Turquie : opération « Bouclier de l’Euphrate », quand Erdogan pratique l’amalgame
La Syrie a lancé depuis 6 jours une offensive militaire dénommée « Bouclier de l’Euphrate », au nord du territoire syrien. Dimanche 28 août, de passage à Gaziantep, la ville frappée par un important attentat ayant tué 54 personnes au milieu d’un mariage kurde, le président turc Recep Tayyip Erdogan a tenté de justifier l’opération militaire. Il s’est livré à un grossier exercice de désinformation et de langue de bois affirmant que par son action militaire la Turquie répond aux coups d’une sorte d’ennemi unique et chimérique : « Enlevez vos masques, nous savons que les visages qui sont derrière sont les mêmes », a-t-il lancé. Il a ainsi mis dans le même sac les réseaux et partisans de l’imam exilé Fathullah Gülen (désigné comme responsable de la tentative de coup d’État du 15 juillet), les jihadistes de l’État Islamique (responsable de nombreux attentats depuis le retournement d’alliance turque) et encore les formations kurdes armées (en guerre contre l’État turc depuis des dizaines d’années).
Drôle d’amalgame qui ne résiste pas à l’analyse et auquel les autorités turques ne croient d’ailleurs pas elle-même : le ministre des Affaires Étrangères turc a confirmé que l’opération militaire en cours dans le nord de la Syrie continuerait tant que les combattants kurdes n’auront pas reculé à l’Est de l’Euphrate. Mevlüt Cavusoglu a ainsi affirmé lundi 29 août : « Les YPG (Unités de protection du peuple kurde), comme les États-Unis l’ont promis, et eux-mêmes l’ont déclaré, doivent repasser à l’est de l’Euphrate dès que possible, et tant qu’ils ne le feront pas ils (resteront) une cible ». En effet, la Turquie en proie à une guérilla kurde sur son propre sol depuis de longues années cherche farouchement à empêcher l’implantation durable des Kurdes syriens le long de la frontière turque pour dissuader toute jonction avec d’autres éléments qui pourrait esquisser un Kurdistan autonome durable.