Les habitants et commerçants excédés par l’afflux massif des migrants
Les services de police appellent ce coin de Paris le « triangle des migrants ». Situé au nord de la capitale, aux alentours de la place Stalingrad, ce territoire est en effet délimité par trois campements. Sous le viaduc du métro : trois rangées de tentes abritent des familles érythréennes et soudanaises. Le long du canal Saint-Martin, quai de Jemmapes, des Afghans et des Syriens cohabitent sous des abris de fortune. Le long du bassin de la Villette et de l’avenue de Flandre enfin : des Somaliens et des Soudanais, encore, ont créé un « village » de cabanes en carton et en toile plus ou moins imperméables.
Régulièrement démantelés, ces trois bidonvilles ont brutalement gonflé en début de semaine. Certains y voient la conséquence de la fermeture de la « jungle » de Calais.
Les envahisseurs seraient aujourd’hui entre 2 500 et 3 000 (contre 2 000 il y a encore 10 jours). Majoritairement des hommes seuls. Une « opération de contrôle » organisée vendredi 28 octobre au matin a conduit la police à procéder à l’arrestation d’une poignée de sans-papiers pour des vérifications de leur état sanitaire et de leur statut administratif. Ils ont été transportés par bus ; un dispositif policier sécurisant l’intervention. Une dizaine de tentes ont été démontées vers 8 h 30 mais, dès midi, les espaces qu’elles occupaient jusque-là étaient réinvestis par d’autres envahisseurs.
Après avoir fait preuve, pendant plusieurs mois, de compassion et même de solidarité, en leur portant parfois des repas, les habitants de l’arrondissement tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme. « La situation n’est plus vivable. La nuit, des bagarres éclatent. Les rues sont dans un état déplorable. On a recensé des cas de gale et aussi de tuberculose parmi les migrants qui vivent dans des conditions d’hygiène déplorables. Nous ne pouvons pas continuer ainsi », confie Marie Léon, 50 ans, qui habite non loin de là.
Les habitants ne sont pas les seuls à se plaindre. Les commerçants imputent aux migrants la baisse de leur chiffre d’affaires. « Mon activité s’est effondrée. Et ce n’est pas lié à la crise. J’ai une deuxième affaire dans un autre quartier qui marche très bien. C’est bien à cause de la présence des réfugiés que mes clients n’osent plus venir », note David Kanda, 34 ans, patron d’un cabinet de tatouage, avenue de Flandre. Plusieurs commerçants chiffrent entre 30 et 40 % la diminution de leur activité depuis l’ouverture de ces bidonvilles. « Et nous sommes plusieurs à craindre de devoir fermer boutique », évoque une esthéticienne qui se cadenasse dans son salon de crainte d’une agression.
Habitants comme commerçants confient éprouver « le sentiment d’être abandonnés » par les pouvoirs publics. « On avait déjà connu ça il y a une quinzaine d’années lorsque des dealers de crack s’étaient installés dans le coin », relève Marie Léon.
« Des maraudes sont organisées, les services de nettoyage sont mobilisés et des sanitaires ont été installés pour éviter que les migrants n’urinent dans les cages d’escalier », indique-t-on dans l’entourage de Dominique Versini. « Il n’empêche. Je retrouve régulièrement mon hall d’entrée souillé le matin », soupire une gardienne d’immeuble.