« Les Maçons en sommeil pourraient se réveiller. En les éliminant, nous sommes sûrs qu’ils dormiront pour toujours » (Duce Benito Mussolini, 7 octobre 1930)
Bernard Faÿ est né le 3 avril 1893 à Paris.
Cinquième d’une famille de sept enfants, à l’âge de sept ans il est atteint de la poliomyélite et doit rester à la maison jusqu’à ses quatorze ans, instruit par un précepteur M. Paysant, aux côtés de sa mère et ses frères. Il passe son baccalauréat au lycée Condorcet, puis une licence de lettres classiques à la Sorbonne.
Réformé définitif en raison de son handicap, Bernard Faÿ s’engage malgré tout comme volontaire dans le service des ambulances militaires pendant la Première Guerre mondiale. Il est affecté à l’administration parisienne de la Croix-Rouge, puis à l’hôpital belge de Calais, enfin sur le front de Verdun pour seconder un chirurgien expérimenté, le Dr. Bouvier. Il reçoit la Croix de Guerre en 1917, ainsi que la Croix Léopold II de Belgique.
Au cours de ses études, il devient un spécialiste du XVIIIe siècle, particulièrement des rapports entre la France et les États-Unis, ce qui l’amène à bien connaître la littérature américaine. Il soutient en 1924 une thèse de doctorat ès lettres sur L’Esprit révolutionnaire en France et aux États-Unis à la fin du XVIIIe siècle.
Il est nommé chargé de cours à la faculté des Lettres de Clermont-Ferrand avant de devenir professeur dans plusieurs universités françaises. Il sera aussi professeur aux universités de Columbia puis de l’Iowa et effectue plus de vingt séjours aux États-Unis durant l’entre-deux-guerres. Sa brillante carrière universitaire culmine avec son élection en 1932 comme professeur de civilisation américaine au Collège de France, à moins de 40 ans. Ses cours rencontrent un réel succès, il est l’un des plus brillants universitaires de son époque.
En parallèle il s’est consacré également à l’analyse profonde, structurée, de la science maçonne. Il en devient même un spécialiste, au point d’être cité avec déférence par des historiens initiés. Catholique fervent et d’opinion politique royaliste, Bernard Faÿ appartient au courant contre-révolutionnaire et se reconnaît dans le projet de la Révolution nationale et de l’État français du maréchal Pétain.
Son intelligence et son érudition lui permettent d’être nommé administrateur général de la Bibliothèque nationale le 6 août 1940 à la suite de la destitution de Julien Cain, juif qui a déserté la France le 19 juin 1940 à bord du paquebot Massilia. Certains officiers allemands cultivés envisageant d’emblée d’emporter à Berlin tous les trésors de la Bibliothèque Nationale, il fallut jouer adroitement pour les en dissuader. Pendant toute la guerre Bernard Faÿ défend pied à pied le patrimoine qui lui a été confié. Pas un livre, pas une médaille, pas une estampe, pas un manuscrit n’a disparu – contrairement à beaucoup d’œuvres du Louvre. Il a réussi à préserver non seulement l’intégralité du contenu de la Bibliothèque Nationale et de la Mazarine, mais également, cachées à Paris ou en province, de nombreuses bibliothèques publiques ou privées, celles du Sénat, de la Marine, du Ministère de la Guerre, des Montmorency-Luxembourg, Rothschild, Fürstenberg, Foch, Poincaré, les bibliothèques de la Société de Géographie, de Chartres, de Lorient.
Mais Bernard Faÿ veut aussi donner à la Bibliothèque nationale une véritable place au sein du nouveau régime. Il remet pour cela au Maréchal Pétain, en 1943, un rapport où est défini le rôle de la Bibliothèque nationale dans l’effort de redressement national. Dès le début de l’année 1941, il avait créé une « Bibliothèque d’histoire de la France contemporaine » (BHFC) au sein de la BN confiant la direction à Adrien Dansette, le chargeant de l’étude des documents confisqués dans les loges maçonniques interdites.
Sa connaissance de la maçonnerie, des sociétés secrètes ou discrètes, des organisations et du milieu israélo-talmudique, semble aux yeux des Allemands suffisamment solide pour que son nom figure dans la liste de personnes proposée le 1er mars 1941 à Otto Abetz pour diriger l’Office central juif.
