la débâcle de la Confédération, la balance ne serait pas loin d’être équilibrée. Il est certain qu’il n’existait aucune intention délibérée, ni à Richmond ni à Washington, d’infliger aux captifs des souffrances plus grandes que celles qui accompagnaient inévitablement leur détention». (Rhodes, p. 508)
Dans la guerre civile, comme dans la Seconde Guerre mondiale, le camp victorieux a déformé à l’extrême les conditions réelles dans les camps de l’ennemi afin de présenter le vaincu comme intrinsèquement mauvais et justifier une politique d’occupation dure et vindicative. Toutes les souffrances et les morts dans les camps du perdant ont été attribuées à une politique délibérée de la part d’une puissance intrinsèquement perverse. Les puissances victorieuses ont exigé une «reddition inconditionnelle» et ont arrêté les chefs de gouvernement vaincus en les qualifiant de «criminels».
Après les deux guerres, les historiens révisionnistes qui se sont efforcés de rétablir la vérité ont été dénoncés pour avoir tenté de «réhabiliter» un ordre social discrédité et détestable. Le système socio-politique du perdant de chaque guerre a été jugé non seulement différent, mais aussi moralement inacceptable. Le vaincu a fait l’objet d’une sorte de surveillance éthique destinée à vérifier sa volonté d’expier ses fautes passées et d’adopter le système social des vainqueurs.
Mark Weber
Traduction : Francis Goumain
Source : The Civil War Concentration Camps (ihr.org)
Bibliographie
- Baker, Raymond F., Andersonville: The Story of a Civil War prison camp, Washington, DC, 1972.
- Futch, Ovid L., History of Andersonville Prison, University of Florida Press, 1968.
- Hesseltine, William B., Civil War Prisons: A Study in War Psychology, New York, 1964.
- Hesseltine, William B., ed., Civil War Prisons, Kent State UniversityPress, 1972.
- Miller, Merle, Plain Speaking (An Oral Biography of Harry S. Truman) New York. 1974.
- Rhodes, James F., History of the United States, (Vol. V. 1864-1865, Ch. XXIX),1904, and Port Washington, NY, 1967.
- From The Journal of Historical Review, Summer 1981 (Vol. 2, No. 2), page 137.
Annexe
Union and Confederate Civil War prison camps:
1. Bell Isle—Richmond, Virginia
2. Cahaba Prison—Cahaba, Alabama
3. Camp Chase—Columbus, Ohio
4. Camp Douglas—Chicago, Illinois
5. Camp Florence—Florence, South Carolina
6. Camp Lawton—Millen, Georgia
7. Camp Morton—Indianapolis, Indiana
8. Camp Sumter—Andersonville, Georgia
9. Castle Pickney—Charleston, S.C.
10. Elmira Prison—Elmira, New York
11. Johnson’s Island—Sandusky, Ohio
12. Libby Prison—Richmond, Virginia
13. Old Capitol Prison—Washington, D.C.
14. Point Lookout—Point Lookout, MD
15. Rock Island—Rock Island, Illinois
16. Salisbury—Salisbury, North Carolina
Les archives de Nuremberg sont maintenant numérisées et disponibles en français sur le site de l’université de Caen. On retrouve effectivement tous les thèmes abordés dans l’article:
Plan général d’extermination des prisonniers russes, exposition volontaire au froid, à la famine, aux maladies, travaux forcés, exécution des réfractaires, au hasard, deux liens vers deux demi-journées d’audience.
https://mrsh.unicaen.fr/nuremberg/consult/Nuremberg/07/58e.xml/pm13021946.html
https://mrsh.unicaen.fr/nuremberg/consult/Nuremberg/07/62e.xml/pm19021946.html
Très troublant.
L’article me fait penser à la BD Tunique Bleue: « la prison de Robertsonville ».
Ce qui me suggère une remarque:
Il est permis de faire des BD hilarantes sur les camps de concentration de la Guerre Civile américaine.
Je répète:
Il est permis de faire des BD hilarantes sur les camps de concentration de la Guerre Civile américaine.
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