L’activité économique d’une nation est d’ordinaire rapportée à son aspect financier. Toutefois, même si les problèmes financiers dominent plus que jamais l’actualité économique par l’emprise démesurée que le pouvoir financier a acquis depuis quelques décennies, cette manière d’envisager les problèmes économiques relève d’une approche déformée du réel : l’économie constitue en quelque sorte l’intendance d’une société ; autrement dit, l’économie est d’ordre physique et se définit comme la production de biens assurant la vie matérielle des hommes et de la société qu’ils constituent.
Quantum d’énergie et signes monétaires
Cette production s’analyse physiquement en termes d’énergie, matérielle et mentale, et la puissance d’une économie est fonction de la capacité d’une population à produire des biens matériels utiles à la vie de ses membres et à sa sécurité. Cela revient à concevoir la puissance économique d’une société comme l’expression de la capacité de ses membres à produire avec la meilleure efficience des biens lui assurant les moyens de son existence matérielle et de sa puissance.
L’activité économique contribue ainsi, dans le domaine matériel, au bien commun d’une société. Sous cet aspect, la puissance économique d’un pays ne peut se réduire à des termes financiers, la monnaie n’étant que la traduction, sous forme de signes monétaires, des richesses produites en son sein. La monnaie est le flux sanguin qui active les organes de l’économie, mais sans ces organes, ce sang monétaire n’est rien.
Autrement dit, avant de raisonner en termes monétaires, il faut raisonner en termes physiques. Si la richesse financière est un élément de puissance par les réseaux d’influence qu’elle procure, par le pouvoir d’achat qu’elle crée, elle ne peut s’établir durablement en l’absence de base économique réelle fondée sur la production de biens matériels, physiques, marchands ou non. La question qui doit être posée, lorsqu’il s’agit de développer la capacité productive d’un pays, n’est pas de savoir si l’on dispose préalablement d’assez d’argent, de signes monétaires en réserve, mais si l’on dispose des facteurs de production nécessaires.
Ces facteurs de production sont : l’existence de matières premières ; la présence d’une main-d’œuvre disponible, mais surtout, d’une main-d’œuvre suffisamment qualifiée pour lancer l’activité productive que l’on souhaite mettre en place et développer, car sans savoir-faire, il est impossible de réaliser quelque activité créatrice.
Les signes monétaires doivent s’adapter aux réalités physiques et non l’inverse. Aussi longtemps que l’on dispose de réserves de main d’œuvre inemployée, de ressources physiques disponibles, il est possible de créer les signes monétaires permettant de transformer en acte le potentiel productif en puissance ainsi constitué. L’argument selon lequel un gouvernement refuse de lancer telle ou telle production, tel ou tel investissement, pourtant reconnu comme utile au bien commun, alors que la main d’œuvre et les ressources physiques sont disponibles et inemployées, sous prétexte qu’il manque de moyens financiers, n’est pas recevable.
Les signes monétaires donnant naissance aux flux monétaires et financiers qui irriguent l’économie, sont comme les globules rouges du sang qui irrigue tout organisme vivant, apportant à tel ou tel muscle ou organe le flux sanguin nécessaire dont il a besoin selon l’effort qu’il fournit et veillant à ce que le débit des flux sortant du cœur soit équilibré globalement avec le débit du flux de retour : c’est tout l’art du contrôle de la création et de la régulation monétaires par la banque centrale et le pouvoir d’État afin d’éviter les désordres monétaires dont l’inflation est le premier danger majeur1.
Il importe donc pour l’État concerné de s’assurer la maîtrise de la création monétaire et du circuit monétaire irriguant l’économie afin d’empêcher que cette création et ce circuit soient accaparés par des intérêts privés qui ne concordent pas nécessairement avec l’intérêt national, ce qui est le cas lorsque la création monétaire est entre les mains de banquiers dont les affaires privées sont déterminées en fonction d’intérêts particuliers qui ne concordent pas avec ceux des peuples dont elles sont les créancières, notamment lorsque ces banques ont des activités transnationales, comme nous l’éprouvons avec la finance internationale dont le centre actif se trouve sur l’axe City-New York.