Bernard Faÿ a joué un rôle moteur dans la politique de l’État français qui lutte contre les lobbies et coteries occultes (maçonnerie, occultisme, rosicrucisme, kabbalisme…), constituant de véritables hiérarchies secrètes et parallèles au sein de l’État. Il va en exposer l’influence négative sur le pays, causant son abaissement tant sur le plan intérieur qu’extérieur.
Après les mesures d’interdiction du Grand Orient De France et des autres sociétés secrètes, il est nommé chef du Service des sociétés secrètes (SSS), chargé de recueillir, de classer et d’étudier toutes les archives saisies dans les loges. 64 000 francs-maçons sont découverts par « l’équipe des sociétés secrètes » ; 18 000 noms sont publiés à partir d’août 1941 ; 3 000 fonctionnaires maçons au cœur de l’État sont démis de leur emploi.
Pour lutter contre ce « parasite monstrueux », Bernard Faÿ publie pendant quatre ans une revue, Les Documents maçonniques, avec comme rédacteur en chef le catholique traditionaliste Robert Vallery-Radot, qui démontre la désastreuse influence de la franc-maçonnerie sur la France ; il fait tourner un film, Forces occultes ; il organise des conférences et une grande « Exposition (anti)maçonnique » au Petit Palais en octobre-novembre 1941 ; il crée à Paris un Musée permanent des sociétés secrètes. Bernard Faÿ sera décoré de l’ordre de la Francisque.
Il est arrêté le 19 août 1944 dans son bureau, à la Bibliothèque nationale, sans mandat administratif et mis en prison. A Fresnes, à la Santé, puis à Drancy, il subit les interrogatoires d’un inspecteur de police, M. Le Poittevin, dont les insinuations sur sa prétendue collaboration avec la Gestapo, son prétendu rôle dans la déportation de francs-maçons – bien qu’il n’y ait pas eu de déportations pour le motif d’appartenance à la franc-maçonnerie – et son prétendu antisémitisme, visent à le faire condamner à mort. Il répond point par point, mais son sort est scellé d‘avance.
Lors du procès des sociétés secrètes devant les tribunaux d’exception, en décembre 1946, son avocat Maître Chresteil tentera en vain de présenter de nombreux témoignages en sa faveur, et de démontrer que les accusations relèvent de la vengeance passionnelle sans s’appuyer sur des faits concrets. Le tribunal le condamne aux travaux forcés à perpétuité, à la confiscation de ses biens et à « l’indignité nationale ».
Bernard Faÿ est incarcéré pour travaux forcés à perpétuité au bagne de Saint Martin de Ré, puis au pénitencier de Fontevraud. Gertrude Stein et Alice B. Toklas interviennent vainement en sa faveur, convaincues qu’il leur a sauvé la vie pendant l’Occupation. Après la mort de Gertrude Stein, en juillet 1946, Alice B. Toklas continuera d’intercéder pour obtenir la grâce de Bernard Faÿ.
Au bout de sept ans de prison, désespérant de recouvrer sa liberté par la voie légale et même de sauver sa vie car il est gravement malade, poliomyélitique, il a contracté la maladie du bronze. Ses reins sont atteints gravement, et c’est à la faveur d’un séjour de soins à l’hôpital d’Angers qu’il réussit à s’évader. Il se réfugie en Suisse, à Fribourg, à la Villa Saint-Jean. Il enseigne au Collège Saint-Michel.
Bernard Faÿ est finalement gracié en 1959 par le président Coty (signée du Garde des Sceaux d’alors François Mitterrand ). Il obtient également la restitution de ce qui reste de ses biens – dont beaucoup ont été vendus par l’administration des Domaines – et l’annulation de « l’indignité nationale ». De retour chez lui, il poursuit son travail d’historien.
Bernard Faÿ décède chez lui à Tours, le décembre 1978. Une messe de requiem est célébrée à Paris, en l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet, par Mgr Ducaud Bourget, en présence de Mgr Lefebvre.
Une association maintient le souvenir de Bernard Faÿ et de son œuvre : l’Association littéraire, loi de 1901, créée en 2011, « Les Amis de Bernard Faÿ Historien ».
Bibliographie :
Histoire et histoire littéraire
- 1925 : Bibliographie critique des ouvrages français relatifs aux États-Unis (1770-1800), Paris, Librairie Ancienne Edouard Champion
- 1925 : L’esprit révolutionnaire en France et aux États-Unis à la fin du XVIIIe s. , Paris, Librairie Ancienne Edouard Champion, prix Thérouanne de l’Académie française
- 1925 : Panorama de la littérature contemporaine, Paris, Editions du Sagittaire
- 1926 : L’Empire américain et sa démocratie en 1926, Paris, article dans Le Correspondant, tome 267, n° 1526.
