L’enquête menée par Taibi et ses collègues journalistes à partir des séries de documents auxquels Elon Musk leur a permis l’accès, a mis en lumière de nombreuses décisions arbitraires prises par Twitter à la demande de membres du Parti démocrate, notamment la suppression du compte de l’ancien président Donald Trump, la pratique du « shadow banning » de comptes ou le déréférencement d’un article du New York Post sur les relations commerciales étrangères de Hunter Biden, le fils du président, Joe Biden.
Mais les dossiers expliquent également comment la communauté du renseignement américain – l’État profond – travaille en étroite collaboration avec la plateforme, demandant la suppression des informations que le gouvernement américain considère comme de la « désinformation » et du « complotisme ».
Dans la dernière fournée des documents révélés on apprend donc comment le FBI et « d’autres agences gouvernementales » (« other governemental organization ») désignant ainsi la CIA dans la correspondance interne de Twitter, ont largement instrumentalisé le réseau social au service de propagande d’État américaine.
Le journaliste Matt Taibbi, qui a publié les documents sur Twitter, écrit :
« Les fichiers montrent que le FBI agit comme un gardien d’un programme massif de surveillance et de censure des médias sociaux couvrant les agences du gouvernement fédéral, du département d’État au Pentagone en passant par la CIA ».
Parmi les milliers de demandes de censure qui ont été soumises à Twitter par le biais du groupe de travail sur l’influence étrangère du FBI, beaucoup n’ont en réalité rien à voir avec une prétendue « ingérence étrangère » et sont des préoccupations purement nationales. Surtout à l’approche des élections de 2020, le FBI a submergé Twitter de demandes, envoyant des listes de centaines de comptes problématiques…
Souvent, les renseignements se présentaient sous la forme de brefs rapports, suivis de longues listes de comptes simplement considérés comme pro-Maduro, pro-Cuba, pro-Russie, etc.
Dans certains cas, les responsables de Twitter ont dû supprimer des informations sans même être en mesure de trouver des preuves indiquant l’ingérence d’une « entité étrangère, en particulier la Russie » comme raison de la suppression. « Je n’ai trouvé aucun lien vers la Russie », déclare un analyste dans courriels et l’ancien chef de la confiance et de la sécurité, Joel Roth, admet qu’il n’a trouvé aucune « véritable correspondance en utilisant les informations » d’une autre affaire.
Les échanges internes indiquent que Twitter a reçu tellement de demandes que ses dirigeants ont perdu le fil et ont dû improviser un système pour les prioriser. Les dirigeants ont également trouvé « étrange » que de nombreux agents fédéraux soient chargés de traiter et de rationaliser les demandes pour un traitement plus rapide par Twitter, mais même dans ce cas, l’entreprise n’a souvent pas réussi à trouver une justification à la censure.
Selon Taibbi :
« Beaucoup de gens se demandent si les plateformes Internet ne sont pas dirigées par les agences de renseignement pour modérer les nouvelles de politique étrangère. Twitter semble l’avoir fait, dans certains cas via le FBI ».
Les agents fédéraux ont parfois envoyé d’énormes listes de plus de 1 000 comptes désignés pour suppression avec seulement une brève explication de leurs crimes présumés. Dans certains cas, ils ont accusé des « agents russes » d’avoir publié à partir de comptes mettant en lumière « des histoires à prédominance anti-ukrainienne » ou documentant « des violations présumées des droits commises par des Ukrainiens ». Twitter a ainsi du supprimer des informations sur les « violations des droits de l’homme » – c’est-à-dire les exactions – commises par l’État ukrainien ou ses bataillons punitifs dans le Donbass.
L’une de ces listes ciblait des comptes traitant du fait que « Joe Biden a aidé à orchestrer un coup d’État en 2014 » en Ukraine et « a mis son fils au conseil d’administration de Burisma ». Autant d’assertions aujourd’hui largement connues ou issues des révélations de documents saisis par les forces armées russes en Ukraine.
« En raison d’un manque de preuves techniques de notre côté, je le laisse généralement en attendant plus de preuves », déclare un employé de Twitter à propos d’un compte à supprimer.
« Aucune correspondance trouvée utilisant de telles informations », s’étonne parfois l’ancien chef du service « Trust and Safety » deb Twitter, Yoel Roth, dans un autre cas, notant que certains liens qui leurs étaient désignés au soutien des demandes de censure étaient « clairement russes », mais qu’un autre traitait par exemple d’une « location de maison en Caroline du Sud »…
Ou encore : « Notre fenêtre pour cela se ferme, étant donné que les partenaires gouvernementaux sont de plus en plus agressifs pour le signaler. Je vais procéder à la suspension et au marquage du domaine comme « non-sûr » (« unsafe »). »
Le scandale des « Twitter Files » montre donc des cadres de Twitter sous une pression constante pour valider les théories de l’influence étrangère mais surtout le plus souvent incapables de trouver des preuves au soutien de telles affirmations !
Les journalistes soulignent que « souvent, les rapports des services de renseignements ne sont que de longues listes de journaux, de tweets ou de vidéos YouTube coupables de « récits anti-ukrainiens ».
Et ils s’interrogent :
« C’est un dilemme relatif à la liberté d’expression. Le gouvernement devrait-il être autorisé à essayer d’empêcher les Américains (et d’autres) de voir des comptes pro-Maduro ou anti-ukrainiens ? »
Voir aussi :
L’État profond qui censure les révélations sur l’ordinateur portable d’Hunter Biden
L’intox de l’État profond sur la prétendue « ingérence » et « propagande » étrangère
La machine à censurer de l’État profond contre les opinons républicaines et conservatrices
L’État profond US utilise Twitter pour sa propagande de guerre
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