« Quand la politique entre dans le prétoire, la justice en sort ». L’histoire de la justice est émaillée de procès politiques. La justice y a rarement gagné ; la morale sociale y a perdu et les magistrats impliqués y ont révélé leur complaisance pour les puissants du jour. Avec son « Vae Victis ! » Brennus, lui, ne prétendait pas à une supériorité morale par rapport aux Romains vaincus. Ce barbare l’emportait par-là du point de vue moral, sur des juges soi-disant civilisés qui, pour servir les détenteurs du pouvoir, acceptent de desservir leur propre idéal.
Le sinistre stalinien Erich Honeker a échappé à la justice ouest-allemande. On s’en félicitera ici, même si l’on est farouchement anticommuniste. La justice doit, en effet, se contenter de sa part de souveraineté sans empiéter sur le domaine du politique. Elle ne peut prétendre à l’indépendance, laquelle suppose un effort permanent de neutralité, que si elle se garde d’intervenir dans le discours politique ou social…
Aujourd’hui, la peur de l’anathème a pris de graves proportions. Un totalitarisme, particulièrement insidieux, prend le contrôle des esprits. Il procède sans botte ni casque. L’effet de sidération est général.
Pour prendre subitement conscience de ce totalitarisme, il faut une expérience personnelle. On a risqué une réflexion, une phrase, un rien : on se retrouve devant un tribunal, on est condamné, la presse vous dénonce et c’en est fait de vous. Même si la sanction n’est pas forcément là, on sent qu’à tout moment elle peut tomber. Une peur diffuse se crée. Les idées déshonnêtes* sont peu à peu proscrites.
Eric Delcroix
(in La police de la pensée contre le révisionnisme, Du jugement de Nuremberg à la loi Gayssot, 1994)
* « Déshonnêtes » : c’est à dessein que j’empreinte ce mot au vocabulaire de la pudibonderie du XIXe siècle ; le tabou s’est transféré du sexe vers la race, puis de la race, vers un ensemble de plus en plus large, d’idées, de convictions ou de comportements aujourd’hui tenus pour outrageants et blasphématoires
Chez Vilfredo Pareto, on trouve ce très étonnant passage dans son Traité de sociologie générale, sur le jeu très corrosif des élites renardes face au peuple lion soucieux, lui, de préserver le socle permanent de la loi naturelle, ce qu’on appellerait aujourd’hui la trahison des élites, le passage est d’autant plus parlant si on remplace «renards» par «rats» et «lions» par «nationalistes blancs»:
«À l’égard des gouvernements, nous avons à considérer principalement cinq catégories de faits.
1° Un petit nombre de citoyens peuvent, pourvu qu’ils soient violents, imposer leur volonté aux gouvernants qui ne sont pas disposés à repousser cette violence par une violence pareille. L’effet voulu par ces citoyens se produit très facilement si, en n’usant pas de la force, les gouvernants sont mus principalement par des sentiments humanitaires. Si, au contraire, ils n’usent pas de la force parce qu’ils estiment plus judicieux d’employer d’autres moyens, on a souvent l’effet suivant.
2° Pour empêcher la violence ou pour y résister, la classe gouvernante recourt à la ruse, à la fraude, à la corruption et, pour le dire en un mot, le gouvernement, de lion se fait renard. La classe gouvernante s’incline devant la menace de violence, mais ne cède qu’en apparence, et s’efforce de tourner l’obstacle qu’elle ne peut surmonter ouvertement. À la longue, une telle façon d’agir produit un effet puissant sur le choix de la classe gouvernante, dont seuls les renards sont appelés à faire partie, tandis que les lions sont repoussés (§2227). Celui qui connaît le mieux l’art d’affaiblir ses adversaires par la corruption, de reprendre par la fraude et la tromperie ce qu’il paraissait avoir cédé à la force, celui-là est le meilleur parmi les gouvernants. Celui qui a des velléités de résistance et ne sait pas plier l’échine en temps et lieu est très mauvais parmi les gouvernants, et ne peut y demeurer que s’il compense ce défaut par d’autres qualités éminentes.
3° De cette façon, les résidus de l’instinct des combinaisons (classe I) se fortifient dans la classe gouvernante; ceux de la persistance des agrégats (classe II) s’affaiblissent, car les premiers sont précisément utiles dans l’art des expédients, pour découvrir d’ingénieuses combinaisons qu’on substituera à la résistance ouverte ; tandis que les résidus de la IIe classe inclineraient à cette résistance ouverte, et un fort sentiment de persistance des agrégats empêche la souplesse.
4° Les desseins de la classe gouvernante ne portent pas sur un temps trop lointain. La prédominance des instincts des combinaisons, l’affaiblissement de la persistance des agrégats, font que la classe gouvernante se contente davantage du présent et se soucie moins de l’avenir. L’individu prévaut, et de beaucoup, sur la famille ; le citoyen, sur la collectivité et sur la nation. Les intérêts présents ou d’un avenir prochain, ainsi que les intérêts matériels, prévalent sur les intérêts d’un avenir lointain et sur les intérêts idéaux des collectivités et de la patrie. On s’efforce de jouir du présent sans trop se soucier de l’avenir»]