Orientation des forces productives et savoir-faire
Néanmoins, puisque nous raisonnons en termes physiques, la quantité d’énergie disponible au sein d’une nation est nécessairement limitée et il importe de l’orienter et de la développer de telle manière que l’activité déployée le soit avec le rendement le plus élevé possible.
C’est alors qu’intervient l’importante question de la répartition et de l’affectation des facteurs humains disponibles pour la réalisation de telle ou telle activité, ces facteurs devant être sans cesse améliorés qualitativement. Cette préoccupation est primordiale lorsqu’il s’agit de développer une économie attardée, mais le reste d’évidence lorsque le rattrapage est réalisé et qu’il faut continuer à aller de l’avant, sachant que, plus une nation se développera, plus les rendements auront tendance à devenir décroissants dans la mesure où l’effort d’instruction et de formation deviendra plus qualitatif et riche en contenus de connaissances et nécessitant d’y consacrer toujours plus de moyens.
Par conséquent, il s’agit de déterminer quelle part de la population active va être affectée à la formation, quelle part va l’être à la recherche, telle autre à l’industrie, aux transports…
La formation est, avant l’effort de recherche, le point majeur dont il faut se préoccuper, car c’est en formant une main-d’œuvre hautement qualifiée et toujours plus qualifiée au fil du temps, qu’il s’agisse d’une activité manuelle ou d’une activité de type ingénieur, qu’une nation pourra développer des branches d’activité performantes et susciter ainsi le vivier créateur d’où, par le développement des connaissances scientifiques fondamentales, il sera possible de voir émerger de nouveaux secteurs d’activités innovants et créateurs de richesses nouvelles et ainsi porteurs d’un renforcement de puissance. Signalons en outre (sans aller plus loin) que la santé spirituelle d’un peuple constitue un élément sous-jacent déterminant, même s’il n’est pas pris en compte dans une société réduite à la seule dimension du matérialisme marchand.
Il est évident qu’une population non qualifiée dans une proportion trop grande par rapport au niveau de développement à atteindre et incapable d’y remédier freinera, voire étouffera tout effort de développement. La qualité de l’instruction dispensée dès l’âge de raison doit être un souci de premier ordre, ce qui nécessite de rompre avec les errements actuels qui gangrènent la plupart des États du monde blanc.
Une mention particulière doit être accordée à la recherche militaire qui est fondamentale par les effets induits qu’elle entraîne sur les autres secteurs d’activité, car elle constitue le fer de lance de la protection de la nation concernée. À ce titre, elle concentre les énergies de la nation d’une manière plus puissante, plus impérative que dans d’autres domaines, car de l’efficacité de cette recherche et de ses applications dépendent la vie et la liberté de celle-ci. La puissance des États-Unis est liée directement à l’efficacité de son secteur militaro-industriel et à l’effort de recherche qu’elle entraîne ; ainsi, entre autres applications spectaculaires de la recherche et développement militaire, nous devons citer l’Internet qui est une technique créée et développée à l’origine pour l’usage exclusif de l’armée des États-Unis, avant qu’elle ne soit reprise par le secteur privé et déployée de la manière que nous savons.
L’État doit donc orienter l’énergie créatrice et intellectuelle d’un peuple vers les activités de recherche-développement en n’hésitant pas à y consacrer des moyens humains et matériels considérables, en incluant, par profits et pertes, les recherches qui ne débouchent pas nécessairement et rapidement sur des applications. En outre, ce secteur de la recherche concerne tous les domaines de l’activité économique, depuis la recherche fondamentale jusqu’à l’amélioration du fonctionnement d’un matériel existant en passant par la création de nouvelles techniques, inventées par ceux-là mêmes qui occupent une activité productive et qui ne manquent pas d’avoir l’esprit ingénieux. Tout autant qu’orienter et former les moyens humains, il s’agit de susciter et d’encourager un état d’esprit qui rejaillit sur l’ensemble de l’activité économique d’une nation.
Le recours au système de l’apprentissage et surtout de la formation au sein de corps de métiers organisés en corps intermédiaires est à même de donner la souplesse nécessaire dont a besoin l’instruction professionnelle, les entreprises étant le mieux à même de savoir ce dont elles ont besoin. L’État supervise l’ensemble et apporte les incitations nécessaires.