- 1927 : Faites vos jeux, Paris, Grasset.
- 1928 : Vue cavalière de la littérature américaine contemporaine, article dans la Revue hebdomadaire, 12 et 19 mai 1928.
- 1929 : Benjamin Franklin, bourgeois d’Amérique, Paris, Calmann-Levy, 315 pages, prix Marcelin Guérin de l’Académie française en 1932.
- 1931 : Benjamin Franklin, citoyen du monde, Paris, Calmann-Levy, 288 pages.
- 1930 : Essai sur la poésie, in : Revue européenne, août-septembre 1930.
- 1932 : George Washington, gentilhomme, Paris, Bernard Grasset, 300 pages.
- 1933 : Roosevelt et son Amérique, Paris, Librairie Plon, 287 pages.
- 1935 : La Franc-maçonnerie et la révolution intellectuelle du XVIIIe, Paris, Edition de Cluny, 286 pages.
- 1937 : Les forces de l’Espagne : voyage à Salamanque, Paris, S.G.I.E.
- 1939 : Civilisation américaine, Paris, Editions du Sagittaire, 299 pages.
- 1939 : L’Homme, mesure de l’histoire. La recherche du temps, Paris, Labergerie
- 1943 : L’Agonie de l’Empereur (récit historique), Paris, Éditions Fernand Sorlot, 91 pages.
- 1952 : De la prison de ce monde, journal, prières et pensées (1944-1952), Éditions du Sapin Vert, 187 pages, rééd. Paris, Plon, 1974.
- 1954 : Pensées, Maximes et Apophtegmes choisis par M. Elphège du Croquet de l’Esq, Paris, Éditions du Conquistador, 92 pages
- 1959 : La grande révolution, Paris, Librairie Académique Perrin, 476 pages.
- 1961 : L’École de l’imprécation ou Les Prophètes catholiques du dernier siècle (1850-1950), Vitte
- 1961 : Louis XVI ou la fin d’un monde, Paris, Librairie Académique Perrin, 378 pages.
- 1962 : L’aventure coloniale, Paris, Librairie Académique Perrin, 602 pages.
- 1965 : Naissance d’un monstre, l’opinion publique, Paris, Librairie Académique Perrin, 443 pages.
- 1966 : Les Précieux, Paris, Librairie Académique Perrin, 307 pages.
- 1969 : La Guerre des trois fous, Hitler, Staline, Roosevelt, Paris, Librairie Académique Perrin, 443 pages.
- 1970 : L’Église de Judas ?, Paris, Plon.
- 1970 : Beaumarchais ou les Fredaines de Figaro, Librairie Académique Perrin, 415 pages.
- 1974 : Jean-Jacques Rousseau ou le Rêve de la vie, Paris, Librairie Académique Perrin, 395 pages.
- 1978 : Rivarol et la Révolution, Paris, Librairie Académique Perrin, 290 pages.
Préfaces
- Le duc de Montmorency-Luxembourg, premier baron chrétien de France, fondateur du Grand Orient : sa vie et ses archives de Paul Filleul
Entrevue
- C’est très probablement lui qui organise le long interview de Henry-Haye, ambassadeur de Vichy auprès des États-Unis, édité chez Plon en 1972, sous le titre La grande éclipse franco-américaine.
Sous Pseudonyme
Bernard Faÿ a utilisé le nom de plume d’Elphège du Croquet de l’Esq pour signer un ouvrage :
- Pensées, maximes et apophtegmes choisis des moralistes français et étrangers à l’usage de la jeunesse studieuse (1954) paru chez Du conquistador en 1957. La préface est signée de son vrai nom.
Coïncidence, iHR propose cette vidéo qui, entre autre, évoque l’intervention de Gertrude Stein en faveur de Bernard Faÿ
https://archive.org/details/youtube-e0gC5OaJWqw
Gertrude Stein, Juive américaine établie à Paris, comme on sait, avait aussi proposé avant la guerre que soit décerné le prix Nobel de la paix à Hitler.
Merci pour le lien. Je suis rarement d’accord avec vos points de vue mais là…Bonne année 2024 ainsi qu’à toute la direction.
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