Twitter Files : après l’État profond qui censure les révélations sur l’ordinateur portable d’Hunter Biden, deuxième coup de projecteur sur l’intox de la prétendue « ingérence » et « propagande » étrangère dans les élections américaines.
Selon les dernières révélations du journaliste Matt Taibbi dans la saga des « Twitter Files », mises en ligne le 18 décembre, le FBI aurait mis l’entreprise sur le grill en 2020 au sujet d’une soi-disant influence étrangère à l’œuvre sur la plateforme, alors que cette dernière expliquait ne pas avoir constaté qu’il s’agissait d’un problème majeur.
Les échanges internes relayés par le journaliste, montrent qu’un agent du FBI aurait ainsi averti l’ancien responsable de la sécurité de Twitter, Yoel Roth, en juillet 2020, de s’attendre à des questions écrites de la part de la task force dédiée aux cyber-menaces étrangères, ajoutant que la communauté du renseignement s’apprêtait à demander des « clarifications » à l’entreprise. Le FBI a ensuite envoyé une liste de questions détaillées après que Twitter a indiqué ne pas avoir observé une activité particulièrement nourrie de la part « d’acteurs de la propagande officielle », en allusion à des comptes soutenus ou alimentés par des Etats tels que la Russie ou la Chine.
A la lecture dudit questionnaire, partagé avec d’autres cadres de Twitter, Yoel Roth s’était dit « franchement perplexe face à ces demandes, qui ressemblent plus à quelque chose que nous recevrions d’une commission du Congrès que du Bureau [FBI] », selon les captures d’écran publiées par Matt Taibbi. L’ancien responsable de la sécurité a ajouté qu’il ne se sentait « pas particulièrement à l’aise » avec les demandes du FBI, jugeant même les postulats de l’agence fédérale « erronés » et évoquant une incompréhension fondamentale, par la communauté du renseignement, de la position de Twitter en matière de désinformation.
Yoel Roth écrivait alors à ses collègues, tout en suggérant de contacter le FBI dès que possible pour clarifier la situation : « Nous avons été clairs sur le fait que la propagande d’Etat officielle existe bel et bien sur Twitter ».
Les précédentes révélations sur le fonctionnement du réseau social, le 16 décembre, avait déjà montré que les équipes de Twitter étaient régulièrement confrontées à des demandes plus ou moins pertinentes du monde du renseignement, quitte à ce que certaines créent la confusion au sein de la société. Matt Taibbi avait évoqué, à propos des liens entre Twitter et le FBI, « un contact constant et omniprésent », l’agence fédérale traitant l’entreprise « comme s’il s’agissait d’une filiale » selon ses mots.
Matt Taibbi explique comment le FBI entrait en relation avec Twitter afin d’exprimer ses requêtes. Il liste les différents dispositifs, canaux et manières avec lesquelles le FBI sollicitait une intervention de l’équipe de modération des contenus. Il cite le groupe du travail du FBI dédié aux réseaux sociaux, connu sous le nom de « Foreign Influence Task Force » – FTIF (Groupe de travail sur l’influence étrangère), mis sur pied à la suite des élections présidentielles de 2016 et chargé d’identifier, comme son nom l’indique, « les influences étrangères présumées et les falsifications électorales de toutes sortes ». Ce groupe, composé de 80 agents, a maintes fois correspondu avec Twitter pour identifier des contenus susceptibles de correspondre à ces opérations.
Les agences de renseignements, le FBI comme le Département de Sécurité Intérieure, poursuit Matt Taibbi, ont également recours à des « sous-traitants » et à des groupes de réflexion pour « faire pression sur Twitter » et obtenir des mesures. L’État profond américain avait donc besoin de ces « ingérences étrangères » quitte à faire pression sur Twitter (et d’autres acteurs) pour les suggérer, les crédibiliser, et finalement les utiliser contre Trump et promouvoir Biden en réaction.
Et Twitter a supprimé – donc sur pression de l’État profond – pendant la campagne de 2020, environ 300 comptes qui auraient été prétendument liés à des tentatives de piratage ou d’ingérence russes. Malgré les avertissements de Twitter aux autorités requérantes ne pas avoir identifié d’activité particulière d’utilisateurs œuvrant pour d’autres Etats… Face aux demandes répétées du FBI visant à obtenir des preuves d’une « propagande étrangère » active sur les réseaux, Yoel Roth a maintenu que Twitter ne disposait pas d’éléments en ce sens, et a même tenté de s’opposer à des requêtes visant à partager des données qui dépassaient le cadre légal.
Mais, la pression exercée sur le responsable de la sécurité du réseau social n’est pas retombée, Elvis Chan le mettant à nouveau en garde, en août 2020, contre « les agissements de plusieurs groupes de hackers russe ».
Aujourd’hui, Michael Shellenberger révèle qu’Elvis Chan lui-même (l’agent du FBI déjà intervenu auprès de Twitter concernant l’affaire du portable d’Hunter Biden) a reconnu tout récemment en novembre 20222, dans une déposition officielle, qu’il n’y avait pas eu en 2020 de tentatives d’ingérence de l’étranger…
Selon Matt Taibbi :
« Ce que la plupart des gens considèrent comme « l’État profond » est en réalité une collaboration enchevêtrée d’agences d’État, d’entrepreneurs privés et d’ONG (parfois financées par l’État). Les lignes deviennent si floues qu’elles n’ont plus de sens ».
À suivre…
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