Orientation planifiée
Toutefois, si dans ce processus d’orientation des forces actives d’une nation qui vise de fait à optimiser le déploiement des énergies nationales, le rôle de l’État est central, l’efficacité de son action sera d’autant plus grande que l’État ne sera pas alourdi de fonctions et de services qui ne relèvent pas de sa raison d’être. L’État et les structures de nature publique ne justifient leur existence qu’en jouant un rôle bien précis : assurer l’ordre public intérieur et la sécurité extérieure, la justice, la suppléance des carences de la société en créant les conditions optimales pour que les forces créatrices et entrepreneuriales du peuple, véritables créatrices de la richesse, puissent s’épanouir au mieux. La part de population active que nécessite le fonctionnement de l’État doit être rationalisée, relativement aux fonctions de suppléance (ou de subsidiarité) qui lui reviennent et qu’il est le seul à pouvoir exercer. Il ne doit suppléer l’initiative privée que lorsque celle-ci fait défaut, mais aussi réguler celle-ci lorsqu’elle s’oriente vers des activités de dévoiement de la population au seul prétexte qu’elles sont lucratives, sans pour autant qu’il s’agisse d’instaurer un quelconque ordre moral. Ceci doit être précisé, car l’État tend naturellement à s’alourdir de services redondants et d’emprises parasitaires, la bureaucratie qui le compose étant par nature proliférante. L’État ne doit pas altérer le « rendement » de la société et accroître inutilement le processus de complexité de la société inhérent à son développement. À cet effet, le système fiscal doit être des plus simples et des plus légers possibles et la législation sociale la plus simple possible. Par exemple, le Code du travail doit être réduit à quelques principes simples, les règles particulières à chaque métier et secteurs d’activité étant précisées au sein des corps intermédiaires paritaires dirigeant-personnel sous le contrôle de l’État.
La mise en place d’un plan d’orientation économique visant à canaliser les forces productives de la nation est l’instrument de la politique d’économie orientée. Cela se traduit par la définition d’orientations générales poussant à développer telle ou telle activité, à créer celles qui font défaut, le tout étant assorti de l’établissement prévisionnel des moyens humains et matériels à affecter à chacune d’entre elles.
Un tel plan n’est en rien un carcan du type que nous avons connu avec la planification soviétique. Il s’agit de favoriser le développement de l’initiative privée, de l’esprit entrepreneurial en l’incitant à développer ses talents vers des secteurs d’activité précis utiles au développement de la puissance nationale. Certes, de grands groupes industriels, qu’ils existent déjà ou qu’ils se constituent par la nature même du développement économique, joueront par nature un rôle central. Cependant, il est essentiel de contribuer à l’apparition et au développement de petites et moyennes entreprises qui sont le cœur vivant de l’activité économique, les cellules créatrices par lesquelles le tissu économique se renouvelle et se développe.
Chaque peuple, à commencer par les peuples d’Europe – ils l’ont montré par le passé par les résultats obtenus – dispose en son sein d’une multitude de talents qui ne demandent qu’à manifester leur inventivité, leur ingéniosité et à l’utiliser pour, tout simplement subsister, subvenir à leurs besoins et garder la tête au-dessus des durs combats de l’existence. C’est en favorisant l’émergence de ces « nouvelles cellules » de la création industrielle et technique que, tels ces coraux qui, en surface de la barrière de corail lui assurent son avenir et sa croissance, que le renforcement de la puissance d’une nation se réalisera.
Une telle politique économique a un objectif bien précis : doter un État de la puissance agricole et surtout industrielle sans lesquelles il n’est ni souveraineté réelle et durable ni indépendance.
Le développement d’une agriculture assurant l’autosuffisance, relativement aux capacités du pays concerné, est le premier pilier. Pourtant, il ne s’agit pas de vouloir créer nécessairement de grandes exploitations de type industriel mais de permettre, par l’installation d’une paysannerie assez dense sur tout le territoire, une occupation humaine de celui-ci évitant la désertification que nous connaissons, par exemple en France, et de créer les bases d’une mise en valeur équilibrée du territoire national bénéfique en termes de puissance. Là encore, une approche de l’économie non pas en termes de comptabilité financière mais énergétique permet de prendre en compte des éléments qualitatifs qui ne le seraient pas autrement.
