La Chanson de Roland est un poème épique et une chanson de geste du XIe siècle attribuée parfois, sans certitude, à Turold (la dernière ligne du manuscrit dit : Ci falt la geste que Turoldus declinet). Neuf manuscrits nous sont parvenus, dont un, le manuscrit d’Oxford du début du XIIe siècle, le plus ancien et le plus complet, est en anglo-normand. Ce dernier, identifié en 1835, est considéré par les historiens comme le manuscrit d’autorité. C’est donc lui que l’on désigne quand on parle sans autre précision de la Chanson de Roland.
La Chanson de Roland comporte 4 002 vers (dans sa version la plus ancienne ; elle en compte 9 000 dans un manuscrit de la fin du XIIie siècle) en ancien français répartis en laisses assonancées, transmises et diffusées en chant par les troubadours et jongleurs. Elle s’inspire, trois siècles après, du combat fatal dans les Pyrénées du chevalier Roland, préfet de la Marche de Bretagne et de ses compagnons d’armes contre une force toujours identifiée avec difficulté, possiblement des Basques.
Huit moments de la Chanson de Roland (enluminure)
Contexte :
La Chanson de Roland a été composée en pleine époque de Reconquista en Espagne et de conquêtes en Orient, avec en trame de fond l’évocation et le soutien aux croisades et à la guerre sainte.
De même, la féodalité, qui commence à l’époque carolingienne et atteint son apogée dans les années de composition de la Chanson tient une place prépondérante dans le texte (par exemple avec les nombreuses occurrences du mot « vassal ») et s’imbrique tout au long de l’œuvre avec la dimension religieuse.
Charlemagne, portant les regalia impériales. Portrait imaginaire exécuté par Albrecht Dürer (1512)
Résumé :
Marsile, roi maure souhaitant épargner sa ville Saragosse de l’occupation de l’armée des Francs, convient d’un traité de paix avec Charlemagne. Ce dernier se demande qui choisir comme émissaire vers Marsile, qui a une réputation de traître bien établie. Celui qui sera envoyé courra donc un grand danger. L’Empereur refuse que ses chevaliers préférés prennent ce risque. On décide enfin, sur la proposition de Roland, d’envoyer Ganelon. Mais ce dernier, corrompu et rempli de haine envers Roland, décide de trahir Charlemagne et propose un plan à Marsile. Marsile fera semblant de conclure la paix avec Charlemagne, qui se retirera. Roland commandera l’arrière-garde. Les Sarrasins attaqueront alors par surprise l’arrière-garde isolée. Une fois Roland, le plus vaillant des chevaliers de Charlemagne, tué, Ganelon considère que l’armée de Charlemagne ne vaudra plus rien. Marsile approuve le plan. Ganelon rejoint Charlemagne, qui se retire avec son armée. Roland prend comme prévu la direction de l’arrière-garde, tandis que Ganelon reste en compagnie de l’Empereur.
Les Sarrasins attaquent Roland dans le défilé de Roncevaux. le preux Olivier, ami et confident de Roland, signale une large troupe sarrasine approchant l’arrière-garde. Il demande à Roland de sonner du cor (ou olifant) pour avertir Charlemagne. Roland préfère mourir en guerrier plutôt que de se déshonorer en appelant à l’aide (il aimait à citer ce dicton: il faut toujours avancer et jamais reculer). Les hommes de Roland se battent contre une force (commandée par Marsile) vingt fois supérieure à la leur, et malgré la bravoure de ses hommes, l’arrière-garde de Charlemagne est exterminée. Lorsqu’il ne reste plus que soixante combattants, et après la mort d’Olivier, Roland fait sonner son olifant tellement fort qu’il rompt une veine au niveau de sa tempe. Charlemagne, quant à lui, continue à s’éloigner avec le gros de l’armée, persuadé par Ganelon que le son du cor, qu’il entend, n’est pas un appel à l’aide.
Mais Charlemagne finit par soupçonner le pire et chevauche vers le lieu de l’embuscade. Pendant ce temps, tous les chevaliers de l’arrière-garde meurent, mais Roland et l’archevêque Turpin, blessés, arrivent à faire fuir l’armée maure avant de s’effondrer tous les deux.
Roland a encore la force d’essayer de briser son épée Durandal contre un bloc de marbre pour éviter qu’elle ne tombe entre les mains de l’ennemi, sans succès : la lame luit et flamboie sans s’ébrécher. Il s’allonge face à l’Espagne pour mourir et c’est alors que saint Michel, Chérubin et saint Gabriel emportent son âme vers le paradis.
Quand Charlemagne rejoint son arrière-garde, il est trop tard, Roland est mort et la bataille est terminée. L’armée de Marsile a subi de lourdes pertes, mais elle est renforcée par une immense armée représentant l’ensemble des peuples musulmans. Cette armée affronte l’armée de Charlemagne au cours d’une seconde bataille, littérairement moins célèbre que la première, au cours de laquelle Charlemagne détruit l’armée sarrasine avant de retourner à Aix-la-Chapelle, où il doit apprendre la triste nouvelle à la belle Aude, sœur d’Olivier et fiancée de Roland, qui meurt sur le coup à cette annonce. Le jugement de Ganelon peut alors commencer. Le Conseil de Charlemagne le juge d’abord innocent et finalement son sort est remis à Dieu sous la forme d’un duel judiciaire : son champion étant vaincu, Ganelon est déclaré coupable, écartelé et sa famille pendue pour avoir pris son parti.
Couverture de l’Édition populaire de la Chanson de Roland (1881), illustrée par Luc-Olivier Merson
La Chanson de Roland fait partie de notre patrimoine littéraire français le plus traditionnel ; un véritable monument de notre culture. Une lecture qui nous plonge dans nos racines franques ancestrales.
Pour écouter une lecture du poème par Denis Podalydès de la Comédie Française, c’est ici.