Le nom de Gérard Bedel n’évoque probablement pas grand-chose en dehors des cercles contre-révolutionnaires et de l’Action française. Auteur d’une quinzaine d’ouvrages portant sur l’histoire de la France, de l’Église et de l’Action française, il contribuait également à la revue Lectures françaises, où il défendait ardemment la civilisation européenne, et particulièrement la langue française. Amoureux de cette dernière, il ne pouvait concevoir qu’elle soit souillée, voire pervertie, au détriment de la nation qu’elle avait si bien servie.
Il y aura bientôt trois ans, le 19 mars 2022, que Gérard Bedel nous a quittés définitivement, laissant dans le deuil non seulement sa famille, mais aussi l’équipe de Lectures françaises et de Chiré. Pour ces derniers, amitié et fidélité ne sont pas de vains mots. En guise de dernier hommage, les Éditions de Chiré viennent de réunir près d’une vingtaine de textes plus ou moins inédits (certains avaient été publiés dans Lectures françaises) dans un recueil varié : poèmes, nouvelles ou courts essais, tous liés par un fil conducteur, l’amour de la France chrétienne.
L’éclectisme de cet ouvrage, qui évoquait chez moi Les lettres martiennes d’Arnaud Rafard de Brienne, est au rendez-vous. Si les nouvelles m’ont davantage touché que les essais, il n’en demeure pas moins que j’ai lu et relu Réflexion sur le processus révolutionnaire à partir du schisme anglican, un essai des plus originaux. Bedel y explique qu’Henri VIII, père du mouvement anglican, voulait d’abord et avant tout rester catholique. Son entourage, avec Cromwell en tête, ainsi que les circonstances, en auraient finalement décidé autrement. Dans tous les cas, la thèse est étayée et passionnante à lire. On en ressort convaincu qu’Henri VIII fut finalement un schismatique malgré lui.
Balade dans l’œuvre de Gérard Bedel ne passera pas à l’histoire de la littérature; pourtant, c’est un livre parfait pour les froides soirées d’hiver, une valeur sûre, qui regorge de réflexions et d’aphorismes bien tournés. Parmi eux, cet extrait très évocateur dans le contexte canadien-français : « Quand un peuple tombe esclave, tant qu’il tient sa langue, c’est comme s’il tenait la clef de sa prison. »
Rémi Tremblay
Gérard Bédel, Balade dans l’œuvre de Gérard Bedel, 2024, 115 p., disponible sur Chiré
De Gérard Bedel :