Mais il ne peut se réaliser qu’avec le développement conjoint des activités industrielles qui fourniront techniques et moyens d’exploitation. Le savoir-faire industriel et la création d’industries productrices de richesses matérielles sont le cœur physique de toute puissance économique. Une économie qui laisse la part trop belle aux seules activités de production de matières premières sans passer par leur transformation peut donner l’illusion de la richesse : elle n’est qu’un colosse aux pieds d’argile. L’Espagne des Habsbourg jadis, les pays arabo-musulmans du Proche-Orient en dont deux cas typiques. De même, les activités de service doivent être avant tout les servantes des deux secteurs précédents et non pas se développer pour elles-mêmes, par croissance endogène, comme c’est le cas avec « l’industrie bancaire » ou celle des assurances qui ne créent que de l’illusion de la richesse dans un tel cas de figure.
En définissant de telles priorités en termes physiques, matériels et humains, il est possible d’orienter les énergies de la population potentiellement active vers ces activités vitales, donnant ainsi un surcroît de puissance et de développement à la nation concernée. Dans le même temps, les femmes peuvent être distraites de l’activité marchande et incitées à jouer leur plein rôle de mère de famille et celui de transmettre la culture et les traditions – vœu qu’émettent nombre d’entre elles –, donnant une éducation et une formation équilibrée aux générations futures, ce qui fait défaut dans le monde socialisé actuel. En effet, l’activité maternelle est un investissement pour le futur, non marchand certes, mais vital et qualitatif qu’une approche énergétique de l’économie permet de prendre en compte.
Orientation par l’État ou par les intérêts privés ?
Répondons maintenant à la question suivante : pourquoi vouloir orienter consciemment l’activité économique vers tel ou tel secteur d’activité et non pas laisser les choses se faire d’elles-mêmes ? Les tenants du libéralisme professent que c’est en laissant l’économie se développer librement, livrée à elle-même, guidée par la rentabilité et le taux de profit que la société en retire le bénéfice maximal. Ils dénoncent à cet effet l’interventionnisme politique des États qui viendrait interférer avec le libre développement des forces productives livrées à elles-mêmes, meilleur moyen de développer les richesses.
Deux objections sont alors à formuler. D’une part, le système libéral est un système administré qui ne fonctionne qu’avec une immense bureaucratie internationale chargée de créer les conditions de ce libéralisme prétendument spontané. Bien au contraire, l’État ne cesse de multiplier ses interventions pour organiser la concurrence entre les personnes, les institutions selon le dogme que la concurrence maximise l’efficacité en toutes choses. À travers le monde se multiplient les bureaucraties chargées de casser les situations non concurrentielles pour mettre en place le modèle néolibéral dont profitent essentiellement des groupes transnationaux industriels et financiers. Il n’est que d’observer l’activité de la technocratie bruxelloise de l’UE pour s’en rendre compte : ainsi s’accumulent les directives concernant la libéralisation de l’électricité, du gaz, des transports, en démantelant les organismes mis en place au cours de décennies précédentes par les États afin, justement de remédier aux défauts d’une organisation – ou plus exactement d’une désorganisation – des activités concernées. EDF, la SNCF en sont des exemples en France.
D’autre part, laisser l’orientation de l’activité économique s’effectuer au gré les secteurs d’activité qui engendrent la meilleure rentabilité ne signifie pas pour autant que le développement des dites activités rentables sera au service du bien commun de la société. Nous en avons un exemple éclatant avec le développement du secteur financier et bancaire qui attire les capitaux, parmi les meilleurs talents mathématiques et scientifiques, mais qui ne crée aucune richesse matérielle. Tout au plus peut-on le reconnaître comme un outil de domination élaboré par les principaux groupes financiers mondiaux constituant l’axe City-New York dans la mesure où celui qui détient le monopole du crédit et parvient à s’immiscer dans l’économie de nombre d’États se donnent les moyens de les dominer.
C’est d’ailleurs l’enjeu majeur de la période présente : comment éviter que les États qui n’y sont pas encore soumis, ou à peine contaminés, tombent sous cette emprise ? Quant à ceux qui sont dans les tentacules de la pieuvre financière de l’axe précité, leur souci doit être de s’en désengager, en se donnant les moyens de retrouver leur souveraineté financière et en sachant profiter des inévitables faiblesses de l’entité dominatrice.
De même, il importe de veiller à ce que les circuits de distribution, notamment dans la consommation, ne soient pas inutilement allongés du fait de la constitution de longues chaînes d’intermédiaires qui n’apportent aucun bénéfice à la nation en dehors de celui que prélèvent ces intermédiaires parasites pour leur propre compte. Dans une économie orientée, l’État a pour rôle légitime de veiller à ce que les prix des biens offerts à la vente ne soient pas artificiellement gonflés par ces procédés.
Cela dit, il est avéré que laisser l’économie se développer au gré de l’orientation fixée par les errements des taux de profits n’est pas plus une garantie d’accroissement de richesse et de puissance de la nation qui s’y confie. L’orientation de l’économie selon les nécessités de l’intérêt national n’altèrent en rien les possibilités de gains pour les entrepreneurs et les preneurs de risques (tout entrepreneur est un preneur de risques et doit retirer une prime de cet effort), mais orientent les flux d’énergie créatrice dans des directions utiles à cet intérêt national et leur donnent les moyens et les occasions de tirer bénéfice de ces nouvelles voies.
Économie orientée et contexte international
La mise en place d’une économie orientée s’en trouve facilitée lorsqu’elle est mise en œuvre dans un État qui n’est pas, ou peu inféodé à ce système financier transnational. Il peut alors mettre en place un système de financement de l’économie dont le circuit monétaire, constitué de signes monétaires qui sont à l’économie ce que les globules rouges sont au sang, irrigue l’organisme économique national. Cette mise en place s’avère d’autant plus indispensable que l’économie d’un pays est attardée par rapport à d’autres : elle se donne alors les moyens de mettre en place les structures économiques indispensables au développement de sa puissance que le simple jeu du marché livré à lui-même, surtout dans une économie ouverte, ne permettrait jamais.
Un tel État ne doit en aucun cas s’ouvrir portes et fenêtres ouvertes sur le monde en acceptant la théorie ricardienne des avantages comparatifs. Cela revient à perpétuer les situations de domination et à empêcher le peuple concerné de se doter de la structure industrielle qui lui fait défaut. Cela ne s’oppose pas pour autant au fait que ces États doivent établir des liens avec ses voisins en vue d’acquérir les techniques et les savoir-faire qui lui font défaut, mais avec la ferme intention de les maîtriser et de se les approprier.
Cela dit, ne nous leurrons pas : un État en situation d’infériorité paie toujours ce qui peut s’analyser comme étant celle de vaincu : il devra bien souvent adopter les standards industriels de celui qui domine et s’en servir de base pour le développement ultérieur de ses propres innovations. De ce point de vue, l’adhésion à l’OMC ne doit pas être considérée comme nécessaire. Au contraire, en n’y adhérant pas, on se protège de l’emprise de ceux qui en détiennent les commandes tout en pouvant établir des écluses, autrement dit des passages contrôlés de l’un à l’autre évitant l’inondation de l’un par les autres. Sur cette base une autre organisation internationale de l’économie, nécessairement mondialisée de par le rapprochement temporel des distances, est envisageable dans laquelle chaque État pourra produire l’essentiel de ce dont il a besoin, relativement aux ressources premières dont il dispose.
Un tel système trouvera inévitablement, dans le contexte actuel, une masse de détracteurs, car il veut imposer l’intérêt des nations face à celui des financiers internationaux et des grandes sociétés transnationales sans attache nationale qui chevauchent le processus de mondialisation dans un but hégémonique, voire messianique. Mais seul, il permet d’éviter que les peuples soient dépossédés de leur souveraineté, car il est basé sur le principe cardinal de tout réalisme économique : « ce qui est matériellement réalisable dans l’intérêt national doit l’être financièrement. »
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1Pour cela, lire notamment Solutions nationales à la crise mondiale, Dualpha, 2010.